Mouammar Kaddafi : 40 ans de règne sans partage

C’est à  27 ans qu’il prend le pouvoir le 1er septembre 1969 en renversant le vieux roi Idriss, alors en villégiature et sans effusion de sang. 40 ans après ce « putsch de lieutenants », le colonel Kaddafi fête à  Tripoli, avec faste et grandeur, l’anniversaire de ce qu’on appela à  l’époque  » La Révolution Lybiennne ». Une trentaine de chefs d’états africains, dont Amadou Toumani Touré, ont fait le déplacement au pays du colonel. Un fils de berger devenu colonel de l’armée A voir l’allure du colonel aujourd’hui, on ne doutera pas des ravages du temps sur l’aura fière du jeune officier qui renversa le pouvoir en 1969. Il serait né un 19 juin dans les années 40, 41, rien n’est sûr, dans une tribu de bergers du désert de Syrte. Tout jeune, il reçoit une éducation religieuse et fréquente une école préparatoire à  Sebha o๠il développera ses idées politiques. A la vie nomade de bédouin, Kaddafi choisira l’armée qu’il intègrera en 1963 après des études de droit à  l’université de Lybie. A l’Académie militaire de Benghazi, il gravit les échelons très vite pour se tourner vers la politique. C’est à  époque qu’il aurait fomenté un putsch contre la monarchie en place avec l’aide de quelques militants. En attendant ce jour fatidique, Kaddafi complète son parcours à  Londres au British Army Staff College et revient en Lybie avec le grade d’officier… Le coup d’état militaire Rien ne préparait la monarchie au putsch orchestré dans le plus grand secret. Avec l’aide d’un groupe d’officiers, Kaddafi sûr de son grade, s’empare le 1er semptembre 1969 du pouvoir, destitue le prince héritier du trône et renverse le Roi Idriss. Il proclame ensuite la République en abolissant définitivement la Monarchie. Son modèle de référence serait le lieutenent Gamal Abdel Nasser d’Egypte. A son tour, Kaddafi devient colonel. Fondant son pouvoir sur un ouvrage  » Le Livre Vert », il tente d’expliquer la révolution, en la basant sur la démocratie et le pouvoir de l’économie. Religieux convaincu, Kaddafi nourrit aussi sa doctrine et sa légende grâce à  l’Islam, au Coran et exclut toute interprétation humaine ou principes d’exégèses. Déjà  mégalomane à  l’époque, le jeune colonel veut marquer son époque, se hisser au rang des Mao Zedong et autres leaders révolutionnaires, qui s’emparèrent des rênes de leurs pays. La dictature, Kaddafi s’en fiche et règne depuis quarante sans partage et sans aucune opposition pour le destabiliser, les partis politiques étant interdits en Lybie. Le rêve perdu du  » Panarabisme » Kaddafi a toujours vu les choses en grand. Il s’est toujours rêvé en conquérant, sorte d’Alexandre post-moderne et leader d’une nation arabe unifiée. La réalité est tout autre face aux souverainetés des uns et des autres, à  la bélligérance israélienne, source d’instabilité dans la région depuis la création de l’état par Golda Meir en 1948. Dans les années 70, Kaddafi commence à  nationaliser les entreprises étrangères puis déclare la révolution du peuple. La république Arabe islamique de 69 devient alors la Jamahiriya arabe libyenne en 1977. Les partis politiques sont toujours interdits. L’or noir de la révolution Pour se démarquer des autres leaders arabes, Kaddafi défie l’hégémonie américaine et fait monter le prix du baril de pétrole en 1970, affirmant ainsi la puissance économique des pays producteurs de pétrole. C’est le règne des pétrodollars. L’or noir coule à  flot et les tribulations commencent pour le régime. Banni de la communauté internationale, Kaddafi est accusé de soutenir le terrorisme internationale. L’attentat de Lockerbie, contre un avion civil américain (270 morts)en 1988 et celui du DC10 d’UTA(170 morts) en 1989, marque une série noire pour la Libye. Ce n’est qu’à  l’indemnisation des familles des victimes de ces attentats un peu plus tard, que la communauté internationale lèvera ses sanctions contre la Libye. Rapprochement géopolitique Dans les années 90, Kaddafi opère un retour vers la communauté internationale, en voulant jouer le rôle d’un pacificateur dans les conflits. Il signe même en 2004 le traité de Non prolifération Nucléaire et tente le rapprochement avec les puissances occidentales et quelques souverains africains comme Feu Omar Bongo ou Sassou Nguesso du Congo. Les Etats-Unis d’Afrique ou le rêve du panarabisme revisité Avec le temps, la soif de grandeur de Mouammar Kaddafi ne s’est pas tarie. A la tête de la présidence de l’Union Africaine depuis le sommet d’Addis Abeba en février 2009, Kaddafi a fait de l’Afrique son nouveau cheval de bataille à  tel point qu’il s’est autoproclamé « Roi des Rois d’Afrique », sceptre en main et propagande à  la clé. Le rêve des Etats-Unis d’Afrique, plusieurs fois évoqué lors des divers sommets de l’Union Africaine ne fait pas l’unanimité. Au contraire. Fustigé pour les mauvais traitements infligés aux ressortissants subsahariens de Lybie, on le juge « parvenu » à  vouloir diriger ce supposé « gouvernement des Etats-Unis d’Afrique », un projet embryonnaire et pour lequel il a parcouru le continent en 2007 afin de convaincre quelques chefs d’états africains de sa réalisation. Au menu, la création d’une monnaie unique et une armée de 2 millions d’hommes qu’il dirigerait bien sûr. Admiré ou hai, Kaddafi joue toutes le cartes : celles de l’audace, de l’outrecuidance et de la mégalomanie sans jamais se départir de ses ambitions : régner avec faste et grandeur. Après Omar Bongo, il est l’un des leaders en exercice les plus vieux du Continent et entend le rester encore longtemps. Sa succession serait dit-on assuré par son fils Seif El Islam, même si ce dernier a été récemment écarté des arcanes du pouvoir pour ses vues trop modernes. En attendant, Tripoli fête le 40ème anniversaire de la Révolution avec éclat. Défilés, feux d’artifices, cérémonies militaires, la capitale libyenne est le lieu de ralliement des chefs d’états africains.