Clap de fin pour Robert Mugabe !

Après une semaine mouvementée pour le Président nonagénaire, voilà, depuis quelques heures, que son sort est connu. Il vient de démissionner après 37 ans à la tête du Zimbabwe et affirme que cette décision est « volontaire ». Pour l’heure, c’est Emmerson Mnangagwa qui devrait reprendre le flambeau. À Harare, la population est euphorique.

Robert Mugabe vient de vivre ses dernières heures à la fonction suprême. La nouvelle est tombée par la voix du Président du parlement et s’est répandue comme une traînée de poudre. Alors que le Parlement statuait sur son sort, Robert Mugabe a préféré lui couper l’herbe sous le pied. « Moi Robert Gabriel Mugabe (…) remet formellement ma démission de président de la République du Zimbabwe avec effet immédiat », c’est ce  qu’à lu Jacob Mudenda, le président du Parlement. L’ancien homme fort du Zimbabwe déclare dans ce courrier qu’il « choisi volontairement de démissionner », en justifiant son choix par sa volonté d’assurer une passation de pouvoir sans heurts.

Seul contre tous

Suite au coup de force opéré par l’armée dans la nuit du 14 au 15 novembre dernier, le positionnement de cette dernière a été clair : elle soutient l’ex vice-président limogé Emmerson Mnangagwa. Un soutien de taille dont ne dispose pas Grâce Mugabe, désignée successeur de son époux au détriment de son successeur légitime – selon ce qui était prévu par Mugabe – et compagnon de route de longue date. Cette dernière est accusée d’avoir précipité la chute de son mari en raison de son ambition politique. Pire, son propre parti, le Zanu PF, au pouvoir depuis son accession à la fonction suprême lui tourne le dos, le démet de ses fonctions, moins d’une semaine après le début de ce qui s’apparente à un coup d’État.

Le retour en force du « crocodile »

Devancé par la désormais ex Première Dame du Zimbabwe, Emmerson Mnangagwa a vu ses plans de carrière réduit à néant lors de son limogeage, le 6 novembre dernier. À la suite de ce revers, qui a lancé le début de cette perturbation, il décide de fuir le pays. Certains pensent qu’il serait le commanditaire de ce coup d’État qui ne dit pas son nom. À la suite du limogeage de Robert Mugabe à la tête du parti, celui-ci a choisi d’y mettre à sa tête Emmerson Mnangagwa. Depuis l’indépendance du pays, en 1980, Mnangagwa a eu en charge de nombreux portefeuilles ministériels, la Défense et la Finance, pour ne citer qu’eux. Pour l’ancien fidèle de Mugabe, c’est un retour à la normale qui semble s’opérer, avec la prise du poste tant convoité.

Euphorie à Harare

Jacob Zuma ainsi que son homologue angolais, Joao Lourenço doivent se rendre ce soir au Zimbabwe pour aider le pays à trouver une issue à ce contexte politique. Pendant ce temps-là, à Harare, la capitale, depuis l’annonce de la nouvelle, brandissement du drapeau national, cris de joie, danses viennent rythmer la satisfaction des Zimbabwéens. Le plus vieux Président au monde, jadis héros de la libération, vient d’être poussé vers la porte de sortie après 37 ans à la tête du pays.

 

 

EXCLUSIVITÉ : Derek Matyszak : « Cela semble être la fin de l’ère Mugabe »

Il régnait d’une main de fer sur le Zimbabwe depuis 37 ans, le chef de l’État, Robert Mugabe, 93 ans, a vu sa position de force basculée suite à une intervention militaire, ce matin. Les locaux de la radio nationale ainsi que certains bâtiments publics et officiels ont été pris d’assaut dans la nuit de mardi à mercredi. Ce bouleversement politique intervient après le limogeage de l’ancien vice-président, Emmerson Mnangagwa, pressenti pour succéder à Robert Mugabe. Alors que son épouse vise également la fonction suprême. En exclusivité pour le Journal du Mali, Derek Matyszak, nous accorde cet entretien. Ce consultant de l’Institute for Security, à Pretoria, mais actuellement basé, à Harare est un témoin privilégié de cet événement.

Journal du Mali : Les militaires disent que ce n’est pas un putsch mais comment interpréter cet événement ?

