Communauté musulmane : Querelles de leadership ?

Depuis le refus de la majorité  des membres du Haut conseil islamique du Mali de suivre l’imam Mahmoud Dicko dans l’organisation d’un meeting de dénonciation du programme d’éducation sexuelle complète, fin décembre, le fossé s’élargit entre certains leaders religieux musulmans. Son dernier appel au stade du 26 mars, sans certains poids lourds, et ses prises de positions laissent apparaitre, au-delà du politiquement correct, un malaise. Querelles de leadership où stratégie politique avant la fin du mandat ?

Ils font l’actualité. Des véritables draineurs des foules. Leurs voix sont écoutées au-delà des mosquées. Depuis plus d’une dizaine d’année, les leaders religieux musulmans occupent, et ce de façon fulgurante, le devant de la scène nationale. « Aujourd’hui, tout bouge du côté de la dynamique religieuse. Il y a la rébellion djihadiste, la société civile musulmane, les conflits de leadership. Rien ne peut se faire désormais dans ce pays sans l’Islam et aucun pouvoir ne peut plus exister s’il ne tient pas compte des musulmans, parce qu’ils ont reçu la formation pour comprendre ce qu’ils représentent comme poids politique », soutient Dr Hamidou Magassa, enseignant chercheur, anthropologue et collaborateur de Mahmoud Dicko pendant dix ans.

Estimés à environ 95% de la population, les musulmans sont devenus au fil des années une force motrice qu’il vaut mieux avoir avec soi que contre. La création par le gouvernement, en 2002, du Haut conseil islamique (HCI), s’inscrivait dans la volonté de canaliser la création des associations musulmanes et d’avoir un interlocuteur unique à qui parler. Mais les relations entre cette institution et le pouvoir sont à la fois complices et conflictuelles. Les dernières sorties de l’Imam Mahmoud Dicko, Président du Haut conseil islamique depuis 2008, dans lesquelles il dénonce les dérives religieuses et sociales signent la fin de l’idylle. Mais pas seulement. Alors que l’imam de la mosquée de Badalabougou et le très respecté Chérif Bouyé Haidara de Nioro font front commun contre le gouvernement, le Vice-président Chérif Ousmane Madani Haidara, soufi, et Chouala Bayaya Haidara, chiite, prennent leurs distances. Deux camps émergent, l’un opposé au pouvoir et l’autre qui ne l’attaque pas.

Le projet de la discorde

Bien que dans le passé la lutte ait été quelques fois âpre entre le gouvernement et le Haut conseil sur certains sujets, elle semble prendre aujourd’hui une autre tournure. L’imam Mahmoud Dicko, qui a alerté l’opinion sur l’existence d’un programme d’enseignement d’éducation sexuelle complète, ne désarme pas des mois après. Il parle publiquement des atteintes à la religion du projet, qui invite selon lui à « la débauche et à la dérive des mœurs». L’homme, d’obédience wahabite, mais qui se dit « adepte de l’islam tout court », est scandalisé. Il entreprend d’organiser un meeting au Palais de la culture le 23 décembre 2018 afin d’informer les fidèles de ses découvertes. Mais la majorité des membres du Haut conseil islamique, dont son Vice-président, Chérif Ousmane Madani Haidara, Président de l’association Ançar Dine international et du Groupement des leaders religieux musulmans, s’oppose à la tenue d’un tel rassemblement, d’autant qu’entre-temps le gouvernement a reculé. Si ces leaders ont des positions tranchées et évoluent dans des courants différents, l’acte de défiance à l’endroit de l’imam de Badalabougou va cristalliser les dissensions au sein de la communauté musulmane. « Je ne crois pas qu’il ait une crise de leadership  au sein du Haut conseil. Peut-être entre les leaders. Ils ne sont pas de la même tradition religieuse et il y a une scission à l’intérieur de la communauté musulmane quant à l’approche vis-à-vis des autorités », souligne Ballan Diakité, analyste politique au Centre de recherches et d’analyses politiques, économiques et sociales (CRAPES). Même s’ils laissent paraitre certaines convergences, des actes qui peuvent sembler anodins révèlent ces dernier temps un climat tendu.

Le meeting et  après ?

Le Président du Haut conseil islamique va organiser le 10 février, avec la bénédiction du Chérif de Nioro, un meeting grandiose au stade du 26 mars.

