» Monsieur le président, j’ai honte d’être officier »

Je vous écris cette lettre ouverte aujourd’hui, Monsieur le président, parce que, comme tous les soldats maliens qui ont encore une conscience, ma dignité a été violée, mon honneur amputé, ma liberté empiétée, ma fierté écorchée. Je porte aujourd’hui Monsieur le président, le fardeau de l’affront, de l’humiliation et de la honte. J’aurais souhaité vous remettre cette lettre ouverte à  mains propres, mais J’ai tenté tous les moyens sans succès. Je suis donc désolé que vous appreniez son existence par voie de presse. l’acte que je pose aujourd’hui devant le destin et l’histoire, n’est ni une incitation à  la révolte, ni un appel à  la violence. Je suis indigné et révolté. Mon pays est agressé et occupé dans ses deux tiers par des bandits armés, des barbares apatrides et autres mécréants qui, au nom d’un islam mal assimilé, sèment la terreur dans le septentrion du Mali. Le nord de mon pays est devenu aujourd’hui une ruche sur laquelle se ruent des abeilles assoiffées. Le nord de mon pays est aujourd’hui une zone de non droit o๠des exactions les plus inhumaines sont le lot quotidien des populations abandonnées, livrées à  elle-même. Ces braves et innocentes populations martyrisées, violées, séquestrées, engrangées, sont réduites au silence, réduites à  la plus petite expression de leur existence. Devant cette tragédie humaine inqualifiable, Monsieur le président, le silence m’étouffe. Lieutenant-colonel de mon Etat, officier supérieur de l’armée de la République du Mali, para commando de formation, J’ai été blessé lors de ce même conflit latent et récurrent en 1994, précisément, le 5 octobre, à  Temeira, entre Bourem et Tombouctou, à  bord du bateau » Général Soumaré » ; J’étais alors jeune Lieutenant et vous, Monsieur le président, ministre de la défense. Aujourd’hui, je refuse de capituler devant ce diktat et cet affront. Je dénonce l’inaction et l’immobilisme des uns et des autres, la peur de l’ennemi et le manque de volonté réelle de combattre cet ennemi avec les moyens disponibles. Un adage bambara dit, je cite : « quand un serpent sort de son trou pour vous mordre, vous l’écrasez avec le bâton disponible « . Les Maliens vivent aujourd’hui dans l’indignation et la crainte d’un lendemain incertain, ce lendemain déjà  hypothéqué. O๠sont donc Soundiata Kéita, Tièba Traoré, Babemba Traoré, Samory Touré, qui ont préféré la mort à  la capitulation, à  la honte ? O๠est donc ce grand et glorieux Mali dont nous étions tous fiers ? O๠est donc l’armée malienne, cette vaillante, brave et intrépide armée malienne qui faisait notre fierté ? Aujourd’hui, Monsieur le président, comme tout soldat malien qui a encore une conscience, J’ai honte. Oui J’ai honte, Monsieur le président, J’ai honte d’être officier. Oui J’ai honte. Oui aujourd’hui J’ai honte, J’ai honte Monsieur le président, J’ai honte de porter l’uniforme et de marcher dans la rue. Dans la rue, monsieur le président, J’ai l’impression de marcher sur des braises ardentes. Oui aujourd’hui J’ai honte, Monsieur le président, J’ai honte de croiser le regard des autres, ce regard qui me transperce telles des flèches empoisonnées. Oui Monsieur le président, aujourd’hui J’ai honte d’être soldat, J’ai honte de moi-même. Mais je suis fier d’être Malien, car le Malien ne baisse jamais les bras devant l’adversité, le diktat, l’affront, l’humiliation et la honte. Le Malien ne capitule jamais. Je ne vous apprends rien par cette lettre ouverte, Monsieur le président. Mais au Mali, l’histoire est en marche, rien, nul ne peut l’arrêter. l’armée malienne a été défaite ; elle est aujourd’hui la risée du monde entier, une sorte de curiosité populaire amèrement célèbre, ses soldats jetés en pâture aux ennemis du Mali. Mais le Mali reste debout Monsieur le président. Des patriotes convaincus et engagés, civils et militaires, sont prompts à  relever le défi, à  laver l’affront fait au peuple malien et à  porter le danger au C’œur de Gao, Tombouctou et Kidal. Depuis le début de ce conflit, l’armée malienne est restée dans une léthargie totale, ballotée entre la peur et le ridicule. Elle est aujourd’hui au bord de l’implosion, minée