Idriss Déby, le nouveau Kadhafi?

En fonction depuis 24 ans, l’homme fort du Tchad, Idriss Déby Itno, semble marcher dans le sillage de l’ex chef d’à‰tat libyen. Pas seulement pour sa longévité au pouvoir, mais aussi et surtout pour son engagement à  rendre les Africains maà®tres de leur destin. Une vision panafricaniste commune Depuis la disparition de Mouammar Kadhafi, Idriss Deby est le nouveau visage de l’Afrique qui en veut. Son pays devenu il y a quelques années producteur de pétrole, ce ne sont pas les moyens qui manquent. Tout comme dans la Libye de Kadhafi. Il n’a pas non plus la langue de bois et évoque, parfois vertement, les problèmes auxquels les pays africains sont confrontés. Tout comme Kadhafi. Déby ne s’en cache d’ailleurs pas, il est fervent admirateur de Kadhafi qui fut un exemple pour lui. Il partage sa vision, celle de faire de l’Afrique un continent uni, solidaire et conscient de sa position dans le monde. Fort de ses convictions, tel un Kadhafi à  la tribune des Nations Unies, il n’hésite pas à  dénoncer en plein Forum International sur la Paix et la Sécurité en Afrique à  Dakar, le comportement de l’OTAN, des Nations Unies et des partenaires occidentaux qu’il accusait d’avoir concocté l’assassinat du leader libyen. Des méthodes différentes Mouammar Kadhafi était très généreux, on s’en souvient. Des projets d’écoles à  ceux de mosquées en passant par l’appui aux chefs d’Etat, les pétrodollars libyens ont profité à  la plupart des pays d’Afrique subsaharienne. Idriss Deby Itno s’investit tout autant, mais à  sa manière. Faisant face à  diverses menaces internes, il n’hésite cependant pas à  envoyer ses troupes sur les théâtres au Mali, au Cameroun, pour défendre l’intégrité territoriale et assurer la sécurité. Janvier 2013, le Tchad annonçait l’envoi d’un régiment d’infanterie de 1 200 hommes et deux bataillons d’appui, soit environ de 2 000 hommes (dont le propre fils Deby) dans la crise du nord-Mali. Deux ans plus tard, 36 soldats manquent à  l’appel mais il en faut plus pour décourager les Tchadiens qui sont au plus près des troupes ennemies dans le nord du Mali. Janvier 2015, c’est au Cameroun que sont envoyés 400 véhicules militaires et des hélicoptères de combat pour soutenir les soldats camerounais dans leur lutte contre la secte Boko Haram. La stature de leader, sinon continental, du moins régional de Deby se conforte au fil des années. Ses prises de position dans les conflits qui ébranlent le continent, sa propension à  s’engager au secours de ses voisins, en font un digne « successeur » de Mouammar Kadhafi. Reste maintenant à  rallier ses pairs africains à  sa vision et les pousser à  l’action. C’est cela certainement le plus dur pour Deby, comme ce fut le cas pour Kadhafi.

Mort de Mouammar Kadhafi : vives réactions au Mali !

