Quels sens donner aux coups d’État en Afrique ?

Curieusement, l’Afrique a fait connaissance avec les coups d’à‰tat en même temps qu’elle savourait le délicieux plaisir de la « Liberté » qu’octroyaient les indépendances de ses différents à‰tats, acquises pour la plupart sur un plateau doré, mais seulement de couleur d’or. Depuis ces indépendances jusqu’à  ce jour, ce continent dénombre près soixante-dix coups d’Etats, qui dit-on, sont commandités par des puissances étrangères pour la plupart. Cette série de coups d’à‰tat avait conduit pour la première fois l’Organisation de l’Union africaine (OUA), en 1963 à  Addis-Abeba à  déclarer « indésirable », le nouveau pouvoir togolais qui venait de faire assassiner le président Sylvanus Olympio. Cette prise de position politique de l’organisation suprême africaine pour « empêcher » de nouveaux coups d’à‰tat sur le continent a été nulle et sans effet. A nouveau, en 1980 à  Lagos, le sergent-chef Samuel Doe et sa délégation étaient à  leur tour interdits à  ce sommet pour avoir assassiné à  la suite d’un coup d’à‰tat d’une barbarie sans nom, le président William Tolbert au Libéria. Ces sanctions politiques qui, avec le recul ressemblaient à  des mascarades, amusaient copieusement ces militaires, assoiffés de pouvoir et de gloire. Elles n’ont aucunement dissuadé ces bidasses de perpétrer leurs sales besognes avec l’aide et l’influence des puissances étrangères. En juillet 1999, l’OUA a décidé de proscrire par « décret » les coups d’à‰tat sur le continent. La même année, comme par défiance à  l’organisation africaine, des soldats pour la plupart incultes, analphabètes et sans projet de société et de gouvernement ont réalisé des coups d’à‰tat au Niger, en Serra-Leone, aux Comores et bien sûr pour la première fois en Côte d’Ivoire. Ce nouveau pouvoir ivoirien était également exclu des sommets africains. Aujourd’hui, ce sont les « barbouses » du Mali et de la Guinée-Bissau qui sont indésirables, comme l’ont été également, ces aventuriers d’un autre âge, conduit par « l’illuminé » Dadis Camara, en Guinée. Mais comment ces soldats pouvaient-ils respecter des décisions politiques décrétées par des chefs d’à‰tat, eux-mêmes arrivés au pouvoir par un coup d’à‰tat pour la plupart d’entre eux ? Quelles légitimité avaient donc t-ils pour empêcher ce que eux-mêmes avaient commis sans vergogne, au mépris de toute moralité et de la vie humaine ? Les indépendances des états africains ont suscité beaucoup d’espoir et de liberté, tant individuelle que collective sur le continent. Cependant, la démocratisation de ces états, imposée par François Mitterrand en 1990 à  la Baule, a libéré davantage toutes formes d’avidités de pouvoir et de richesse par le biais de la politique. A la suite de ce fameux sommet de la Baule, un vent de démocratisation et de liberté a pourtant suscité de grands espoirs sur le continent. Plusieurs conférences nationales se sont tenues dans ces années 90. Des élections ouvertes à  des candidats de l’opposition se sont également tenues, même si personne n’était dupe pour espérer voir du jour au lendemain des dictateurs organiser des élections et accepter de les perdre. Comme disait Sassou N’Guesso, « on n’organise pas des élections pour les perdre ». Cet état d’esprit a conduit à  la confiscation du pouvoir par tous les moyens, y compris la manipulation des populations, l’instrumentalisation de l’ethnicité et du nationalisme, les violations des droits humains et la militarisation de la jeunesse fortement désespérée par le chômage et l’absence de perspective d’avenir. De fait, cette logique de gestion du pouvoir dont l’issue à  terme reste incertaine, a favorisé l’émergence de coups d’à‰tat pour rétablir une « normalité » constitutionnelle. Ce fut par exemple le cas au Mali, en 1991 avec Amadou Toumani Touré. Au Ghana avec Jerry Rawlings en 1981. En Côte d’Ivoire en 1999 avec Robert Gué௠alors que le pays s’embourbait dans une dérive ethnique et nationaliste autour du concept douteux de l’ivoirité qui était devenu le centre de toute l’activité politique depuis 1994. Malheureusement, très souvent, la joie des populations qui saluent ces coups d’Etat dans l’espoir de voir se rétablir la normalité démocratique et constitutionnelle est de courte durée. Elles finissent par découvrir que derrière ces belles intentions se cachent souvent des désirs de pouvoir, de richesse et d’honneurs comme ce fut le cas en Côte d’Ivoire, jusqu’au drame que nous venons de vivre, dans lequel chacun sait sa part de responsabilité.

Qui veut la peau du capitaine Sanogo ?

Une tentative de contre-putsch a été immédiatement évoquée, dès le début des affrontements entre bérets rouges et bérets verts de l‘ex junte, le 30 avril au soir. Un affrontement qui a occasionné de nombreux morts de part et d’autre et parmi la population civile, sans qu’aucun bilan officiel n’ait été révélé. Les bérets verts du capitaine Sanogo ont livré en quelques heures une bataille épique contre les bérets rouges du camp des parachutistes de Djicoroni à  Bamako, considérés comme l’élite de l’armée malienne, jusqu’ à  reprise totale du contrôle de la situation. Dans un ultime sursaut, ces parachutistes (environ 300 hommes) ou bérets rouges, ont voulu contrôler la télévision nationale, l’aéroport et le camp de Kati. Les opérations étaient dirigées par le colonel Abidine Guindo, commandant des parachutistes et ancien aide de camp du président déchu ATT. Il serait l’artisan de la fuite d‘ATT du palais de Koulouba la veille du coup d’état du 22 Mars. «Â Un capitaine de plus en plus populaire ? » De son côté, le capitaine Sanogo, qui ne quitte plus son QG de Kati, doit en avoir gros sur le C’œur. Ayant rejeté en bloc les dernières décisions du sommet de la CEDEAO tenu à  Abidjan le 26 Avril, il avait clairement promis que l’Accord Cadre signé avec la CEDEAO serait respecté. Et sans autre forme de recours. La CEDEAO elle a réaffirmé certaines mesures, lors du sommet de Dakar le 3 Mai, tout en lâchant du lest sur l’envoi d’une force de sécurisation de la transition, qui ne sera désormais déployée que sur demande des nouvelles autorités maliennes de transition. Son non à  la CEDEAO, dont les décisions étaient perçues comme une atteinte à  la souveraineté nationale, et la victimisation qui a suivi les attaques du 30 avril, ont sans doute renforcé la popularité de Sanogo, auprès des populations maliennes. En est-il de même parmi les élites de Bamako ? Pas si sur, et certainement pas dans les partis politiques, qui après s’être beaucoup agités, font désormais profil bas. La vague d’arrestations qui a visé de nombreuses personnalités, dont l’ancien premier ministre Modibo Sidibé, interpellé trois fois, ou encore le leader du parti URD, Soumaila Cissé, en soins à  Paris, a sans doute calmé leurs ardeurs. Au total, 22 personnalités politiques et civiles avaient passé 48h au camp de Kati, entre le 16 et le 18 avril 2012. Les déclarations et les méthodes du capitaine semblent agacer depuis longtemps. «Â  Il est frappant de constater à  quel point un culte de la personnalité s’est crée autour de ce militaire, dès les premières heures du putsch », témoigne un journaliste sur place. Défilés de personnalités à  Kati, demande d’audiences en cascade, le chargé de la communication de la junte est débordé, parfois exaspéré, mais il tient : «Â  Vous voyez, C’’est ainsi toute la journée à  Kati. Tout le monde veut voir le capitaine… » Tout le monde peut-il encore voir le capitaine ? «Â Evidemment non ! », affirme un garde à  Kati , joint par téléphone. «Â  Depuis l’attaque du lundi, on a renforcé la sécurité autour du capitaine et du camp.» A l’entrée de la ville garnison, les contrôles de sécurité ont été renforcés et les véhicules sont fouillés un à  un par les hommes du capitaine. «Â Le Bâton magique du capitaine » «Â  Le capitaine est un enfant béni ». «Â C’’est Dieu qui le protège contre ses ennemis », témoignait un menuisier à  Bamako, au lendemain des attaques du 30 avril. En effet, Amadou Haya Sanogo, depuis son entrée en scène, se promène avec un bâton en bois étrange, qui le protégerait contre toute attaque sur sa personne, disent les plus superstitieux. «Â Il ont pourtant essayé de l’avoir un soir … », raconte une femme soldat de la garnison de Kati aux formes rondes. Elle est l’objet de plaisanteries de la part de ses collègues, mais sa bonne humeur plaà®t. Elle fait partie de ceux qui auraient empêché une énième tentative d’exfiltration du capitaine il y’a quelques semaines. Alertés, par la sortie inopportune de l’homme fort de Kati, elle et ses collègues ont intercepté le véhicule et demandé au chauffeur : «Â  O๠emmenez-vous le capitaine? ». Et cette autre tentative au début du mois d’avril, qui aurait été commanditée par des politiciens excédés par les agissements de la junte. «Â 58 millions » auraient été proposés si l’opération de liquidation avait réussie, confirme une source militaire à  Kati. «Â s’Ils ont procédé de la sorte en visant la garde rapprochée du capitaine, ils ont mis tous leurs œufs dans le même panier et les ont cassé ! », réplique un éditorialiste malien. « Bérets rouges en mission ? » Entraperçus sur la route de Samè et de Koulouba menant à  Kati, lundi 30 Avril, l’information a rapidement été transmise au camp, qui a agi en conséquence… A Kati, il y a bien eu des échanges de tirs, mais les bérets rouges n’ont pu atteindre le QG. D’autant que les mercenaires qu’ils attendaient à  l’aéroport de Bamako pour leur prêter main forte, n’ont pas pu atterrir. l’ ORTM et l’aéroport ont vite été repris et 300 hommes ne peuvent faire tomber l’ex junte, qui a reçu le renfort de la gendarmerie, de l’armée de l’air et du géni, avec des éléments venant notamment de Koulikoro. Cette tentative de contre-putsch par les bérets rouges s’inscrit-elle dans un complot qui dépasse les frontières nationales ? l’idée circule à  Bamako, que des forces étrangères ou « forces obscures » selon l’ex junte, chercheraient à  faire tomber le CNRDRE. Parmi les mercenaires arrêtés ces derniers jours et dont certains ont été exhibés à  la télévision, se trouvaient des Burkinabés, Sénégalais, Nigérians, Tchadiens et des Ivoiriens. D’autres pointent du doigt la CEDEAO, dont les dernières décisions à  Abidjan, concernant la durée de la transition et le maintien du Président intérimaire au-delà  des 40 jours, renvoient à  une mise sous-tutelle du Mali, insupportable aux yeux de beaucoup. « La junte a signé seule l’Accord Cadre avec la CEDEAO, sans consulter les forces vives de la nation, à  elle d’assumer les conséquences des mesures de la CEDEAO », affirmait l’Imam Dicko, en réaction. Son institution, le Haut conseil islamique du Mali (HCIM) a pris ses distances avec l’ex junte. Du reste, l’action de protestation des bérets rouges, fidèles à  l’ancien président ATT peut-elle avoir été suscitée et récupérée par des individus malintentionnés et soutenus par des éléments étrangers ? Ne dissout pas qui veut le CNRDRE en quelques heures. La chasse aux sorcières elle va-t-elle reprendre de plus belle ? Le commandant Mamadou Lamine Konaré, dit « Mala » et fils d’Alpha Oumar Kaonaré, soupçonné d’avoir épaulé la junte dans le coup d’état du 22 Mars, a été arrêté le vendredi 4 Mai par les hommes de Sanogo…