C’était officiellement pour prier pour la paix et la réconciliation au Mali, un pays qui traverse la plus dure période de son existence. Mais les thèmes du meeting vont changer. Les leaders religieux profitent de l’occasion pour fustiger la gouvernance actuelle et appellent à la démission du Premier ministre, Soumeylou Boubeye Maiga. Pour eux, le mal, c’est ce « hérisson ». « Récemment, avant que Barkhane ne mène l’offensive contre Kouffa, les ministres de la Défense française et allemande se sont entretenues avec SBM. Et c’est là que l’ordre a été donné, alors que le contact était déjà établi avec Koufa par la Mission de bons offices. Si on détruit les instruments de dialogue que nous avons, nous risquons de devenir comme le Nigeria, où l’État est très puissant mais n’a pas réussi à régler le problème Boko Haram », prévient Dr Hamidou Magassa.

Les dissensions latentes au sein de la communauté musulmane ont fini par se manifester lors de ce rassemblement. « L’objet du meeting était de prêcher pour le Mali, mais nous avons vu un meeting politique. On comprend que Haidara ne voulait pas s’inscrire dans cette logique et s’est intelligemment effacé, en prétextant qu’il était hors du pays. Et tout cela montre que ça ne va pas. C’était juste un combat entre eux et les dirigeants, car s’ils étaient là-bas pour l’Islam ils n’allaient pas huer la délégation de Haidara », signale pour sa part l’analyste politique Boubacar Bocoum.  La création par Chérif Ousmane Madani Haidara du Groupement des leaders religieux musulmans, suite à la crise de 2012, n’avait pas enchanté le camp de Mahmoud Dicko. « Ils ont hué son représentant parce que Haidara n’est pas très loyal. Il a créé le Groupement des leaders religieux soufis alors qu’il est dans une faitière. Je sais que  Dicko a eu toujours l’intelligence de ne jamais être en conflit avec lui. Les gens savent qu’il est son adjoint, c’est pour cela qu’ils l’ont hué », explique Dr Hamidou Magassa.

Pour ce proche du Président d’Ançar Dine, ils ne regrettent pas leur démarche. « Le 26 mars n’est pas un lieu de prière. Le lieu de prière c’est la mosquée. Et Dieu aussi nous a donné raison », déclare Mohamed Maky Bah, Président de l’Union des jeunes musulmans du Mali (UJMMA) et Secrétaire général du Groupement des leaders religieux musulmans. Il poursuit : « il n’y a pas de problèmes entre nous quand il s’agit de l’islam, mais quand certains leaders veulent se servir de la religion pour faire de la politique ». Pour le Professeur Issa N’Diaye, ce meeting montre « une fracture au sein du Haut conseil islamique, dans la mesure où d’autres clans religieux ne s’y sont pas associés, comme Haidara. Il y a donc deux tendances désormais, une qui soutient le pouvoir et une autre qui est contre », observe-t-il.

Les prises de positions se sont transportées jusque dans les mosquées. Vendredi dernier, pendant son Koutouba (discours) dans une mosquée de Dravela, un imam favorable au maintien de Soumeylou Boubeye Maiga et critique vis-à-vis de la démarche de l’imam Dicko a déclenché l’ire de certains fidèles. Quelques-uns ont même décidé d’abandonner cette mosquée.

La fin d’un mandat

Mahmoud Dicko, en place depuis 2008, sera au terme de son second mandat au HCI en avril prochain. Il ne peut plus se représenter. Mais, au-delà de sa foi, de sa défense de l’islam et du Mali qu’il réclame, l’imam serait-il à la recherche d’un point de chute ? « C’est un rempart vis-à-vis d’un certain nombre de dérives de ce gouvernement, qu’il semble bien connaitre. Même si ses sorties sont liées à des raisons politiques, il faut admettre qu’elles ont permis d’éclairer la lanterne de nombre de nos concitoyens », concède  Ballan Diakité. Son aura et la confiance qu’il capitalise ont fait de lui une personnalité de poids aujourd’hui. « Peut-être qu’il pourrait créer un parti politique. Personne ne peut l’empêcher d’avoir une vie politique. C’est une hypothèse. Il ne peut pas rester seulement au Haut conseil alors que l’opinion publique est derrière lui », s’interroge Dr Hamidou Magassa.

Interview Chérif Ousmane Madani Haïdara 4

Seid Ousmane Madani Haïdara est l’une des figures emblématiques de l’islam au Mali. Religion, gestion du pays et de la chose publique, péril extrémiste, le leader incontesté d’Ansar Dine International et Président du tout nouveau Groupement des leaders spirituels musulmans du Mali, a livré sa vision préoccupée du monde à Journal du Mali (en langue bambara), en ce mois de carême.

