Winnie Mandela, l’ex-épouse de Nelson Mandela, est morte

Égérie populaire mais controversée de la lutte anti-apartheid, elle fut la deuxième épouse du premier président noir d’Afrique du Sud Nelson Mandela.

Elle s’est éteinte des suites « d’une longue maladie ». Winnie Mandela, l’ex-épouse de l’ancien président sud-africain Nelson Mandela, est morte à l’âge de 81 ans, lundi 2 avril dans un hôpital de Johannesburg, a annoncé son porte-parole. « C’est avec une grande tristesse que nous informons le public que Mme Winnie Madikizela Mandela est décédée à l’hôpital Milkpark de Johannesburg lundi 2 avril », a déclaré Victor Dlamini dans un communiqué.

Egérie de la lutte anti-apartheid durant les vingt-sept années d’emprisonnement de Nelson Mandela, libéré en 1990, elle était cependant devenue une figure controversée.

Celle qui était surnommée la « mère de la nation » a notamment encouragé la violence pendant la lutte contre le régime ségrégationniste.

En 1991, elle est ainsi reconnue coupable de complicité dans l’enlèvement d’un jeune militant et condamnée à six ans de prison, une peine ultérieurement commuée en simple amende.

En 1998, la Commission vérité et réconciliation (TRC), chargée de juger les crimes politiques de l’apartheid, déclare Winnie « coupable politiquement et moralement des énormes violations des droits de l’Homme » commises par le « Mandela United Football Club », un groupe de jeunes hommes aux méthodes particulièrement violentes dont elle s’était entourée.

« Elle était une formidable égérie de la lutte, une icône de la libération », dira d’elle le prix Nobel de la paix Desmond Tutu, président de la TRC et ami de Nelson Mandela. « Et puis quelque chose a terriblement mal tourné ».

L’image du couple Mandela, marchant main dans la main à la libération du héros anti-apartheid en 1990, a fait le tour du monde. Mais les époux ne se sont jamais retrouvés. Ils ont fini par divorcer en 1996 à l’issue d’une sordide procédure qui a révélé les infidélités de Winnie. Leur animosité a continué, même après la mort de Nelson Mandela en 2013. Il ne lui a rien légué. Furieuse, elle a engagé une bataille pour récupérer la maison familiale de Qunu (sud). La justice l’a récemment déboutée de ses demandes.

Aminata Dramane Traoré : «La guerre n’est pas la solution»

