Pâques 2013: la paix « urbi et orbi »

Le pape François, qui prononçait dimanche sa première bénédiction solennelle «Urbi et orbi» place saint-Pierre, a lancé un appel à  la paix dans le monde et souhaité une solution diplomatique aux vives tensions dans la péninsule coréenne. «Paix en Asie, surtout dans la péninsule coréenne, pour que soient surmontées les divergences et que mûrisse un esprit renouvelé de réconciliation», a déclaré à  l’occasion de Pâques le pape argentin, élu le 13 mars à  la succession de Benoà®t XVI. La Corée du Nord a multiplié les annonces bellicistes ces dernières semaines, dénonçant l’accord d’armistice conclu avec les Etats-Unis dans la péninsule en 1953, menaçant de lancer une attaque nucléaire préventive et se déclarant en état de «guerre» avec la Corée du Sud. Du balcon dominant la place, o๠se pressaient selon le Vatican au moins 250.000 personnes, l’ancien cardinal Jorge Bergoglio a également appelé à  la paix entre Israéliens et Palestiniens, à  l’arrêt de la guerre civile en Syrie et à  des solutions politiques aux conflits en cours dans plusieurs pays d’Afrique comme le Mali et la Centrafrique. «Paix pour le Moyen-Orient, en particulier entre Israéliens et Palestiniens, qui travaillent à  trouver la route de la concorde, afin qu’ils reprennent avec courage et disponibilité les négociations pour mettre fin à  un conflit qui dure désormais depuis trop de temps», a dit le pape. La paix et la protection de l’environnement «Paix en Irak, pour que cesse définitivement toute violence, et, surtout, pour la Syrie bien-aimée, pour sa population blessée par le conflit et pour les nombreux réfugiés qui attendent aide et consolation». «Paix pour l’Afrique, encore théâtre de conflits sanglants. Au Mali, afin qu’il retrouve unité et stabilité; et au Nigeria, o๠malheureusement ne cessent pas les attentats qui menacent la vie de tant d’innocents et o๠de nombreuses personnes, même des enfants, sont retenues en otage par des groupes terroristes.» «Paix dans l’est de la République Démocratique du Congo et en République Centrafricaine, o๠nombreux sont ceux qui sont contraints à  laisser leurs maisons et vivent encore dans la peur», a continué le souverain pontife. Le pape François, qui a fait de la défense de l’environnement l’une des marques de fabrique de son pontificat, s’est également élevé contre «l’exploitation inéquitable des ressources naturelles» et a appelé les fidèles à  être «des gardiens responsables de la Création». Le pape, qui a choisi son nom d’après saint François d’Assise, lequel symbolise une vie frugale, s’est élevé contre les «gains faciles». «Paix au monde entier, encore si divisé par l’avidité de ceux qui cherchent des gains faciles, blessé par l’égoà¯sme qui menace la vie humaine et la famille, égoà¯sme qui continue la traite de personnes, l’esclavage le plus répandu en ce vingt et unième siècle».