Interview Chérif Ousmane Madani Haïdara 3

Seid Ousmane Madani Haïdara est l’une des figures emblématiques de l’islam au Mali. Religion, gestion du pays et de la chose publique, péril extrémiste, le leader incontesté d’Ansar Dine International et Président du tout nouveau Groupement des leaders spirituels musulmans du Mali, a livré sa vision préoccupée du monde à Journal du Mali (en langue bambara), en ce mois de carême.

Interview Chérif Ousmane Madani Haïdara 2

Seid Ousmane Madani Haïdara est l’une des figures emblématiques de l’islam au Mali. Religion, gestion du pays et de la chose publique, péril extrémiste, le leader incontesté d’Ansar Dine International et Président du tout nouveau Groupement des leaders spirituels musulmans du Mali, a livré sa vision préoccupée du monde à Journal du Mali (en langue bambara), en ce mois de carême.

Interview Chérif Ousmane Madani Haïdara 1

Seid Ousmane Madani Haïdara est l’une des figures emblématiques de l’islam au Mali. Religion, gestion du pays et de la chose publique, péril extrémiste, le leader incontesté d’Ansar Dine International et Président du tout nouveau Groupement des leaders spirituels musulmans du Mali, a livré sa vision préoccupée du monde à Journal du Mali (en langue bambara), en ce mois de carême.

Ousmane Madani Haïdara : « Nous assistons à l’islamisation politique de notre pays »

Seid Ousmane Madani Haïdara est l’une des figures emblématiques de l’islam au Mali. Religion, gestion du pays et de la chose publique, péril extrémiste, le leader incontesté d’Ansar Dine International et Président du tout nouveau Groupement des leaders spirituels musulmans du Mali, a livré sa vision préoccupée du monde à Journal du Mali (en langue bambara), en plein cœur de ce mois de carême.

Vous êtes l’une des personnalités les plus populaires au Mali aujourd’hui, mais peu vous connaissent vraiment. Qui est Ousmane Madani Haïdara ?

Je suis né en 1955 à Tamani, cercle de Baraouéli, dans la région de Ségou. J’y ai commencé les études coraniques. Je n’ai fréquenté l’école occidentale que pendant une année parce qu’elle était obligatoire. Mais mon père s’est arrangé avec le directeur de l’école et on m’a envoyé à Ségou à la médersa d’Oumar Touré. À la fin de mon parcours, j’ai été prêcher d’abord en Côte d’Ivoire, avant de venir m’installer au Mali où j’ai commencé d’abord à Sofara et à Mopti. C’est en 1984 que je me suis définitivement installé à Bamako.

Comment financez-vous vos nombreuses œuvres sociales ?

Le social et la religion vont de paire. Toute personne qui aime Dieu et qui a une portion de bonheur, a le devoir de partager avec les autres. Partager le peu que vous avez afin que tout le monde soit content, c’est ce qui est le plus important, en plus du fait de prier, de faire des bénédictions, de s’adonner à la lecture du Coran. Ce n’est rien d’autre que le comportement de tous les jours d’un bon musulman. Il faut toujours partager le peu qu’on a avec son prochain. Dieu n’a pas donné la chance à tout le monde de devenir riche, alors ce que j’ai, je le partage. De nombreuses personnes participent à cet effort et m’aident à financer ce que je fais. Les riches doivent se mettre en tête que Dieu leur a donné la part de plusieurs personnes et qu’ils ont le devoir de partager avec les autres.

Vous avez créé en avril dernier le Groupement des leaders spirituels musulmans du Mali (GLSM). Parlez-nous de ses objectifs.

