Mali : l’opposition en ordre de bataille

La messe de requiem du consensus dans le microcosme politique malien semble être dite. La démocratie malienne, après une décennie de gestion consensuelle, renaà®t de ses cendres comme un phénix. Quelques poids lourds de l’échiquier politique malien entendent conjurer le syndrome ATT qui a théorisé le consensus politique qui a précipité le Mali dans les abysses de la déchéance. Parmi ceux-ci figure en bonne place l’Union pour la République, deuxième force politique du pays à  travers son porte-étendard, Soumaà¯la Cissé. Candidat malheureux à  la dernière présidentielle, il est considéré de fait comme le meneur de la nouvelle opposition. Après dix passés dans les différents gouvernements sous l’ère Konaré, à  des ministères aussi juteux que stratégiques (Economie et Finance, Aménagement…) avant de passer près de dix ans à  la présidence de la Commission d l’Uemoa, nombreux doutaient de la capacité de l’homme à  endosser l’habit d’un opposant. Et pourtant le député élu à  Nianfunké dans la région de Tombouctou, est en train de bien mouiller le maillot pour faire honneur à  son statut de meneur de l’opposition. Sa dernière attaque contre le régime IBK date du 24 avril 2014, o๠dans une sortie dans l’hebdomadaire panafricain, « Soumi Champion » affirme que le président de la République n’a pas de feuille de route. « L’attente des Maliens était très forte sur des sujets comme la sécurité, la réconciliation nationale, la justice… On n’a pas beaucoup bougé depuis. Kidal est toujours quasi inaccessible. », a jugé Cissé. En politicien madré, Soumaà¯la Cissé joue la carte d’une opposition Républicaine, ne veut pas « hurler avec les loups » et n’exclut pas de travailler avec IBK pour sortir le pays du gouffre. Quelques mois auparavant, il avait déclaré que le Kankeletigui semblait avoir du mal à  dégager ses priorités. Du renfort Soumaà¯la Cissé ne fera pas cavalier seul dans l’opposition, il peut compter désormais sur l’accompagnement de l’ancien Premier ministre et aussi candidat malheureux à  la dernière présidentielle, Modibo Sidibé, président des Forces alternatives pour le renouveau et l’émergence (Fare), a clarifié sa position d’opposant à  la faveur de son congrès des 15 et 16 mars 2014. En rencontrant Soumaà¯la Cissé au siège de l’Union pour la République(URD), le 16 avril dernier, Modibo Sidibé semble conclure un accord tacite avec « Soumi » pour incarner une vraie opposition au Mali. C’’est justement dans ce cadre, que le numéro 1 des Fare a profité, le week-end dernier d’une visite à  sa base en commune I du district de Bamako pour réitérer sa vocation d’animer l’opposition avant d’émettre des réserves sur la gouvernance actuelle. Autre coéquipier, de taille du reste, que l’ancien président de la Commission de l’Uemoa pourra compter dans les rangs de l’opposition, C’’est le Parti pour la renaissance nationale (Parena) qui entend également jouer sa partition dans l’animation d’une opposition république. Il en a administré la preuve par sa sortie d’y il y a deux semaines. Dans un document-pamphlet intitulé : « IBK, sept mois après: le Mali dans l’impasse », le parti de Téibilé Dramé dresse un bilan peu flatteur du régime IBK en dénonçant pêle-mêle, l’intrusion de la famille présidentielle dans la gestion du pouvoir, l’achat d’un nouvel avion par le président, la gestion du dossier du nord, l’opacité dans certains dossiers de l’Etat etc.… Ce fameux document qui marquait le réveil du parti du bélier depuis l’élection présidentielle, a perturbé le sommeil du parti du tisserand qui a répondu promptement mais avec maladresse en n’apportant aucune réponse aux griefs formulés dans ledit document. Revenant à  la charge, le Parena a demandé officiellement un débat médiatique avec le parti au pouvoir qui n’a pas donné de suite pour le moment. Autant de signaux forts qui fondent à  croire que le Mali est en train de tourner résolument la page de l’unanimisme politique. Place à  une opposition qui jouera son rôle de contre-pouvoir. Au grand bonheur de la démocratie malienne.

