Défaite de l’EI au Proche-Orient : Alerte sur le Sahel ?

L’effet papillon. La célèbre théorie qui voudrait qu’un battement d’aile au Proche-Orient provoque une tempête au Sahel est depuis un certain temps mise en avant par certains experts.

En 2017 déjà, l’Union africaine tirait la sonnette d’alarme sur un éventuel retour de 6 000 djihadistes africains partis combattre au sein de l’EI. Le très tentaculaire EI à qui deux têtes ont été coupées s’en verrait pousser de nouvelles au Sahel. Dans nos colonnes, en janvier 2018, Ibrahim Maïga, chercheur à l’Institut d’études et de sécurité (ISS) estimait que la « faiblesse structurelle des Etats sahéliens fait de cette région une destination attractive pour des groupes armés en perte de vitesse au Moyen-Orient ».

«Il faut absolument éviter que le Sahel soit un bourbier comme au Proche-Orient, il serait plus difficile à maitriser et les conséquences seraient terribles » avertit cette source sécuritaire. La zone est immense, les frontières poreuses, et les pays pas toujours résilients face à la menace terroriste. Pour y faire face, les Etats concernés ont mis sur pied le G5 Sahel. 5 000 hommes afin d’éradiquer la menace terroriste. Les intentions sont affichées mais l’opérationnalisation peine à devenir une réalité. De quoi agacer certains chefs d’Etats du Sahel. « Ce qui se passe au Mali ne nous concerne pas seulement mais la communauté mondiale » a souligné le président du Mali, Ibrahim Boubacar Keïta, dans une interview pour le magazine Bloomberg. « Avec les avancées dans la lutte contre l’État islamique en Syrie et en Irak, il y a un retour vers l’Afrique du Nord, en passant par la Libye, pour atteindre le Mali et le Sahel. Nous ne défendons pas seulement notre territoire, nous nous battons pour vous aussi. La Méditerranée n’est pas loin » alerte-t-il.

Vases non communicants Défaits en Irak et en Syrie, les djihadistes de l’EI pourraient donc se tourner vers le Sahel pour en faire leur base arrière. Mais Yvan Guichaoua, enseignant chercheur à la Brussels School of International Studies ne croit pas en cette hypothèse. « Cela revient à se demander si les candidats au djihad sont transposables d’un terrain à l’autre. Je ne suis pas persuadé que les vases communiquent si bien entre eux malgré les tentatives d’uniformisation des cadres d’Al Qaïda ». Le chercheur pousse son analyse. « Le Sahel attire quelques nord-africains, mais surtout des ressortissants des pays concernés issues des parties de la population bien identifiables. On est loin de l’utopie dans laquelle des gens de tous horizons viennent se fondre » analyse-t-il. En outre, il ajoute que l’aspect des préjugés racistes entre les djihadistes mériterait d’être étudié. Se basant sur des témoignages de l’occupation en 2012, les catégories raciales entre les terroristes n’auraient pas été abolies.