Si certains pensent que la mort du guide de la révolution libyenne est le symbole de la liberté, d’autres estiment que le héros visionnaire de l’Afrique vient de tomber sous les balles de l’Europe impérialiste . Réactions ! Mahamane Maiga, électricien «Â  Mouammar Kadhafi était un facteur de déstabilisation au Nord Mali. Il séduisait nos dirigeants avec l’argent de son pétrole en faisant des réalisations, mais il entretenait une rébellion au Nord qui a transformé cette zone en lieu de trafic de drogues et de terrorisme. Avec cette mort, les rebelles se verront décapités ». Adama Oueleguem, économiste : la mort de Kadhafi est une honte pour l’Afrique «Â J’ai été déçu d’apprendre la mort d’un héros de l’Afrique. C’’est le dernier Baobab qui vient d’être abattu par l’Europe colonialiste. l’Afrique vient de perdre un grand homme qui disait ses quatre vérités aux puissances du monde. Il fallait l’éliminer pour s’emparer de son pétrole et régner en Afrique, tel était le but recherché par l’OTAN en complicité avec les insurgés. Vraiment, il est malheureux d’être africain». Sanoussi Camara, enseignant : «Â Un dictateur qui développe son pays vaut mieux qu’un démocrate corrompu » «Â C’’est maintenant que les libyens vont se mordre les doigts. Mouhammar Kadhafi est mort parce qu’il dérangeait ces puissances. Il les dérangeait par ces idées panafricanistes, ses idées fédératrices et visionnaires. Sa mort ne m’a pas surpris, car tous ses prédécesseurs qui ont voulu tenir tête à  ces pays impérialistes ont été tués. Ici je parle de Thomas Sankara, de Modibo Keita premier président du Mali, de Patrice Lumumba du Zaà¯re etc… Qu’est-ce que cet homme n’a pas fait pour son pays ?. La Libye était enviée par le monde. Sa dictature valait mieux que nos démocraties o๠les dirigeants pillent la richesse de l’état. C’est pourquoi nos dirigeants sont à  la merci de ces puissances du monde, parce qu’ils savent très bien qu’ ils sont mal élus. Les libyens vont beaucoup regretter la perte d’un homme qui a donné tout pour son pays et aussi pour l’Afrique ». Moussa Mariko, gestionnaire : «Â On ne se réjouit pas de la mort de quelqu’un, mais Kadhafi était un vrai dictateur «Â Trop, C’’est trop, 42 au pouvoir sans organiser des élections, pensez-vous que ce dernier est un bâtisseur ? Dans un pays o๠la population ne peut pas s’exprimer, vous trouvez que ce dirigeant est un guide ? Vraiment les gens doivent réfléchir, une société qui ne peut s’exprimer est une société esclave. Pire, l’homme était devenu trop orgueilleux et hautain. . Mariétou Konaté, ménagère : «Â Kadhafi aidait l’islam au Mali ». Vraiment, la mort de Kadhafi m’a choqué, il a beaucoup soutenu l’Islam dans sa globalité au Mali. Il a construit beaucoup de mosquées au Mali et ils assuraient les salaires des Imams qui guidaient les fidèles musulmans ». Aminata Keita, juriste : la mort de Kadhafi est loin d’être la fin de la guerre en Libye ! «D’abord, je ne prends pas cette information avec certitude parce que le CNT a toujours donné de fausses informations sur le Guide et ses fils. Même si Kadhafi meurt, les khadafistes continueront à  se battre. Il peut disparaitre en tant qu’être humain mais ses idées resteront. Par ailleurs, le pays trouvera difficilement la paix, car là  bas, C’’est une société de tribus. André Kamaté, artiste : « Désormais le peuple libyen est libre » «Â Le peuple s’est finalement débarassé de ce tyran. On doit féliciter le Conseil national de transition, la France et l’Angleterre qui ont contribué à  la chute de ce dictateur qui massacrait son peuple en catimini ». Fadiala Sissoko,  menusier ; « Kadhafi est un homme » «Â Comme on le dit chez nous, la mort vaut mieux que la honte. C’’est ce que Kadhafi a vite compris et c’est pourquoi, il a accepté d’être tué par les bombes de l’OTAN plutôt que de se rendre à  ses ennemis pour l’humiliation. Il l’a dit et il l’a fait ! Il s’est battu jusqu’à  la dernière goutte de sang.

L’Occident crée la « nouvelle Libye »

Le président français, Nicolas Sarkozy, peut enfin célébrer sa victoire sur le régime défunt de Mouammar Kadhafi. Six mois après avoir galvanisé les puissances étrangères à  adopter la Résolution 1973, ordonnant les frappes de l’OTAN sur la Libye, le chef de l’Etat français a réuni hier, jeudi 1er septembre, les dirigeants de 63 pays. Objectif : l’avenir de la Libye. l’heure des comptes La communauté internationale s’est donc retrouvée dans la capitale française pour engager, autour de la France et de la Grande-Bretagne, la transition démocratique de la «Libye libre», sur fond d’ultimes combats entre la rébellion et le dernier carré des fidèles du colonel Mouammar Kadhafi. «Nous allons tourner la page de la dictature et des combats et ouvrir une ère nouvelle de coopération avec la Libye démocratique», a résumé le chef de l’Etat français cité par les médias français. Tout auréolé du succès, longtemps incertain, de la coalition dont il fut l’un des fers de lance, Nicolas Sarkozy est décidé à  « réussir la transition et éviter les ratages», selon l’expression de ses proches, qui ont marqué celle qui a suivi la chute de Saddam Hussein en Irak. Pour y parvenir, le président Sarkozy a élargi le format de sa conférence en y invitant, outre la trentaine de membres du «groupe de contact» qui ont soutenu les frappes aériennes, les pays qui y étaient jusque-là  hostiles ou ont jugé que l’opération de l’OTAN dépassait le cadre fixé par les Nations unies. Sur les 50 milliards de dollars des avoirs libyens gelés par les puissances, la conférence de Paris a débloqué 12 milliards pour le Conseil national de transition, CNT. A ce jour, seuls trois enveloppes d’1,5 milliard de dollars ou d’euros chacune ont été libérées des comptes américains, britanniques et français. Très réticentes (au début) la Chine, la Russie et l’Afrique du Sud, qui souhaitent la fin des opérations de l’OTAN, n’ont accordé qu’au compte-goutte les demandes de déblocage de fonds. Et d’autres pays, comme la Pologne, ont suggéré une fin de la guerre en échange de leur aide. Jusque-là , la coalition, France en tête, s’y est opposée. «L’opération militaire durera tant que Kadhafi représentera une menace», a réitéré hier le président français au cours d’une conférence de presse. La réunion de Paris sonne comme l’heure du partage du gâteau, sans doute. Même si Paris a précisé que le «business» ne figurait pas à  son ordre du jour. Hier, les discussions se sont déroulées sur fond de compétition autour du juteux «gâteau» de la reconstruction. Selon le très sérieux quotidien français « Libération », la France aurait conclu un accord avec le CNT lui attribuant 35% du pétrole libyen. Le ministre français des Affaires étrangères Alain Juppé a déclaré sur la radio française « RTL » qu’il n’avait «pas connaissance» d’un tel accord, mais a jugé «logique et juste» que les pays engagés aux côtés de la rébellion soient privilégiés dans la période de reconstruction. A huit mois de la fin de son mandat, Nicolas Sarkozy entend aussi profiter du rôle moteur de la France en Libye pour peaufiner son image présidentielle. ATT loyal jusqu’au bout La conférence de presse a enregistré l’absence remarquée du président sud-africain, Jacob Zouma. En visite à  Oslo (à  Norvège) le chef de l’Etat arc-en-ciel (cité par RFI) a mis en garde contre « les initiatives parallèles », et a réitéré sa position pour un dialogue pacifique dans la sortie de crise. Pour lui, l’ONU et l’Union africaine restent les deux organisations en charge de ce dossier. La position de Jacob Zuma rejoint ainsi celle adoptée, dès le début de la crise, par le président malien Amadou Toumani Touré. Si ATT a accepté de prendre part à  la réunion de Paris, il s’est surtout refusé de reconnaitre le CNT libyen comme organisation légitime. Cette déclaration du président malien intervient quelques jours après la publication d’un communiqué du gouvernement réaffirmant son soutien à  Mouammar Kadhafi et au peuple libyen. Dans ce communiqué, rendu public le mercredi 24 août, le gouvernement du Mali avait en effet exprimé sa « préoccupation » face aux derniers évènements en Libye. ATT et son gouvernement, ont ainsi réitéré leur « fidélité aux valeurs démocratiques universelles et aux positions qu’il a toujours défendues dans le cadre du Comité Ad Hoc de l’Union Africaine sur la Libye. Comme pour dire que « nouvelle Libye » se dessine sur fond de division entre les Etats. Mais pour combien de temps ?

