Chute de Mugabe : recueil de certaines réactions

Actuellement en résidence surveillée depuis ce mercredi 15 novembre 2017, la situation reste toujours confuse au Zimbabwe. L’armée est toujours aux commandes du pays et cette dernière refuse de parler de coup d’État. Du côté de la communauté internationale, les propos sont mesurés.

Un coup d’État qui ne dit pas son nom ? Dans les réactions de la communauté internationale, le terme semble banni du vocabulaire. Le Royaume-Uni, ancienne puissance coloniale, s’est exprimé par la voix de la Première ministre, Theresa May. « Nous observons les développements en cours très attentivement. La situation est encore très mouvante », dit-elle. Le ministre britannique des Affaires étrangères, Boris Johnson, a pu échanger au téléphone avec le vice-président sud-africain Ramaphosa. Il en est ressorti que « les Zimbabwéens doivent être en mesure de décider de leur propre avenir dans des élections libres et équitables, conformément à la Constitution. L’autoritarisme ne devrait pas avoir de place en Afrique », a-t-il déclaré sur Twitter.

 

L’Union européenne préconise le « dialogue » dans le but de conclure à une « résolution pacifique », par la voix d’une porte-parole des services extérieurs de l’UE. « Nous appelons toutes les parties concernées à passer de la confrontation au dialogue avec pour objectif une résolution pacifique« , affirme Catherine Ray, la porte-parole de l’instance européenne.

Les quelques réactions africaines

Force est de constater que le terme « coup d’État » a du mal à sortir, mais le président de l’Union africaine et de la Guinée-Conakry, Alpha Condé, n’a pas hésité à dire le mot « tabou » pour parler de la situation du pays de l’un de ces prédécesseurs à la tête de l’organisation continentale. Le contexte « apparaît comme un coup d’État » et il exhorte les militaires à « se soumettre à la légalité constitutionnelle ». De plus, « l’Union africaine exprime sa grande préoccupation face à la situation qui se déroule au Zimbabwe, où manifestement des soldats tentent de prendre le pouvoir par la force », atteste Alpha Condé dans un communiqué de la présidence guinéenne.

Quant au président de l’Afrique du Sud, Jacob Zuma, ce dernier se pose en médiateur de la situation zimbabwéenne. C’est auprès de ce dernier que le président déchu a déclaré à son homologue sud-africain, par téléphone, être détenu par l’armée. Dans un souci de clarté, le dirigeant a déployé une logistique sur le terrain. « J’ai pris la décision d’envoyer des émissaires sur place pour entrer en contact avec les chefs des forces armées qui ont mené ces opérations, mais aussi pour rencontrer le président Mugabe pour que nous ayons une vision plus claire de la situation au Zimbabwe », déclare-t-il lors d’un discours retransmis à la télévision.

 

 

 

 

Robert Mugabé, Président de l’Union Africaine

Robert Mugabe, président zimbabwéen est depuis ce vendredi le nouveau président de l’instance continentale, l’UA. Le plus ancien chef d’à‰tat africain en exercice, au pouvoir depuis l’indépendance de son pays en 1980, succède au Mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz. « J’accepte humblement votre décision collective, pleinement conscient de la lourde responsabilité qu’elle implique », a-t-il déclaré, sous les applaudissements de leurs pairs. Un signal pour les occidentaux? Alors que des rumeurs persistantes le disaient à  l’article de la mort(il souffrirait d’un cancer), c’est un Robert Mugabé pimpant et tout sourire qui a pris fonctions aujourd’hui. à€ 90 ans passés, il est au pouvoir depuis 35 ans et la Constitution de son pays lui permet théoriquement de rester au pouvoir jusqu’à  99 ans. Depuis une « réforme agraire » sanglante qui a chassé la plupart des fermiers blancs du pays, et violences qui ont entaché les campagnes électorales de 2002 et 2008, il était devenu personঠnon gratta auprès des occidentaux qui ont multiplié les sanctions contre son régime. Mais sur le continent africain, il garde l’image du héros de l’indépendance pour la plupart des Africains. Ne serait-ce que parce qu’il a toujours osé vilipender les Occidentaux : ses tirades anti-impérialistes et ses provocations plaisent. Robert Mugabe a en outre su rompre l’isolement en se tournant vers l’Asie, imité par de nombreux dirigeants africains. Pour Aditi Lalbahadur, analyste à  l’Institut sud-africain des affaires internationales, l’accession de Robert Mugabe à  la tête de l’UA vendredi « est une reconnaissance par les dirigeants africains ». « Cela le renforce également en tant que leader, et cela entérine aussi le statu quo politique au Zimbabwe », note-t-elle. Pourtant, cette nomination suscite un certain embarras dans les rangs de l’organisation panafricaine. Des diplomates ont en effet évoqué un « hasard malheureux » et une règle impossible à  contourner offrant, à  tour de rôle, la présidence de l’UA à  chaque grande région africaine : c’était le tour de l’Afrique australe et le Zimbabwe était seul pays en lice. Des observateurs ont par ailleurs estimé que cette élection était un mauvais signal envoyé par l’organisation sur les valeurs de démocratie et de gouvernance qu’elle prétend défendre, ce qui risquerait de nuire à  son image.