Le Haut conseil islamique prend ses distances avec l’ex junte…

Demeurant l’une des premières personnalités consultées par l’ex junte après le coup d’Etat du 22 mars dernier, Mahmoud Dicko semble annoncer une rupture entre son institution (HCIM) et le Comité national de redressement de la démocratie et la restauration de l’Etat (CNRDRE). «Â Mauvaise stratégie » Si le président du HCIM avait félicité la junte afin de préserver l’intérêt et la quiétude de la population malienne, Dicko désapprouve désormais la stratégie de la junte. Le président du Haut conseil islamique, est précis dans son analyse : «Â Les erreurs de l’ex junte ont commencé avec les négociations qu’elle a entamées avec la Cédéao. Bien que rejetée par son illégitimité, elle a opté pour la stratégie solitaire », signale l’imam Dicko. Concernant la signature de l’accord-cadre, l’ex junte a négocié seule avec la Cédéao en excluant les Forces vives de la nation. Affirmation nuancée par un éditorialiste, pour qui la faute revient surtout aux partis politiques d’avoir boycotté la première proposition de convention nationale de la junte. Mais l’imam de la Mosquée de Badalabougou va jusqu’à  pointer les récentes attaques dont fait l’objet le capitaine Amadou Haya Sanogo, dues à  son propre comportement. «Â  Absence de consultations  »Â  Sur les décisions de la Cédéao, fixant la transition à  12 mois, et l’ envoi de forces pour sécuriser les organes de la Transition, Dicko renvoie la junte à  ses responsabilités. l’accord cadre a lui été clairement violé par l‘institution panafricaine… Et souligne Dicko, Sanogo aurait du consulter les Forces vives de la nation pour adopter une position commune face à  ces nouvelles mesures concernant l’avenir du Mali : «Â A la surprise de tous, le chef de la junte a fait une déclaration à  la télé en donnant sa position de façon unilatérale. Toutes ces erreurs auraient pu être évitées, si le peuple était derrière le chef de la junte.», conclut Dicko.

Cheick Modibo Diarra appelle la population au calme

Alors que Bamako était en proie aux manifestations, ce mercredi, le premier ministre de transition, Cheick Modibo Diarra, a fait une déclaration télévisée dans laquelle il appelle tous les Maliens au calme. En s’adressant aux étudiants et lycéens sortis massivement pour protester contre la fusillade qui a visé Hammadoun Traoré, Cheick Modibo Diarra a demandé aux étudiants de ne pas sortir et de rester chez eux jusqu’à  ce que la situation soit clarifiée. « Nous avons assisté à  une tentative de déstabilisation du pays ces dernières 48 heures, qui se sont soldées par une victoire, temporaire, pas complète encore, de notre armée et de nos forces de sécurité, constituées notamment des ex-putschistes », a déclaré le premier ministre. «Â Attaques et mercenaires en ville » Concernant la situation sécuritaire, le premier ministre a tenté de rassurer les Maliens, en évoquant les rumeurs de distribution d’armes et la présence de militaires dans la ville : « Il y a encore quelques éléments civils et armés [Bérets rouges, commandos parachutistes fidèles à  ATT, NDLR] dans la nature, ce qui justifie la présence massive de nos forces armées et de sécurité dans la ville de Bamako, afin de sécuriser la population, le business et les bureaux ». Et de rajouter que l’aéroport de Bamako Sénou qui avait été le siège de combats entre bérets rouges et bérets verts, est ouvert, contrairement à  ce qui se dit : «Â Les gens peuvent venir et prendre leurs avions » . Le premier ministre n’a pas manqué d’évoquer la situation au Nord en promettant l’acheminement de vivres et de médicaments aux habitants du nord. «Â  Nous ne vous oublions pas, vous êtes notre priorité ». Avec une pensée pour toutes les victimes des évènements du 30 avril 2012, Cheick Modibo Diarra a annoncé qu’il participerait à  une réunion de la Cédéao sur la situation…

Guerre des bérets :  » Les frères d’armes ne doivent pas s’entretuer « 

« Deux corps au sein d’une même armée ne doivent pas s’affronter. Avec le retour à  l’ordre constitutionnel je désapprouve le coup de force des bérets rouges pour renverser la junte à  Kati », estime Bakoroba Dembélé, professeur de mathématiques. «Â Si le CNRDRE s’est montré menaçant envers les politiciens, cela ne veut pas dire qu’on doit tuer le capitaine Amadou Haya Sanogo et ses hommes. Imaginez, ils ont essayé de prendre l’ORTM, l’aéroport, et la ville de Kati, QG des putschistes. » « Les frères d’armes ne s’entretuent pas » Pour Samba Diarra, sociologue, la situation est honteuse pour l’armée malienne. « Les bérets rouges et verts sont d’abord des maliens avant d’être ses militaires. Ils sont tous les fils du pays et des frères d’armes ne s’entretuent pas. Aujourd’hui, tous ces morts constituent une perte pour le Mali. » D’autres comme Clément Diawara, pointent du doigt les militaires qui veulent rester au pouvoir : « Cet affrontement est un coup monté par la junte pour montrer les muscles à  la CEDEAO. Les militaires veulent s’accrocher au pouvoir, C’’est pourquoi ils créent toujours la confusion pour semer le désordre à  Bamako. Le moment n’est pas propice pour la bataille du pouvoir, l’important C’’est d’aller au nord libérer les trois régions occupées par les groupes armés ». « La priorité, C’’est d’aller se battre au nord « Pour Djénèba Kassambara, la priorité, C’‘est plutôt d’aller se battre contre les rebelles qui occupent les trois régions du nord. Et non de s’entretuer. Tandis qu’ Amadou Djittèye, entrepreneur, estime qu’on doit juger tous les bérets rouges arrêtés: « C’’est honteux pour les bérets rouges de vouloir venger ATT. Ils sont une minorité dans l’armée malienne. ( 300 hommes ont tenté le coup de force du 30 avril). Et des mercenaires étaient mélangés aux bérets rouges. Ils seront tous jugés avec leurs complices ». Le capitaine lui impressionne certains. Pour avoir échappé à  plusieurs tentatives de liquidation : « Amadou Haya Sanogo est un enfant béni, estime Fadiala Keita, menuisier. Personne ne peut le tuer. C’’est Dieu qui le protège contre ses ennemis. Les fidèles d’ATT qui ont tenté de le tuer ont été humiliés. La junte a ouvert les yeux des maliens sur la corruption du régime d’ATT »

Contre putsch avorté : Sanogo confirme le maintien des organes de la transition

La capitaine Sanogo, président du Comité national de restauration de la démocratie et du redressement de l’Etat (CNRDRE) a fait une déclaration sur les ondes de l’ORTM à  15h40, au cours de laquelle il a tenu à  rassurer la population : « je suis là , je vais bien ». Des mercenaires étrangers infiltrés Selon lui, les événements qui ont opposé ses troupes, les bérets verts, aux parachutistes (bérets rouges) hier soir et dans la matinée étaient destinés à  l’éliminer. Pour le chef de l’ex-junte, auteur du coup d’Etat du 22 mars, les paras étaient appuyés par des « individus mercenaires mal intentionnés qui commençaient à  s’infiltrer depuis plusieurs jours ». Selon lui, des enquêtes seraient en cours. Sanogo a par ailleurs lancé un appel aux bérets rouges qui ne se seraient pas rendus, « il est encore temps de revenir, de se rendre. Cela va faciliter les choses », a t’il déclaré. Visiblement fatigué, le chef de la junte était entouré de plusieurs membres du commandement militaire : le ministre de la défense, le colonel-major Yamoussa Camara, celui de la sécurité le Général Tiefing Konaté, et également le chef d’Etat major de la gendarmerie, le colonel Diamou Keita. Interviewé par le journaliste Makanfing Konaté, Sanogo a par ailleurs confirmé que les organes de la transition, Président par intérim, Premier ministre et gouvernement resteraient en place, conformément à  l’Accord-Cadre signé le 6 avril 2012 signé entre la CEDEAO et le CNRDRE. Première sortie du porte parole du gouvernement Dans la foulée de Sanogo, Hamadoun Touré, ministre de la communication, des nouvelles technologies et porte parole du gouvernement a pris la parole pour appeler au calme, « la violence ne saurait être la solution ». Celui qui était jusqu’à  sa nomination porte parole de l’ONUCI a présenté ses condoléances aux familles des disparus, et appelé à  parachever le retour définitif à  la vie constitutionnelle avec un retour de la sécurité sur tout le territoire.

Calme précaire à Bamako, le Camp Para attaqué dans la matinée

Mise à  jour : 17h05 Ce matin, les bérets verts du capitaine Sanogo ont donné l’assaut au Camps Para de Djicoroni, siège des forces loyalistes de l’ancien président ATT. Des tirs intenses ont résonné vers 10 heures locales, après que l’ex-junte malienne ait déclaré contrôler la situation, notamment à  l’aéroport de Bamako et au siège de la télévision nationale (ORTM), o๠de violents combats ont eu lieu dans la nuit dernière. Le calme est revenu en fin de matinée, informe l’AFP. Plus tôt dans la matinée, un militaire s’exprimant au nom du capitaine Amadou Haya Sanogo, chef de l’ex-junte, est apparu à  l’ORTM pour dénoncer l’attaque de « forces obscures » et affirmé que les forces du Conseil national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’Etat (CNRDE, junte) avaient sécurisé la capitale. Dans la capitale, les habitans vivent un 1er Mai terrés chez eux, alors que de nombreuses manifestations populaires étaient prévues. Selon des informations concordantes, le camp parachutiste dans lequel étaient retranchés les bérets rouges seraient tombé aux mains des éléments de l’ex-junte, les bérets verts. Après d’âpres combats qui ont débuté dans la soirée du lundi 30 avril, les bérets verts auraient réussi à  capturé le Colonel Abidine Guindo, commandant du camp et ancien chef d’état major particulier du président ATT. Ils seraient en route pour la ville de garnison de Kati o๠se trouve le siège de la junte. Un premier bilan des affrontements de la matinée entre l’ex junte et les bérets qui se sont repliés, fait état d’au moins 11 morts, dont 5 civils, tous tués par balles et environ 30 blessés, selon une source à  l’hôpital Gabriel Touré. De nombreux blessés y ont été transportés.