Pape François, symbole fort pour l’Eglise et le monde

Une fois la surprise passée, le monde entier s’interroge et s’intéresse de près au nouveau Souverain Pontife. Les 115 cardinaux ont en effet porté à  la tête de l’à‰glise catholique, il y a de cela 24 heures, un quasi inconnu. Cardinal Jorge Mario Bergoglio, prête jésuite devenu archevêque de Buenos Aires, la capitale argentine, ami des pauvres et défenseur des valeurs de l’à‰glise, est devenu François, premier Pape sud-américain de l’Histoire. C’est un choix éminemment symbolique qu’ont fait ceux qui ont entre les mains la destinée des catholiques, environ un milliard d’individus sur la planète. Un Pape qui vit comme Jésus D’abord symbole pour l’à‰glise. François a donné le ton lors de sa toute première apparition, juste après son élection, il est le Pape de la simplicité, de l’humilité. Il est en effet venu saluer saluer la foule qui attendait sur la place St-Pierre sans la tenue pontificale rouge, mais en habit blanc. Il a tenu son premier discours en romain, et non en italien ou en latin, car archevêque de Rome, pour que tous comprennent son message. Puis il est resté égal à  lui-même, en s’exprimant simplement, avec une pointe d’humour. Car, Jorge Mario Bergoglio est avant un homme proche des pauvres, à  l’image de Jésus. Membre de la communauté des jésuites, des religieux qui vivent comme le Christ, au service des pauvres, il s’est investi pour améliorer le quotidien des populations les plus marginales de son pays, das les prisons et auprès des malades et des toxicomanes. La lutte contre la pauvreté sera donc un de ses principaux chevaux de bataille. Mais il est aussi, un « puriste » de la religion catholique. Dans sa toute première messe célébrée ce jeudi dans la chapelle Sixtine en compagnie de ses pairs cardinaux, il a demandé aux chrétiens de construire ensemble une à‰glise plus forte, plus ancrée sur les valeurs du Christ. Le respect de la vie, de la famille, seront certainement au C’œur de son ministère. Les catholiques du monde entier comptent en tout cas sur lui pour leur redonner un nouveau souffle. Un instrument de paix dans le monde La prière la plus célèbre du saint dont le nouveau Pape porte le nom, St François d’Assises, commence par ces mots: « Seigneur, fais de moi un instrument de paix ». Au regard de l’engagement de l’homme pour le rapprochement entre les peuples et le dialogue entre les religions, on comprend mieux pourquoi il a choisi de se nommer ainsi. Il est en effet l’un des initiateurs du dialogue islamo-chrétien engagé pendant l’ère de feu Jean-Paul II. Depuis l’à‰glise catholique, même si elle commet des erreurs de parcours, ne cesse de tenter de maintenir les ponts, avec le monde musulman. L’élection du cardinal Bergoglio est donc un signal fort pour le dialogue entre les religions, mis à  mal sous le pontificat de Benoit XIV. Tous attendent maintenant son homélie du dimanche prochain lors de sa première messe sur la place St Pierre. Selon la tradition, c’est une espèce de déclaration de politique générale,qui permet d’indiquer les axes de l’action du pontificat. Mais une chose est sure, l’à‰glise comme le monde voient dans l’avènement de François, le symbole d’une page qui se tourne et surtout d’un espoir en un avenir meilleur.

Bergoglio, la simplicité faite pape

Il a déjoué tous les pronostics. Et même ceux qui le portaient haut dans leur C’œur n’osaient pas croire son élection possible. Jorge Maria Bergoglio, après cinq scrutins seulement, a pourtant été élu pape, 266e successeur de Pierre. Le premier non-Européen depuis douze siècles. Le premier pour les Amériques. Le premier pour l’Argentine. Le premier à  se nommer François. Et aussi, le premier jésuite. Autant de symboles qui font d’ores et déjà  de lui un pape hors normes. En 2005, challenger de Ratzinger A l’annonce de son nom par le proto-diacre Jean-Louis Tauran, la foule massée au pied de Saint Pierre est d’abord restée stupéfaite, observant quelques secondes de silence confus. Peu connu en effet du grand public, l’archevêque de Buenos Aires et primat d’Argentine est néanmoins une figure très aimée