Mali – Préavis de grève: la vie chère en cause

Un collectif d’acteurs de la société civile prévoit une grève de 72 heures à compter de ce 23 mars 2021. Regroupant plusieurs corporations, transporteurs, acteurs des marchés ou consommateurs, il exige la satisfaction d’un chapelet de doléances, faute de quoi il envisage la paralysie de plusieurs secteurs stratégiques.

Le Groupement des syndicats des transporteurs et conducteurs routiers du Mali (GSTCR), le Collectif national des acteurs des marchés du Mali (CNAM), l’Association nationale des transformateurs de bétail – viande du Mali (ANATRABEVIM) et l’Association libre des consommateurs maliens (ALCOM) regrettent  d’avoir épuisé  toutes les voies de recours pour se faire entendre par les autorités, dans le préavis de grève adressé au ministère du travail et de la fonction publique.

L’annulation du nouveau système de péage, l’attribution à chaque marché d’un titre foncier, l’amélioration de la qualité de l’hygiène dans les abattoirs, ainsi que celle du plateau technique en termes d’équipements, sont quelques unes des nombreuses et diverses revendications du collectif. La baisse des prix et « l’homologation » de plusieurs denrées de consommation courante et la situation des travailleurs de la COMATEX font aussi partie des revendications portées par l’ALCOM.

Malgré sa détermination à faire aboutir ses revendications, le collectif n’exclut pas la possibilité d’un dialogue et exige une réponse favorable d’ici au 22 mars 2021.

Même si l’application des dispositions relatives au péage, qui a été reportée par le gouvernement à plusieurs reprises, semble être le catalyseur de ce mouvement, le regroupement tente désormais de fédérer « les colères ».

Moussa Ismaïla Touré : « Les retombées du forum continuent a être récoltées »

Le directeur général de l’Agence pour la promotion des investissements au Mali (API-Mali) a participé début octobre à l’Université d’été du patronat algérien. De retour, il fait le point de cette mission, mais aussi de la vie interne et des projets de sa structure.                              

Vous êtes rentré le 10 octobre d’un déplacement en Algérie à l’occasion de la 4ème édition de l’Université du Forum des Chefs d’entreprise (FCE), où vous avez conduit une délégation de chefs d’entreprise maliens de haut niveau. Quel est le bilan de cette mission ?

Nous avons en effet fait le déplacement d’Alger accompagné de chefs d’entreprise maliens de haut niveau, de différents secteurs. Au cours de ce déplacement qui a duré 4 jours, nous avons participé à l’université d’été du patronat algérien. Une activité pour laquelle le Mali était l’invité d’honneur. Nous avons eu l’opportunité de prendre la parole et d’échanger avec le patronat algérien et de présenter toutes les opportunités et toutes les synergies que nous pouvons créer entre les deux pays. Qui d’ailleurs ont d’excellentes relations politiques et diplomatiques que les autorités ne demandent qu’à traduire sur le plan des relations économiques. Cette démarche s’inscrit dans ce cadre.

Au cours de notre séjour, nous avons rencontré plusieurs acteurs économiques algériens qui sont très intéressés par le Mali. Ces rencontres ont abouti à la signature de deux conventions d’établissement d’entreprises algériennes qui ont décidé de faire le pas et de venir s’installer au Mali. Ces entreprises sont le groupe Ival, représentant de la marque IVECO, qui a décidé d’ouvrir un atelier d’entretien et de réparation mais aussi une représentation pour la vente de véhicules utilitaires au Mali. Le deuxième accord d’établissement a été signé avec un bureau d’étude, BH, qui va ouvrir des bureaux à Bamako pour amener ses compétences et renforcer ainsi notre environnement dans ce domaine et aussi pouvoir accompagner les entreprises algériennes qui vont faire le pas vers le Mali.

A-t-on une idée de l’échéance d’installation de ces deux structures ?

Je peux vous dire que le groupe Ival est plus que pressé puisqu’ils espèrent faire le déplacement dans les 10-15 jours à venir pour identifier le terrain où ils peuvent s’installer et commencer les démarches administratives nécessaires. Ils sont prêts, pressés et engagés. Pour l’autre structure, nous avons convenu de revenir ensemble après un deuxième déplacement que nous devons faire à Alger à la mi-novembre, pour qu’ils puissent également commencer leurs démarches.

Au delà de ces deux signatures, nous avons pu établir un certain nombre de contacts très intéressants qui vont déboucher sur des partenariats commerciaux mais aussi des projets d’investissements. Ces contacts sont à approfondir et c’est pour cela que nous avons été invités à revenir mi-novembre pour pouvoir concrétiser. Les sociétés en question opèrent dans l’industrie et d’autres secteurs pertinents pour notre environnement.

Les deux structures avec lesquelles les accords ont été signés seront accompagnées par l’API dans leur installation ?

Nous allons bien sûr les accompagner dans la collecte d’informations, dans les démarches administratives, dans l’ouverture de leurs opérations au Mali. Nous allons les assister à tous les niveaux, même lorsqu’ils auront commencé leurs activités. Nous souhaitons qu’ils s’agissent de success stories car cela pourra permettre de rassurer d’autres entreprises algériennes qui pourraient demeurer hésitantes.

Votre retour à Bamako a été un peu mouvementé puisqu’en votre absence, le syndicat du personnel de l’API-Mali a déposé un préavis de grève. Que se passe-t-il ? Quelles sont les revendications de ce syndicat et comment pouvez-vous y répondre ?