par de graves dissensions internes, de querelles intestines insensées, de conflits fratricides incompréhensibles, gangrénée par une profonde crise de confiance et de commandement. Il est certain qu’aucune armée ne peut gagner la guerre dans la division, la suspicion et l’indiscipline des hommes. Il apparait aujourd’hui indispensable que l’armée malienne se réconcilie avec elle-même dans un élan de sursaut national, afin d’aller à  la reconquête des territoires perdus, unie et solidaire. Il lui faut aujourd’hui engager le combat avec les moyens disponibles et attaquer l’ennemi sans délai et sans attendre les soldats de la CEDEAO. Ne nous berçons pas d’illusions. l’ennemi, chaque jour, consolide ses positions et renforce ses capacités de combat. Il pose, chaque jour, des actes de défiance à  l’Etat, viole, ampute, et tue, pendant que nous perdons notre temps dans des débats stériles interminables et honteux, débats qui se focalisent sur le manque de matériels et une éventuelle intervention de soldats étrangers. La communauté internationale tergiverse à  prendre une décision courageuse. Certains de nos grands voisins jouent à  l’hypocrisie, d’autres, prétendent s’en tenir au principe de la neutralité. Pendant ce temps, le Mali se consume et se meurt à  petits feux. Engageons le combat avec les moyens disponibles et attaquons. Les soldats de la CEDEAO nous trouverons sur le terrain. l’armée malienne, après sa défaite, a opéré un repli stratégique sur le terrain, certes, mais l’armée malienne a cessé le combat ; elle a rangé le matériel et attend aujourd’hui un miracle qui ne se produit toujours pas. En terme clair, opérer un repli stratégique sur le terrain après une défaite militaire ne doit jamais signifier cesser le combat. En 1940, l’armée française a été défaite, mais l’armée française n’a jamais cessé le combat. l’armée française a même su transformer cette Depuis le début de ce conflit, l’armée malienne est restée dans une léthargie totale, ballotée entre la peur et le ridicule. Elle est aujourd’hui au bord de l’implosion, minée par de graves dissensions internes, de querelles intestines insensées, de conflits fratricides incompréhensibles, gangrénée par une profonde crise de confiance et de commandement. Il est certain qu’aucune armée ne peut gagner la guerre dans la division, la suspicion et l’indiscipline des hommes. Il apparait aujourd’hui indispensable que l’armée malienne se réconcilie avec elle-même dans un élan de sursaut national, afin d’aller à  la reconquête des territoires perdus, unie et solidaire. Il lui faut aujourd’hui engager le combat avec les moyens disponibles et attaquer l’ennemi sans délai et sans attendre les soldats de la CEDEAO défaite militaire en un véritable sursaut national et populaire, aidée en cela par des partisans, poursuivant résolument et invariablement son idéal de liberté, de fraternité, d’égalité et de justice dans une France libre et réunifiée. Le peuple français a soutenu l’armée française, parce que l’armée française n’a pas trahi le peuple français. Et nous ? Qu’avons-nous offert à  notre peuple ? Nous lui avons offert un spectacle d’indignation, de désolation et de désespoir, dans une ambiance folklorique frisant souvent le ridicule, dont les pas de danse riment avec les larmes des désespérés. Nous avons trahi le peuple malien, nous avons trahi la confiance du peuple malien et nous lui avons asséné le coup de massue. Il faut aimer son pays pour accepter de mourir pour son pays. Il faut, Monsieur le président, aimer le Mali pour accepter de mourir pour le Mali. Depuis le début de ce conflit, Monsieur le président, aucun acte concret n’a été posé pour reprendre l’initiative du combat. La prise de la localité de Douentza devrait servir de tremplin à  l’armée malienne pour engager le combat avec les moyens disponibles. Elle aurait pu ainsi redonner l’espoir au peuple malien, car le peuple malien attendait cela. Mais le peuple malien a été lamentablement déçu, il a vécu cette journée dans l’indignation, l’humiliation et la honte.