Slate Afrique – Comment jugez-vous l’évolution actuelle de la situation de votre pays ? Aminata Dramane Traoré – D’une extrême gravité, mais pas désespérée. Il y a d’une part la désinformation qui ne contribue en rien à  la paix, et d’autre part l’attitude de certains dirigeants africains qui semblent avoir fait le choix de la guerre dans notre pays depuis le début de cette crise dite malienne. La désinformation consiste à  occulter l’échec lamentable du modèle économique mis en œuvre et celui du système politique qui tient lieu de démocratie. Le faux diagnostic qui en découle pousse la communauté internationale à  prendre des décisions que je juge à  la fois erronées et injustes. Cette crise, on ne le dira jamais assez, est d’abord l’une des conséquences dramatiques de l’intervention de l’OTAN en Libye. Je comprends mes concitoyens qui, traumatisés par la violence de l’invasion et de l’occupation des deux tiers de notre territoire et désemparés par la défaite de notre armée face au Mouvement National de Libération de l’Azawad (MNLA) et ses alliés islamistes , croient que l’intervention de forces militaires extérieures est une solution rapide, efficace et radicale. Rien n’est moins certain. Il suffit de regarder du côté de l’Afghanistan, de l’Irak, de la Côte d’Ivoire et de la Libye pour se rendre compte que la guerre n’est pas la solution. Des morts, des viols, des blessés, des déplacés, des réfugiés, des écosystèmes saccagés et la destruction d’infrastructures, souvent acquises au prix du lourd fardeau de la dette, sont autant de conséquences que personne ne doit banaliser et à  plus forte raison ignorer. Slate Afrique – On vous comprend. Mais concrètement, le Nord étant occupé, comment faites vous pour le récupérer sans intervention militaire de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) et de l’Occident? A.D.T – Ce n’est pas moi qui vais dire qu’il ne faut rien faire pour arrêter le calvaire de mes frères et sœurs du Nord de notre pays, quand je pense, en plus des massacres perpétrés contre des soldats désarmés à  Aguelhok, aux viols, aux tueries et aux pillages, dont ceux des hôpitaux et des pharmacies. Ce traitement est infligé à  des populations innocentes qui étaient déjà  éprouvées par la faim, le manque d’eau et autres pénuries. Par ailleurs, un pays, en plus d’être une histoire, une identité est aussi la représentation que l’on s’en fait. Nous avons du mal à  nous imaginer, nous Maliennes et Maliens, notre pays amputé des régions de Tombouctou, de Gao et Kidal. l’envoi de troupes de la Cédéao dans ce contexte est-il pour autant souhaitable? Absolument pas. Les combats, s’ils ont lieu, ne se dérouleront pas le désert mais dans des villes et des villages. Pour libérer le septentrion malien, nous devons commencer par nous demander ce qui nous arrive exactement. Pourquoi? Comment? Et maintenant? Nous ne parvenons pas à  en parler entre nous avec la sérénité nécessaire en raison de malentendus qui tiennent également à  l’ignorance de certains desseins. Pour ce qui est des causes internes, nous sommes quasi unanimes à  reconnaà®tre notre manque de vision, nos incohérences, nos contradictions, la corruption et l’impunité. Les causes externes, par contre, sont soigneusement occultées alors qu’elles sont souvent plus déterminantes. La classe dirigeante excelle souvent dans l’art de l’autosatisfaction, l’autoglorification et la séduction des argentiers. Si nous étions plus perspicaces et plus ouverts à  l’autocritique et au débat contradictoire, nous serions plus nombreux à  comprendre que la guerre qui est envisagée par la Cédéao dans notre pays n’est pas que celle de la restauration de l’intégrité territoriale. Elle est aussi une nouvelle étape de la guerre mondiale contre le terrorisme visant à  traquer Al Qaida au Maghreb Islamique (Aqmi), Ansar Dine et autres groupes islamistes sur notre territoire. Nous n’aurions rien eu à  redire s’il ne s’agissait pas de l’externalisation de la politique sécuritaire des puissances occidentales qui sont dans une logique de sous-traitance de la violence armée à  laquelle adhèrent certains dirigeants africains. Ces derniers, dans le cas du Mali, semblent même prendre les devants, en sollicitant la France, le Conseil de Sécurité. La double peine ainsi infligée à  notre pays, sous prétexte qu’il a failli sur différents plans dont la protection de ses frontières et de ses acquis démocratiques, consiste à  en faire un terrain de chasse contre l’islamisme -dont il serait subitement devenu le foyer-, et à  réinstaurer, coûte que coûte, un ordre constitutionnel dit normal, alors que celui-ci n’avait rien de vertueux. Si vous le permettez, je reviendrai plus loin sur ma proposition de sortie