Éducation des enfants : L’indispensable remise en cause

De responsabilité collective à « laisser-aller » général, l’éducation des enfants dans notre société a négativement évolué. Ce n’est qu’avec l’engagement de tous que la tendance peut être inversée. Même s’ils n’appellent pas à un retour aux méthodes d’antan, parents et éducateurs prônent le respect de certains principes.

« Il n’y avait qu’une famille, une même morale, une même rigueur », se souvient Yacouba Kéïta, enseignant, directeur d’école à la retraite, aujourd’hui chef de quartier du Badialan II, en Commune III du district de Bamako. Ce qui se traduisait par les « mêmes principes dans toutes les familles ». Lorsqu’un enfant commettait une faute, il pouvait être « corrigé » par un aîné, peu importait le lien de parenté. C’est cette responsabilité collective où «  la tâche d’éduquer  était dévolue à tous » qui a disparu, selon Cheikna Diarra, chef de quartier de Bolibana, en Commune III.

L’évolution de la société, l’influence d’autres valeurs ou même la pauvreté sont autant de facteurs qui ont contribué à l’abandon des principes qui régulaient nos relations. S’ils ne justifient pas le mauvais comportement des jeunes, ils expliquent certains phénomènes, selon M. Diarra. « On ne mange plus dans la même calebasse », ce qui créait une certaine proximité, affirme-t-il. Mais, plus que l’évolution des ménages, où l’individualisme a pris le pas, le développement, avec « ses avantages et ses inconvénients », c’est surtout l’abandon de certains principes, comme celui du « respect dû aux aînés », qui a négativement joué sur le comportement des jeunes, dès lors soustraits à l’autorité en dehors de la famille, et même en famille, car « je ne peux plus gronder le fils de mon frère » si ce dernier n’est pas d’accord, regrette M. Diarra.

Parallèlement, l’école, sur laquelle les parents avaient misé, n’a pas les moyens de sa mission. Paradoxalement, les parents y ont envoyé leurs enfants mais en « lui déniant une partie de ses missions », selon M. Kéïta. « Les parents ont fui leurs responsabilités et l’école est devenue un fourre-tout. Lorsque tu réprimandes un enfant, ce sont les parents qui te tombent dessus », déplore l’ancien directeur. Les dérives actuelles s’expliquent donc par l’effritement conjoint de l’autorité familiale et de celle de l’école. Le changement ne peut venir que de nous-mêmes, selon notre Directeur, qui refuse de croire que la pauvreté soit l’un des facteurs de cette dégradation des mœurs. « Nos pères n’étaient pas riches. Mais ils avaient de l’autorité ». Sans occulter la responsabilité des parents, l’éducateur appelle à une école qui retrouve pleinement son rôle, d’abord par l’amélioration des ressources humaines et en redonnant aux matières comme l’ECM (Éducation civique et morale), l’importance qu’elles méritent.