Edito : La bataille des caïmans

«Â Qu’on en finisse cette nuit !», «Â Nous traversons une grave crise et si on sort de cette période, le Mali sera sauf à  jamais ». «Â Il y a quelques chose d’étrange dans cette affaire non ?… ». Ainsi vont les commentaires dans la capitale malienne, au lendemain des évènements qui ont opposé les militaires de l’ex junte à  la garde nationale de l’ancien président Amadou Toumani Touré. Dans trois lieux clés : au Camp Para, à  l’ORTM et à  l’aéroport de Bamako Sénou. Et d’autres évoquent des forces étrangères, «Â obscures » ou encore «Â occultes». Ce qui est certain, C’’est que le ciel rouge de Bamako servira désormais d’avertissement au peuple. Ce vent bizarre n’était donc pas fortuit. Ce mardi matin, la situation est à  l’avantage de l’ex junte, qui dit avoir repris la situation sous contrôle, dans une déclaration télévisée aux premières lueurs de l’aube. Mais plusieurs personnes ont perdu la vie ce 30 avril, jour noir pour le Mali. A commencer par cette jeune étudiante, Abibata Danioko, victime collatérale de ceux qui en veulent à  Hamadoun Traoré, le secrétaire général de la toute puissante association des élèves et étudiants du Mali. (AEEM). On apprend ce mardi que le deuxième homme, blessé dans la fusillade qui visait le jeune leader, a succombé à  ses blessures, tandis que Traoré est toujours en réanimation. Si la douceur règne ce 1er mai après une pluie salutaire, le ciel lui n’a pas été clément la veille. Les caà¯mans se sont déchirés dans la capitale jusque tard dans la nuit du 30 avril au 1er mai 2012. Quelques jours après la date qui aurait du voir la tenue de l’élection présidentielle, Bamako a vécu des heures étranges, entre affrontements et menaces tous azimuts. La vie a donc repris son cours normal, même si des tirs sporadiques résonnent encore dans la capitale. Sommation ou menaces de la junte, pour intimider, ce qui est sûr, C’’est que ça n’est pas terminé. La transition qui avait pris une bonne voie, semble désormais menacée par les agissements d’une junte, échauffée par les décisions de la CEDEAO et qui ne se laissera pas écarter de la résolution de la crise malienne. Dans ce cas précis, l’institution panafricaine devra revoir ses méthodes. Et si elle devait convoquer un autre sommet extraordinaire, ces chefs d’Etat, devront user de gants et de subtilité, pour ne pas échauffer davantage les esprits à  Bamako. Quant à  la junte, qui se voit bénéficier du soutien grandissant de la population face à  l‘ingérence de la CEDEAO, elle risque de se galvaniser davantage, en entravant le processus de retour à  l’ordre constitutionnel. Et en rendant plus complexe la gestion du nord. Le salut viendra-t-il alors du peuple ? Lorsqu’il sera excédé d’un côté ou de l’autre. Comme en Mars 1991, lors de la révolution démocratique, le dernier mot risque de revenir à  la rue. Les caà¯mans envahiront alors Bamako….

Tentative de contre-putsch à Bamako, des morts et des blessés à l’ORTM

Mise à  jour : 15h14 Aux alentours de 18h, des coups de feu ont retenti le lundi 30 avril en plusieurs endroits précis de la ville de Bamako : camp parachutiste, cité administrative et ORTM, o๠plusieurs morts auraient été dénombrés. Des combats auraient opposé les bérets verts du capitaine Amadou Haya Sanogo, auteurs du putsch du 22 mars qui a mis fin au régime du président ATT, et les bérets rouges, de la compagnie parachutiste dont est issu le président déchu. La tentative des bérets verts d’arrêter le commandant des paras, le Colonel Abidine Guindo, ancien aide de camp d’ATT qui se trouve retranché dans le camp situé à  Dijicoroni, serait à  l’origine de la confrontation. Après plusieurs heures de combats faisant plusieurs morts, les bérets rouges auraient pris l’ORTM, la télévision nationale, aux alentours de 21h30. Mais après plusieurs informations contradictoires, les bérets verts auraient repoussé les assaillants. Des combats à  l’arme lourde se seraient poursuivis au camp militaire de Kati o๠se trouve le siège du Comité national de restauration de la démocratie et de redressement de l’Etat (CNRDRE), présidé par le capitaine Sanogo. A 22h30, le CNRDRE annonçait avoir la situation sous contrôle, une déclaration est prévue ce soir sur les ondes de l’ORTM. Mardi au petit matin, un militaire s’exprimant au nom du capitaine Sanogo est apparu à  l’ORTM pour dénoncer « des forces obscures » à  l’origine des « attaques » et affirmé que les forces du Conseil national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’Etat (CNRDE, junte) avaient « sécurisé » les trois sites stratégiques visés. « Nous tenons l’ORTM, l’aéroport et Kati. Nous maà®trisons la situation. Il y a eu des morts mais pour l’instant on ne peut pas donner le nombre », a déclaré à  l’AFP un officier de communication de la junte. Un soldat de la junte a affirmé de son côté avoir vu « au moins 9 morts entre Kati et Bamako », ajoutant que « des bérets rouges ont été arrêtés », sans préciser le nombre. Dans la matinée du 1er Mai, de nouveaux combats ont opposé la junte aux Bérets rouges. Des tirs intenses ont résonné vers 10 heures locales, après que l’ex-junte malienne ait déclaré contrôler la situation, notamment à  l’aéroport de Bamako et au siège de la télévision nationale (ORTM), o๠de violents combats ont eu lieu dans la nuit dernière. Le calme est revenu en fin de matinée, informe l’AFP. Contre Putsch ? Il s’agirait donc d’une tentative de contre putsch, quelques jours après le sommet de la CEDEAO qui s’est tenu à  Abidjan le 27 avril, et dont les résolutions avaient été rejetées par le CNRDRE et une partie de la classe politique. Alors qu’un gouvernement de transition dirigé par Cheikh Modibo Diarra venait d’être nommé, les chefs d’Etat ouest-africains avaient décidé de porter la durée de la transition à  12 mois, de prolonger d’autant le mandat du président par intérim, et d’envoyer des troupes pour protéger les organes de la transition. Depuis plusieurs jours, des tensions étaient nées au sein de l’armée, les bérets verts du capitaine Sanogo souhaitant garder le pouvoir, voire même présider la transition, alors que d’autres, notamment des officiers supérieurs, avaient opté pour un retrait de l’armée. Cette tentative de contre coup d’état se déroule alors que le Nord Mali est en proie à  une grave crise, occupé par la rébellion armée du MNLA qui revendique l’indépendance de l’Azawad, et des groupes islamistes armés, tels qu’AQMI et ses alliés Ancar Dine, MUJAO et Boko Haram.

Accord Cadre : la CEDEAO et la junte à couteaux tirés

Si l’institution panafricaine avait déjà  été décriée pour avoir imposé un embargo aux Maliens dès les premières heures du putsch, sa légitimité est désormais contestée par bon nombre d’observateurs. En cause, sa capacité à  gérer les crises maliennes et bissau-guinéennes. On se souvient que la mission de cinq chefs d’Etat, mandatée par le président en exercice Alassane Dramane Ouattara, n’avait pu atterrir à  Bamako pour discuter d’un retour rapide à  l’ordre constitutionnel avec la junte. Cette fois, la CEDEAO met le paquet et annonce une transition d’une durée de 12 mois, dirigée par le Président intérimaire Dioncounda Traoré, alors que la constitution ne prévoit qu’une durée de 40 jours pour ce dernier.  » La junte rejette les décisions de la CEDEAO  » Aussitôt la décision prise à  Abidjan, le capitaine Amadou Haya Sanogo n’a pas attendu pour monter au créneau. Dans une intervention télévisée, le putschiste a annoncé que le délai constitutionnel des 40 jours du président intérimaire sera respecté. En clair, avertit l’ex-chef de la junte, pas question de prolonger de ce délai. Que va-t-il se passer désormais du côté des putschistes, qui venaient d’obtenir trois ministères clés dans le nouveau gouvernement de transition que préside Cheick Modibo Diarra. La Cédéao a également annoncé l’envoi de 600 hommes à  Bamako pour sécuriser les organes de la transition. « A quoi va servir cette force ?, s’indigne un citoyen. Ce qu’il nous faut, C’’est de l’aide au nord, pas à  Bamako ! ». Face à  la radicalisation des décisions de la CEDEAO, d’aucuns estiment qu’elles sont dictées par les récentes arrestations de personnalités politiques à  Bamako par la junte.  » Violation de l’Accord Cadre » Alors que l’Accord cadre du 1er Avril, signé entre la junte et la CEDEAO, avait fixé une convention nationale o๠devait être discutées la durée et les modalités de la transition malienne suite au coup d‘état du 22 Mars, cette ingérence de la CEDEAO dans le processus normal de retour à  l’ordre constitutionnel, confirme une gestion bizarre de la crise malienne, selon un observateur. Au profit de qui ? «Ces chefs d’Etat qui sont pour la plupart arrivés au pouvoir de façon anti-démocratique, peuvent-ils appliquer de telles décisions au peuple malien ?, s’interroge un éditorialiste. Pour d’autres, la sortie médiatique du capitaine Sanogo, n’arrange pas le processus de sortie de crise. Si le capitaine est dans son droit de rester attaché à  l’esprit de l’Accord-cadre, il ne fait aucun doute que la junte compte revenir au pouvoir après les 40 jours du président Dioncounda Traoré, exigé par la Constitution. Les putschistes chez Blaise Selon plusieurs sources, une délégation de la junte militaire devrait se rendre aujourd’hui à  Ouagadougou chez le médiateur de la CEDEAO. Il s’agira pour les militaires de signifier au président Blaise Compaoré leur opposition à  la décision du sommet et de proposer une alternative. Mais en attendant, les observateurs sont formels. De grosses incertitudes planent désormais sur la transition. Et l’après 17 mai (devant marquer la fin de l’intérim), s’annonce sous haute tension entre le président Dioncounda, appuyé par la CEDEAO et l’ex chef de la junte. Ce blocage du processus intervient au moment o๠le gouvernement de transition, mis en place le 25 avril par Cheick Modibo Diarra, tient aujourd’hui une réunion de cabinet. Sur leur table, plusieurs dossiers brûlants, dont l’épineuse question du Nord et la crise humanitaire. Pour la gestion de la transition, tout reste à  jouer en attendant un compromis entre les émissaires de la junte et le médiateur Blaise Compaoré.