Députés, soyez honorables !

Les jeux sont faits. Les 147 places seront bientôt pourvues. La nouvelle législature sera installée sous peu. En attendant, les partis se concertent pour le choix du Président du Parlement. La tradition républicaine au Mali veut que le Chef de l’Etat cède le perchoir de l’Assemblée Nationale au patron du plus grand parti de l’opposition. C’’est donc l’ADEMA jusqu’ici faiseur de rois qui doit s’emparer de ce fauteuil mais ce serait un suicide politique pour le RPM de ne pas offrir un os à  ronger à  l’URD de Soumaila CISSE. Challenger de IBK, l’enfant de Niafunké a commencé à  décocher des flèches assassines contre son tombeur. La couronne parlementaire devrait adoucir ses velléités de perturber le règne de son grand frère. Quoi qu’il en soit, le Président de cette nouvelle législature devra inviter et inciter ses collègues à  jouer pleinement leur rôle comme du reste l’a relevé le Président IBK après avoir introduit son bulletin de vote dans l’urne. àŠtre député, ce n’est pas une sinécure Il faut s’informer, écouter le peuple et tout le peuple. Il ne doit être ni sectaire, ni partisan. Il doit porter les aspirations du peuple. Dés l’acquisition de l’écharpe tricolore, il devient un contrôleur de l’action gouvernementale habilité à  interpeller tout membre du gouvernement pour des questions orales en application de l’article 90 du règlement intérieur de l’Assemblée Nationale. La question est saisie, imprimée et déposée sur la table du Président du parlement chargé de la transmettre au ministre interpellé. Le député peut aussi saisir le gouvernement à  travers un projet de loi pour légiférer sur un sujet. Il est tenu de se prononcer sur les propositions de loi émanant du gouvernement. C’’est dire qu’entre propositions de lois, projets de loi et questions orales, le parlementaire a du grain à  moudre et toute absence volontaire à  ces séances plénières dans la salle Modibo KEITA ou en commission technique est une trahison contrat de confiance signé avec le peuple. l’absence, une pathologie parlementaire à  éradiquer Cet absentéisme des députés fragilise l’institution parlementaire. Il renforce l’image déjà  négative du député « payé gracieusement à  ne rien faire ». Le règlement intérieur du parlement doit être revu et corrigé afin que le travail de fonds réalisé en commission technique ne soit pas terni par le one-man-show des députés de la caméra obnubilés par le seul renforcement de leur aura politique via la télévision. Aussi, il urge de recruter des assistants parlementaires pour expliciter aux élus la nomenclature de la valise budgétaire faute de quoi le Mali aura encore une chambre d’applaudissements. IBK a raison. Le travail du député est plus un sacerdoce qu’une sinécure. Que les entrants s’informent, écoutent et veillent afin de bien légiférer. Il faut se faire élire pour lire et pouvoir dire les dires du peuple.

Opération militaire : Sanogo hors jeu?