« Si vous dansez avec aveugle, il faut de temps à  autre, lui donner de petits coups de pied, pour lui signifier votre présence, afin qu’il sache que vous êtes toujours là  et bien là  » a-t-on coutume de dire. Monsieur le président, parler de la venue ou non des soldats de la CEDEAO, spéculer sur nos matériels militaires bloqués aux ports de Conakry, Dakar, ou de je ne sais oà¹, ne nous avancent à  rien. Engageons le combat et attaquons avec les moyens disponibles. On ne peut pas travailler au four et avoir peur de la chaleur. Monsieur le président, l’histoire militaire de l’humanité est jalonnée de hauts faits qui prouvent à  suffisance que ce n’est pas le matériel qui est l’élément déterminant d’une victoire militaire sur le terrain. Ce n’est pas le matériel qui fait la guerre, mais l’homme. C’’est l’homme qui fait la guerre avec son courage, sa bravoure, sa détermination, animé par l’idéal pour lequel il se bat. Pour illustrer cela, Monsieur le président, je citerais seulement deux exemples éloquents : 1- Les soldats français ont été défaits à  Dien-Bien-Phu, alors que l’armée française disposait des armes sophistiquées et modernes. Dien-Bien-Phu est resté dans la mémoire collective comme la victoire du plus faible sur le plus fort. 2- l’armée américaine, l’armée la plus puissante du monde, a été mise en déroute au Vietnam. l’utilisation des armes ultra modernes, les plus redoutables, souvent non conventionnelles, n’a pas entamé le moral et la détermination du peuple Vietnamien à  se défaire de l’impérialisme américain. Le matériel militaire le plus sophistiqué, le plus redoutable, reste un tas de ferraille, si l’homme qui l’utilise a peur ou ne croit plus à  l’idéal qu’il défend. Un Général français, lors de la deuxième guerre mondiale a dit, je cite : » une armée perd la guerre quand le Caporal mouille sa culotte « . Monsieur le président, nous avons eu peur de l’ennemi, nous avons encore et toujours peur de l’ennemi. Voilà  l’amère et triste vérité. La guerre est un art. Le chef militaire qui se trouve sur le terrain est un artiste. Quatre qualités essentielles lui sont indispensables pour lui permettre de tenir toute sa place au sein de sa troupe et commander. Il s’agit entre autres : 1- De l’esprit de sacrifice ; 2- Du courage ; 3- De la bravoure ; 4- Du caractère. Il lui faut impérativement concilier ces quatre qualités pour réussir sa mission. Monsieur le président, la guerre n’a d’autre solution que la guerre. Celle-ci nous a été imposée, tramée de l’extérieur, orchestrée et manipulée par des intelligences non avouées, une agression barbare et inhumaine. Mais o๠sont donc les Généraux, Monsieur le président ? O๠sont donc les officiers ? Nous avons tous déserté, tous disparu sur la pointe des pieds et à  présent nous sommes confinés au fond des chambres, tremblotant au moindre bruit de botte à  la porte, la peur au ventre. Tous les officiers, Monsieur le président, devraient passer cette année devant une cour martiale, pour haute trahison, désertion en temps de guerre et abandon de matériels sur le terrain. Mais le peuple malien ne nous a fait aucun procès, parce que le peuple malien est un peuple indulgent, parce que le peuple malien est un grand peuple. C’’est une honte pour nous cette année d’attribuer des grades et de s’entredéchirer pour des promotions, pendant que le reste du peuple croupit au bas de l’échelle. Mais comme le dit Mao, ancien président chinois : » le ridicule ne tue pas l’homme dépourvu de dignité « . Le grade se mérite, il ne se décrète pas. Qu’avons-nous fait cette année pour le mériter ? Nous avons déserté le front, nous avons fui le combat, nous avons fui devant l’ennemi, abandonnant tout le matériel sur le terrain. Toute promotion en grade cette année, au sein des forces armées et de sécurité, est une insulte à  la conscience du peuple malien. Je n’engage aucun bras de fer avec l’armée qui reste ma famille et mon point d’attache. Je dis les choses telles qu’elles sont. Je mesure toute la portée de mon acte, en tant que soldat, J’en assume l’entière et pleine responsabilité. Ce pays m’a tout donné, en retour je lui dois tout. Et pour le soldat que je suis, ce pays, mon pays est au dessus de toute autre considération. Pour le Mali, nul sacrifice n’est vain. Si je ne peux continuer à  vivre dans l’humiliation