Le blocage persiste après les refus du capitaine Sanogo

Les médiateurs, arrivés en urgence à  Bamako samedi matin, n’ont pas réussi à  infléchir les positions du capitaine, alors que la population civile désapprouve les choix de la Cédéao. A Bamako, le blocage continue depuis vendredi, au moment o๠l’on a appris dans la capitale malienne les décisions prises la veille par la Cédéao. Rapidement, dans la journée de vendredi, la fronde est montée du camp de Kati sur les hauteurs de Bamako, sous forme de fin de non recevoir de la part des militaires. Le capitaine Sanogo a consulté des personnalités influentes dans la nuit de vendredi à  samedi, avant de s’entretenir avec les médiateurs burkinabè et ivoirien. La pression autour de lui a été très forte. Des soldats « sur les dents », qui ont compris que le texte de la Cédéao les mettaient à  l’écart, des hommes qui ont même menacé samedi les deux émissaires de la Cédéao Djibril Bassolé et Adama Bictogo, armes aux poings samedi en criant « A bas la Cédéao ! ». Un véritable coup de sang dans le camp de Kati, que le capitaine Sanogo a dû calmer à  plusieurs reprises. Les militaires ont même tenté de bloquer la voiture des médiateurs à  la sortie de ce camp militaire. La Cédéao accusée d’avoir outrepassé ses prérogatives En réalité, les Maliens ne comprennent pas bien que la Cédéao décide unilatéralement de l’avenir de la transition de leur pays. En effet, il y a un grand écart entre le premier accord-cadre signé le 6 avril dernier et la déclaration des chefs d’Etat de la Cédéao le 26 avril. Dans le premier texte, la junte devait participer au débat sur le rôle qu’elle pourrait jouer dans les mois à  venir et aussi sur la durée consensuelle de la transition. Mais trois semaines plus tard, jeudi dernier, le ton a été très différent et beaucoup plus radical vis-à -vis des militaires qui ont été priés de se soumettre aux autorités civiles. Au Mali, les différentes décisions prises par la Cédéao ont vraiment été vécues comme un affront, comme une mise à  l’écart. Ce n’est pas seulement au camp de Kati que l’on désapprouve cette attitude. Beaucoup de Maliens estiment qu’on ne peut pas revenir sur le premier accord, que ce n’est pas honnête. « Il y a un capitaine à  bord » dit le maire d’une des villes du nord du pays, et « il faut faire avec lui ». Ce dimanche matin la Copam, une coalition de partis d’associations et de syndicats favorable au capitaine Sanogo, a décidé d’organiser jeudi une marche anti-Cédéao. Dans une déclaration, la Copam se dit décidée à  faire échouer cette tentative de déstabilistion et d’humiliation du pays. La Cédéao est donc entièrement invitée à  revoir sa copie.

Gouvernement de transition : les jeux sont faits, rien ne va plus!

Les Maliens attendaient un gouvernement de combat resserré autour de 15-20 membres maximum. C’’est finalement une équipe de 24 ministres, contre 29 dans l’équipe sortante, qui a été annoncée. La nomination une semaine plus tôt de Cheikh Modibo Diarra à  la Primature avait déjà  suscité quelques émois, non pas à  cause de son profil, mais plutôt du procédé. Aucune concertation de la classe politique ni de la société civile n’avait eu lieu au préalable, donnant l’impression d’un choix imposé par la junte et la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). La classe politique, grande perdante Une semaine plus tard, les forces vives de la nation ont une nouvelle fois été mises devant le fait accompli. C’’est un gouvernement de technocrates qui a été nommé, au grand dam d’une classe politique qui n’y compte aucun représentant. Sans aller jusqu’à  intégrer des politiciens dans le nouveau gouvernement, le Premier ministre aurait été mieux inspiré de consulter toutes les forces vives, dont il aura forcément besoin pour relayer sa politique auprès des populations. Des découpages discutables Alors que le président renversé, Amadou Toumani Touré (ATT), avait découpé certains grands ministères uniquement pour satisfaire ses amis politiques, le nouveau gouvernement retrouve une architecture plus traditionnelle à  travers le regroupement de l’agriculture, de l’élevage et de la pêche, mais aussi de la communication et des nouvelles technologies, du tourisme et de la culture. Il est néanmoins regrettable que le grand ministère de l’Education nationale reste divisé, de même que celui des Affaires étrangères, toujours indépendant de celui des Maliens de l’extérieur. Plus surprenant encore, le ministère de la Jeunesse et des sports a été éclaté. En ces temps de guerre, de crise alimentaire et de ralentissement économique, le Mali peut-il se payer ce luxe ? Avantage à  Blaise Compaoré et au CNRDRE Depuis l’éclatement de la crise politico-militaire le 22 mars dernier, beaucoup craignaient que le Mali ne soit mis sous la tutelle du Burkina Faso. C’’est aujourd’hui chose faite. Après l’humiliation de la rencontre de Ouagadougou, les 14 et 15 avril, o๠quasiment toute la classe politique malienne s’était déportée pour une réunion qui n’a servi à  rien, le président Blaise Compaoré a obtenu la nomination de son conseiller spécial Sadio Lamine Sow au poste stratégique de ministre des Affaires étrangères du Mali. Ce dernier saura t’il s’émanciper de son ancien maà®tre qu’il a servi pendant plus de 20 ans? Difficile à  croire quand on sait que le médiateur désigné par la CEDEAO n’est autre que le président burkinabé… Les militaires à  la tête de ministères clés Un mois après son coup d’Etat du 22 mars, le Comité national de redressement de la démocratie et de restauration de l’Etat (CNRDRE) reste au centre du jeu. Bien que la junte ait concédé un semblant de retour à  l’ordre constitutionnel à  travers la désignation de Dioncounda Traoré comme président par intérim, elle garde la main sur les principaux leviers du pouvoir, comme l’atteste la présence de trois de ses membres à  la tête de ministères clés. Le colonel major Yamoussa Camara, qui connaà®t bien le Nord Mali, le Général Tiéfing Konaté, et le Colonel Moussa Sinko Coulibaly obtiennent respectivement la défense, la sécurité, et l’administration territoriale. Ce dernier, diplômé de la prestigieuse école militaire française St Cyr, est le directeur de cabinet du chef de la junte, le capitaine Amadou Haya Sanogo. Le message est donc clair : les anciens putschistes vont contrôler le processus électoral. Mais au profit de qui ? Le Général Moussa Traoré est de retour l’autre grand gagnant de ce casting gouvernemental est l’ancien président, le général Moussa Traoré, victime d’un putsch le 26 mars 1991 à  l’instigation d’un certain ATT. La nomination de son gendre à  la Primature était déjà  un premier signal, qu’est venu renforcer la désignation de certains de ses proches, tels que son ancien ministre Tienan Coulibaly, jusqu’ici PDG de la Compagnie malienne de développement des textiles (CMDT), ou encore Léo Sidibé nommé à  l’agriculture. Un gouvernement d’union nationale ? Si le Premier ministre avait voulu donner un signal fort en direction des populations du Nord qui sont dans leur grande majorité hostiles à  la partition du Mali, il aurait nommé des ministres issus des communautés blanches, arabes et touarègues. Or, il n’en est rien. La nomination de Madame Alwata Ichata Sahi, une touarègue noire, est un cache misère qui ne fait que verser de l’eau au moulin du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA). Ce dernier qui occupe avec ses alliés tout le Nord Mali a proclamé l’indépendance du «Â territoire de l’Azawad », le 6 avril 2012, prétextant leur exclusion par le pouvoir de Bamako. Dans le contexte actuel, Cheick Modibo Diarra et ses parrains ont donc commis une faute morale et une faute politique. Au lieu d’annoncer un véritable gouvernement d’union nationale qui réunisse toutes les composantes de l’ensemble national, ils ont choisi de prendre acte de la partition effective du grand Mali.

Le poing levé du FDR pour la démocratie

Ce qu’il faut retenir de ce meeting tenu samedi 21 avril au Palais de la Culture Amadou Hampaté Ba de Bamako, C’’est la salle archicomble et la fougue des membres du Front Uni pour la Sauvegarde de la République galvanisés par les récentes arrestations de personnalités politiques par la junte au motif d‘un contre coup d‘état. «Â  Les militaires ne font que distraire la population » Constitué d’une centaine d’associations de la société civile et d’une cinquantaine de partis politiques, le FDR a réuni plus de 3000 personnes pour faire passer un seul message, celui de la sauvegarde de la démocratie et le retour à  l’intégrité territoriale du Mali. Pour Siaka Diakité, Président du Front, la population malienne doit agir et ne peut continuer à  se laisser distraire par les militaires : D’autres leaders du FDR comme Tiéman Coulibaly ou Maà®tre Kassoum Tapo, tous deux galvanisés par leur 48h de détention au camp de Kati, n’ont pas fait dans la dentelle : «Â  Tolérance zéro face à  la violation de la constitution », a clamé l’avocat à  la foule, le poing en l’air. Expliquant les causes de leur arrestation par le CNRDRE, Maà®tre Tapo et Tiéman Coulibaly, ajouteront que la junte n‘a pas apprécié leur déclaration à  Ouagadougou concernant l‘application de l‘Accord Cadre et qui doit en principe respecter la Constitution maliennede 1992 : , précise Kassoum Tapo profitant de l’occasion. «Â  l’appel à  la CEDEAO pour libérer le nord «Â  Iba Ndiaye, premier vice président de l’Adema, a lui lancé un vibrant appel à  la CEDEAO pour qu’elle intervienne de toute urgence et renforce l’armée malienne pour reconquérir les régions occupées du nord. Au moment o๠Cheick Modibo Diarra, Premier ministre appelle à  la négociation avec les occupants du nord dans son premier discours à  la nation, certains, échauffés par les agissements de la junte à  Bamako, réclament l’offensive : Pour Amadou Koita, président de la jeunesse FDR, le CNRDRE ferait mieux d’encercler les régions du nord au lieu de faire pression sur la télévision nationale et transformer le camp Soundiata de Kati en « bounker ». Grands absents à  ce meeting du FDR, Soumaila Cissé, le leader de l’URD qui s’est envolé ce week-end à  Paris pour y recevoir des soins. Son interpellation la semaine dernière lui a valu quelques blessures sérieuses. Et Modibo Sidibé, le candidat indépendant qui en était à  sa troisième interpellation… Le Front poursuit lui son action.

Et la junte rentra dans sa caserne…

A tous ceux qui protestent contre les agissements de la junte, il est vain de croire que la formation du gouvernement va y changer quoique ce soit surtout, si les super ministères convoités par les membres du CNRDRE leur sont octroyés d‘office. Justice, Mines, Santé, Sécurité Intérieure, Défense bien entendu, les supputations enflent à  Bamako. Consultations nous dit-on. Elles devraient donc voir leur terme ce lundi. Dans son fief de Kati, Sanogo a reçu la visite de toutes les autorités dites constitutionnelles de ce pays, à  commencer par le président de la République par intérim, ce qui choque une bonne frange de la population. Mais C’’est oublier que C’’est de Kati qu’est parti la révolte. Que C’’est encore de Kati que C’’est négocié le fameux et flou Accord Cadre qui régit notre république à  trois têtes. Et que C’’est certainement à  Kati que tout s’achèvera, lorsque les militaires décideront de rentrer dans leurs casernes, en laissant V8, honneurs et courtisaneries à  tout va.. Du reste, l’homme qui nous intéresse, tout autant que le capitaine Haya, dont l’épouse est couverte de basins aujourd’hui, elle qui vendait fripes et «Â froufrous » il y a quelque temps, C’’est le Docteur Diarra, notre astrophysicien à  la barbe poivre et sel, à  la sagesse planétaire. Dans son discours, Cheick Modibo Diarra l’a affirmé : ‘ Nous ne négocierons jamais le couteau sous la gorge ». Certes, mais à  l’heure o๠nous devons négocier, le Mali se trouve tiraillé entre volonté de négocier et d’attaquer. Blessé dans son orgueil, le sursaut national est en marche, dans la rue comme dans les «Â grins.». Pourtant, il faudra encore patienter dans un pays o๠tout se règle d’abord par la langue, le verbe. La forme comptant autant que le fond, nous ne chercherons pas à  décrypter un discours qui n’a pas d’autre visée que de jouer le jeu politique normal et d’obéir à  une règle circonstancielle. Il est donc plus intéressant d’attendre la composition de ce futur gouvernement, qui n’aura qu’une seule mission : Recouvrer l’intégrité du territoire national. Et faire fi des considérations partisanes et surtout, arrêter de gesticuler autour du capitaine Haya Sanogo. Cela ne rendra pas service à  la nation malienne.