En attaquant les troupes maliennes sur la ligne de front à  Konna, les islamistes déclenchaient une opération militaire depuis longtemps programmée et sans cesse repoussée. En effet, les pronostics les plus favorables prévoyaient le début de l’offensive armée au plus tôt au mois d’avril. Et voila, qu’en quelque heures, force a été donnée aux armes pour mettre fin à  la situation de ni-paix-ni-guerre qui durait depuis des mois. Les militaires maliens sont donc au front. Mais ils ne sont pas seuls. A leurs côtés, des soldats français dont l’effectif est graduellement monté à  plus d’un millier d’hommes ces derniers jours. Hélicoptères, blindés de la Licorne, forces spéciales, les troupes étrangères sont là . Les chefs d’état major africains sont réunis depuis deux jours maintenant pour peaufiner l’arrivée de troupes d’un peu partout sur le continent. Car, il est clair que seule, notre armée ne peut faire face à  des islamistes puissamment armés et prêts à  tout pour imposer leur régime de terreur. Mais alors, se demandent de nombreux maliens, pourquoi la hiérarchie militaire malienne a-t-elle autant tergiversé ? Surtout le plus en vue, le Capitaine Amadou Haya Sanogo, qui il y a quelques semaines encore demandait «juste un soutien logistique » pour monter au front ? Quelle marge d’action pour le Capitaine ? Malheureusement, la suite ne lui a pas donné raison. Le tombeur d’ATT se voit ainsi dans l’obligation de revoir sa copie face à  la précipitation des événements depuis le jeudi dernier. Il a d’ailleurs fait un pas dans ce sens en remerciant la France pour son intervention salvatrice auprès des militaires maliens pour endiguer la percée islamiste. Le capitaine est d’autant plus gêné que les porteurs d’uniforme non-Maliens qui auront en charge la sécurisation de la capitale pourraient marcher sur ses plates bandes et réduire du coup son ‘’pouvoir ». Ce qui n’est guère à  son gout. Avec la nouvelle donne, l’on est en droit de se poser des questions. Quelle est aujourd’hui la marge de manœuvre réelle du président du comité de suivi et de la réforme de l’armée ? Est-il en train de perdre la main ? Les militaires interrogés n’ont pas souhaité faire de commentaires, se contentant juste de déclarer que seule la patrie compte. Nombreux sont les maliens qui attendaient l’annonce de son départ au front. « Cela nous aurait confirmé tout ce qu’il nous a dit au matin du 22 mars » affirme un bamakois, sous couvert d’anonymat. Pour l’instant ce n’est pas la cas… En attendant, pour ne pas disparaà®tre de la carte qui se joue actuellement autant sur le plan politique que militaire, le capitaine tente, tant bien que mal, de marquer son territoire. En atteste sa visite aux militaires blessés dans les hôpitaux avant même le ministre de la Défense et le Président par intérim. Sans oublier sa visite éclair à  Sévaré pour remonter le moral de la troupe. Une visite mise à  profit pour élever certains militaires au grade supérieur.

Quel rôle pour les médias dans le développement de l’Afrique ?

« Quel est le rôle des médias dans le processus de développement de l’Afrique ? » Cette conférence était animée par Hervé Bourges, ancien Directeur de RFI et ancien Directeur de TFI et France 3 et Tiégoum Boubeye Maà¯ga, Directeur de Publication du journal « La Nouvelle République ». La modération était assurée par Philippe Vasseur, ancien Ministre de l’Agriculture de la France. Intervenant le premier, Tiégoum Boubeye Maà¯ga dira que de 1950 à  nos jours, la marche en avant de l’Afrique n’est pas satisfaisante, que malgré les immenses potentialités du continent, celui-ci est toujours à  la dérive. Selon lui, sous la Colonisation il y avait une relative liberté, les médias de cette époque étaient des médias de l’Etat qui devaient faire la propagande du régime. De 1990 à  maintenant, a ajouté le conférencier, l’Etat a perdu le monopole des médias alors que pendant ce temps les populations végètent dans la misère. Les Médias, vecteur de démocratie en Afrique Aux dires de Maà¯ga, les médias aident l’Etat démocratique à  se bâtir, ils essayent d’informer les populations sur les exigences de la démocratie, notamment en matière électorale. De même qu’ils tentent d’expliquer les notions qui sont liées au développement, en particulier l’Aide publique au développement. Pour lui, les médias doivent faire en sorte que le tissu social ne s’effiloche pas par leur fait. Il faut que les autorités aident les médias à  devenir de véritables entreprises de presse, la démocratie ne peut se construire sans eux, quelque soit le régime, les médias doivent jouer leur rôle traditionnel, a conclu Tiégoum. Quant au deuxième conférencier, celui qu’on a qualifié de «monument » ou « monstre sacré » de la presse en France, Hervé Bourges a souligné que les médias africains doivent s’affirmer et trouver leur place. Tout en déplorant l’extraversion des élites africaines. Et d’ajouter que la presse a un rôle social à  jouer, elle ne peut le faire qu’en développant sont rôle local. Les médias africains doivent être des agents de développement, des promoteurs de civisme. Pour Bourges, sans presse réellement libre, il ne peut y avoir de véritable démocratie. Il a préconisé d’en faire plus pour l’alphabétisation, toujours plus pour la formation des journalistes.