et la honte, la mort sera alors pour moi une véritable délivrance. Je suis un soldat, Monsieur le président, tenu par le devoir de réserve, censé obéir aux ordres de ma hiérarchie. Mais voyez-vous, Monsieur le président, je suis d’abord au service et aux ordres de mon peuple avant d’être au service et aux ordres de l’armée. Il faut souvent choisir la désobéissance là  o๠l’obéissance est déshonorante. Dès la diffusion de cette lettre ouverte, on m’enverra sûrement une horde de soldats pour me faire regretter mon acte. Mais les commanditaires d’une telle décision se trompent, car je vis pour un idéal, celui de servir mon pays, en tout temps, en tout lieu, en toute circonstance, sans condition aucune, au prix de ma vie s’il le faut. Aucune force au monde ne peut m’enlever cet idéal. Je suis prêt à  mourir pour le Mali, dans une civière, s’il le faut, pour débarrasser définitivement et complètement mon pays de cette vermine. Donnez-moi Monsieur le président, un char, un B.T.R, un B.R.D.M.2 et un commando de 90 hommes équipés en grenades, lance-roquettes et fusils d’assaut ; donnez-moi ces moyens, Monsieur le président, et je vous donnerai 24 heures pour libérer Douentza et marcher sur Gao. Je jure sur ma lignée peuhle et sur mon honneur de soldat qu’il en sera ainsi, ou l’ennemi marchera sur mon corps. Je mets au défi tout juriste, si éminent soit-il, si émérite soit-il, de condamner mon acte. l’ennemi est-il celui qui prend les armes contre son propre pays, ou celui qui le défend au prix de sa vie ? J’invite tous les patriotes maliens, civils et militaires, convaincus et engagés, à  observer une journée de jeun le lundi 5 novembre 2012 par solidarité avec nos compatriotes du nord, pour partager une journée de souffrance et de douleur avec eux. Pour ma part, J’ai décidé, à  compter de lundi 29 octobre 2012, d’entamer une grève de la faim illimitée: soit l’armée se décide d’engager le combat et d’attaquer avec les moyens disponibles, sans délai et sans attendre les soldats de la CEDEAO, soit on me donne les moyens d’engager le combat tout seul et d’attaquer l’ennemi, ou je meurs sur mon lit. Ces bandits armés ne sont pas invincibles, ils ne sont pas immortels. Ces bandits armés ne sont pas des diables, ce sont des êtres humains comme nous. Pourquoi avoir peur d’eux alors ? Pourquoi avoir peur de les affronter avec les moyens disponibles ? En tout cas, moi, Seydou Moussa Diallo, lieutenant-colonel de mon état, officier supérieur de l’armée de la république du Mali, je dis non au diktat. Je refuse tout compromis tant que ces bandits armés occuperont encore un centimètre du territoire de mon pays. La guerre d’abord, la négociation ensuite. Le bateau-Mali a tangué, mais le bateau-Mali n’a pas chaviré, le bateau-Mali ne va jamais chavirer. Seuls les stupides et les imbéciles osent s’en prendre au Mali. Nous n’échangerons rien contre notre liberté, notre dignité, notre honneur et notre patrie. l’intégrité territoriale de notre pays n’est pas négociable. Nous ne capitulerons jamais. Nous sommes jaloux de notre souveraineté et fiers d’être Maliens. Il faut aimer son pays pour accepter de mourir pour son pays ; il faut aimer le Mali, pour accepter de mourir pour le Mali. Engageons le combat et attaquons l’ennemi avec les moyens disponibles. Les soldats de la CEDEAO nous trouveront sur le terrain. Pour la gloire et la grandeur du Mali, nous vaincrons

Francophonie : la jeunesse africaine écrit à François Hollande

Excellence Monsieur le président François Hollande, Au moment o๠vous vous apprêtez, en tant que président de la république française, à  effectuer votre premier voyage en terre africaine à  l’occasion du sommet de la Francophonie, nous, Jeunesse africaine, venons auprès votre Bienveillance porter un certain nombre de faits auxquels nous faisons face depuis plus de 50 ans, et sollicitons une action décisive de votre part lors de ce sommet qui se tiendra du 12 au 14 octobre 2012 à  Kinshasa au Congo. La Jeunesse africaine vient vers vous parce que ce voyage s’effectuera dans un contexte particulier. En effet, au Togo, les milliers de morts de 2005 n’ont pas toujours empêché à  ce jour l’à‰tat de mater dans