Douanes : l’heure des comptes

Dans les jours qui ont suivi le coup d’Etat les passants de la Tour d’Afrique ont pu assister, médusés, au pillage de la direction générale des douanes. Des enfants, des hommes en uniforme sortaient de l’établissement les bras chargés de cartons. Aujourd’hui c’est l’heure des comptes. Retour au travail manuel «Â Jusqu’au 22 mars, la douane était dans une dynamique de modernisation très avancée. Toute la chaà®ne de dédouanement avait été informatisée », explique le directeur général Modibo Maà¯ga. Malheureusement, déplore-t-il, tous les équipements ont été saccagés ou emportés. «Â Chaque fois que l’on s’attaque à  des biens publics, C’’est un recul. » Les services tentent tant bien que mal de se remettre en marche. Certains bureaux stratégiques tels que ceux des régimes économiques, des exonérations et des Maliens de l’extérieur ont été relogés à  Sotuba. Certains services de la direction générale sont quant à  eux hébergés par le bureau des produits pétroliers. Pour le reste, c’est le retour aux anciennes méthodes manuelles. Les pertes occasionnées se comptent en milliards de FCFA. Sur une prévision de 26 milliards la douane n’a récolté que 16 milliards en raison des troubles qu’a connus le Mali ces dernières semaines. Les services n’ont pas travaillé entre le 22 et le 27 mars, notamment en raison de la fermetures des frontières qui a stoppé les mouvements de marchandises. La douane vache à  lait de la junte ? Répondant aux rumeurs selon lesquelles la douane serait devenue la vache à  lait de la junte, Modibo Maiga affirme que «Â la douane n’a ni le pouvoir, ni les moyens de donner l’argent à  qui que ce soit car elle ne manipule pas d’argent liquide ». l’administration des douanes, affirme-t-il, veille à  la régularité des procédures de dédouanement et au contrôle des opérations. « Le recouvrement et l’encaissement relèvent exclusivement du Trésor », précise-t-il.

IBK appelle à la libération des personnalités arrêtées

Depuis le 16 avril 2012, des personnalités militaires et politiques ont été victimes d’arrestations extrajudiciaires par des soldats en armes. Ces arrestations vont à  l’encontre de l’Etat de droit et du respect des libertés individuelles, des principes partagés par l’écrasante majorité du peuple malien. Ce sont des actes inacceptables que je condamne avec la plus grande fermeté. Alors que la nomination le 17 avril d’un Premier ministre de transition est un pas de plus vers la normalisation, ces actes portent une atteinte grave au processus de retour à  une vie constitutionnelle. Les arrestations arbitraires sapent la confiance entre les différentes parties prenantes alors que l’heure est à  l’union nationale. Je demande aux responsables du CNRDRE de libérer toutes les personnalités arrêtées, et encourage le Président de la République par intérim et le Premier ministre de transition à  tout mettre en œuvre pour que leur libération intervienne sans délai. Ibrahim Boubacar Keà¯ta Ancien Premier ministre Président du Rassemblement pour le Mali (RPM)

Cheick Modibo Diarra, de la NASA à la Primature du Mali

De Nioro du Sahel o๠il vit le jour en 1952, aux Etats Unis o๠il s’est distingué par ses travaux, Cheick Modibo Diarra a eu un parcours exceptionnel. Son baccalauréat en poche en 1972, il part étudier les mathématiques et la physique à  l’Université Pierre et Marie Curie à  Paris, puis l’Ingénierie Aérospatiale aux à‰tats-Unis à  Washington, o๠il obtiendra la nationalité américaine. C’’est à  la Howard University qu’il atterrit, grâce à  une bourse d’études. En 1989, l’année o๠le monde basculait avec la chute du mur de Berlin, une rencontre bouleverse le destin de Cheick Modibo Diarra. Alors qu’il se destinait à  une carrière d’enseignant, il rencontre deux chercheurs de la NASA qui lui proposent d’intégrer le laboratoire de propulsion des fusées, le fameux Jet Propulsion Laboratory. Quelques années plus tard, l’enfant de Ségou deviendra navigateur interplanétaire. Il travaille d’abord sur le projet d’envoi de la sonde Magellan dans l’espace, un univers qui l’a toujours fasciné. En juillet 1997, son heure de gloire est arrivée. Il conçoit et envoie une sonde qui atterrit sur Mars avec à  son bord un robot capable de se mouvoir, de réaliser des analyses scientifiques et de prendre des photographies de la planète rouge. La mission Pathfinder est un succès, et C’’est désormais une notoriété interplanétaire qu’acquiert Cheikh Modibo Diarra, devenu l’icône de tout un continent. Ses compatriotes maliens, notamment les jeunes, en sont fiers, même s’ils ne comprennent pas très bien ce qu’est un navigateur interplanétaire… Engagement social…et politique Après ses années au service de la NASA et des Etats-Unis, Cheikh Modibo Diarra se retourne vers son continent. Il y crée, en 1999, l’association Pathfinder Foundation pour l’Education et le développement, afin de susciter l’intérêt des jeunes, en particulier les filles, pour la science. A Bamako, il initie un laboratoire de recherche solaire. Cheikh Modibo s’envolera en 2006 vers Johannesburg pour y présider le département Afrique de Microsoft. Même s’il n’a qu’un rôle protocolaire et de représentation, il continue son combat pour réduire la fracture numérique et faire profiter le continent de toutes les avancées technologiques en promouvant de nombreuses initiatives sur le continent. Il est également Ambassadeur de bonne volonté de l’Organisation des Nations Unies pour la Science, l’Education et la Culture (UNESCO) depuis 1998. En 2011, ce père de trois enfants, marié à  la fille de l’ex-président Moussa Traoré se lance en politique. Le 6 mars, avec la bénédiction de son beau-père, il porte sur les fonds baptismaux un nouveau parti, le Rassemblement pour le développement du Mali, (RPDM), dont il devient le président. Le RPDM ambitionne alors de construire un projet de société basé sur l’égalité des chances pour tous les citoyens. Ses dirigeants présentent leur nouvelle formation comme « un parti qui défend les intérêts du peuple, l’égalité des chances, l’ équité, la souveraineté de l’Etat et respectueux des droits de l’Homme ». Cheick Modibo Diarra annonce dans la foulée qu’il sera très probablement candidat à  la présidentielle de 2012. «J’ai toujours fait de la politique. Au sens étymologique du mot, politique veut dire résoudre les problèmes de la Cité. Elle ne signifie pas aller faire des discours, courir de gauche à  droite. Je pense que J’ai toujours participé à  la résolution des problèmes de la Cité et continuerai à  résoudre autant de problèmes que je peux », déclarait-il ce jour là . La revanche du Général Moussa Traoré ? Comme le stipule l’Accord Cadre du 6 Avril signé entre la junte et CEDEAO, CMD devra pourtant renoncer à  son ambition présidentielle. Si l’on en croit les intentions de vote en sa faveur, il a sans doute fait le bon choix. Mais sera t’il à  la hauteur de l’enjeu ? La tâche ne sera sans doute pas facile pour ce Premier ministre « de consensus », pourtant nommé par le CNRDRE et le médiateur, sans que la classe politique et la société civile n’aient été consultées. Saura t’il s’imposer ? Aura t’il les coudées franches face aux militaires et au vieux renard politique qu’est Dioncounda Traoré ? Originaire de Ségou comme le capitaine Sanogo, chef de la junte, Cheick Modibo Diarra pourra aussi jouer de son lien de parenté avec Moussa Traoré, respecté par tous les militaires. Vingt ans après le coup d’état contre le Général dictateur, le capitaine Sanogo aura fait fuir son tombeur ATT, pour ensuite installer son gendre à  la Primature. Certains appellent cela la revanche de l’histoire. Quant à  l’attitude du peuple malien, elle dépendra sûrement de la capacité de l’homme de la Nasa, surtout connu dans les milieux informés, à  poser des actes justes dès les premiers jours. Selon ses proches, il a toutes les qualités pour être « l’homme de la situation ». Son charisme, sa stature internationale et surtout sa connaissance des réseaux financiers internationaux, ainsi que « l’estime » dont il jouit auprès des Partenaires techniques et financiers devraient lui servir pour l’immense tâche qui l’attend. A commencer par celle de former un gouvernement d’union nationale.

Bienvenue dans la République bananière du Mali

Entre la République Bananière de Kati et la République hôtelière du Salam, il y a 15km. Pour ceux qui n’ont pas compris grand chose à  cet Accord Cadre signé entre la junte et la Cédéao, il y a plusieurs niveaux de lecture. Et les Maliens sont entrain de s’en rendre compte. Chaque jour qui passe, montre une omniprésence de la junte dans les affaires du pays. «Â J’ai les forces armées… », déclarait le capitaine Amadou Sanogo, chef suprême dans son royaume de Kati à  nos confrères du Républicain. De Kati, les ordres continuent à  pleuvoir. Les nominations se poursuivent et les communiqués du CNRDRE pleuvent sur la télévision nationale… en langue bambara s’il vous plaà®t. Le capitaine Sanogo continue de s’adresser aux Maliens en faisant fi de la légalité constitutionnelle et avec l’aval de la CEDEAO. Dernière démonstration de la junte, l’arrestation en cascade ce mardi 17 Avril de personnalités politiques dont l‘ancien Premier ministre Modibo Sidibé, ou celle plus musclée de Soumaila Cissé, blessé et en soins à  l’hôpital de Kati. OnT suivi, Bani Kanté, un ancien conseiller à  la présidence et représentant des intérêts libyens au Mali tout comme un général de gendarmerie; «Â Pourquoi le capitaine ne respecte t’il pas la Constitution et les accords signés ? Il n’a qu’à  attendre son heure et le moment venu, au terme des 40 jours, il pourra se prononcer à  nouveau », commente un bamakois excédé. Entre la constitution malienne et l’Accord Cadre, il y a mélange des genres dans la pratique institutionnelle. La junte en acceptant de signer l’Accord Cadre joue sur les nerfs du peuple, tandis que le président par Intérim joue une course contre la montre face à  l’urgence du nord. La rencontre de Ouagadougou a elle abouti à  une déclaration vide, qui se répète et convoque une concertation des forces vives pour poursuivre la discussion sur les modalités de la transition. Passons ! Dioncounda Traoré peut-il se permettre de prendre part aux gesticulations de la junte à  Bamako en se mêlant de ses manœuvres politiciennes. En dépêchant un émissaire à  Nouakchott, pour mobiliser la Mauritanie dans la négociation avec les envahisseurs du nord, il a plutôt amorcé un début de solutions qui pourrait être compromis par les coups d’éclat du CNRDRE. D’un autre côté, le consensus voulu par tous autour de Dioncounda semble bien fragile. Durée de la transition ? Les partis politiques et la société civile ne sont pas d’accord. En attendant le retour total et définitif à  l’ordre constitutionnel, la junte du capitaine Sanogo semble décidée à  montrer les muscles au peuple malien. Bienvenue dans la République Bananière du Mali.