du monde catholique, en Amérique latine et jusque parmi le petit personnel de la Curie qui a toujours apprécié sa bienveillante humilité. « C’’est un saint », décrivaient même certains avec ferveur. Un homme discret pour le moins, qui n’a jusqu’alors accordé qu’une seule interview dans toute son existence. Un spirituel au sens fort du terme, devenu une autorité morale quasi-incontestée, plutôt épargnée par les accusations de passivité qui pèsent en général sur la hiérarchie de l’Eglise argentine face à  la dernière dictature militaire (1976-1983). Un ascète encore, qui se lève à  4h30 du matin pour commencer ces journées par une attentive lecture de la presse. C’’est d’ailleurs sa capacité d’écoute et son attention au monde qui le caractérise. « Il écoute deux fois plus qu’il ne parle et perçoit bien plus que ce qu’il écoute », confiait un proche au journal « La Croix » en 2005. Son élection a d’autant plus sidéré que le cardinal Bergoglio, en 2005, aurait été un adversaire de taille face à  Joseph Ratzinger, la légende lui attribuant 40 voix au premier tour des votes. Mais il aurait alors fait entendre qu’il ne voulait pas être élu et se serait éclipsé devant le futur Benoà®t XVI. C’’est d’ailleurs au souverain pontife émérite que son premier appel téléphonique est allé juste après son élection, et à  lui qu’il a adressé ses premières prières depuis le balcon de Saint Pierre. Déjà  âgé de 76 ans, ce qui en fait le huitième pape plus âgé de l’histoire, et de santé fragile – une partie de son poumon droit lui ayant été retiré à  l’âge de 20 ans – il est de fait voué à  un pontificat de transition. Un point commun qu’il partage ainsi avec Jean XXIII, celui qu’on surnommait le « bon pape » et qui de façon inattendue a bouleversé l’Eglise en ouvrant le Concile Vatican II. Sera-t-il de cette trempe-là  ? C’’est en tout cas l’espoir de tous ceux qui souhaitent une réforme en profondeur des instances vaticanes. Extrême simplicité Son extrême simplicité a sans doute été déterminante dans le choix des cardinaux électeurs, qui ont longuement discuté durant les réunions pré-conclave des problèmes internes de la Curie et de tous ces « péchés qui défigurent l’Eglise », selon les mots de Benoà®t XVI. En apparaissant tout en blanc sur le balcon, sans la traditionnelle mozzetta, cette cape rouge et courte typique des pontifes, il a déjà  envoyé un signal fort de sobriété. Quand il a demandé au peuple, surtout, de le bénir et de prier pour lui avant qu’il ne donne lui-même la traditionnelle bénédiction ubi et orbi, ce « conservateur modéré » a révolutionné la geste papale. C’’est un souffle très conciliaire, dans l’esprit de Vatican II, qui a donc fait s’envoler la mouette qui avait élu domicile sur la cheminée de la Sixtine peu avant que n’apparaisse la fumée blanche. En se définissant lui-même avant tout comme l’évêque de Rome, le premier d’une assemblée de pairs, il a tenu à  marquer son attachement au principe de collégialité. Le choix original de son nom, François, en référence à  saint François d’Assise, montre aussi son souci des plus pauvres, dont il se fait depuis toujours le défenseur acharné. La pauvreté, a-t-il du reste affirmé en 2009, est pour lui « une violation des droits de l’homme ». « l’incorruptible » dont l’Eglise catholique a besoin ? Né le 17 décembre 1936 à  Buenos Aires, Bergoglio est lui-même un fils d’immigrants italiens modestes venus du Piémont, dont le père était employé de chemins de fer. à‰duqué à  l’école publique, il suit des études pour devenir technicien en chimie, avant de se destiner à  la prêtrise. A 22 ans, il intègre la Compagnie de Jésus, o๠il obtient une licence de philosophie. Passé ensuite par l’enseignement privé, il étudie la théologie, puis est ordonné prêtre en 1969. Il a seulement 36 ans lorsqu’il est élu provincial (responsable national) des jésuites argentins. Six années difficiles durant lesquelles il se bat pour conserver l’unité du mouvement taraudé par la théologie de la libération. Il souhaite alors à  tout prix éviter la politisation de la Compagnie. Il n’a d’ailleurs jamais mâché ses mots envers les