le sang le soulèvement populaire, et ce malgré l’entrée historique en scène des femmes togolaises (30 août 2012) décidées de marcher nues pour maudire la tyrannie. Au Gabon, le régime a récemment réprimé dans la violence les manifestants pacifiques qui rejettent toujours le verdict des urnes des dernières présidentielles. Au Congo Brazzaville, le peuple a depuis longtemps été littéralement réduit au silence. De l’autre côté du fleuve, au Congo Kinshasa, les élections truquées ont cédé la place à  la violation des droits de l’homme et à  la naissance de la rébellion du M23 qui poursuit une guerre ayant déjà  fait plusieurs millions de morts. En Guinée comme au Cameroun, au Burkina Faso comme au Tchad, la violence policière et militaire et les manipulations des codes électoraux en vue d’assurer l’éternité politique aux chefs d’à‰tats sont devenues le mode de gouvernance qui fait de l’espace francophone africain la pire et la dernière des quatre aires linguistiques du continent (arabophone, lusophone, anglophone et francophone). De l’Afrique centrale à  l’Afrique de l’ouest francophones, quand ce ne sont pas ces événements qui font l’actualité, ce sont les caisses publiques qui sont vidées par les gouvernants dont bon nombre passent la moité de l’année dans les paradis fiscaux, laissant nos pays dans une situation de pauvreté extrême et de tension explosive. Comment ne pas s’étonner que, dans ce contexte, la Francophonie tienne son sommet de 2012 à  Kinshasa au Congo? Que ce sommet n’ait pas été déplacé dans un autre pays ayant présenté des garanties minimales de bonne gouvernance, comme au Niger par exemple, n’a pas comblé les attentes de la Jeunesse Africaine. Pour cette raison, on peut comprendre les critiques émises par les organisations de défense des droits de l’homme tant au Congo Kinshasa, dans le reste de l’Afrique qu’en France, critiques qui sont autant d’appels à  l’annulation de votre voyage au Congo, le gouvernement en place n’ayant pas toujours donné des garanties de bonne gouvernance, de justice et de démocratie. Cependant, un regard en profondeur permet de réaliser que votre présence à  ce sommet était inévitable, que votre Excellence l’ait voulu ou non, puisque la charte de l’Organisation stipule en son article 1 (2) que la Francophonie «respecte la souveraineté des à‰tats, leurs langues et leurs cultures et observe la plus stricte neutralité dans les questions de politique intérieure.» Aux yeux de la jeunesse africaine, cet article est la clé de la compréhension de tout, puisqu’il rend possible les rencontres chaleureuses, respectueuses et dénuées de critique entre les démocraties et les dictatures, heurte les promesses les plus fortes et affaiblissent de manière alarmante les exigences en matière de justice et de démocratie. Excellence Monsieur le président François Hollande, Lorsque nous nous rappelons que le jour o๠nous sommes sortis en masse pour vous élire, vous aviez fait la promesse «que le 06 mai 2012 sera une bonne nouvelle pour les démocraties et une terrible nouvelle pour les dictatures», nous pensons que l’heure de la tenue de cette promesse est arrivée, et qu’elle commence par un amendement des statuts de la charte de cette organisation. Au fait, comment la Francophonie peut-elle «observer la plus stricte neutralité dans les questions de politique intérieure» des pays dictatoriaux et y réussir l’objectif d’aide «à  l’instauration et au développement de la démocratie» comme le recommande l’article 1 (1) ? Un soutien à  l’instauration de la démocratie ne peut se faire dans un contexte de dictature que si l’on cesse d’être neutre. Aussi, trouvons-nous, jeunesse africaine, dans la relation entre l’article 1 (1) et l’article 1 (2) une opposition fondamentale qui fait la faiblesse de l’institution francophone et constitue en même temps le motif valable pour lequel nous en appelons à  votre fermeté dans la réalisation de votre promesse. Ainsi, rendu à  Kinshasa, nous vous saurions gré de bien vouloir lever cette contradiction statutaire et de procéder aux amendements règlementaires. N’avez-vous pas vous même réaffirmé le 27 août 2012, reprenant l’article 1 (1) de la charte, que «la