Mousso Académie : Professionnaliser les jeunes femmes artistes

Depuis quatre mois, des jeunes filles passionnées de musique ont décidé de concrétiser leur rêve en apprenant à chanter ou à jouer d’un instrument. Nous sommes allés à la rencontre de l’initiative Mousso Académie à l’espace culturel Blonba, qui veut autonomiser les femmes artistes au Mali.

Un coach vocal, des apprenantes qui miment avant de finalement libérer leurs cordes vocales. L’exercice reprend jusqu’à la parfaite maîtrise d’une note. Juste à côté, un autre groupe, paré d’instruments de musique. Ici également, la différence entre les formateurs et les élèves est vite perçue. Pour se faire applaudir ou apprécier par l’encadreur, il faut marquer sa prestation avec une performance, du mérite, en mettant notamment en application la leçon apprise avec l’instrument de musique choisi. Toujours dans les couloirs de cette visite guidée, un autre groupe de jeunes femmes. On les appelle les Djettes entendez Disc jockey (DJ) au féminin. Ça scratch, ça mixe, ça fait du beatmapping, des compilations musicales, un dance flow assuré pour des festivals ou des concerts.

Fantastik DJ sur les platines

Ce jour-là, aux platines, elles sont deux : Fanta Sangaré, alias Fantastik DJ, et Fatoumata Touré, alias Tim D. Ce sont des jeunes femmes qui ont choisi d’apprendre le métier de DJ grâce au projet Mousso Académie. Il s’agit non seulement de l’expression de leur passion, mais aussi d’une façon pour elles de se réaliser, de prouver dans ce domaine essentiellement masculinisé leur capacité à manier avec dextérité, rapidité et efficacité les platines.

Tim D dans son flow

Fanta Sangaré est comédienne, danseuse en formation au Conservatoire Balla Fasséké et footballeuse à ses heures creuses. Passionnée du métier de DJ, elle a été d’abord été sous le joug des préjugés qui stipulent que la profession qu’elle rêve d’exercer n’est pas faite pour les femmes. Alors « ma formation avec Mousso Académie est une façon pour moi de montrer à toutes les personnes qui m’ont découragée que j’aime mon métier et que je peux l’exercer sans aucun obstacle, car j’ai autant de talent que les hommes et les mêmes capacités pour me démarquer, sinon faire mieux que certains d’entre eux », tient à préciser Fantastik DJ. Comme elle, Fatoumata Touré, agent de sécurité, vit aussi dans l’ombre des préjugés sur le métier qu’elle affectionne. Son objectif est de « comprendre le métier, mais aussi et surtout de se faire remarquer après la formation », qu’elle qualifie de « réussite ».

Mousso Académie est un projet culturel. En clair, il s’agit d’une école de musique qui promeut l’inclusion des femmes. De façon concrète, le projet, ouvert gratuitement à toutes les Maliennes passionnées de musique, met l’accent sur l’apprentissage des instruments et la maîtrise de la voix ainsi que de la scène. Selon l’homme de culture Alioune Ifra N’Diaye, l’objectif de cette initiative est de former un maximum de femmes. C’est pourquoi, pendant quatre mois, depuis juin 2019, 24 apprenantes, venues en majorité de Bamako et de certaines autres régions, ont bénéficié de cette formation particulière et intense au Complexe culturel BlonBa.

Pour la première saison, trois groupes de jeunes filles se sont formés autour des enseignements sur la voix, les instruments de musique et le métier de Disc jockey. Selon Alioune Ifra N’Diaye, « l’objectif est d’aboutir à la création d’une série de groupes, des jeunes filles Disc jockey, un genre de Spice Girls maliennes que l’on va appeler les Gos de Bamako qui vont faire de la musique urbaine et un troisième groupe. À ce stade, les meilleures vont être associées à des projets artistiques pour la création et la diffusion d’œuvres originales ».

Le projet, accompagné et soutenu par des organisations internationales, des centres culturels et la mairie de la Commune V, fait intervenir des formateurs venus d’Europe mais aussi des enfants d’Afrique, comme l’Ivoirienne Maaté Keita de l’ancien groupe les Gos de Kotèba.

Idelette BISSUU