Kenya – Attaque de shebab : trois soldats américains tués

Les combattants du groupe islamiste somalien des shebab ont attaqué dimanche à l’aube une base militaire américano-kényane à Lamu, dans le sud-est du Kenya, près de la frontière avec la Somalie, tuant trois Américains.

“Durant une attaque par les shebab, un groupe affilié à Al-Qaïda en Afrique de l’Est, plus tôt aujourd’hui, un militaire américain et deux sous-traitants du ministère de la Défense ont été tués” sur la base de la baie de Manda, a annoncé le commandement américain pour l’Afrique (Africom) dans un communiqué.

Africom a précisé à l’AFP que les trois personnes décédées étaient de nationalité américaine. Deux autres employés du Pentagone ont été blessés.

Kenya: deuil national de trois jours

L’attaque lancée samedi, revendiquée par les insurgés islamistes somaliens shebab, a coûté la vie à  au moins 61 civils, six membres des forces de sécurité kényanes et cinq assaillants. Presque autant de personnes sont portées disparues et 175 ont été blessées. Il s’agit d’ores et déjà  de l’opération la plus meurtrière à  Nairobi depuis l’attentat-suicide d’Al-Qaà¯da en août 1998 contre l’ambassade des Etats-Unis, qui avait fait plus de 200 morts. Et le nombre de victimes devrait encore grimper, a prévenu mardi soir le président kényan Uhuru Kenyatta en annonçant la fin de l’interminable siège lors d’une allocution télévisée, car le toit du Westgate s’est partiellement effondré. « Des corps sont toujours bloqués » sous les décombres, a précisé le président. Mercredi à  l’aube, les secours s’affairaient autour du luxueux centre commercial dévasté par les balles, les explosions et les flammes. Des experts en explosifs aidés de robots démineurs téléguidés l’inspectaient, vérifiant « qu’aucun explosif n’a été laissé » dans le dédale de magasins par les islamistes, a expliqué une source sécuritaire. Des équipes de chiens renifleurs recherchaient également des bombes, mais aussi les corps de tout ou partie de la soixantaine de disparus. Un bilan encore provisoire « Des experts médico-légaux d’autres pays ont été autorisés à  se joindre à  l’enquête sur le site, dont Israà«l, les Etats-Unis et le Royaume-Uni », a indiqué le chef des services administratifs kényans, Francis Kimemia. Pendant le siège, ces trois pays avaient soutenu les forces kényanes sans intervenir directement, à  part peut-être les Israéliens qui, selon une source sécuritaire, étaient présents dans le Westgate. Le président Kenyatta avait annoncé mardi soir la fin du siège après presque 80 heures d’affrontements, décrétant un deuil national de trois jours et promettant de poursuivre les responsables. L’identité des membres du commando reste controversée Des rumeurs ont circulé sur la présence dans le groupe de combattants étrangers, notamment américains et britanniques, dont la Britannique Samantha Lewthwaite, veuve d’un des kamikazes des attentats du 7 juillet 2005 à  Londres, surnommée « la veuve blanche » par les médias. Les shebab ont « catégoriquement démenti l’implication d’une femme » dans l’attaque, et Uhuru Kenyatta a affirmé ne pas pouvoir confirmer la participation de Britanniques ou d’Américains, car « les experts médico-légaux travaillent à  établir les nationalités des terroristes ». Les shebab vont souvent chercher en Occident des volontaires au jihad mondial, des fonds et des soutiens, surtout dans la diaspora somalienne en Europe et aux Etats-Unis. A Nairobi, o๠vivent de nombreux expatriés rayonnant dans toute la région, le Westgate était régulièrement cité par les sociétés de sécurité comme une cible possible de groupes liés à  Al-Qaà¯da – comme les shebab. La police kényane a renforcé sa vigilance dans les principales villes du pays, tandis que la classe politique, fortement divisée par de récentes élections, a sans relâche appelé à  l’unité pendant la crise. Des milliers de Kényans se sont aussi déplacés pour donner leur sang, faire des dons et venir en aide aux victimes.

