Mahamet Traoré: « L’avenir du football malien dépendra de la qualité de ses managers »

Il était encore étudiant lorsqu’il a lancé en 2007, un site d’information dédié exclusivement au football malien. Pour Mahamet Traoré, Malifootball.com a été créé pour combler un vide. D’abord pour assouvir sa soif de connaissances et ensuite informer les férus du foot malien. Ayant acquis des compétences dans la gestion des projets de créations de site web à  l’université, il a concrétisé son projet. Mahamet avoue que les débuts n’étaient pas faciles. Selon cet aficionado du ballon rond, il fallait se faire connaà®tre dans le milieu, être en contact avec les bonnes personnes, se faire accepter, chercher l’information tout en étant sérieux et rigoureux dans le travail. Par la suite, affirme-t-il, « tout est venu naturellement, la confiance est installée, le travail est reconnu, ce qui fait que les gens viennent vers moi. Malifootball.com est devenu le carrefour des fans de l’équipe nationale du Mali, la référence en ce qui concerne l’actualité du football malien de façon générale ». Autre difficulté, C’’est le financement des activités. Pas de sponsoring, ni d’aide de la part du ministère des sports, ni de la Fédération malienne de football. « Tout est à  mes frais et le site n’est pas rentable pour couvrir les dépenses quotidiennes. Par passion du football malien et du projet, pour l’utilité que le site a auprès des supporters et tous ceux qui suivent le football, je me suis donné ce devoir de continuer malgré tout » souligne-t-il. Consultant pour la chaà®ne Africa 24 depuis 2011, Mahamet Traoré intervient également dans l’émission Radio Foot International sur RFI pour commenter et analyser l’actualité footballistique. Fier d’avoir créé une plateforme utile à  son pays, il répond aux questions de Journaldumali. Journaldumali: Quel regard portez-vous sur le foot malien ? Mahamet Traoré: C’’est un regard mitigé ! Au niveau des résultats, ce n’est pas mal, parce que l’équipe nationale a occupé deux fois, la troisième place à  la Coupe d’Afrique des Nations. Il faut noter aussi que les clubs arrivent souvent en phase de poule sinon dans le dernier carré des coupes CAF o๠ces dernières années, le Stade Malien et le Djoliba AC étaient présents. Cela a permis au Mali de redorer son blason sur l’échiquier continental en matière de football. On a aussi des joueurs de qualité et le Mali est un grand réservoir. Mais derrière, il y a beaucoup de choses à  exploiter. Actuellement, le management sportif fait défaut. Quand on est manager d’une sélection, il faut avoir les compétences, être au fait de l’actualité du football, du point de vue technique, organisationnel, matériel. Dans les grands clubs, chaque année, les entraà®neurs, les managers font une mise à  jour, ils revoient le système de jeu, les types de joueurs qu’il faut former, etc. C’’est un travail de fond qui se fait en s’adaptant régulièrement aux nouvelles orientations du football mondial. Donc il faut avoir des cadres compétents pour faire ce boulot. Malheureusement, je ne pense pas que ce travail est fait au Mali. Ce qui est dommage et ce qui fait que très régulièrement, on arrive proche des coupes africaines comme la CAN. On se dit qu’on aurait pu aller en finale pour remporter la coupe mais à  chaque fois, on s’arrête. Sinon on a des équipes professionnelles, la sélection nationale est constituée uniquement de joueurs professionnels mais si derrière, il n’ y a pas un encadrement, un environnement professionnel autour, on ne peut pas aller loin. Quelle solution proposez-vous ? Il faut être sérieux et rigoureux et ne pas se mentir soi-même, mettre les bonnes personnes aux bons endroits. Il faut qu’on arrête le calcul, juste pour satisfaire une personne. Il faut être objectif dans les choix. Aujourd’hui, le Mali a le potentiel de faire des choses extraordinaires en matière de foot mais il faut mettre des personnes qui sont passionnées par la réussite de ce foot, qui sont prêts à  servir cette discipline et non se servir. Quel avenir pour le ballon au Mali ? Il dépendra de la qualité des managers. Il ne s’agit pas seulement des entraà®neurs mais aussi des présidents de clubs, de fédération, des arbitres, des kinésithérapeutes, des médecins. Pour les joueurs, je ne me fais pas de souci. Nous avons une chance extraordinaire d’avoir beaucoup de jeunes qui sont passionnés par ce foot et qui ont d’énormes qualités. Nous avons également des jeunes de la diaspora qui sont formés dans les meilleurs clubs et sont potentiellement sélectionnables. En faisant la symbiose de ces deux profils de joueurs, on peut créer des grandes équipes C’’est-à -dire équipe A, U23, sélection olympique, junior, cadet. A chaque tranche d’âge on a la possibilité de faire un mélange entre le jeunes issus de la diaspora et ceux formés au pays pour faire une équipe compétitive. Le foot malien porte beaucoup d’espoir et on peut en faire un moteur de développement à  condition qu’on ait conscience du pouvoir et de l’économie du foot. De là , le Mali pourra profiter de cette opportunité pour se développer. On a vu comment les joueurs expatriés arrivent à  faire revenir des devises dans nos pays, à  travers leur relationnel, la création des centres de football à  l’image de Kanouté. Nous devons travailler sur ça pour permettre à  d’autres jeunes d’avoir d’autres opportunités, ce qui va de la responsabilité de tout le monde. Le Mali qui participe actuellement au Championnat d’Afrique des Nations (CHAN 2014) en Afrique du Sud a remporté son premier match face au Nigéria 2 buts à  1, le samedi dernier. Peut-on espérer une place en finale, voire remporter la coupe? On a avait des appréhensions lors de la préparation parce que les matchs amicaux n’ont pas donné beaucoup de satisfaction. Mais à  l’ouverture, le match qui a été livré contre le Nigéria nous a permis de savoir qu’on a une équipe qui est bien en place, équilibrée, capable de se créer des occasions. Cette équipe a certes, des lacunes qu’on a pu déceler pendant le match notamment le problème d’efficacité. On a eu beaucoup d’occasions qui n’ont pas été concrétisées. Quand on arrive dans le dernier carré, à  chaque occasion, il faut bien les gérer. C’’est surtout cet aspect sur lequel J’insisterai. Si on pouvait reproduire le même match en étant plus discipliné, je pense qu’on peut aller loin avec cette composition. Maintenant remporter la coupe C’’est trop dire mais je pense qu’on a la possibilité d’aller au prochain tour. Mais la finale, pour l’instant J’attends de voir la deuxième ou la troisième sortie du Mali pour me faire une idée complète de cette équipe.