Un sommet à Paris pour endiguer le flux migratoire

Dirigeants africains et européens se rencontrent aujourd’hui en France pour évoquer une nouvelle fois la problématique de la crise migratoire.

Un énième sommet sur la crise migratoire. Ce lundi 28 août, dirigeants européens et africains se rencontrent à Paris sur invitation du président français Emmanuel Macron, pour discuter de la problématique de l’immigration clandestine. Le chef d’État nigérien Mahamadou Issoufou dont le pays est une zone de transit très utilisée par les migrants et son homologue tchadien Idriss Déby seront accompagnés du chef de gouvernement « d’union nationale » libyen Fayez al-Sarraj pour faire le point sur la question migratoire, et présenter les avancées de leurs différents pays dans la résolution de la ‘’crise’’. Pour l’Elysée, cette rencontre vise à « réaffirmer le soutien de l’Europe au Tchad, au Niger et à la Libye pour le contrôle et la gestion maîtrisée des flux migratoires ».

Pour ce faire la chancelière allemande Angela Merkel, les chefs de gouvernement espagnol et italien, Mariano Rajoy et Paolo Gentiloni et la chef de la diplomatie Européenne Federica Mogherini ont été conviés par le chef d’État français pour participer à la réunion, à l’heure où l’Europe durcit un peu plus le ton à l’encontre des migrants. « L’Europe se sent de plus en plus acculé par les migrants, ils se sentent plus proches des Syriens ou Irakiens qu’ils considèrent comme des réfugiés, à l’inverse de ceux qui viennent d’Afrique, qui sont tous catégorisés comme migrants économiques, c’est discriminatoire. Ils veulent donc se servir de ces pays comme des pays de leurs gendarmes » analyse le Dr Brema Ely Dicko, chef du département sociologie et anthropologie de la faculté des sciences humaines et des sciences de l’éducation de Bamako (FSHSE) et spécialiste des questions migratoires. La France envisage notamment l’installation de ‘’Hotspot’’, des centres d’enregistrements de migrants au Niger et au Tchad, pour distinguer les réfugiés des migrants économiques, une mesure impopulaire dans les pays concernés, et sans doute un sujet de discussion tendu au cours de ce sommet. « Les dirigeants africains auront l’occasion de faire part de leurs inquiétudes à l’Europe sur les nouvelles mesures qu’elle veut mettre en place, et qui ne donnerait qu’une mauvaise idée de l’Europe qui serait vu comme voulant se barricader » estime le Dr Dicko.

L’Italie, pays européen directement touché par cette immigration clandestine ne semble plus faire dans la complaisance. Ce mois d’août, le gouvernement italien à tour à tour, placé des bateaux patrouilleurs dans les eaux italiennes, imposé un code de bonne conduite aux ONG, accusées ‘’d’alimenter le trafic’’ et expulsé près de 400 migrants d’un building désaffecté de Rome.

 

Niger : une attaque contre un camp militaire fait 15 morts, 19 blessés

Le Niger a de nouveau été victime d’une attaque meurtrière contre une importante base militaire, à TILWA, localité située dans la région de Tilabery.

L’attaque a eu lieu dans la nuit du 22 au 23 Février à Tilwa une localité proche de la frontière entre le Niger et le Mali plus précisément à une dizaine de kilomètres de la ville d’Anderamboukane qui est localisé de la région de Menaka. Elle visait une base militaire où était hébergé une nouvelle compagnie chargée de la lutte contre les groupes terroristes et mafieux. Lors d’un premier bilan on dénombrait 11 victimes, le ministère de la défense nationale nigérien a dans un communiqué, établi le bilan à 15 morts dont un jeune officier, 19 blessés et 14 disparus.

Des voitures ont été emportées dont 4 calcinées par les auteurs de l’attaque, mentionnait le quotidien nigérien « Aïr Info  » dans son bulletin d’information. « Nous pensons que c’est le MUJAO qui serait derrière cette attaque meurtrière parce que c’est la seule organisation terroriste qui opère dans la zone où il y a eu l’attaque et elle déjà auteur de deux attaques récentes au Niger » a déclaré le conseiller à la Primature joint au téléphone, même si aucune revendication de l’attaque n’a été faite au moment où nous écrivons cet article.

Abdelkader Abu Walid El Saharaoui chef  de la branche de l’état islamique au sahel à revendiqué l’attaque contre la compagnie militaire nigérienne de Tilwa
Le président nigérien Mahamadou Issoufou a adressé ses condoléances aux parents des victimes de l’attaque dans un communiqué officiel publié par sa page officielle Twitter « Je présente au nom du peuple nigérien meurtri, mes sincères et vives condoléances aux familles des victimes de l’attaque de Tilwa » a-t-il écrit.