Francophonie, ce n’est pas simplement une langue en partage mais aussi une communauté de principes et d’idéaux»? De ce fait, nous attendons de ce sommet de Kinshasa que vous pesiez, de tout le poids de la France des libertés, sur les orientations de la conférence ministérielle, instance décisionnaire, afin de modifier et de compléter l’article 1 (2) de la charte comme suit : «La Francophonie respecte la souveraineté des à‰tats, leurs langues et leurs cultures. Elle observe la plus stricte neutralité dans les questions de politique intérieure dans la mesure o๠les pays membres poursuivent sans faille et rendent concrets les objectifs de démocratie et d’à‰tat de droit contenus dans l’article 1 (1) de la présente charte». La Jeunesse africaine aimerait aussi obtenir à  ce sommet une clarification, sinon une modification de l’article 9 (3) de la charte qui stipule que «l’Organisation Internationale de la Francophonie peut contracter, acquérir, aliéner tous biens mobiliers et immobiliers, ester en justice ainsi que recevoir des dons, legs et subventions des gouvernements, des institutions publiques ou privées, ou des particuliers.» Il nous semble qu’il s’agit là  de l’article à  l’origine de toutes les manipulations, de tous les jeux de passe-passe qui font de la Francophonie la face visible de la Françafrique. Excellence Monsieur le président François Hollande, l’opinion a beau penser que le destin de l’Afrique francophone était entre les mains de sa jeunesse. Nous le voulons bien, mais la réalité est que le sommet qui se tiendra à  Kinshasa sera l’occasion pour les chefs d’à‰tats d’Afrique centrale et de l’Ouest de vouloir modifier la direction de ce destin en notre défaveur. Et s’il advenait que ce sommet accouche d’une nouvelle souris, C’’en sera une de trop. De plus, si Kinshasa ne devient pas le point de départ d’une Afrique nouvelle et de relations justes entre la France et les pays africains, nous le regretterons amèrement. Voilà  pourquoi nous vous sollicitons désormais comme allié, car le 27 août 2012, vous aviez, lors de l’annonce de votre premier voyage en terre africaine, affirmé vouloir «tout dire partout et faire en sorte que ce qui soit dit soit fait». Ainsi, peut-être Kinshasa marquera-t-il le tournant de notre histoire; et peut-être notre rêve de voir tomber plusieurs dictatures d’ici la fin de votre premier mandat, en commençant par les plus anciennes et les plus cruelles, se transformera-t-il en réalité. Faites qu’il en soit ainsi, Monsieur le président, pour la grandeur de la Francophonie.Si rien n’est fait à  Kinshasa, les textes fondateurs de cette institution tomberont en désuétude à  mesure que l’Afrique francophone régressera sous le poids de ses régimes totalitaires. Et la conséquence ne sera rien d’autre que la percée d’une chinophilie déjà  redoutable, l’image de la France en Afrique francophone n’étant pas séduisante à  nos jours. Quand on sait que C’’est l’Afrique qui donna pourtant à  la Francophonie le plus grand contingent de pays membres, et que dans 40 ans, C’’est elle qui comprendra 80 % de Francophones du monde, on se demande comment, dans un monde dominé par l’économie, la France en est arrivée à  ne pas pouvoir y créer un grand marché de consommation de produits de la civilisation francophone. La volonté de la Chine de corriger cette erreur historique en créant en Afrique son plus grand marché de consommateurs devient compréhensible. Si la fin des dictatures n’est pas proclamée à  Kinshasa, les sommets Chine-Afrique, initiés depuis quelques années, aboutiront certainement à  la création de «l’Organisation Internationale de la Chinophonie». Seule, l’instauration des systèmes démocratiques fiables sera le gage d’une Francophonie partagée partout en Afrique, parce que renovée, modernisée et rendue compétitive face à  une Chinafrique déjà  présente et frileuse, elle aussi, des dictatures. Ce sera le signe fort de votre engagement à  faire bouger les lignes dans la perspective de la tenue de votre promesse du 06 mai 2012. Nous vous prions de croire, Excellence Monsieur le président François Hollande, en la sincérité de nos propos et en l’expression de notre haute considération.

