Dakar sans eau : panne sèche pour le président Macky Sall

Le fatalisme et la résignation ont fini par atteindre leurs limites pour céder la place à  l’exaspération puis à  la révolte chez les Dakarois, privés d’eau depuis la mi-septembre. Dans la soirée du mercredi 25 septembre 2013 plusieurs quartiers de la ville ont initié des manifestations populaires, barrant la circulation à  l’aide des pneus calcinés et des troncs d’arbres, a pu constater un reporter d’Ouestafnews. Cette poussée de fièvre dans la capitale sénégalaise n’est pas sans rappeler les dernières heures de l’ancien régime libéral, du président Abdoulaye Wade, « chassé » du pouvoir par des électeurs excédés par les coupures d’électricité et des conditions de vie qui se dégradaient alors qu’au sommet de l’Etat, on festoyait. Son remplaçant à  la présidence Macky Sall (un de ses ex-collaborateurs devenu un de ses opposants lors de la présidentielle de 2012) n’a pas encore bouclé deux ans de présence au pouvoir, mais commence à  accumuler les passifs. Les Sénégalais semblent retrouver au sein du nouveau régime les mêmes tares que ceux de l’ancien : incompétence, laxisme, insouciance et arrogance face à  la souffrance des populations. Une souffrance caractérisée par la ronde quotidienne des femmes et hommes armés de récipients de toutes sortes, à  la recherche du liquide précieux. Et depuis plus de deux semaines, cette scène fait partie du décor dakarois, en cette période caniculaire. Dans la plupart des quartiers de la capitale pas une goutte d’eau ne tombe des robinets d’o๠le recours aux pompes manuelle souterraines ou aux puits, tandis que d’autres vont se ravitailler dans les quelques rares zones relativement épargnées. Selon les informations fournies par la Sénégalaise des eaux (SDE), l’entreprise chargée de la distribution, l’origine du calvaire réside dans la rupture de la principale conduite d’eau, un tuyau qui mesure 85 mètres de long et 1,20 mètre de diamètre à  la station de Keur Momar Sarr, localité située au nord-ouest de la capitale. Il s’agit « d’un scandale dans la mesure o๠la SDE est assujettie à  un remplacement régulier des conduites, selon un programme contractuel » dénonce dans un communiqué l’Association des consommateurs sénégalais (Ascosen) qui, de concert avec d’autres consuméristes locaux prévoit de porter plainte contre l’entreprise. Les réparations qui trainent en longueur ont cependant fini d’installer le doute dans l’esprit des populations. Pis, à  la SDE tout comme au niveau du gouvernement, on multiplie les pirouettes, arguties et autres propos de circonstances, sans convaincre une population assoiffée et qui désormais craint de plus en plus pour sa santé. Le « retour à  la normale » a été maintes fois annoncé par la SDE en vain. Le gouvernement promet à  présent des « audits », des « sanctions » et la création d’une nouvelle station. Fausse route disent ses adversaires, se faisant l’écho des usagers, pour qui la priorité C’’est trouver de l’eau aux populations et en urgence. Ce que manifestement le gouvernement semble incapable de faire. l’affaire fait la « Une » de l’essentiel des quotidiens dakarois depuis des jours, et constitue notamment le principal sujet des programmes interactives des radios privées de la place Selon les confidences d’un cadre de la SDE, interrogé par le quotidien Wal fadjri (privé) et qui a requis l’anonymat, la pénurie risque de durer encore deux mois. Autant dire une éternité. A côté des consuméristes, d’autres organisations de la société civile sont également montés au créneau pour dénoncer la gestion par le gouvernement de cette crise sans précédent, d’autres organisations de la société civile comme le Collectif des imans de Guédiawaye, installé dans la banlieue dakaroise ou encore le mouvement Y’en-a-marre (mouvement contestataire essentiellement composé de jeunes). Une frange du Mouvement du 23 juin (M23) a aussi organisé une manifestation dans la journée du mercredi 25 septembre 2013 à  Khar Yalla, un quartier populaire dans la proche périphérie de la capitale. Le président Macky Sall, qui s’était rendu à  New York, a interrompu son séjour « du fait la gravité » de la situation. Il fait face à  sa première grande crise, un an et demi seulement après son arrivée au pouvoir. « Si Wade a été électrocuté, Macky sera noyé » ironisent déjà  les internautes sénégalais qui ont créé pour l’occasion sur les réseaux sociaux les mots clés #sunudokh (notre eau, en wolof) et #eauxsecours.