Fonctionnaires radiés : la justice lâche le ministre

La nouvelle a fait l’effet d’une douche froide chez nombre de nos compatriotes. Alors que tous l’ont saluée comme signe de la fin de la culture du népotisme et de la médiocrité, voici que l’on annonce un grand pas en arrière. En effet, la section administrative de la Cour suprême a décidé d’annuler l’arrêté du ministre de la Fonction publique, Mamadou Namory Traoré, datant du 2 octobre 2012 et relative à  la radiation des 263 agents de la Fonction publique malienne. Les personnes frappées par cette mesure avaient, selon le ministère, été abusivement recrutées, soit parce que leur qualification n’avait aucun lien avec leur fonction, ou pour usages de faux documents. En dehors de ceux qui avaient frappés par cette mesure, tous avaient trouvé qu’il s’agissait d’acte courageux, destiné à  assainir un tant soit peu la fonction publique malienne. La décision de la Cour est donc tombée comme un couperet. La déception et l’indignation ont vite gagné des Maliens. La nouvelle a alimenté les discussions dans beaucoup de ‘’grins » de la capitale au point de reléguer en second plan le très fêté cinquantenaire de l’Union africaine(UA), commémoré le week-end à  Addis-Abeba. La réintégration de ces fonctionnaires, en plus de décevoir les Maliens qui ont eu tort de crier vite victoire, est un camouflet pour le ministre qui a pris une décision aussi courageuse contre vents et marées et même au risque de sa sécurité. Loin de nous la prétention de commenter une décision de justice, mais l’on peut en déduire que C’’est un lâchage du ministre dont le seul tort a été d’être courageux. Tort d’avoir eu le courage d’appliquer une décision que le régime défunt avait classé dans les tiroirs pour des calculs politiciens. Tort d’avoir mis le holà  à  des pratiques qui favorisent le népotisme, les raccourcis, la méprise des textes. Tort d’avoir eu le courage d’incarner l’espoir et le renouveau. Pourtant la décision ministérielle ne relevait pas de la précipitation, de l’amateurisme ou du zèle. Loin s’en faut. Elle avait, au contraire, fait l’objet d’une explication de texte pour l’opinion nationale. Mieux, après s’être assuré du bien fondé de sa décision, le ministre est même parti à  l’Assemblée nationale pour répondre avec brio à  l’interpellation de l’honorable Koniba Sidibé sur la question. l’arrêt de la Cour suprême n’est pas sans rappeler, toutes proportions gardées, la démission en 1988 de Soumana Sacko, alors ministre des Finances. « Zorro » avait eu le courage de faire la lumière sur une nébuleuse affaire d’or de la compagnie Sabena impliquant l’ex-première dame, l’épouse du président Moussa Traoré. l’ancien premier ministre avait préféré démissionner pour ne pas cautionner une affaire portant préjudice au pays à  bien des égards. Autre exemple que celui de l’actuel ministre de la Justice, garde des Sceaux, qui avait aussi démissionné du cénacle des « enfants gâtés de la République »en 2008 « pour le Mali ». Alors question. Mamadou Namory Traoré sera-t-il un autre Soumana Sacko ou un Malick Coulibaby? Rien n’est moins sûr dans un pays o๠la culture de la démission est loin d’être la tendance.