Relations commerciales entre l’Afrique Subsaharienne et les USA, quel avenir ?

L’élection du nouveau président américain a suscité chez les Africains au sud du Sahara beaucoup d’inquiétudes dont la source est la déclaration du candidat TRUMP qui, sans mentionner l’Afrique, a promis de revoir la coopération avec certains partenaires des États-Unis. Notons que la coopération entre l’Afrique Subsaharienne et les Etats-Unis d’Amérique est régie depuis l’administration CLINTON par l’African Growth and Opportunity Act (AGOA), une Loi programme présentée sous forme d’arrangement bilatéral exprimant l’approche des seules autorités américaines. L’AGOA permet aux Africains d’exporter vers les États-Unis sans droits de douane et sans contingents 4900 produits couverts par le système de préférences généralisées auxquels s’ajoutent 1900 autres produits. Pour ce faire, les pays bénéficiaires doivent remplir certaines conditionnalités politiques et économiques comme l’établissement d’une économie de marché, d’un État de droit ; la levée d’obstacles aux échanges et investissements des États-Unis y compris le traitement national et la protection de la propriété intellectuelle ; la lutte contre la pauvreté, la corruption ; la protection des droits des travailleurs; le respect la sécurité nationale des États-Unis et leurs intérêts en matière de politique étrangère; le respect des droits de l’homme.

L’État qui ne respecte pas ces conditionnalités perd les bénéfices de l’AGOA. La décision de retrait de ces bénéfices est prise par le Président américain sur recommandation du Comité de politique commerciale présidé par le représentant de commerce des États-Unis. Ainsi, chaque année, à compter du 1er janvier, un pays peut être radié ou ajouté à la liste des bénéficiaires.

Comme on peut le voir, c’est une loi, adoptée selon les procédures internes, qui définit les modalités du commerce avec les États-Unis. Rien ne s’oppose à ce que l’autorité qui l’a émise l’annule ou la modifie de manière unilatérale et sans discussion avec les pays africains. Ceci est d’autant plus vrai que cette loi reste influencée par de puissants lobbies. En effet, avant même son adoption en 2000, l’AGOA a fait l’objet de protestations de la part des différents secteurs économiques et socio – politiques américains. Ces protestations sont venues de la part d’entreprises qui craignaient la diminution de leurs profits par l’arrivée massive des marchandises à bas prix d’Afrique, des mouvements syndicalistes qui voyaient en la loi une menace pour le secteur du textile américain et plusieurs organisations et mouvements sociaux mobilisés lors des grandes manifestions de Seattle en  1999. Si ces lobbies y ont adhéré, c’est grâce à l’assurance que les produits africains ne seront pas aussi compétitifs que les leurs. De plus, en cas d’afflux d’importations menaçant l’industrie américaine, le département du commerce a la possibilité de modifier la liste des produits éligibles ou de réintroduire des droits de douane. Enfin, les clauses d’origine contiennent un certain nombre de conditions susceptibles aussi d’être réexaminées.

Pour les raisons ci-dessus évoquées, les inquiétudes des Africains paraissent justifiées. Le candidat TRUMP n’a pas caché son intention de se focaliser sur les problèmes domestiques. Il sera bien à l’écoute de ces lobbies. Toutefois, le Président sera différent du candidat. Malgré son imprévisibilité, il n’a aucune raison de remettre en cause une coopération qui porte ses fruits. À ce jour, l’impact économique de l’AGOA est positif. Certes, le partenaire américain reste le plus grand bénéficiaire grâce aux hydrocarbures représentant plus de 69 % de ses achats en 2014. Ceci semble normal dans la mesure où l’administration BUSH fils considérait l’approvisionnement des États-Unis en hydrocarbures comme un facteur de sécurité et diminue la dépendance vis-à-vis des pays du golfe. Les autres produits agricoles, industriels et artisanaux n’y comptent que de manière résiduelle.

Les partenaires africains ont aussi tiré leur épingle du libre jeu échangiste avec les États-Unis. Le nombre est limité aux producteurs de pétrole tels le Nigeria, le Gabon, l’Angola, la Guinée équatoriale, le Congo, le Tchad, le Cameroun. L’Afrique du Sud y tire quelque avantage à travers ses exportations de platine, de diamant, de produits ferreux, de véhicules et de pièces détachées, de convertisseurs catalytiques, d’agrumes, de vin, de textile, etc. Il en est également ainsi, mais dans une moindre mesure, pour l’Ouganda, le Lesotho, le Botswana, le Kenya (textile), Madagascar (habillement et vanille), le Ghana (artisanat) ou la Namibie (raisin) avec, à la clé, la génération d’assez nombreux emplois. Grâce à cet impact positif, l’AGOA a été prorogée par le Président OBAMA jusqu’en 2025.

