Fin de Kadhafi, le début d’une nouvelle colonisation africaine ?

Face à  la mort de Kadhafi, le «Â Politiquement correct » règne désormais parmi les présidents Africains. Au Mali, o๠le guide est considéré comme un bienfaiteur, on entend les commentaires suivants : «Â Le président Malien ATT doit parler au nom du peuple malien, Kadhafi était l’Ami du Mali! ». Alors que pleuvent des réactions internationales de satisfaction, le silence troublant des monarques africains révolte certains intellectuels. Seul Robert Mugabe du Zimbabwe a osé exprimer tout haut ce que beaucoup de nos leaders africains pensent tout bas, et pour lui, la mort de Kadhafi est un jour triste pour l’Afrique. Plus grave, l’incapacité de l’Union Africaine, depuis le début de cette crise, questionne la légitimité des institutions panafricaines obligées de s’aligner sur les instances internationales. l’organisation panafricaine s’est simplement contentée d’une déclaration plate, affirmant qu’un chapitre d’histoire était clos, et espérant que la Libye devienne un pays plus stable, qui s’occupe de réconciliation et de reconstruction… Bien que l’ONU ait demandé une enquête ouverte sur les circonstances de la mort du guide, jugées floues, cette fin convient à  la plupart des puissances engagées dans le conflit libyen au nom d’intérêts économiques. Mais si Kadhafi avait été arrêté et jugé, sa fin eut sans doute été plus humiliante que celle de mourir en martyr, comme il l’avait souhaité, livré aux mains de ce peuple pour qui il a tant fait. l’homme à  abattre s’appelle désormais Seif El Islam, fils aà®né de Kadhafi, dauphin et héritier des secrets de son père. Il demeure introuvable. Le rêve mégalomane d’une Afrique Unie Si le dictateur énervait, amusait, troublait, force est de reconnaà®tre la vison panafricaniste d’un homme animé d’idéaux qui ont fini par avoir raison de lui. Grandeur et décadence, mégalomanie, excès en tous genres, Kadhafi se faisait appeler le «Â Roi des rois d’Afriques » pour retrouver un peu de cette aura perdue dans les années 90. Après les attentas de Lockerbie, il avait reculé, fait des concessions face aux Américains et aux Nations Unies… Rêvant de diriger ces Etats-Unis en inversant la géopolitique mondiale, avec une armée puissante, ses diatribes et ses réactions finirent par exaspérer l’occident, tandis qu’elles continuaient de séduire les panafricanistes convaincus. Les sommets de Kadhafi étaient fastueux à  Syrte, à  Tripoli, ses réceptions sous une tente ou dans le désert, inoubliables pour les journalistes. Une célèbre journaliste raconte comment ils furent réveillés à  5h du matin par les militaires et emmenés manu militari pour être reçus par Kadhafi en plein désert libyen. Quiconque a rencontré Kadhafi évoque un dirigeant qui se croyait investi d’une mission au point d’en oublier l’humain. Au Mali, Kadhafi est aimé et les réalisations de la Libye dans notre capitale sont nombreuses, en témoigne la Cité Administrative Mouammar Kadhafi, les hôtels Lybia, les investissement agricoles en Zone Office du Niger, les mosquées, les médersas, les routes financées par le guide, instruments d’influence certes, mais instruments de développement certains. Entre Africains. Mais à  Tripoli, C’’est une autre réalité. La soif de changement, issue du printemps arabe, anime désormais les Libyens. Même si l’avenir du pays reste incertain, le changement sera difficile. La réorganisation politique et administrative du pays, la redistribution des richesses et des avantages, les privilèges des uns et des autres, le partage de l’or noir, qui soutenait l’économie libyenne et africaine certainement. O๠en est l’Unité Africaine ? «Â Vous vous rendez compte, la côte part de la Libye dépassait de loin celle des autres pays membres de l’Union Africaine », interpelle une journaliste choquée par la nouvelle de la mort de Kadhafi. A quoi ont servi les incessants ballets diplomatiques, les réunions extraordinaires pour tenter de trouver une issue à  la crise déclenchée par le Printemps Arabe ? Est-ce pour autant la fin du printemps libyen ? Aujourd’hui, le CNT est la seule autorité légitime, reconnue par la France, les Etats-Unis. Que pèse la voix de l’Union Africaine face à  un peuple qui a choisi d’appeler l’Occident à  l’aide ? Déclaration de principe, les pays arabes ont déjà  fait entendre leur voix. Manifesté leur joie. Face à  cette mort, s’opposera longtemps le silence gêné des souverains africains, que Kadhafi de son vivant a reçu dans son palais de Syrte, sa ville natale. C’’est donc la fin de ces sommets 100% Africains o๠Kadhafi recevait ses « amis » pour leur livrer sa vision d’une Afrique Unie. Après lui, qui réunira ces dirigeants soumis aux intérêts des occidentaux ? Combien nous reste t-il de visionnaires sur le continent ? Malgré leurs défauts et leurs croyances, ils étaient animés d’idéaux et prêts à  mourir pour ces idéaux. Mais avec l’ingérence de l’OTAN qui jure avoir agi pour protéger les civils libyens, l’on est en droit de se demander si l’Afrique, n’est pas entrain de subir pas une nouvelle colonisation ?