Le groupement n’a d’autre objectif que la promotion d’une société paisible et prospère au bénéfice de tous les musulmans. Seules l’union et l’entente entre les leaders religieux permettront à l’islam de faire face à l’obscurantisme et aux mauvaises interprétations de ses ennemis. L’islam tel que nous l’avons appris auprès de nos grands-parents, n’est pas cette religion de violence où l’on tue son prochain parce qu’il n’est pas du même avis que soi. Nous étions habitués au vivre ensemble dans la diversité religieuse et culturelle. Moi, je pense que c’est l’islam qui peut me sauver. Si l’autre pense que c’est le christianisme qui peut le sauver, il n’y a pas de problème, c’est Dieu qui va nous départager. C’est aussi simple que ça et personne n’a le droit de verser du sang au nom de la religion. Il appartient donc aux leaders de rétablir l’image de l’islam, aujourd’hui écornée par les pratiques terroristes qui ne font que détruire les valeurs qui ont fait le rayonnement de cette religion pendant des siècles. On constate aujourd’hui qu’ils sont en train d’instrumentaliser les jeunes un peu partout dans notre pays. On leur donne de l’argent, on leur tient des discours haineux. Il y a des mouvements qui reçoivent des financements pour endoctriner la jeunesse. Ils ne reculent devant rien, ils sont prêts à tout pour arriver à leurs fins. Pour lutter contre cela, nous avons été voir le Président de la République, le Premier ministre, le ministre de la Défense et cela bien avant l’arrivée de ce gouvernement. Mais jusqu’à présent, il y a des prêches qui se font dans certaines mosquées, sur certaines radios privées de la place, au point que l’on se demande s’il y a un gouvernement dans ce pays. Notre groupement depuis sa création ne fait que la promotion de la solidarité et de la cohésion entre les Maliens.

On vous accuse de vouloir supplanter le Haut Conseil islamique ?

Je suis le premier vice-président du Haut Conseil islamique (HCI), ce qui signifie que moi-même je suis du Haut conseil. Il est clair cependant, qu’il y a une différence entre le Haut conseil et le Groupement des leaders spirituels musulmans du Mali. Le Haut Conseil est une structure mise en place par le gouvernement pour être une interface entre lui et les musulmans. Donc ce n’est pas une  association musulmane et c’est ce que beaucoup ne comprennent pas. Mais Dicko (le président du HCI) et moi, on travaille main dans la main, même si parfois il y a divergence d’idées sur un certain nombre de choses. Ce qui ne signifie pas que le GLSM va supplanter le Haut Conseil. Seulement les deux entités ne font pas le même travail. Le Haut Conseil travaille pour le gouvernement alors que le GLSM mène une action citoyenne. Nous sommes un rempart contre l’extrémisme et la radicalisation des jeunes.

Justement, quelles sont vos relations avec le ministère du Culte ?

Rien ne nous oppose au ministère du Culte. On peut même dire que nous avons de bonnes relations. Le problème, ce n’est pas le ministère du Culte. C’est le gouvernement même qui est en train de croiser les bras face aux problèmes que le pays connait. Rien n’est fait aujourd’hui par le gouvernement pour lutter contre le fléau de l’extrémisme. Nous ne sommes pas contre une religion, mais il faut admettre que tout ce qui peut amener les jeunes au radicalisme doit être empêché. La création même du département a soulagé les musulmans, mais le problème est qu’il n’a pas suffisamment de poids pour interdire par exemple un prêcheur de ne pas tenir tels ou tels propos.

On vous sent plutôt critique envers le gouvernement… Que lui reprochez-vous dans la gestion actuelle du pays ?

Il serait difficile de me prononcer sur la gestion du pays qui relève de la tâche des hommes politiques. Je suis religieux, c’est la religion que je connais un peu. Mais du constat général dans le pays, nous assistons à un mélange de la politique et de l’islam. Autrement dit, nous assistons impuissants à l’islamisation politique dans notre pays, encouragée et bénie par certains leaders religieux, dans un silence effroyable. Ce qui est très dangereux. Pour notre part, nous faisons de notre mieux pour sensibiliser ceux qui nous écoutent et qu’ils ne tombent pas dans cette situation qui peut être une bombe à retardement. Partout où je prêche, je demande aux leaders religieux de se retirer du terrain politique pour plutôt jouer un rôle d’arbitre. Nous ne baissons pas les bras. À la prochaine élection présidentielle, nous ne nous laisserons plus faire car nous allons montrer que la religion a sa place dans la vie démocratique. C’est inacceptable de laisser le pays plonger dans l’abîme sans faire quelque chose. On parle de la paix mais rien ne bouge dans ce sens. Nous ne laisserons personne décider à notre place. Le Mali n’appartient pas seulement aux dirigeants. Le Mali appartient au peuple.

Vous êtes d’ailleurs particulièrement efficace quand il s’agit de vous faire entendre. On se souvient de l’épisode du Maouloud dernier. Vous aviez menacé de faire élire un imam président de la République ?