Nouvelle vague d’arrestations: tentative de putsch?

Alors que les maliens retenaient leur souffle en attendant la nomination d’un Premier Ministre pour diriger la transition et préparer les élections, la junte vient de procéder à  l’arrestation de personnalités politiques et militaires entre 23 heures hier lundi et tôt ce mardi matin. Cinq sont d’anciennes figures du régime d’Amadou Toumani Touré. Il s’agit notamment de l’ancien ministre de la défense Sadio Gassama, le directeur général de la police nationale, Mahamadou Diagouraga, l’ancien chef d’état-major particulier d’ATT, le général Hamidou Sissoko dit « Man » et de l’ancien Premier ministre, Modibo Sidibé. C’’est la troisième fois depuis le coup d’Etat que ce dernier se retrouve entre les mains du CNRDRE. Sa famille se dit inquiète et au niveau des clubs de soutien qui appuyaient sa candidature, on crie à  l’acharnement. Soumaà¯la Cissé, précédemment président de la Commission de l’UEMOA et candidat de l’URD à  l’élection présidentielle a également été arrêté. Blessé, il aurait été conduit par une ambulance à  Kati. Le groupe de militaires, dont certains étaient cagoulés, s’est également rendu aux domiciles de leaders politiques tels que le Pr Ali Nouhoum Diallo (COMMODE), Tiébilé Dramé (PARENA), Me Kassoum Tapo et Ibrahima Ndiaye (ADEMA). Diversion ou chasse au sorcières ? Plusieurs rumeurs courent à  propos des raisons de ces interpellations. La plus reprise est celle d’une tentative de coup d’Etat fomentée par ces personnalités. Mais cette raison est repoussée du revers de la main par les analystes qui pensent qu’il s’agit d’une manœuvre de diversions de la junte pour ne pas tenir les engagements pris dans l’Accord-cadre du 6 avril dernier. Une chose est sure, ces personnalités sont plus ou moins gênantes pour la junte du CNRDRE. Le général de brigade Sadio Gassama, dont la rencontre avec les mutins a dégénéré le 21 mars dernier, était soumis à  des soins de santé suite à  une blessure grave. Selon plusieurs observateurs, son arrestation par la junte serait liée au fait que l’officier reste très influent dans les rangs des forces armées et de sécurité. « La junte a des raisons de ne pas être rassuré tant que des officiers comme Sadio Gassama sont dehors. Car il a encore de nombreux fidèles parmi les sous-officiers et les hommes de rang », nous confie ce militaire sous couvert d’anonymat. Il voit en cette arrestation une mesure de prudence de la junte plutôt qu’un règlement de compte gratuit. Quant au patron de la police nationale, il pourrait lui être reproché sa gestion de la mise en œuvre des Accords d’Alger avec la rébellion Touareg de 2006-2008, dont il assurait la présidence du Comité de suivi avant sa nomination. Mahamadou Diagouraga est considéré comme l’un des fidèles de l’ex-président ATT.

« Le CNRDRE restera maître du jeu », dixit Bakary Mariko

Selon Bakary Mariko, le coup d’Etat du 22 Mars est salutaire car il a permis d’étaler au grand jour la corruption du régime d’ATT. Le porte parole du CNRDRE n’y va pas de main morte avec l’ancien pouvoir : « J’ai été toujours contre le pouvoir d’ATT qui se réduisait à  une poignée d’individus s’enrichissant sur le dos de la population. ». Sur le nord, le constat est plus sombre : « Le président ATT a fait la gestion de la crise du nord une vraie mafia. Plus de 1500 milliards ont été investis dans le nord qui ne compte que 80 communes sur 703 communes. » «Â En France, le coup d’état est salué » En France en particulier, le coup d’Etat a été salué par beaucoup de Maliens, affirme Bakary Mariko. Une autre frange de la diaspora condamne malgré tout le coup d’état en multipliant les marches pour le retour à  l’ordre constitutionnel. Sur l’Accord Cadre, le jeune Bakary Mariko estime que le capitaine Sanogo a été patriote en rendant le pouvoir aux civils. Même si pour l’heure, le retour à  l’ordre constitutionnel se fait étape par étape, avec la restauration de l’article 36 de la constitution du 25 février 1992. Mais Bakary Mariko affirme que le CNRDRE restera maà®tre de jeu dans l’application de l‘Accord cadre et la nomination du premier ministre de transition. Un rôle clé pour la junte selon le porte-parole du CNRDRE et qui ira bien au-delà  des 40 jours de l’intérim. Bakary Mariko est l’ancien Secrétaire Général du bureau de l’Association des Elèves et Etudiants du Mali à  l’école normale administrative (l’ex ENA) en 1998. Il en a ensuite été exclu après sa soutenance avant de s’envoler en France.

La lettre de démission d’ATT

« En ce moment critique de l’histoire de notre pays, qu’il me soit permis d’avoir une pensée profondément douloureuse pour les populations des régions de Tombouctou, Gao et Kidal, en particulier mes amis les enfants qui souffrent du fait de l’occupation inacceptable de cette partie de notre territoire. A la suite de l’élection du président de la République en Avril 2007, les Maliennes et les Maliens m’ont renouvelé leur confiance. En application des dispositions de l’article 37 de la Constitution du 25 février 1992, J’ai pris fonction le 08 juin 2007 pour un mandat de cinq (05) ans. Dans le prolongement des acquis de mon mandat précédent, J’ai consacré toute mon énergie et toute mon imagination à  la satisfaction exclusive des besoins essentiels de mes compatriotes et à  la réalisation d’un Mali émergent. Aujourd’hui, il ne me revient pas de dresser le bilan de mes deux quinquennats. Les historiens s’en chargeront. Toutefois, depuis quelques mois, notre pays est en proie à  des convulsions sur le triple plan sécuritaire, politique et social. Cette situation a atteint son paroxysme les 21 et 22 mars 2012, lorsqu’une violente mutinerie de la garnison militaire de Kati m’a mis dans l’impossibilité d’exercer mes fonctions de président de la République. C’’est pourquoi, dans l’intérêt supérieur de mon pays, J’ai l’honneur de demander qu’il vous plaise de recevoir ma démission et, subséquemment, de constater la vacance de la présidence de la République conformément à  l’article 36, alinéa 2 de la Constitution susvisée. Ce faisant, J’adresse mes sincères remerciements à  toutes les Maliennes et à  tous les Maliens qui m’ont fait confiance, m’ont accompagné durant le temps que J’ai passé à  la tête de l’Etat et qui continuent d’œuvrer pour le rayonnement d’un Mali éternel. Enfin, je demande pardon à  toutes celles et à  tous ceux qui ont pu souffrir du fait des actes que J’ai posés, sans intention de nuire, durant mes deux mandats. Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de ma considération très distinguée. Amadou Toumani Touré

La classe politique juge l’Accord Cadre

Enfin un compromis ! C’’est ainsi que se sont exclamés plusieurs Maliens à  l’annonce de l’Accord-cadre de sortie de crise entre la junte militaire au pouvoir depuis le 22 mars dernier et la CEDEAO. La classe politique, dans majorité, se veut optimiste, et pense qu’il s’agit d’un grand pas. A l’URD, on se réjouit de l’application de l’article 36 de la Constitution du 25 février 1992. «Â C’’est cela que nous avons demandé : sortir du problème par la meilleure façon », a commenté Adama Coulibaly, 2ème vice-président du bureau national de la jeunesse URD. « Le Mali vit sa plus grave crise constitutionnelle, estime Tiébilé Dramé du PARENA, qui estime qu’il y a deux choses positives dans l’Accord Cadre, le retour à  l’article 36, qui entrera en vigueur dès l’investiture du président intérimaire. Et le retour dans les casernes des militaires, même si cela n’est pas encore effectif » Pour le parti SADI, l’Accord semble ouvrir de nouvelles perspectives pour le règlement de la crise politique et institutionnelle que traverse notre pays. «Â Au jour d’aujourd’hui, ce document répond aux aspirations du peuple malien puisqu’il ne fait pas l’objet de contestations », apprécie le Dr Etienne Oumar Sissoko. Cependant, prévient ce responsable de la jeunesse SADI, «Â les termes de l’accord risquent d’être compromis si on ne respecte pas les textes, en essayant d’imposer Dioncounda Traoré après le délai de 40 jours prévu par la Constitution ». Pour lui, «Â la tenue donc d’une Convention Nationale à  laquelle prendront part les forces vives de la nation, permettra de dégager les orientations et les aspirations du Peuple malien ainsi que les exigences pour une démocratie débarrassées de ses fossoyeurs ». Tels sont, commente Etienne Oumar Sissoko, les souhaits du peuple malien. « Des bases très floues » A l’Alliance des démocrates patriotiques pour la sortie de crise l’ADPS (regroupant laCNAS de Soumana Sacko, le parti YELEMA de Moussa Mara, etc.), on estime que le présent accord représente un premier pas dans le sens de la Transition préconisée. Cependant, regrette le regroupement politique, il est impossible d’appliquer de manière stricte, sur le plan juridique, politique et matérielle, l’article 36 auquel il est fait référence. l’ADPS, par la voix de Soumana Tangara de la CNAS, regrette ainsi que « l’élaboration et la conclusion dudit Accord-cadre aient été menées en l’absence de la participation formelle d’importantes parties prenantes nationales, dont la classe politique et la société civile, alors même que celles-ci ont un rôle majeur et incontournable dans sa mise en œuvre et dans la réussite de toute stratégie efficace et durable de sortie de crise ». Aussi, M. Tangara constate que l’Accord du 06 avril « laisse subsister des zones d’ombre et soulèvent d’importantes questions qu’il convient de clarifier dès le départ afin d’éviter d’éventuelles complications susceptibles d’entrainer des blocages pouvant être préjudiciables à  une bonne conduite du processus de sortie de crise ». Violation de la Constitution l’Accord du 6 avril a suscité également des commentaires à  la Confédération syndicale des travailleurs du Mali (CSTM). Son président Hamadoun Amion Guindo, qui préside la Coordination organisations patriotiques du Mali (COPAM), prend acte de la convention ainsi signée. Pour lui, ceci a de notoire qu’il lève l’embargo de la CEDEAO contre le Mali d’une part, et d’autre part l’embargo des tenants de l’ancien régime sur notre transition ». « Nous avons aujourd’hui un adversaire de taille qui est la rébellion au Nord du pays, dont la gestion par le régime sortant a été catastrophique. Nous demandons alors au peuple malien un sursaut d’orgueil pour ne pas tomber dans les mêmes erreurs », nous a confié Hamadoun Amion Guindo. Au Mouvement populaire du 22 mars, si l’on se réjouit de l’Accord, le temps est à  la mobilisation et à  la vigilance de la part des Maliens. Aussi, estime son représentant Mohamed Tabouré, l’accord revêt des insuffisances comme l’absence de la tenue d’une Convention nationale conformément à  la déclaration, le 1er avril dernier, du capitaine Amadou Haya Sanogo. Cette Convention, explique le militant du MP 22, devait définir la feuille de route de la transition et la mise en place des organes de gestion. Aussi, le MP 22 (membre de la COPAM), pense que la prolongation du mandat des députés prévue dans le présent accord, est anticonstitutionnelle. « A partir du 9 août, les députés seront non pas sou le mandat du peuple malien, mais celui de la CEDEAO », a dénoncé pour sa part Mohamed Tabouré.