politiques et la gangrène de la corruption. Il pourrait en quelque sorte incarner la figure de « l’incorruptible » dont avait urgemment besoin une Eglise catholique en crise. Quand, après avoir été nommé par Jean-Paul II évêque auxiliaire de Buenos Aires en 1992, il succède au cardinal Antonio Quarracino et devient archevêque, il délaisse ainsi la fastueuse résidence de ses prédécesseurs pour vivre seul dans un petit appartement près de la cathédrale et préfère le bus et le métro aux voitures avec chauffeur. Créé cardinal en 2001, il garde encore son éternel pardessus noir plutôt que d’arborer l’habit pourpre. A peine fait-il retailler la soutane de son prédécesseur pour ses venues à  Rome… Resté proche de ses prêtres, auxquels il avait dédié une ligne téléphonique directe, il n’avait pas hésité non plus, en 2009, à  venir habiter dans un bidonville chez l’un de ses curés menacé de mort par des narcotrafiquants. Peu d’espoir d’une évolution réelle de la doctrine de l’Eglise En se plaçant sous le patronage de Saint-François d’Assises, premier personnage occidental à  être allé à  la rencontre d’un sultan, dans le contexte des guerres de religion, le nouveau pontife pourrait aussi se montrer désireux de faire progresser le dialogue avec l’islam. Un des défis majeurs pour la chrétienté. Ses positions vigoureusement hostiles à  la légalisation du mariage homosexuel en Argentine et à  l’inscription des transsexuels à  l’état civil laissent en revanche peu d’espoir aux partisans d’une évolution réelle de la doctrine de l’Eglise, notamment en matière de sexualité et de morale. La critique qu’il a adressée en septembre 2012 aux prêtres qui refusent de baptiser les enfants nés hors mariage, les qualifiant d' »hypocrites », révèle chez lui une relative mesure et une préoccupation pour le monde actuel. Grand lecteur de Dostoà¯evski, qui croyait dans les forces de l’amour pour refonder l’humanité et dénonçait un catholicisme cédant aux sirènes du pouvoir temporel, Bergoglio partage avec l’écrivain russe la volonté de revenir au message de l’Evangile. Dans son « Journal », Dostoà¯evski rêvait ainsi de voir le pape sortir devant le peuple « à  pied et pieds nus ». Le voilà  presque exaucé. Marie Lemonnier, à  Rome – Le Nouvel Observateur

Les cardinaux africains susceptibles de succéder à Benoît XVI

Le pape Benoit XVI a annoncé, le 11 février, sa démission de la tête de l’Eglise catholique romaine. Celle-ci sera effective le 28 février prochain. Dès les heures qui ont suivi, les rumeurs sur les cardinaux favoris à  sa succession ont commencé à  circuler. Notamment chez les bookmakers, qui ont fait des Africains et des Italiens leurs favoris à  la victoire finale. Les regards se tournent vers l’Afrique, qui n’a pas compté de pape depuis 496. Il y a aujourd’hui dix-huit cardinaux —fonction sine qua non pour devenir pape— en Afrique, mais seulement onze ont moins de quatre-vingt ans, condition requise pour voter au concile lors de l’élection du ministère d’évêque de Rome. Il n’y a, en revanche, pas de limite d’âge pour être élu. Le club des dix-huit Voici la liste des dix-huit cardinaux africains éligibles: —Wilfrid Fox Napier, archevêque de Durban (Afrique du Sud) —Peter Kodwo Appiah Turkson, cardinal-prête de San Liborio (Ghana) —Robert Sarah, cardinal-diacre de San Giovanni (Guinée) —Polycarp Pengo, archevêque de Dar es-Salaam (Tanzanie) -John Oneiyekan, archevêque d’Abuja (Nigeria) -John Njue, archevêque de Nairobi (Kenya) -Gabriel Zuber Waiko, Archévêque de Karthoum, (Soudan) -Laurent Monsengwo Pasinya, archevêque de Kinshasa (RD Congo) -Théodore Adrien Sarr, archevêque de Dakar (Sénégal) -Anthony Olubunmi Okogie, Archevêque émérite de Lagos (Nigeria) -Antonios Naguib, archevêque émérite de l’Eglise catholique copte d’Alexandrie -Bernard Agré, archevêque émérite d’Abidjan (Côte d’Ivoire) -Françis Arinze, cardinal-évêque de Velletri-Segni, en Italie (Nigeria) -Medardo Joseph Mazombwe, archevêque émérite de Lusaka (Zambie) -Christian Wiyghan Tumi, archevêque émérite de Douala (Cameroun) -Alexandre José Maria dos Santos, archevêque émerite de Maputo (Mozambique) -Alexandre do Nascimento, archevêque émérite de Luanda (Angola) -Emmanuel Wamala, archevêque émérite de Kampala (Ouganda) Lire la suite sur Slate Afrique.com http://www.slateafrique.com/103273/cardinaux-africains-succession-benoit-xvi