Une autre raison pour ne pas remettre en cause la coopération est le rôle de contre-pouvoir des institutions. Bien que promulguée par un président démocrate CLINTON, la loi a été prorogée par un président républicain BUSH fils pour être de nouveau prorogée par un président démocrate OBAMA avec l’aval d’un congrès à dominance républicaine. Toutes ces initiatives de prorogation visent à consolider les acquis de la coopération. Le Président TRUMP aura des difficultés à rallier le congrès actuel à sa cause et ce d’autant plus que le secteur privé américain est de plus en plus impliqué en Afrique. Il y a des fortes chances qu’il soit bien encadré par le Congrès.

En revanche, sa tendance protectionniste pourra l’amener à réclamer plus de réciprocité des Africains comme le font les Européens dans le cadre des Accords de Partenariat économique. Il pourra être moins attentif à certaines doléances des Africains. Rappelons que l’accès au marché américain n’est pas facile pour les entreprises africaines obligées de se soumettre à un grand nombre de procédures de vérification de l’adéquation de leurs produits aux diverses normes américaines. Elles souhaitent donc la levée des obstacles non tarifaires aux échanges, comme les mesures sanitaires et phytosanitaires, les barrières techniques au commerce, les formalités administratives, la difficulté à s’insérer dans les réseaux de commercialisation, le manque de confiance des importateurs vis-à-vis d’un fournisseur donné, etc. Des programmes d’assistance pourront connaître un ralentissement dans leur exécution : l’appui des secteurs publics et privés américains à travers l’Overseas Private Investment Corporation (OPIC) et l’Import Export Bank (Eximbank) aux projets des femmes entrepreneures et projets d’infrastructures, au Fonds de lutte contre le VIH/SIDA, le plan d’électrification de l’Afrique, etc.

Pour conclure, l’avenir des relations commerciales entre l’Afrique Subsaharienne et les États-Unis d’Amérique sous le régime de Donald TRUMP doit être vu sous un angle optimiste. L’Afrique est et sera au cœur de la politique américaine. En témoignent, les nombreux programmes d’échanges universitaires, la présence militaire, le plaidoyer en faveur de l’Afrique du secteur privé américain réuni au sein du Corporate Council of Africa. Enfin, le Président TRUMP n’ignore pas que l’Afrique est en train de diversifier son partenariat grâce à l’émergence sur son marché d’acteurs non traditionnels venus principalement d’Asie et d’Amérique. Les États-Unis voudront bien conserver leur place en Afrique.

 

 

L’avenir des relations commerciales entre l’Afrique Subsaharienne et les États-Unis d’Amérique

Enseignant-Chercheur à l’Université des Sciences Juridiques et Politiques de Bamako, O. Touré analyse les répercussions que pourrait avoir l’élection de Donald J Trump dans les relations entre les deux continents.

L’élection du nouveau président américain a suscité chez les Africains au sud du Sahara beaucoup d’inquiétudes dont la source est la déclaration du candidat TRUMP qui, sans mentionner l’Afrique, a promis de revoir la coopération avec certains partenaires des États-Unis. Notons que la coopération entre l’Afrique Subsaharienne et les Etats-Unis d’Amérique est régie depuis l’administration CLINTON par l’African Growth and Opportunity Act (AGOA), une Loi programme présentée sous forme d’arrangement bilatéral exprimant l’approche des seules autorités américaines. L’AGOA permet aux Africains d’exporter vers les États-Unis sans droits de douane et sans contingents 4900 produits couverts par le système de préférences généralisées auxquels s’ajoutent 1900 autres produits. Pour ce faire, les pays bénéficiaires doivent remplir certaines conditionnalités politiques et économiques comme l’établissement d’une économie de marché, d’un État de droit ; la levée d’obstacles aux échanges et investissements des États-Unis y compris le traitement national et la protection de la propriété intellectuelle ; la lutte contre la pauvreté, la corruption ; la protection des droits des travailleurs; le respect la sécurité nationale des États-Unis et leurs intérêts en matière de politique étrangère; le respect des droits de l’homme.

L’État qui ne respecte pas ces conditionnalités perd les bénéfices de l’AGOA. La décision de retrait de ces bénéfices est prise par le Président américain sur recommandation du Comité de politique commerciale présidé par le représentant de commerce des États-Unis. Ainsi, chaque année, à compter du 1er janvier, un pays peut être radié ou ajouté à la liste des bénéficiaires.

Comme on peut le voir, c’est une loi, adoptée selon les procédures internes, qui définit les modalités du commerce avec les États-Unis. Rien ne s’oppose à ce que l’autorité qui l’a émise l’annule ou la modifie de manière unilatérale et sans discussion avec les pays africains. Ceci est d’autant plus vrai que cette loi reste influencée par de puissants lobbies. En effet, avant même son adoption en 2000, l’AGOA a fait l’objet de protestations de la part des différents secteurs économiques et socio – politiques américains. Ces protestations sont venues de la part d’entreprises qui craignaient la diminution de leurs profits par l’arrivée massive des marchandises à bas prix d’Afrique, des mouvements syndicalistes qui voyaient en la loi une menace pour le secteur du textile américain et plusieurs organisations et mouvements sociaux mobilisés lors des grandes manifestions de Seattle en 1999. Si ces lobbies y ont adhéré, c’est grâce à l’assurance que les produits africains ne seront pas aussi compétitifs que les leurs. De plus, en cas d’afflux d’importations menaçant l’industrie américaine, le département du commerce a la possibilité de modifier la liste des produits éligibles ou de réintroduire des droits de douane. Enfin, les clauses d’origine contiennent un certain nombre de conditions susceptibles aussi d’être réexaminées.