Merci capitaine Sanogo !

Djibril Coulibaly, médecin, salue le courage d’Amadou Aya Sanogo. Le président autoprocalmé du Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’Etat (CNRDRE) a selon lui tenu parole en remettant le pouvoir aux civils. « Le jeune capitaine a respecté son engagement de ne pas confisquer le pouvoir. Il fallait ça pour le Mali, qui avait été mis au ban de la communauté internationale. » « Ouattara a oublié que le Mali l’a aidé » Gérant d’un pressing à  Korofina, Baye Camara est d’un tout autre avis. « Je suis contre le retour au pouvoir des politiciens corrompus. Ils sont tous comptables du bilan d’Amadou Toumani Touré (ATT). Ils ont cautionné toutes les erreurs du président pour se maintenir à  leurs postes juteux au détriment des Maliens. La junte a pris la responsabilité de les faire partir. On aurait du lui laisser le temps de ‘nettoyer’. Je n’ai plus confiance en ces politiciens qui ne cherchent qu’à  défendre que leurs intérêts ». Pour Sanoussi Kamaté, professeur d’histoire et de géographie dans un lycée d’Hamdallaye, la junte a sauvé le Mali et la CEDEA présidée par le président ivoirien a fait preuve d’ingratitude avec l’embargo. « Le pays était géré par des gens qui ont encouragé la gabegie, les détournements de fonds publics et ont fragilisé l’armée malienne. Merci Capitaine Sanogo pour nous avoir sauvé en faisant le coup d’Etat ! J’ai été vraiment déçu par la décision de la CEDEAO d’imposer l’embargo au Mali. Allassane Dramane Ouattara a oublié que le Mali l’a aidé lorsqu’il était retranché à  l’hôtel du Golf.». « Militaire ou politicien, ça m’est égal » Pour Ibrahim Diallo, administrateur civil, l’embargo de l’organisation régionale a au contraire été salvateur, en permettant un retour à  l’ordre constitutionnel. « Sans elle je ne voyais pas d’autres solutions pour sauver le Mali de l’humiliation. Le Mali était auparavant un modèle de démocratie. Il a été relégué au dernier rang avec le coup d’Etat. Grâce à  la CEDEAO, on peut respirer maintenant ». Pour d’autres comme Wassa Doumbia, vendeuse de poissons, les préoccupations politiques ne sont pas prioritaires : « Je m’inquiétais beaucoup avec la fermeture des frontières. Mes poissons viennent du Sénégal. Je ne savais plus comment faire pour m’approvisionner. Que le Mali soit dirigé par un militaire ou un politicien ça m’est égal. l’essentiel pour moi est de pouvoir travailler.

Accord cadre entre la CEDEAO et la junte : un premier ministre de transition bientôt nommé

Cette décision a été rendue public lors d’un déclaration du capitaine Amadou Haya ce vendredi 6 Avril au camp de Kati. Cet accord de principe entre le CNRDRE et la CEDEAO datée du 1er Avril, a été signé entre les deux parties en vue de mettre en place la transition selon l’article 36 de la constitution. L’accord prévoit que la Cour Constitutionnelle « constate la vacance de la présidence » et investisse pour l’intérim du pouvoir le président de l’Assemblée nationale, a expliqué une source proche de la junte. Un premier ministre sera trouvé à  l’issue des discussions en cours et sera à  la tête d’un gouvernement de mission qui devra organisé les élections. Compte tenu de la situation urgente au Nord un premier ministre devra aussi être nommé sous l’égide du médiateur de la CEDEAO et la mise en place d’un gouvernement » consensuel de mission, selon les termes de Djibril Bassolé, ministre des affaires étrangères du Burkina et porte parole du médiateur Blaise Compaoré. « Nous faisons du combat du Mali notre combat, avec un gouvernement en vue de négocier la paix ou la Guerre », a ajouté Bassolé. De plus, l’accord prévoit une Loi d’amnistie générale pour les membres de la junte. Du reste, dès l’entame du processus de transition, le président Blaise Compaoré a promis de prendre les dispositions pour rendre effectif rapidement la levée des sanctions de la CEDEAO. Dès la signature de l’accord, le président en exercice de la Cédéao prendra les dispositions nécessaires pour la levée des sanctions contre le Mali, stipule le texte.

Bienvenue dans le SANOGO SHOW

JT de 20h, mercredi 4 avril au soir. Ndèye Sissoko, charmante présentatrice du paysage audiovisuel malien, annonce l’annulation, ou plutôt le report de la convention Nationale, qu’avait annoncé la junte mardi soir. Plus tôt dans la journée du 4 Avril, le Front Uni pour la sauvegarde de la démocratie, se réunissait et décidait de ne pas participer à  cette concertation qualifiée de «Â piège », par un membre du Front. Du côté des pro-putschistes, on tape sur la Cédéao qui menace d‘intervenir militairement. A Kati, la junte doit s’interroger… Et les journalistes de se demander o๠va se tenir cette rencontre de «Â haut niveau »Â… Dans les stations services, les Bamakois dépités font le plein d’essence. A l’ACI 2000, quartier d’affaires, on évoque les dernières frasques du capitaine Sanogo, alors qu’une coupure EDM, paralyse la cité des affaires à  Bamako. «Â  Mais vous avez noté que son teint est devenu lisse en dix jours de pouvoir ? », fait remarquer Céline, une expatrié à  Bamako. «Â  Eh, il a même changé son canapé, pour recevoir ses visiteurs, vous avez pas fait attention au JT de l’ORTM ? », ajoute Leila. Oui, en dix jours, le capitaine Sanogo a pris de l’assurance. Déclaration sur déclaration, face à  la meute de journalistes nationaux et étrangers pendus à  chacune de ses sorties, il distille avec éloquence ses dernières décisions qu‘il remettra aussitôt en cause le lendemain . Oublié la voix éraillée et cassée de la première interview accordée à  nos confrères d’Africable, quand le chef de la junte tombait dans l’escarcelle du pouvoir, un 22 Mars, à  la faveur d’un coup d’état inattendu. Histoire d’un putschiste qui s’ignorait… Le capitaine Sanogo prend peu à  peu la mesure du pouvoir et semble y prendre goût, sans pour autant en maà®triser les ressorts ni les subtilités. D’abord en retrait, derrière son porte parole, le lieutenant Amadou Konaré, qui distillait les communiqués les un après les autres, à  la télévision, désormais, le chef de la junte convoque les médias au fief de Kati, entouré de ses généraux. Béret vert sur le crane, l’œil brillant, il en appelle à  l’aide internationale, convoque les parties politiques et tape sur ATT, qu’il menace de poursuite et de sanctions. Le chef de la junte, est un roublard qui joue avec la Cédéao, les Maliens et même les journalistes à  qui il dit tout et son contraire. Son bâton magique à  la main, il se donne une contenance qui laisse masquer un côté brouillon, comme témoigne un journaliste qui l’interviewé. « Le capitaine est sympa mais on le sent confus… » Confusion au sommet de l’état, Sanogo a dans les mains, un pouvoir qui lui échappe. Cerné de toutes parts, affirmant détenir des informations compromettantes pour les anciens affidés du général décu, le capitaine fait son show, donne de l’espoir aux Maliens comme lorsqu’il déclarait restaurer la constitution, après avoir dérouté la CEDEAO, en empêchant 5 chefs de l’état d’atterrir à  Bamako. Excuses internationales, Sanogo crée l’espoir puis l’angoisse chez le peuple. Comme dirait un homme politique célèbre, le feuilleton Sanogo nous réserve chaque jour que Dieu fait, son lot de mauvaise surprises. Le Sanogo Show, C’’est du 24h sur 24 en prime time national ! Dernier rebondissement du feuilleton Sanogo qui en appelle à  l‘intervention militaire étrangère au Mali : le report d’une convention nationale boycotté par une grande partie de la classe politique. Motif de la junte : impréparation, définition des angles et contours floues en filigrane… Ils vont y plancher. Et cette fois, ce n’est pas le capitaine qui a parlé, mais l’un de ses obscurs lieutenants ! A suivre…

La CEDEAO pourrait lever les sanctions sur le Mali

Le ministre burkinabé des Affaires Etrangères Djibril Bassolé, émissaire de Blaise Compaoré auprès du CNRDRE, vient de faire une annonce importante à  la télé nationale. Cette annonce est intervenue à  la suite d’une serie de rencontres que le ministre a eu avec les responsables du CNRDRE. « Nous travaillons ensemble pour créer les conditions de levée de ces sanctions, et je pense que ce sera pour très bientôt », a affirmé le ministre burkinabè des Affaires étrangères Djibrill Bassolé à  la télévision ORTM, à  l’issue d’un entretien dans la nuit de mercredi à  jeudi avec le capitaine Amadou Sanogo, chef de la junte militaire, à  Kati (près de Bamako). Sa déclaration a été diffusée jeudi après-midi, il n’a pas précisé de calendrier. « Nous allons tout mettre en oeuvre pour que ces sanctions soient non seulement suspendues, mais complètement levées et abandonnées. Nous en sommes sur le chemin. Je peux vous assurer que le capitaine (Sanogo) est dans de bonnes prédispositions, il aura bientôt à  faire des annonces qui vont dans la bonne direction, je préfère lui laisser la primauté de le dire », a ajouté M. Bassolé. Une déclaration publique du Capitaine SANOGO devrait donc intervenir bientôt, selon les propos du ministre burkinabè. Il faut ajouter que M. Bassolé est accompagné d’autres ministres ouest-africains des affaires étrangères, dont ceux de la Côte d’Ivoire et du Niger. Force d’interposition Les Chefs d’Etat major de la CEDEAO réfléchiront, au cours de la rencontre d’Abidjan, sur la mise en place d’une force d’intervention au Mali qui devrait compter quelques 3000 soldats. Cette réunion ‘’d’urgence » fait suite aux décisions prises le 29 mars dernier à  Abidjan par les Chefs d’Etat de la sous région à  l’initiative du président Alassane Ouattara, par ailleurs président en exercice de la CEDEAO. M. Ouattara a annoncé la semaine dernière que ‘’2000 soldats de la CEDEAO » ayant du matériel et bien équipés sont ‘’prêts » à  intervenir au Mali.