Benoît XVI démissionne

Le Souverain Pontife, âgé de 85 ans, affirme ne plus avoir « les forces » de la diriger en raison de son « âge avancé ». Cette annonce a été faite dans une salle du Palais Apostolique lors d’un consistoire au Vatican pour la canonisation de martyrs d’Otrante. Et ce sont des chaà®nes de télévision italiennes qui les premières ont annoncé l’information, très vite reprise dans le monde entier. Il est vrai que C’’est un évènement rarissime qui s’est produit une seule fois auparavant. Unique précédent dans l’histoire de l’Eglise, Célestin V avait abdiqué de sa fonction peu après avoir été sacré en 1294. Il avait vécu en ermite jusqu’à  sa désignation comme pape, et ne se sentait pas prêt à  assumer ce rôle dans l’à‰glise. Le Vatican et le monde pris de cours La démission de Benoit XVI prendra effet à  20H00 (19H00 GMT), le 28 février prochain. Commencera alors la période de « sede vacante » (siège vacant), a indiqué, le porte-parole du Vatican, le père Federico Lombardi. Un nouveau pape sera désigné « pour Pâques », a-t-il précisé ensuite lors d’une conférence de presse convoquée à  la hâte au Vatican. Le père Lombardi a admis que « le pape nous a pris un peu par surprise, en outre un jour férié pour le Vatican ». Selon lui, le pape a « saisi l’occasion qu’un grand nombre de cardinaux étaient réunis à  Rome » pour le consistoire. « La plupart n’en avaient pas été informés à  l’avance », a assuré le père Lombardi. Le doyen des cardinaux Mgr Angelo Sodano a parlé de « coup de tonnerre dans un ciel serein ». Les réactions des chefs d’Etat n’ont pas tardées non plus à  tomber. En Italie, qui abrite le micro-Etat du Vatican, le chef du gouvernement sortant Mario Monti s’est dit « très secoué par cette annonce inattendue ». Le président français François Hollande a qualifié la décision du pape d' »éminemment respectable ». L’Allemagne pays d’origine du cardinal Joseph Ratzinger a exprimé son « respect » et sa « gratitude » envers le pape « pour avoir mené l’à‰glise comme il l’a fait pendant huit ans ». Un pontificat perturbé, un Pape fatigué Josef Ratzinger devenu Benoà®t XVI se retirera après son départ dans un monastère situé dans l’enceinte du Vatican. Il a accédé à  la tête de l’Eglise catholique le 19 avril 2005 à  l’âge de 78 ans après avoir régné près d’un quart de siècle sur la Congrégation pour la doctrine de la Foi. Très conservateur, il a été confronté dès le début de son règne à  une cascade de scandales scandale d’abus pédophiles dans le clergé, la crise la plus profonde de l’à‰glise contemporaine. L’an dernier, il a également dû faire face à  l’intérieur du Vatican à  un scandale de fuites de documents confidentiels, qui a conduit à  la condamnation de son propre majordome, Paolo Gabriele: un symptôme des mécontentements et des divisions dans la Curie, et une trahison personnelle qui avait beaucoup affecté Joseph Ratzinger. Un départ annoncé ? Même si les premières réactions sont à  la surprise face à  cette décision, on se souvient que Benoit XVI en avait évoqué l’éventualité en 2010. Dans un livre interview intitulé « Lumières du monde », le pape avait évoqué la possibilité d’une démission au cas o๠il ne se serait plus senti en état de continuer. Répondant au journaliste allemand Peter Seewald, Benoà®t XVI avait affirmé qu’un pape « a le droit et, selon les circonstances, le devoir de se retirer » s’il sent ses forces « physiques, psychologiques et spirituelles » lui échapper. Il a donc tenu promesse en déclarant ce lundi 11 février être « parvenu à  la certitude que (ses) forces, en raison de l’avancement de son âge (« ingravescentem aetatem » en latin), ne sont plus aptes à  exercer de façon adéquate le ministère » de pape et évêque de Rome. Un nouveau pape devrait être désigné «pour Pâques», le 31 mars, un conclave devant être organisé dans les 15-20 jours suivant la renonciation du pape.