Cette attaque intervient alors que les pays du G 5 Sahel réunis le 6 février dernier à Bamako, ont convenu de la mise en place d’une force commune visant à contrer les attaques des groupes terroristes qui opèrent de part et d’autre des frontières de ces 5 pays.

Mahamadou Issoufou : «Nous sommes sur le même bateau »

En marge du sommet Afrique-France qui s’est tenu dans la capitale malienne les 13 et 14 janvier, le Président de la République du Niger, Mahamadou Issoufou, tire un bilan de l’événement et des relations franco-africaines, et revient, pour Journal du Mali, sur les enjeux de la sécurité et de l’immigration, communs aux pays de la région sahélienne.

Monsieur le Président, vous avez pris part au 27e Sommet Afrique-France qui s’est déroulé le 14 janvier à Bamako. Pour vous, quelle est la pertinence d’une rencontre de ce genre, d’ailleurs décriée par de nombreuses voix sur le continent ?

Le Sommet de Bamako avait pour thème « Pour le partenariat, la paix et l’émergence ». C’est un thème vraiment en phase avec les préoccupations qui sont les nôtres. Il a également été l’occasion pour nous de faire le bilan de la mise en œuvre des actions que nous avions programmées durant le précédent sommet qui s’était tenu à Paris. Le bilan a été positif et sur la base de ce bilan et sur la base des acquis, nous avons décidé de poursuivre les efforts pour renforcer les relations de partenariat qui existent entre la France et le continent africain. La France qui joue, comme vous le savez, un rôle extrêmement important du point de vue de la sécurité, avec l’intervention Serval qui a stoppée l’avancée des terroristes sur Bamako, avec l’opération Barkhane qui couvre l’ensemble des pays du Sahel. La France a décidé de continuer à maintenir ses efforts pour contribuer à la stabilité des pays africains. L’autre domaine d’action, c’est le développement. Il y a une liaison étroite que nous faisons désormais entre sécurité et développement. Certes, les solutions que nous envisageons face aux menaces sécuritaires sont à court terme, mais à long terme, c’est le développement économique et social qui permettra effectivement de battre le terrorisme. Donc, par rapport à tout cela, le sommet a eu à prendre des résolutions très fortes. Le sommet a eu à saluer l’action du Président Hollande pendant son quinquennat, où il a eu à prendre des décisions très courageuses, en particulier celle d’envoyer des forces françaises se battre à nos côtés pour assurer la sécurité de nos populations. La France, sous le Président Hollande, a eu également à mener des actions extrêmement importantes au plan du développement socio-économique en Afrique.

Pour le Niger, quelles sont les implications directes d’un sommet comme celui-ci ?

D’abord, la sécurité. Le Niger, vous le voyez est enfermé dans un triangle de menaces, avec comme premier foyer la Lybie, puis le Mali, et enfin le Bassin du Lac Tchad. Donc, les préoccupations sécuritaires perdurent. Nous allons continuer à travailler pour davantage protéger nos frontières ainsi que les personnes et les biens à l’intérieur pays. Et nous avons besoin des partenaires français pour pouvoir continuer cette mission de protection de notre pays. Sur le plan économique également, le Niger est en train de mettre en œuvre le Programme de Renaissance « Acte 2 ». Et ce programme a des ambitions importantes comme les infrastructures, l’initiative 3N « Les Nigériens Nourrissent les Nigériens », les secteurs sociaux de base (éducation, accès à l’eau et santé). Nous avons le défi de la jeunesse, avec cette croissance démographique exponentielle à laquelle nous sommes en train de faire face. Le Niger a besoin de ses partenaires extérieurs, en particulier la France, pour pouvoir mobiliser les ressources qui puissent permettre de réaliser ces objectifs.

Le sommet de Bamako a fait une large part à la jeunesse. Certains jeunes entrepreneurs ont été présentés aux chefs d’État et ont reçus des trophées. Pour vous, quelle est la place de la jeunesse africaine dans ces nouvelles relations voulues entre l’Afrique et la France ?

La jeunesse a une place centrale. Si je prends le cas du Niger, plus de 70% des Nigériens ont moins de 25 ans. Donc, toutes les stratégies que nous sommes en train de mettre en œuvre, ce sont des stratégies qui doivent d’abord profiter à la jeunesse. C’est pour cela que nous saluons les décisions prises par le sommet en rapport avec l’éducation, la promotion des jeunes, filles comme garçons, par rapport à la formation professionnelle et technique. Et là, le Niger fait un effort colossal. En 2011, quand nous sommes arrivés aux affaires, seuls 8% des enfants nigériens étaient orientés vers les centres de formation professionnelle. Aujourd’hui, ils sont 25% et d’ici 2020, ce sont 40% de nos enfants qui seront dirigés vers la formation professionnelle. Mais il ne suffit pas de former les jeunes, il faut aussi leur donner des emplois. C’est pour cela qu’il faut mettre en place des mesures d’expansion économique qui puissent permettre aux jeunes de créer des entreprises. Un peu partout dans le pays, nous sommes en train de créer des incubateurs qui assurent aux jeunes la mise en place d’un entreprenariat qui nous permette d’avancer.