Kadhafi, réveilles-toi!

« Tout mon peuple m’aime et mourrait pour me protéger ». C’’est ce que le colonel Kadhafi, qui ne contrôlerait plus que Tripoli et ses environs, a été interviewé par Christiane Amanpour de la chaà®ne américaine ABC. Au cours de l’entretien, il assure que son peuple est toujours derrière lui et qu’aucune manifestation n’a lieu. Sur le site internet de la chaà®ne, la journaliste précise que Kadhafi voulait faire connaà®tre la vérité, C’’est donc pour cela qu’il a accordé cette interview. La rencontre a eu lieu dans un restaurant de Tripoli, ce qui signifie que le dictateur a pris le risque de sortir de sa caserne ultra-protégée. Il s’estime « abandonné » par les pays occidentaux, et plus particulièrement les Etats-Unis, alors que la Libye est « alliée à  l’Occident pour combattre Al Qaida ». « Peut-être veulent-ils (les Occidentaux) occuper la Libye », a-t-il ajouté. Pour finir, il qualifie Barack Obama d’ « homme valable », mais « victime de désinformation » sur la situation en Libye. Avant de lancer : « l‘Amérique n’est pas le gendarme du monde.» Des milliers de morts Rappelons que sur place, le nombre de morts se compte à  présent en milliers. Alors que le nord-est du pays est aux mains des protestataires, plus personne ne circule dans la capitale transformé en bastion, mis à  part les miliciens de Kadhafi. Des chars contrôlent les routes d’accès à  la capitale, selon un habitant. Malgré cette situation de tension extrême, Mouammar Kadhafi affirme qu’il ne démissionnera pas. Pour lui, il n’y a d’ailleurs aucune manifestation dans son pays, mais juste des jeunes Libyens qui prennent les armes, toujours influencés par Al Qaida. Concernant les bombardements aériens sur les manifestants qui ont eu lieu fin février, Kadhafi nie en bloc. « Kadhafi a dit qu’ils n’avaient pas eu lieu et que seuls des sites militaires et des dépôts de munitions avaient été bombardés », explique Christiane Amanpour. Opération séduction Les autorités libyennes usent de la carotte et du bâton. Après la répression et les menaces, viennent maintenant les bonus offerts aux «amis de Kadhafi ». Et ils utilisent les mêmes moyens que les révolutionnaires. Vendredi dernier, les libyens avaient déjà  reçu sur leur portable des sms leur interdisant interdisaient de manifester contre leur leader Mouammar Kadhafi, ainsi que de “ regarder les chaà®nes satellitaires comme al-Jazira, qui répand des rumeurs et qui incite les gens à  faire couler le sang des musulmans ”. Il semblerait que le gouvernement libyen s’essaie à  présent à  une autre stratégie. Pendant la nuit d’hier à  aujourd’hui, les autorités ont envoyé des SMS aux habitants de Tripoli pour les inviter à  aller à  la banque et recevoir 500 dinars (environ 406 dollars). Les bénéficiaires doivent se munir d’un livret de famille. Une offre boudée pour le moment d’après un habitant de Tripoli pour qui «ils veulent nous acheter». «Kadhafi dois se réveiller, son règne est fini» a t-il ajouté.