Pour comprendre cette situation, il faut revenir en arrière dans l’histoire de l’API-Mali. A mon arrivée, en février 2015, j’ai trouvé une API-Mali par terre si je puis dire. Les employés enregistraient 6 à 7 mois d’arriérés de salaires, les compétences étaient parties et l’API se réduisait, avec ceux qui sont restés, à la seule activité de création d’entreprise au niveau du Guichet unique quasiment. La mission qui m’a été confiée était de remettre cette structure sur pied, les autorités ayant pleinement conscience de son caractère stratégique. Dans cette démarche, nous avons fait appel à des cabinets extérieurs pour faire un état des lieux et c’est ainsi qu’un audit organisationnel et des ressources humaines a été mené. Cet audit a débouché sur un plan de restructuration que nous avons soumis au Conseil d’administration. La 8ème session du Conseil d’administration de l’API, qui s’est tenue le 29 avril 2016, a validé ce plan de restructuration et, dans ses recommandations, a précisé clairement quelles sont les étapes de cette restructuration à appliquer et mieux, les actions à mener pour chaque catégorie de personnel. Lorsque le personnel a été évalué, il a été classé en trois groupes. Un groupe jugé comme ayant les compétences et les capacités pour occuper leur poste et peut-être même faire mieux. Un deuxième groupe a été qualifié comme ayant une compétence insuffisante pour occuper les postes qu’ils avaient à l’époque mais que l’on pouvait redéployer à des fonctions inférieures. Et un troisième groupe de personnes qui ont été jugées comme n’ayant pas leur place et qu’il fallait libérer. Le Conseil a décidé de gérer ce volet en intégrant le départ volontaire pour que chacun puisse partir tranquillement et que l’on arrive pas au licenciement sec. La direction s’est inscrite dans cette démarche et a appliqué les recommandations du Conseil d’administration. Nous ne nous sommes donc pas levés comme ça pour faire ce que nous voulons.

Après, nous comprenons bien que dans l’exécution de cette décision de notre instance dirigeante, il puisse y avoir des difficultés, qu’il puisse y avoir des désaccords sur certains points. Cela est normal et c’est le rôle du syndicat de revendiquer. Il faut juste que cette revendication se fasse dans un cadre normal de respect des textes et des procédures mais aussi de respect des personnes. C’est ce qui tend à manquer un peu et que nous déplorons.

Mais nous continuons notre démarche parce que c’est une recommandation du Conseil d’administration. Nous sommes bien sûr ouverts pour discuter avec le syndicat sur les points de revendication et nous ferons appel à toutes les structures que la loi prévoit pour nous accompagner dans ces négociations. (…) Tout ce qui est fait l’est dans l’intérêt du personnel et de l’Agence. Les deux sont liés : si l’Agence n’existe pas, il n’y a pas de personnel et vice versa. L’essentiel est que nous nous comprenions et je pense que l’on se comprendra.

Donc pas d’entrave à votre action de promotion des investissements au Mali qui est l’un des deux volets de votre mission ? Quelles en sont les prochaines étapes, les projets à court et moyen terme ?

Non ! Mais pour que l’API-Mali puisse continuer à faire son travail et soit performante, il nous faut rapidement boucler cette restructuration. Sans les hommes, sans la qualité, nous ne pouvons pas répondre correctement aux attentes légitimes placées en nous par le secteur privé, car c’est pour lui que nous travaillons. Il faut donc consolider cette agence avec les ressources humaines qualifiées. Pour ce qui est de notre travail quotidien, nous sommes en train d’améliorer les process internes au niveau de la création d’entreprise. Nous travaillons à la faciliter. Nous sommes dans un processus de dématérialisation pour la création d’entreprise. Le chantier est bien avancé et courant premier trimestre de l’année prochaine, on pourra créer son entreprise au Mali, en ligne, depuis son ordinateur n’importe où dans le monde. Cela va permettre d’améliorer la vie des entrepreneurs. Nous continuons également notre démarche de déconcentration des activités du Guichet unique. Ces deux dernières années, nous avons ouvert des représentations à Kayes, Ségou et Sikasso. Cette année, nous avons ouvert Mopti et Gao devrait ouvrir d’ici décembre. L’année prochaine, nous allons poursuivre cette dynamique. Pour ce qui concerne le volet promotion des investissements, des actions comme celle d’Alger vont se poursuivre. Nous avons avant la fin du mois, un certain nombre d’activités entre Paris et Genève pour participer à des rendez-vous internationaux de l’investissement. En marge de la réunion des investissements de Paris et de l’activité de Business France à l’endroit de l’Afrique, nous allons organiser une journée de promotion de deux filières stratégiques pour le Mali : la gomme arabique et le karité. Nous allons réunir les acteurs maliens de ces deux filières avec des acteurs français et européens intéressés par ce secteur.

Nous travaillons parallèlement à renforcer les capacités de nos relais. Nos relais naturels sont les ambassades du Mali à travers le monde. Nous avons proposé d’organiser une session de formation pour tous les conseillers économiques de nos ambassades. Nous allons procéder par zone et commencer fin octobre début novembre avec les conseillers des ambassades d’Europe. Nous allons donc les inviter à Paris pendant deux jours pour les former sur comment faire la promotion des investissements, quels sont les outils disponibles, quelles sont les techniques. C’est quelque chose de nouveau car nous avons compris qu’il fallait que nous soyons plus présents mais compte tenu de nos moyens limités, il faut renforcer les partenaires naturels que sont les ambassades afin qu’elles puissent assurer un relai.

Sur le moyen et long terme, comme vous le savez, nous avons organisé avec brio le forum Invest in Mali 2017 dont les retombées continuent à être récoltées par le Mali. Les trois projets annoncés sont en cours d’exécution. Nous nous sommes engagés à tenir ce forum tous les deux ans. La prochaine édition devrait donc se tenir courant 2019. Nous avons donc déjà commencé à travailler sur ce projet afin que le Mali tire le maximum de profits du forum Invest in Mali.