Le président sortant avait créé de multiples ponts avec les entrepreneurs et investisseurs du continent
Le président sortant avait créé de multiples ponts avec les entrepreneurs et investisseurs du continent

Pour les raisons ci-dessus évoquées, les inquiétudes des Africains paraissent justifiées. Le candidat TRUMP n’a pas caché son intention de se focaliser sur les problèmes domestiques. Il sera bien à l’écoute de ces lobbies. Toutefois, le Président sera différent du candidat. Malgré son imprévisibilité, il n’a aucune raison de remettre en cause une coopération qui porte ses fruits. À ce jour, l’impact économique de l’AGOA est positif. Certes, le partenaire américain reste le plus grand bénéficiaire grâce aux hydrocarbures représentant plus de 69 % de ses achats en 2014. Ceci semble normal dans la mesure où l’administration BUSH fils considérait l’approvisionnement des États-Unis en hydrocarbures comme un facteur de sécurité et diminue la dépendance vis-à-vis des pays du golfe. Les autres produits agricoles, industriels et artisanaux n’y comptent que de manière résiduelle.

Les partenaires africains ont aussi tiré leur épingle du libre jeu échangiste avec les États-Unis. Le nombre est limité aux producteurs de pétrole tels le Nigeria, le Gabon, l’Angola, la Guinée équatoriale, le Congo, le Tchad, le Cameroun. L’Afrique du Sud y tire quelque avantage à travers ses exportations de platine, de diamant, de produits ferreux, de véhicules et de pièces détachées, de convertisseurs catalytiques, d’agrumes, de vin, de textile, etc. Il en est également ainsi, mais dans une moindre mesure, pour l’Ouganda, le Lesotho, le Botswana, le Kenya (textile), Madagascar (habillement et vanille), le Ghana (artisanat) ou la Namibie (raisin) avec, à la clé, la génération d’assez nombreux emplois. Grâce à cet impact positif, l’AGOA a été prorogée par le Président OBAMA jusqu’en 2025.

Une autre raison pour ne pas remettre en cause la coopération est le rôle de contre-pouvoir des institutions. Bien que promulguée par un président démocrate CLINTON, la loi a été prorogée par un président républicain BUSH fils pour être de nouveau prorogée par un président démocrate OBAMA avec l’aval d’un congrès à dominance républicaine. Toutes ces initiatives de prorogation visent à consolider les acquis de la coopération. Le Président TRUMP aura des difficultés à rallier le congrès actuel à sa cause et ce d’autant plus que le secteur privé américain est de plus en plus impliqué en Afrique. Il y a des fortes chances qu’il soit bien encadré par le Congrès.

En revanche, sa tendance protectionniste pourra l’amener à réclamer plus de réciprocité des Africains comme le font les Européens dans le cadre des Accords de Partenariat Economique. Il pourra à être moins attentif à certaines doléances des Afritc. Des programmes d’assistance pourront connaître un ralentissement dans leur exécution : l’appui des secteurs publics et privés américains à travers cains. Rappelons que l’accès au marché américain n’est pas facile pour les entreprises africaines obligées de se soumettre à un grand nombre de procédures de vérification de l’adéquation de leurs produits aux diverses normes américaines. Elles souhaitent donc la levée des obstacles non tarifaires aux échanges, comme les mesures sanitaires et phytosanitaires, les barrières techniques au commerce, les formalités administratives, la difficulté à s’insérer dans les réseaux de commercialisation, le manque de confiance des importateurs vis-à-vis d’un fournisseur donné, el’Overseas Private Investment Corporation (OPIC) et l’Import Export Bank (Eximbank) aux projets des femmes entrepreneures et projets d’infrastructures, au Fonds de lutte contre le VIH/SIDA, le plan d’électrification de l’Afrique, etc.

Pour conclure, l’avenir des relations commerciales entre l’Afrique Subsaharienne et les États-Unis d’Amérique sous le régime de Donald TRUMP doit être vu sous un angle optimiste. L’Afrique est et sera au cœur de la politique américaine. En témoignent, les nombreux programmes d’échanges universitaires, la présence militaire, le plaidoyer en faveur de l’Afrique du secteur privé américain réuni au sein du Corporate Council of Africa. Enfin, le Président TRUMP n’ignore pas que l’Afrique est en train de diversifier son partenariat grâce à l’émergence sur son marché d’acteurs non traditionnels venus principalement d’Asie et d’Amérique. Les États-Unis voudront bien conserver leur place en Afrique.