La lettre d’Alioune Ifra Ndiaye au capitaine Sanogo

Bonjour mon capitaine, Je me permets de vous adresser cette lettre ouverte parce que je vois que mon pays s’enfonce dans l’aventure et que je ne peux pas me taire. Mon capitaine, vous avez pris le pouvoir parce que vous étiez mécontent, comme beaucoup, mais surtout parce que vous aviez des armes. Ce qui est d’ailleurs le cas des rebelles du Nord. Ils étaient mécontents et ils ont des armes. Ils les ont retournées contre leur pays. Aujourd’hui, leur mécontentement est devenu une revendication politique : la partition du Mali. Mon capitaine, votre mécontentement est malheureusement en train de changer de nature. Il provoque une confusion politique qui coupe le Mali du reste du monde. Mon capitaine, J’observe que, pro ou anti coup d’Etat, tout le monde est unanime pour dire que vous n’êtes pas une mauvaise personne. Mais ça ne donne ni la légitimité, ni les connaissances qui permettent, au XXIe siècle, de diriger le pays. Mon capitaine, la plupart des gens qu’on entend très fort, qu’ils soient pro ou anti coup d’Etat, ne cherchent qu’une chose : attirer votre attention et se positionner pour le « partage du gâteau ». Il ya quelques mois, beaucoup d’entre eux qualifiaient ATT de messie. Certains lui ont même proposé un troisième mandat. D’autres sont mécontents, parce qu’on leur a pris leur strapontin. C’est malheureusement une réalité de notre pays, une réalité que nous vivons tous, que vous vivez comme nous. Et quand les événements tourneront mal – il y a toujours un moment o๠ça tourne mal – ces mêmes personnes qui aujourd’hui vous encensent diront : « On l’avait bien dit, il n’écoute pas les gens ». Mon capitaine, je ne crois pas qu’un seul Malien soit fier de ce qui se passe aujourd’hui. Mais nous sommes tous responsables de la situation. ATT, vous, le citoyen lambda, moi…. J’imagine la pression sociale que vous devez subir. « C’’est notre tour maintenant » vous diront la famille, les amis, les anciens proches et les nouveaux proches, tous les opportunistes que toujours le pouvoir attire. Ces sentiments destructeurs ont déjà  dérouté du droit chemin des milliers de cadres compétents. Les liens familiaux et les passe-droits priment sur la compétence. La société elle-même n’a pas pris la mesure du chantier. La preuve. Nous tolérons la corruption quand elle est le fait d’un parent qui nous en fait profiter. Beaucoup d’associations et de partis politiques vous soutiennent aujourd’hui espérant tirer de ce soutien un maroquin, un strapontin, un avantage. l’impasse dans laquelle la situation nous met, les dangers qu’elle fait courir à  la patrie, à  nous tous, à  vous même, C’’est le dernier de leur souci. Mon capitaine, des centaines de milliers de personnes comme moi n’ont pas besoin d’être ministres, députés, directeurs généraux, conseillers municipaux, ect… Nous savons travailler. Nous nous sommes assumés en créant les moyens de notre activité, des associations, des ateliers, des exploitations agricoles, des PME, des PMI. Nous sommes le C’œur du dynamisme du Mali d’aujourd’hui. Nous sommes la vraie société civile. Nous appartenons à  des familles politiques différentes ou même à  aucune. Aux élections prochaines, nous ne voterons pas pour les mêmes candidats. Nous sommes souvent maltraités par le système. Mais nous n’avons pas souhaité le coup d’Etat. Nous voulons un Mali stable avec des repères intouchables quel que soit le problème. Le Sénégal vient de nous donner une leçon qu’aujourd’hui nous méditons tous dans la tristesse et l’angoisse du lendemain. Mon capitaine, imaginez un homme qui change constamment de nom de famille. Pensez-vous que ses voisins lui feront confiance ? Sa propre famille lui fera-t-elle confiance ? Un ami me disait hier, « l’eau versée ne peut être ramassée ». C’’est vrai. Mais nous pouvons sortir de cette impasse par le haut. Et la CEDEAO nous tend une perche. Elle n’est pas géniale comme solution, mais elle nous permettra de sortir rapidement de cette impasse. Vous. Nous. Le pays. Beaucoup de citoyens maliens de ma génération ou plus jeunes sont décidés à  tout faire pour que le laisser-aller, la corruption, les injustices, le mépris de l’intérêt général n’aient plus droit de cité dans notre patrie. Là  est la vraie force des idées que vous affirmez vouloir mettre en œuvre, pas dans la peur, ni dans les fusils. Alioune Ifra Ndiaye Opérateur culturel