Mariko Fadima Siby : L’experte du fonio

Peu connus au Mali, les produits de Mme Mariko Fadima Siby s’exportent merveilleusement à l’étranger. Le fonio, sur lequel sa société, UCODAL, met principalement l’accent, est l’un de ses produits phares, que l’on trouve en Europe, en Amérique ou encore en Afrique. Portrait d’une entrepreneure qui vise haut, très haut.

À 73 ans, Mariko Fadima Siby ne pense pas encore à la retraite. Ses très longues journées, elle les passe dans son usine de l’Unité de transformation et de conditionnement des denrées alimentaires (UCODAL). Dans cette usine, qui ne paye pas de mine à première vue, Mme Mariko développe un business très fructueux. Ses produits, le fonio principalement, s’exportent et se vendent très bien, en France, au Sénégal, en Gambie, aux États-Unis ou encore en Espagne. Ses clients y sont des expatriés maliens, mais également des natifs de ces différents pays.

Tout en gardant le regard sur les différentes étapes de la production si exigeante du fonio, la septuagénaire supervise aussi les travaux de modernisation de son unité industrielle. En plein chantier, l’usine aura bientôt un nouveau visage et disposera de nouvelles installations. Que de chemin parcouru pour cette « self entrepreneur woman », qui s’est lancée en 1988 à son propre compte, en ensachant pâte d’arachides, oignons ou encore gombo.

À l’époque, tient-elle à préciser, c’est assise sous un acacia que se déroulait tout son business. Contraste très saisissant avec son environnement professionnel. Puisque après avoir décroché un diplôme en Sciences de la nutrition et technologie alimentaire en Allemagne, en 1974, avec une spécialisation laits et produits laitiers, elle rentre au Mali, où elle travaillera à Mali Lait.

Elle y restera quinze ans. Dans sa tête, elle a déjà mûri l’idée de « se » lancer. Mme Mariko profite du programme de départ volontaire à la retraite pour concrétiser son projet. Même s’il lui aura fallu trois ans, en 1991, pour bénéficier de ce fonds, destiné à ceux qui avaient effectué 15 années de service. Avec peu de moyens et beaucoup d’envie naît donc UCODAL. Les premières années de la société, bien qu’encourageantes, ne la satisfont pas.

Femme de défi, elle décide d’ajouter le fonio à ses produits, car « personne ne s’y intéressait à cette époque ». Pendant des années, elle apprend tout ce qu’il faut savoir sur cette céréale, dont elle est aujourd’hui « une experte », clame-t-elle. Depuis, celle qui est également Présidente de la Plateforme fonio du Mali, produit du fonio précuit, complet et complet enrichi.

En entrepreneuse avertie, elle se tourne vers le marché international et décide de faire de l’exportation sa principale stratégie de commercialisation. « Je voulais conquérir un marché où les gens ne connaissaient pas encore cette céréale », confie-t-elle. Et cette audacieuse vision a semble-t-il payé. Même si elle refuse à dévoiler son chiffre d’affaires, elle assure que le développement de la société la « satisfait amplement ».

Ne travaillant que sur commande, ses productions atteignant les 150 tonnes annuelles et ne souffrent d’aucun invendu, selon elle. Son personnel, des intermittents pour la plupart, est difficile à compter, son effectif évoluant en fonction du volume des commandes.

Fonio noir

Elle a passé plusieurs années à la recherche de la solution pour un fonio moins clair, noir même. Difficile, car, des années durant, le critère sine qua non de sa consommation était une couleur claire après étuvage et divers traitements. Et elle faisait recette.

Mais, pour séduire une clientèle nouvelle, des Suisses en l’occurrence ou encore quelques Américains, la très active retraitée s’est fixé comme objectif d’obtenir cette composition, qui lui ouvrira de nouvelles portes. Après des années de recherche, de nuits blanches, de doutes et surtout d’abnégation, elle assure l’avoir enfin trouvée et prévoit de lancer ce nouveau produit en 2020.

Ce qui pourrait être sa quête du Graal. Son entourage étudie la possibilité pour elle de laisser les rênes à l’un des enfants, pour enfin se « reposer ». Dans un proche et lointain avenir.

Boubacar Sidiki Haidara