Quel est votre message pour le successeur de François Hollande en ce qui concerne les relations entre l’Afrique et la France ?

Le Président Hollande a placé le partenariat entre la France et l’Afrique à un niveau très élevé. Je n’ai pas de leçons à donner à qui que ce soit, mais je souhaite bien sûr que celui qui le remplacera poursuivra ces actions dans la même direction, et cela dans l’intérêt des peuples africains mais aussi dans celui du peuple français.

Les questions sécuritaires sont d’une importance majeure pour le Mali et le Niger. Votre pays a reproché au Mali de ne pas prendre toutes les mesures pour éviter d’exporter l’insécurité hors de ses frontières. La situation a-t-elle positivement évolué ?

Je dois d’abord rectifier une chose : nous n’avons jamais rien reproché au Mali. Nous considérons que nous vivons dans le même espace. Nous considérons que cet espace est sous des menaces terroristes, sous les menaces d’organisations criminelles. Pour m’exprimer de manière terre à terre, je dirais que nous sommes sur le même bateau. Le Niger a toujours estimé que la situation sécuritaire du Mali est une question de sécurité intérieure pour le Niger et inversement. On ne fait pas de reproche aux autorités maliennes qui font un travail important, colossal. Voyez-vous les efforts qui sont faits dans la mise en œuvre de l’Accord de paix que je salue au passage ? Le gouvernement actuel a hérité d’une situation sécuritaire extrêmement difficile et il fait beaucoup pour créer les conditions du retour à la paix dans le pays. Avec le Mali, nous travaillons, ainsi qu’avec les autres pays de l’espace sahélien, en particulier dans le cadre du G5 Sahel. Il y a des initiatives que nous comptons prendre pour mettre en place des forces sur le modèle de ce que nous avons mis en place dans le bassin du Lac Tchad, c’est-à-dire faire la même chose au niveau de la Mauritanie, du Mali, du Burkina Faso, du Niger et du Tchad. Cela pour lutter plus efficacement contre le terrorisme, en rapport avec les autres forces déjà en présence, qu’elles soient celles de Barkhane ou de la MINUSMA.

Vous avez évoqué l’accord pour la paix et la réconciliation. On déplore souvent, au plan national comme international, la lenteur du processus de sa mise en œuvre. Qu’en pense Niamey ?

La situation est très difficile. Ceux qui regardent le problème de loin pensent que tout est facile mais ceux qui sont au pied du mur savent que ce n’est pas aussi simple. Nous saluons les efforts que fait le gouvernement malien pour la mise en œuvre de cet accord et nous l’encourageons à poursuivre. Nous sommes prêts à continuer notre soutien, puisque le Niger fait partie du Comité de suivi de la mise en œuvre de l’Accord. Nous continuerons à remplir nos engagements par rapport à la nécessité de mutualiser les moyens pour notre sécurité commune.

Dernier volet de cet entretien, Excellence, parlons migrations. Vous avez sans doute suivi l’actualité au Mali qui a été marquée ces dernières semaines par la polémique sur l’accord de réadmission. On a même annoncé une signature du côté du Niger. Qu’est-ce que cela peut apporter à un pays de signer ce type de convention avec l’Europe ?

D’abord, il ne faut pas réduire le problème de migration aux accords de réadmission. En ce qui concerne le Niger, il faut bien spécifier de quelle migration il s’agit. Il s’agit de lutter contre une activité criminelle qu’on appelle migration clandestine. Le Niger est engagé dans la lutte contre la migration irrégulière. Nous avons défini un plan quand il y a eu le sommet Europe-Afrique à la Valette (Malte, ndlr). Ce plan a décidé de s’attaquer aux causes profondes des migrations. Ces causes profondes, c’est la pauvreté, le déficit démocratique dans certains pays, l’insécurité, mais aussi les effets des changements climatiques. Dans ce plan, il est dit clairement que nous allons lutter contre la migration irrégulière mais encourager la migration régulière. Le Niger, qui a adhéré à ce plan de la Valette et qui a conçu son propre plan de lutte contre la migration irrégulière en temps que pays de transit, le fait pour deux raisons. Pour des raisons morales d’abord parce que c’est insoutenable le drame que vivent les ressortissants africains à travers le désert ou la Méditerranée. Entre 2015 et 2016, pour donner un exemple, il y a eu plus de 10 000 Africains qui sont morts noyés en Méditerranée. Nous, dirigeants africains, ne pouvons pas rester insensibles à ce drame. Cela nous a amené à nous engager très fortement dans la lutte contre la migration clandestine. La deuxième raison est sécuritaire. Les passeurs qui amènent les migrants en Lybie, à travers le Niger, nous reviennent de ce pays avec des armes. Pour ces deux raisons, nous sommes très fortement engagés dans la lutte contre la migration clandestine. Les questions de réadmission, c’est juste un aspect du problème.