Derek Matyszak : Les militaires ont déclaré qu’ils effectuaient une courte intervention chirurgicale et incisive pour « extraire » les éléments contre-révolutionnaires du parti au pouvoir, le ZANU PF. Ils disent que ce groupe contre-révolutionnaire déstabilise le parti au pouvoir et donc le pays, et qu’ils sont constitutionnellement tenus de le défendre. Ils ont déclaré qu’une fois leur devoir accompli, ils retourneront à la caserne. Cependant, leurs actions constituent clairement une ingérence inconstitutionnelle dans les affaires politiques.

Certaines personnes appartenant à l’entourage de Robert Mugabe ont été arrêtées. Mais qui sont-elles concrètement ?

Les personnes qui ont été arrêtées appartiennent à une faction particulière du Zanu-PF connue sous le nom de G40. Ce groupe a essayé d’empêcher la succession à la présidence par Emmerson Mnangagwa, qui a le soutien de l’armée. Lorsque ce dernier a été limogé par le président Mugabe, le 6 novembre dernier, l’armée a décidé de protéger son statut de successeur.

Le vice-président Mnangagwa est destitué et Grace Mugabe est désignée comme la succeseur de son mari, cette intervention militaire peut être considérée comme un avertissement pour le pouvoir ? Une nouvelle ère pour le paysage politique ?

Cela semble être la fin de l’ère Mugabe. Mnangagwa sera installé en tant que président. La question est de savoir s’il a l’intention de chercher une sorte d’alliance avec les groupements d’opposition pour former un gouvernement technocratique pour sauver l’économie zimbabwéenne qui est au bord de l’effondrement.

 

 

Zimbabwe : Mugabe de nouveau face à la contestation

Les Zimbabwéens sont fatigués du régime du vieux Robert Mugabe. Rien ne le prouve mieux que les manifestations dirigées contre lui, exigeant son départ du pouvoir. Mugabe, dont on dit qu’il est à l’article de la mort, envisage pourtant de briguer un nouveau mandat en 2018.

Depuis plusieurs semaines, le régime de Robert Mugabe est pris dans le maelström des manifestations. Le samedi 17 septembre dernier, les manifestants ont bravé un décret publié vendredi dans The Herald, quotidien d’État, par la police interdisant tout rassemblement à Harare. Une semaine auparavant, la justice avait annulé une mesure de même nature. Situation paradoxale, symptomatique de la déliquescence de ce pays d’Afrique australe, où le président Robert Mugabe, 92 ans, doyen des chefs d’État africains, est au pouvoir depuis bientôt 30 ans. Il a d’ailleurs menacé les manifestants : « que les partis d’opposition et tous ceux qui font le choix du chaos, du désordre et des manifestations violentes soient prévenus que notre patience a des limites ». Selon l’opposition, une centaine de manifestants ont été arrêtés dans le pays, samedi.

Agrégation de mécontents Ces manifestations sont menées par l’Initiative nationale pour une réforme électorale (Nera), une coalition de partis d’opposition, et des mouvements de la société civile. Interrogé par RFI, Daniel Compagnon, professeur à Sciences Po, estime que cette « bravitude » des adversaires de Mugabe tient au fait que « les gens ayant moins peur qu’avant, les appels aux manifestations sont suivis. Il y a des catégories sociales (vendeurs ambulants, conducteurs de bus), qui étaient moins impliqués au début des années 2000 (…) qui le sont maintenant. » En outre, les partis d’opposition ont explosé, et le Mouvement pour le changement démocratique (MDC) de Morgan Tsvangirai ne représente plus l’avant-garde de l’opposition. Les protestataires dénoncent la corruption, le chômage et la mauvaise gouvernance, et exigent des réformes électorales avant le scrutin de 2018 pour lequel Mugabe est candidat. Ainsi que des réformes pour sauver l’économie déjà à genoux, une sorte de prolongement de la crise de 2000, caractérisée par le chômage, l’inflation et un taux élevé d’infection au VIH-Sida. Mugabe, qui a su faire face aux différentes contestations qui se sont succédées depuis son accession au pouvoir, résistera-t-il à cette nouvelle bourrasque ?