Il faut savoir replacer les mots dans leur contexte. Je pense que vous avez été témoins lors du Maouloud 2015, des difficultés auxquelles nous avons été confrontés. Imaginez : pendant que nous étions en pleine organisation de notre célébration, nous apprenions à la télé que l’état d’urgence était décrété ! Du coup, nous nous sommes sentis visés par l’État qui voulait par là interdire la fête du Maouloud, qui est une tradition. En tant que patriotes, nous nous sommes pliés à leur décision car il faut respecter les textes de son pays. Après une réunion de la commission d’organisation, nous avons accepté de faire la célébration le jour et le gouvernement a promis de nous envoyer de 200 policiers pour la sécurité. Telle ne fut pas notre surprise, le jour du Maouloud, de ne voir aucun agent de sécurité sur place. Du coup j’ai compris que l’État ne respectait pas du tout son engagement ou bien que les activités religieuses étaient prises à la légère. C’est dans ce contexte que j’ai déclaré que nous allions élire un imam qui allait s’occuper des affaires des musulmans au Mali. Sinon loin de moi l’idée de politiser la religion. Cela ne m’est jamais venu à l’esprit. Mais mon propos a été interprété de telle sorte que des ambassadeurs des pays occidentaux se sont déplacés jusque chez moi pour demander des précisions. Je les ai rassurés. Peu m’importe la religion de celui qui dirige ce pays. Qu’il soit chrétien, musulman, animiste ou même athée ! L’important, c’est qu’il aime ce pays et se batte pour que les Maliens vivent dans la paix et mangent à leur faim.

Revenons à votre lutte contre l’extrémisme. Que faut-il faire, que faites-vous contre certains prêches extrémistes ?

L’islam est une religion de paix et de tolérance. Même le prophète (PSL) a été solidaire envers les mécréants. D’ailleurs, le Coran nous enseigne que le musulman peut manifester sa solidarité envers un non croyant qui ne le gêne pas dans sa pratique religieuse. Dieu nous a créés dans nos diversités. Chacun suit son chemin. C’est pour dire que le prophète n’a jamais imposé l’islam aux gens. On parle des guerres qu’il a livrées, mais ce qu’on ne dit pas c’est que c’était pour se défendre. Il était menacé et Dieu lui-même lui a donné l’ordre de se défendre. Une fois de plus l’islam n’est pas une religion de violence comme on le montre à nos enfants. Une image qui la dessert d’ailleurs, puisqu’aujourd’hui ce sont les musulmans qui sont montrés du doigt dans le monde comme des assassins, comme des sauvages. C’est cette vérité crue que j’ai toujours transmise à mes fidèles. Malheureusement, cette vérité dérange les islamistes. Ma tête est mise à prix depuis 2013. J’ai reçu des menaces de mort par écrit et par téléphone. Il existe même une vidéo réalisée par les islamistes dans laquelle mon nom est cité et on me désigne comme une cible à abattre. Je suis aujourd’hui protégé par des gendarmes et des policiers déployés par le gouvernement. Cela ne fait que me réconforter dans ma mission d’édifier l’opinion publique sur un islam modéré. Je fais tout cela pour mon pays.

Nous sommes à la moitié du mois de carême. Cette année est particulièrement difficile à cause de la hausse des prix des produits de première nécessité. Que pensez-vous de cette situation ?

Ce mois est difficile parce que certains font en sorte qu’il le soit. Ils ont créé les conditions pour que les prix augmentent, alors que les gens souffrent. Il est vrai que le Malien est habitué à faire face à la dureté de la vie. Mais il faut le dire, c’est surtout à cause de l’État qui ne respecte pas ses propres engagements. Comment on peut comprendre que le ministre affirme à la télé que toutes les mesures ont été prises pour stabiliser le prix de viande, que les bouchers sont subventionnés pour que la viande soit accessible et que malgré cela, le prix flambe ?

Vous revendiquez plus de deux millions de fidèles au Mali, en Afrique et au-delà. Quel est votre secret?

Je n’ai aucun secret. Les gens ont besoin de la vérité, qu’ils soient religieux ou non, même s’ils ne peuvent pas la pratiquer. J’ai toujours dit que c’est Dieu qui est la vérité. Même quand on n’est pas instruit, tout le monde sait ce qui est bien ou mauvais. Dieu a donné à chacun un esprit d’analyse et de compréhension pour distinguer la vérité du mensonge. Tout ce que je peux vous dire comme secret est que les paroles que je prononce appartiennent à Dieu. Tout ce que je fais a été soutenu par Dieu.