Ce ne sont donc pas, comme l’ont reproché certaines organisations de la société civile, les millions promis par Bruxelles qui vous poussent à renforcer la lutte ?

Je vous ai dit les raisons pour lesquelles nous nous sommes engagés.

Pour conclure, nous souhaiterions savoir comment se porte le Niger.

Le Niger se porte bien. J’ai fait un premier mandat qui a été concluant, à l’issue duquel j’ai eu à réaliser toutes les promesses faites au peuple nigérien. Mon programme a été réalisé à plus de 93%. Ces promesses tenues et le nouveau programme conçu et présenté aux électeurs m’ont permis d’être réélu et j’espère que ce deuxième quinquennat sera consacré d’une grande réussite, comme le premier.

 

 

Le Niger menacé… Issoufou à Paris

Du 13 au 16 juin, le président nigérien est en visite officielle en France dans un contexte marqué par les récentes incursions de Boko Haram sur son territoire.

Pourquoi cette visite du Président nigérien, Mahamadou Issoufou, en France ? À Paris depuis lundi, il a rencontré, mardi, le Président François Hollande et le ministre des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault. Demain Jeudi, il aura un tête-tête avec le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian. Le président Issoufou s’est entretenu avec François Hollande, de la menace terroriste avec en toile de fond les dernières attaques de Boko Haram, il y a plus d’une semaine, qui ont visé la localité de Bosso, dans le sud-est du Niger, tuant 26 soldats. Un véritable électrochoc. L’attaque la plus meurtrière depuis que le Niger est entré en guerre, en 2015, contre la secte islamiste nigériane.

Maillon faible

Dans le Sahel, Issoufou est l’un des alliés de la France dans la guerre sans merci, qu’elle fait aux terroristes qui écument la région. Il reste que le Niger, aux yeux de beaucoup d’observateurs, fait figure de « maillon faible » dans cette lutte, certains experts allant jusqu’à rappeler que les forces armées nigériennes, manque de matériels et d’hommes, outre le fait qu’elles sont en permanence la cible d’attentats perpétrés par la secte islamiste.
Ce voyage du président nigérien, intervient un mois après le sommet d’Abuja consacré à la lutte contre Boko Haram qu’on disait aux abois depuis le début de l’année,  mais qui continue de semer la terreur.

Est-ce à dire que ce fut un sommet pour rien ? ce n’est pas l’avis du Malien Soumeïlou Boubèye Maïga, ancien ministre de la Défense, ayant également dirigé les services de renseignement, et aujourd’hui expert à l’Union africaine sur les questions de terrorisme et extrémisme :

« Nous sommes dans une situation asymétrique qui fait que les armées conventionnelles -la preuve en est faite tous les jours- ont beaucoup de difficultés à cerner durablement les activités des groupes terroristes (…) Le Sommet a certainement contribué à mieux définir les axes de coopération, c’est-à-dire que plus d’efforts doivent être portés sur la conception, la planification, la logistique et l’organisation du commandement et du renseignement. Et surtout ce qu’on voit bien, c’est que c’est un conflit qui ne se mène pas à une échelle nationale. Donc cela doit conduire nos pays à nous engager dans une offensive permanente, générale. Il faut que ce soit une vraie guerre jusqu’à atteindre le niveau d’éradication [de Boko Haram] afin que cela ne pose plus problème au fonctionnement normal des États. », confiait-il à R.F.I il y a quelques jours.
Lors de leur déclaration conjointe, le Président français a souligné que la France apportera un appui au Niger dans la lutte contre Boko Haram. Il s’agira surtout d’un travail de coopération, de formation, d’équipement, de renseignement. Il a aussi été question de la participation de la France pour appuyer la Force multilatérale et « ainsi porter les coups nécessaires à Boko Haram ». Le déploiement dans la région du Sahel des forces françaises a aussi été évoqué, à cause de la «tentative toujours répétée des groupes terroristes de faire en sorte que le nord du Mali puisse être déstabilisé ».