Sanogo dos au mur

Combien de temps tiendra-t-il encore le coup ? Arrivé au pouvoir le 22 mars par un coup de force, le capitaine Amadou Haya Sanogo reprochait au régime d’Amadou Toumani Touré «Â l’incompétence » dans la gestion de la rébellion au Nord du pays. Comme une ironie du sort, deux semaines après le coup d’Etat la junte militaire doit se résoudre à  constater l’avancée remarquable des rebelles du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) et des groupes islamistes d’Ansar Dine. La semaine dernière, les trois villes principales villes sont tombées sous le contrôle des assaillants. Face à  cette déroute de l’armée nationale, le capitaine est aux abois. Ses nombreuses offres de dialogue à  l’endroit des rebelles n’ont pas eu gain de cause. Et la communauté internationale, dont il sollicite l’aide, demande mordicus son départ. Les sanctions économiques et diplomatiques décrétées la semaine à  Dakar par la CEDEAO et entérinées par l’ONU, ne laissent point de chance à  la junte militaire de rester au pouvoir. Mission infructueuse à  Abuja La délégation de leaders religieux (composée du président du Haut conseil islamique et de Monseigneur Jean Zerbo), dépêchée lundi dernier à  Ouaga, n’a pu convaincre le médiateur Blaise Compaoré de revoir auprès de ses pairs les sanctions contre le Mali. De sources proches de la junte, nous apprenons que rien n’a filtré de cet entretien avec le président du Faso. A Abuja, au Nigéria, o๠la junte avait envoyé le colonel Blonkôrô Samaké (chef d’Etat-major du chef de la junte) auprès du président Jonathan, les nouvelles ne sont pas bonnes non plus. Et dans l’entourage du capitaine Sanogo, on se refuse à  tout commentaire sur les conclusions de cette mission. «Â Si la junte n’a pas communiqué sur cette mission, il faut en déduire que les résultats n’ont pas fructueux », analyse cet observateur politique. Comme si cela ne suffisait pas, la Convention nationale annoncée par le capitaine n’aura finalement pas lieu ce jeudi. Face au refus d’une importante partie de la classe politique (réunie au sein du Front uni pour la Sauvegarde de la démocratie FDR ), la crise politique s’accentue au Mali. Sur le plan économique, malgré les assurances de la junte sur les conséquences de l’embargo, la population reste inquiète. Cette convention, devrait donc réunir toutes forces vives de la nation, et adopter le schéma de mise en place d’un gouvernement d’union nationale. Avec le report de ces assises à  une date ultérieure, une la junte rate l’occasion de réconcilier les positions de la classe politique. Le temps presse donc pour le capitaine, qui est pris désormais entre plusieurs feux : la pression de la communauté internationale, l’avancée de la rébellion, l’opposition d’une partie de la classe. «Â Il faut aider Moussa Dadis Camara », avait recommandé ATT aux pires moments de crise guinéenne. Faudra-t-il «Â aider » le capitaine Amadou Haya Sanogo ?

Sanogo : « Si la situation se durcit au Mali, le monde entier en sera victime »

Le chef mutin s’entretenait avec des journalistes français depuis le camp militaire de Kati, près de la capitale malienne. {Les rebelles avancent à  grande vitesse. Est-ce l’heure d’une opération militaire, d’une contre-offensive de l’armée dans le Nord} La situation est critique, mais pas générée par le CNRDRE. C’est une des raisons pour lesquelles on a décidé de mettre fin à  un régime [celui du président Amadou Toumani Touré]. La situation était déjà  pourrie, depuis une dizaine d’années, par des personnes qui avaient trahi ce pays. Nous mettons tout à  la disposition des forces armées qui doivent préserver l’intégrité du territoire. La situation n’est pas seulement critique pour le Mali. Ce n’est plus une rébellion simple. On a un groupe islamique qui s’installe, avec tout un réseau. Si la situation se durcit, et l’Afrique et le monde entier en seront victimes un jour. {Que faut-il faire à  ce stade ?} Essayons d’oublier le Comité [le CNRDRE], oublions les rouages de la Constitution : on doit faire face à  un problème. Chaque heure compte. {Quelle est la solution ? Vous appelez à  une aide militaire internationale contre les rebelles ?} Si les grandes puissances ont été en mesure de traverser les océans pour aller lutter contre… [un ennemi comparable], qu’est-ce qui les empêche de venir ici ? Le danger, ce n’est pas seulement pour le Mali. Qu’on oublie un peu le Comité. Parlement, Constitution, ça peut attendre. Le dossier grave, c’est au Nord, c’est le plus important. {Une force internationale au Mali serait souhaitable, selon vous ?} Le Comité va toujours dans le sens de ce qui est bien pour ce pays. L’intervention d’une force, d’accord, mais bien canalisée, conformément à  nos principes. L’ennemi est connu, ce n’est pas Bamako. Si une force devait intervenir, elle sait oà¹. C’est là -haut [au Nord]. Des éléments africains ou occidentaux pourraient prendre part à  cette force ? J’ouvre la porte à  toutes les possibilités. Mais, encore une fois, dans le souci d’aller en guerre contre ce système [les rebelles], pas à  Bamako. Vous appelez la classe politique et les organisations à  tenir, jeudi 5 mars, une convention nationale pour décider du futur du pays ? Quand pensez-vous que des conclusions peuvent être attendues ? Nous sommes venus [au pouvoir] pas pour nous [y] éterniser, je le dis et le maintiens. Nous sommes des militaires. Notre mission principale, c’est de sécuriser le territoire, d’assurer la sécurité des personnes et des biens. Si vous voyez qu’on est là  aujourd’hui, c’est par la force des choses. On compte tenir la promesse qu’on ne sera pas là  pour longtemps. Concernant la convention, puisque on l’a fait pour le bonheur du peuple, c’est que quelque chose ne marchait pas. Dans la convention, demain, les participants parviendront à  dégager les grandes lignes d’une feuille de route. Pour le petit temps qu’on aura fait ici, et projeter ce qui se passera plus tard. Y a-t-il a des négociations avec Ansar Dine ou le Mouvement national de libération de l’Azawad -MNLA- [les deux groupes rebelles qui ont pris le nord du Mali] ? Faut-il discuter avec ces deux groupes séparément ? Tant qu’un individu est en armes, avec l’objectif de semer la terreur ou tuer, pour moi ces groupes n’ont pas de différence. Quant aux négociations, les portes sont ouvertes, mais une chose est sûre : l’intégrité du territoire reste mon mot d’ordre. C’est l’une des plus graves crises dans le nord du Mali. Ce qui est certain, c’est que le groupe islamiste est en train de s’installer, et ça n’interpelle pas seulement le Mali. Cela interpelle tout le monde. Vous avez peur que le MNLA décrète une forme d’autonomie, ou de sécession, dans le Nord du pays ? D’abord, en tant que soldat, je n’ai jamais peur. Mais j’ai quelques inquiétudes quand même. Pour l’instant, je préfère ne pas me prononcer. Hier, vous annonciez des poursuites contre « ATT » [le président Amadou Toumani Touré, toujours caché]. Que vont devenir les ministres arrêtés [comme Boubeye Maiga, ministre des affaires étrangères] ? Je n’ai pas de ministre arrêté. Pour le moment, je les détiens pour protéger leur intégrité physique, car je connais bien mon pays. En les laissant en ville, ils peuvent courir un risque. Si on devait faire des exactions, on l’aurait déjà  fait, mais vous conviendrez avec moi que depuis qu’on est là , on est à  l’écoute du peuple, on fait ça pour le peuple, donc on n’est pas dans une chasse aux sorcières. Ces gens, en les laissant en ville, courent un danger. Voilà  pourquoi je les garde, mais ils ne sont pas détenus. Et « ATT » ? Si je le trouve, c’est aux services spécialisés de le décider. Il y a encore un service judiciaire qui fonctionne, c’est à  eux de déterminer. O๠sont les militaires qui ont fui ? Mes soldats n’ont pas fui, ils se sont repliés. Une grande partie est restée à  Sévaré [base militaire près de Mopti]. Etes-vous en contact avec les pays qui sont utilisés par la rébellion comme bases arrières, l’Algérie et la Mauritanie ? Je n’en veux à  personne. D’ailleurs, si nos propres responsables ont permis l’accueil de groupes armés… Tout un groupe [de rebelles] a quitté la Libye et a été accueilli en héros ici, avec les honneurs, et c’est ce même groupe qui en train de tuer les Maliens aujourd’hui… Je n’en veux à  personne. Au contraire, je les invite à  une collaboration pour éradiquer le mal commun. Avez-vous peur de voir la classe politique qui était aux affaires revenir au pouvoir ? C’est ma plus grande préoccupation. Il y a ceux qui ont fait dix ou quinze ans au pouvoir. De député on devient ministre sans rien rapporter au pays. Vous croyez que les mêmes têtes vont rester ? Nous, on veut un changement, pas un changement pour changer, pour les valeurs. « Tu as dirigé le Mali pendant trente ans, et tu t’accroches encore ? Laisse les autres s’exprimer ! » C’est tout ce que je demande à  la classe politique. Si la convention nationale décide que votre départ est souhaitable, que ferez-vous ? Laissons la convention décider de cela, mais laissez-moi vous dire quelque chose : à  l’heure o๠nous sommes, on a déjà  évité un chaos. J’espère bien que la convention ne souhaitera pas voir ce Comité disparaà®tre, parce que ça va être le chaos le lendemain. L’application des sanctions est-elle une grande surprise ? La Cédéao [Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest], c’est l’organisation à  laquelle nous appartenons, je respecte leur décision, mais je les appelle au dialogue. Il est temps qu’on aille vers une Cédéao des peuples et non des Etats, des peuples d’Afrique. Je n’ai rien contre les circuits institutionnels, mais j’ai peut-être quelque chose contre les hommes. Si dans vingt à  quarante jours, il n’y a pas d’élection, il y aura un vide. Ce vide, qui va le combler ? Au lieu de perdre deux mois et de repartir sur quelque chose d’incertain, puisque il y a déjà  des acquis, pourquoi ne pas faire un démarrage imminent ? On gagne en temps, on gagne en structure, on gagne en confiance. Et surtout le CNRDRE est le comité du peuple, vous l’avez remarqué, faites des sondages. On a posé un acte qui a plu au peuple. Des propositions pour la Cédéao ? Je suis obligé de garder une position. Ce n’est pas de la bravade, c’est pour l’intérêt du peuple malien. L’heure n’est pas au Comité, ou au jeu politique, ça peut attendre dix ans. C’est un pays de la Cédéao qui est en train de mourir chaque jour, c’est ça la priorité. L’administration à  Bamako fonctionne, les gens vaquent à  leurs affaires, le Comité est là , bien respecté, donc il n’y pas d’urgence ici. L’urgence, c’est le Nord. Les pays qui conseillent à  leurs ressortissants de quitter le pays ? Ils ont leurs raisons. Vous êtes là , à  Bamako, on vous a menacé ? Certains journalistes l’ont été, oui… Certains journalistes ? Ceux qui les ont agressé ont leurs raisons. Mais moi, ma mission est d’assurer la sécurité des personnes et des biens sur le territoire malien, que vous soyez malien ou étranger. Et si je suis incapable de le faire, ce n’est pas délibéré. Y a-t-il déjà  un effet des sanctions qui perturbent le secteur bancaire ? Pour le moment, le Mali marche bien. Pour les structures bancaires, je ne suis pas informé, mais ça marche. Je peux vous assurer qu’on n’arrivera pas à  ce point.