Le Vatican secoué par une crise interne !

Le Vatican confronté à  une crise sans précédent… l’affaire des fuites de documents a, depuis janvier dernier, empoisonné le quotidien du Vatican. Ce climat de suspicion s’est soldé depuis samedi dernier par la publication en Italie d’un livre intitulé « Sua Santita » (« Sa Sainteté »). Ce livre reproduit des dizaines de fax et de lettres ultra-secrètes dont le pape est destinataire ou a eu connaissance et que des « gorges profondes » ont ensuite livré à  l’auteur, le journaliste Gianluigi Nuzzi. Ces documents illustrent de nombreux débats internes, par exemple sur les relations avec les autorités italiennes (pressions vaticanes sur les sujets de société, questions fiscales, finances des instituts catholiques), les scandales sexuels chez les Légionnaires du Christ ou encore les négociations avec les intégristes. Ce n’est certes pas le premier scandale qui ébranle l’institution, mais cette fois, « il y a quelque chose d’encore plus profond », car émerge le sentiment d’un « désordre systémique » au sein de l’Eglise catholique, comme l’a déclaré Alberto Melloni. Pour cet historien spécialisé « jamais l’Eglise catholique n’a donné un tel sentiment de désorientation ». Alors qu’une commission d’enquête dirigée par trois cardinaux est au travail au Vatican sur d’autres fuites intervenues en janvier dernier, ce livre a donné lieu à  une réaction furibonde du Saint Siège qui a menacé de poursuites en Italie. Une réaction qui peut surprendre car les documents publiés ne sont souvent pas des surprises, et n’ont en général rien de scandaleux, même s’ils révèlent des tensions entre cardinaux. Le Vatican secoué par une crise interne : le majordome du pape serait l’auteur des indiscrétions Quatre jours après l’arrestation d’une personne « en possession illégale de documents confidentiels », le Saint-Siège a annoncé que le responsable présumé des indiscrétions, en garde à  vue depuis quelques jours, n’est autre que Paolo Gabriele, l’ancien majordome des appartements pontificaux de Benoà®t XVI. Accusé d’avoir divulgué des secrets papaux, il risque trente ans de prison. La justice du Vatican aurait donc débusqué la taupe… « Je confirme que la personne, arrêtée mercredi pour possession illégale de documents confidentiels retrouvés à  son domicile situé sur le territoire du Vatican, est M. Paolo Gabriele, qui reste incarcéré », a indiqué dans un communiqué le père Federico Lombardi, responsable de la salle de presse du Saint-Siège. Techniquement, le petit Etat ne disposant pas de prison, la supposée taupe est actuellement détenue dans une « salle sécurisée » par la gendarmerie vaticane. Si d’aventure Paolo Gabriele était reconnu coupable, ce proche d’entre les proches du souverain pontife, qui jusqu’à  son arrestation mercredi dernier lui servait ses repas, l’aidait à  se vêtir et avait libre-accès aux pièces les plus protégées du Vatican, pourrait passer les trente prochaines années en prison. Au terme d’un mois d’enquête d’une commission spéciale constituée de trois cardinaux, il lui est reproché d’avoir transmis des documents on ne peut plus confidentiels et embarrassants pour l’Eglise catholique à  des médias qui ne se sont pas privés de les rendre publics. Ces pièces, tirées notamment de la correspondance privée de Benoà®t XVI, sont révélatrices entre autres débats internes et sujets sensibles, des négociations entre Rome et « ses » intégristes, des scandales sexuels chez les Légionnaires du Christ, et surtout, sur le terrain