de crise. Slate Afrique- Faut-il croire, à  partir de cette analyse, que la prise en main du dossier par l’UA qui, à  son tour a saisi le Conseil de Sécurité, va dans le bon sens ? A.D.T – Le déni de démocratie est malheureusement le même au niveau de toutes ces instances, parce que leur prémisse de départ, qui consiste à  décréter qu’il y a démocratie dès lors qu’il y a élection, est erronée. Le processus de prise de décision dans la gestion de cette crise reproduit l’exclusion dont les Maliens et les Maliennes ont souffert ces vingt dernières années en dépit de la rhétorique sur la décentralisation et la participation populaire. Pour l’Etat néolibéral, nous ne comptions pas, en tant que peuple. Et voici que nous ne comptons plus, en tant que pays. En plus de l’occupation du Nord, nous sommes sous tutelle pour ce qui est des questions institutionnelles et politiques. La logique dominante veut qu’à  partir du moment o๠il n’y a pas de dirigeants légitimés par des élections, même quand les élus, qui ont gouverné, ont échoué, il n’y ait plus rien d’autre à  faire que d’organiser des élections dans les plus meilleurs délais de manière à  remettre les mêmes en selle. C’’est à  ce jeu dangereux que joue la Cédéao en accordant plus d’importance à  la légitimité de façade qu’à  l’intégrité territoriale et aux réponses concrètes et rapides que les Maliens et les Maliennes attendent, depuis trop longtemps, aux questions de vie ou de mort qu’ils se posent. Si l’embargo total que la Cédéao voulait nous imposer a été écarté, le pays n’en est pas moins confronté à  une sorte de paralysie, due aux sanctions injustes des bailleurs de fonds, qui entravent la bonne marche de l’économie nationale pour prouver leur thèse selon laquelle sans démocratie électoraliste il n’y a pas d’économie viable. Slate Afrique – Considérez-vous que la France ait une part de responsabilité dans cette situation? Cela transparaà®t dans certaines de vos déclarations. A.D.T – Bien avant l’invasion et l’occupation des trois régions du Nord o๠le tourisme constitue l’une des rares sources de revenu des populations, la France, et dans son sillage, d’autres pays occidentaux ont fait du Mali un pays à  risques, interdit à  leurs touristes. Ni le Maroc ni l’Egypte qui ont enregistré des attentats terroristes sanglants n’ont eu droit au même traitement. La non signature de l’Accord de réadmission des migrants par l’ancien Président malien Amadou Toumani Touré et son soi-disant manque d’efficacité dans la lutte contre Aqmi, ont certainement déçu l’ancien président français, Nicolas Sarkozy. Le Président François Hollande vient de signifier à  son homologue nigérien, Mahamadou Issoufou, que C’’est à  l’Afrique de résoudre ses problèmes et, que la France ne s’impliquera dans une intervention militaire au Mali que lorsque le Conseil de Sécurité des Nations Unies en aura pris la décision à  travers une résolution. Selon le président français, si l’intervention est décidée, C’’est aux Africains de la mener. C’’est un pas considérable par rapport à  l’interventionnisme décomplexé de son prédécesseur. Mais le mal est déjà  fait. Le préjudice, qui est moral et politique, consiste à  imposer aux victimes de la guerre de convoitise du pétrole libyen, de se protéger eux-mêmes contre l’agression des troupes lourdement armées, qui s’acheminaient vers le Mali. Les Occidentaux avaient les moyens technologiques et militaires de les arrêter. Les Maliens et les Maliennes ainsi que l’opinion publique internationale doivent savoir que si la France et les à‰tats-Unis n’avaient pas transformé la résolution 1973 du Conseil de Sécurité de «No Fly Zone» en mandat de renverser le régime de Mouammar Kadhafi, les rebelles et les islamistes, qui occupent le Nord du Mali, n’auraient pas pu disposer de l’arsenal qui fait leur force sur le terrain. Cette responsabilité des pays de l’OTAN, qui est considérable, n’est presque jamais évoquée. l’ancien Président de l’Afrique du Sud, Thabo Mbéki est le seul à  l’avoir fait. Il rappelle que Nicolas Sarkozy, Barack Obama et David Cameron ont foulé au pied le mandat du Conseil de Sécurité et trahi leurs obligations en termes de droit international en décidant de l’avenir de la Libye. Ils ont royalement ignoré la proposition de médiation de l’Union africaine et de résolution pacifique du conflit. C’’est à  ce niveau aussi que l’on mesure l’incohérence de l’organisation panafricaine. Car ce sont les mêmes Chefs d’à‰tats qui ne voulaient pas de l’intervention militaire en Libye qui en admettent le principe pour le Mali. Slate Afrique – Votre nouvel essai intitulé «l’Afrique mutilée» qui traite à  la fois de la question du développement et de la condition des femmes a t-il