financier, de la situation fiscale du Vatican, de la gestion des instituts catholiques et autres affaires de contrats truqués. Pour avoir illégalement détenu des documents appartenant à  un chef d’Etat, Paolo Gabriele risque beaucoup plus gros, a fortiori s’il a agi seul, ce dont doutent certains connaisseurs des arcanes du Vatican, qui avancent dans la presse italienne qu’il n’a probablement été que le pion d’une lutte intestine. Au Saint-Siège, beaucoup ne croient tout simplement pas en sa culpabilité, ou du moins sont apparus stupéfaits. M. Gabriele « aime tellement le pape qu’il ne le trahirait jamais », a ainsi affirmé à  La Stampa, sous couvert d’anonymat, un prélat qui dans le passé a confessé le majordome déchu. D’après son entourage, le pape Benoà®t XVI, qui ne s’attendait certainement pas à  aborder de cette façon la fête de la Pentecôte se serait simplement dit « affligé » et « choqué » du fait que son majordome ait pu le trahir. « L’accusé a nommé deux avocats de son choix (…) et il a eu l’occasion de les rencontrer » et le pourra encore dans « les prochaines phases de la procédure », poursuit le communiqué, qui assure que M. Gabriele, 46 ans, qui vient officiellement d’être inculpé, bénéficie de « toutes les garanties juridiques prévues par le Code pénal et de procédure, en vigueur dans l’Etat de la Cité du Vatican ». « La phase d’instruction se poursuivra tant que la situation au C’œur de l’enquête ne sera pas claire, après quoi le juge d’instruction décidera de l’acquittement ou du renvoi en justice », avait précédemment indiqué le père Lombardi à  la presse. Le Président de la banque du Vatican limogé Première victime du scandale, Ettore Gotti Tedeschi, le président de l’Institut des œuvres religieuses (IOR), autrement dit la banque du Vatican, accusé de « mauvaise gouvernance » a été limogé jeudi. Comment expliquer le spectaculaire vote de défiance jeudi du Conseil d’administration de l’IOR à  l’encontre d’Ettore Gotti Tedeschi, expert de « l’éthique de la finance », dont la nomination en 2009 à  la tête de l’IOR avait laissé espérer l’assainissement des finances du Vatican ? Officiellement, il lui est reproché de « n’avoir pas su remplir certaines fonctions de première importance », en dépit d’avertissements répétés, alors que la situation « se détériorait ». Selon des sources non confirmées, il aurait pu faire connaà®tre lui-même certains documents de travail à  l’extérieur du Vatican, par un souci de transparence. Selon les documents reproduits dans Sua Santita, Gotti Tedeschi demande notamment comment anticiper les probables répercussions de la crise financière sur les finances de l’à‰glise. La chute de cet homme respecté survient à  un moment crucial. Au début du mois de juillet prochain, un groupe d’experts européens doit décider si le Vatican peut rejoindre la liste des à‰tats transparents dans la lutte anti-blanchiment, la « White list ». D’o๠la question de savoir si ce n’est pas un complot systématique pour discréditer le Vatican ? Impliqué dans les années 1980 dans des scandales sulfureux mêlant mafia, loge maçonnique et services secrets, l’IOR a repoli lentement son image sous le pontificat de Benoà®t XVI, en s’efforçant de remplir les critères contre le recyclage de l’argent sale. De nouvelles lois vaticanes ont été adoptées, même si elles sont critiquées car jugées insuffisantes. Le pape allemand, qui a fait de la rigueur une priorité, a créé en 2010 une Autorité d’information financière (AIF), même si beaucoup reste à  faire.