un lien avec cette crise? A.D.T – Absolument. Parce que C’’est au niveau des femmes que l’on prend la véritable mesure de l’échec du modèle dominant tant en matière de développement que de démocratisation, en Afrique. Bien avant la mutinerie qui s’est soldée le 22 Mars 2012 par un coup d’Etat, ce sont les épouses et les mères des militaires envoyés au Nord du pays pour se battre, sans les moyens nécessaires, qui ont manifesté leur colère et alerté l’opinion nationale et internationale. Le drame est que d’une manière générale les femmes ne sont impliquées ni dans l’analyse des causes profondes et structurelles des crises ni dans la recherche des solutions. Croyez-moi ou non, ma prise de parole, en tant que femme, dérange ceux-là  mêmes qui, à  l’intérieur de mon pays comme à  l’extérieur, ne jurent que par la promotion et la participation politique des femmes. Ce n’est d’ailleurs pas tant parce que je suis une femme que parce que les questions macroéconomiques, géopolitiques et stratégiques, que J’aborde, sont exclues du débat politique ou constituent, quand elles sont soulevées, un domaine réservé aux hommes. C’’est donc un crime de lèse majesté que nous commettons, Nathalie M’dela et moi, en traitant de l’excision économique dans «l’Afrique mutilée.» Le parallèle entre le corps de la femme et l’Afrique, immensément riche en ressources dont l’économie mondiale a cruellement besoin mais, humiliée et pillée, est saisissant de notre point de vue. J’invite mes sœurs africaines à  ne plus se laisser instrumentaliser au nom d’un modèle de développement extraverti qui enrichit les riches et d’un processus de démocratisation qui n’est que mascarade. Ce qui est considéré comme notre «non intégration» dans le développement est à  bien des égards une chance à  l’heure o๠le modèle économique dominant est en panne et que tout est à  réinventer. Les valeurs non marchandes et non monétaires qui font notre force contribueront, J’en suis persuadée, à  reconstruire l’Afrique sur des bases économiques, sociales et environnementales plus saines. s’agissant de la parution de cet essai dans le contexte actuel, ce n’est qu’une pure coà¯ncidence. Il résulte de longs mois de travail. Slate Afrique – Vous insistez lourdement dans cet essai sur la responsabilité de l’Occident et du modèle capitaliste. Sont-ils les responsables des drames africains? Les Africains n’ont-ils pas une part de responsabilité? A.D.T – Cette question qui m’est souvent posée, ne devrait plus être d’actualité. J’inscris tout simplement mon discours sur le registre du local et du global, ici et ailleurs, l’Afrique et le monde. Cette revendication du global pour mieux le questionner indispose les Maliens et les Africains qui veulent mordre la mondialisation à  pleines dents. Je suis d’autant plus à  l’aise aujourd’hui que les conséquences catastrophiques du système capitaliste que je dénonçais déjà  dans mon premier essai «l’à‰tau o๠l’Afrique dans un monde sans frontière» -paru en 1999- sont vérifiables, non seulement dans nos pays traités de Républiques bananières mais aussi dans les démocraties occidentales dites avancées dont les peuples ne sont, visiblement pas plus heureux que nous, de leur sort. Je ne suis donc pas dans une démarche de victimisation et d’accusation de l’Occident. Le modèle dont celui-ci réclame le leadership et qu’il nous impose, est tout simplement un désastre au Mali comme en Grèce, en Espagne au Portugal ou ailleurs. Les Africains n’ont-ils pas une part de responsabilité me demandez-vous? Oui. Mais ce n’est pas faute d’avoir essayé d’être de bons élèves. C’’est parce que la logique du profit et de l’accumulation sans limites, fondement du système, finit tôt ou tard dans l’impasse. Dans les pays occidentaux en crise, plus particulièrement en Grèce, les tenants du capitalisme mortifère se dédouanent et prétendent que le système est vertueux mais les Grecs, les seuls responsables de leurs malheurs. Les Africains, notamment les dirigeants, ont bien entendu leur part de responsabilité dans la nature particulièrement grave de la situation de notre continent. Ils manquent souvent de clairvoyance, de vigilance et surtout de solidarité avec leurs peuples. Rares sont ceux qui parmi eux admettent que nous nous trompons de modèle de développement comme de démocratie au risque d’exposer leurs concitoyens à  davantage de souffrance. Ils ont la naà¯veté de croire que la crise du système, qui aujourd’hui donne du fil à  retordre à  leurs maà®tres à  penser occidentaux, ne nous concerne pas ou fort peu et que bientôt nous émergerons à  notre tour à  notre tour à  l’instar de la Chine, de l’Inde ou du Brésil. Propos recueillis par Pierre Cherruau, Christian Eboulé et Abdel Pitroipa