Comment les shebab sapent la stabilité de la Corne de l’Afrique

Trois jours après l’attaque du 21 septembre qui a fait 68 morts, les forces kényanes ont repris en grande partie le contrôle du centre commercial Westgate à  Nairobi. Deux hommes du commando shebab seraient encore retranchés dans le bâtiment et détiennent des otages, comme l’a confirmé le groupe islamiste sur son nouveau compte Twitter. Malgré sa faiblesse politique en Somalie, le groupuscule Al-Shebab, affilié à  al-Qaida, reste un facteur d’instabilité sécuritaire dans la Corne de l’Afrique, analyse Le Monde. D’après l’article, l’attaque de Nairobi est représentative d’une «guerre asymétrique» entre les groupes radicaux et des Etats plus puissants qu’eux. Même si la milice shebab ne dispose plus que de quelques milliers d’hommes, elle parvient encore à  recruter à  l’étranger, loin de ses bases, et dispose d’une importante force de frappe, observe le journal. D’après Le Monde, faute de combat frontal, les shebab multiplient les attentats pour maintenir un «arc de terreur» d’une rive à  l’autre du continent africain. Il s’agit aussi de frapper les puissances occidentales, comme lors des attentats de Kampala (Ouganda), le 11 juillet 2010. Le Kenya dans l’œil du cyclone Mais C’’est le Kenya qui est particulièrement visé depuis quelques années, avec 17 attaques terroristes depuis 1998, précise le site. Elles ne sont pas toutes menées par Al-Shebab mais le groupe indique cependant clairement son intention de «châtier» le pays après l’implication de l’armée kenyane dans l’offensive africaine multinationale qui a contribué à  chasser les shebab du pouvoir en Somalie. «Ce que les Kényans voient à  Westgate, C’’est de la justice punitive pour les crimes commis par leur soldats», revendique la milice islamiste sur Twitter. De fait, le choix de la cible des terroristes n’est pas anodin, ajoute Le Monde. Ce lieu touristique bondé, symbole de la société de consommation, fréquenté à  la fois par des étrangers et des Kényans aisés, permet aux shebab de frapper l’Occident tout autant que Nairobi, souligne l’article. Le journal explique que l’attaque de Nairobi a plusieurs retombées pour les terroristes. En plus de leur offrir une «publicité» mondiale, C’’est aussi l’occasion de pointer les failles sécuritaires des puissances occidentales et de saper le tourisme et l’économie kényans en instaurant un climat de terreur, conclut l’article.

Kenya: assaut final à Westgate

L’horreur continue dans le centre commercial Westgate de Nairobi alors que les autorités parlent d’un assaut final pour déloger les shebabs somaliens, ces derniers affirment encore détenir des otages et évoquent des cadavres jonchant le centre commercial de la capitale kenyane. Plus de 62 morts, évoque le dernier bilan de cette barbarie o๠de nombreuses personnes ont perdu la vie. « Les otages qui sont détenus par les moujahidines à  l’intérieur du Westgate sont toujours vivants, choqués mais néanmoins vivants », ont écrit les insurgés shebab, liés à  Al-Qaà¯da, sur leur compte Twitter. Toujours sur Twitter, les shebab, qui disent avoir attaqué Westgate en représailles d’une intervention militaire kényane lancée en Somalie fin 2011, ont ajouté qu' »il y a un nombre incalculable de cadavres éparpillés » dans le bâtiment pris d’assaut samedi par un commando armé d’une douzaine de personnes. Nouveaux affrontements Lundi soir, le gouvernement kényan avait affirmé que tous les otages piégés dans le bâtiment avaient probablement été secourus. Le gouvernement avait ajouté que ses forces contrôlaient le Westgate et qu’elles passaient au peigne fin les étages sans rencontrer de résistance. Mais les affrontements ont repris mardi à  l’aube, lorsqu’une explosion et des coups de feu sporadiques ont retenti brièvement, suivis quelques heures plus tard par un échange, bref mais intense, de tirs d’armes automatiques dans ou tout près du bâtiment. Des sources de sécurité ont indiqué qu’elles combattaient toujours « un ou deux » assaillants, localisés à  l’intérieur ou à  côté d’un casino situé dans les étages. La police kényane a ensuite expliqué être en train de désamorcer des « explosifs » placés « par les terroristes » dans le bâtiment, sans donner davantage de précisions. De son côté, la ministre kényane des Affaires étrangères, Amina Mohamed, avait déclaré lundi soir sur PBS la présence au sein du commando de deux ou trois Américains et d’une Britannique. La police kényane avait affirmé plus tôt vérifier des informations selon lesquelles la Britannique Samantha Lewthwaite, veuve d’un des kamikazes des attentats du 7 juillet 2005 à  Londres, serait « impliquée ». Londres a refusé de commenter l’information Quant aux Américains, a précisé la ministre, ce sont « de jeunes hommes, entre 18 et 19 ans (…) d’origine somalienne ou arabe, mais qui vivaient aux Etats-Unis ». La Cour pénale internationale (CPI), qui poursuit actuellement le président et le vice-président kényans pour crimes contre l’humanité, a proposé son aide mardi en vue de poursuivre les responsables de l’attaque. Selon les autorités kényanes, trois assaillants ont été tués et 11 soldats kényans blessés lundi. Le ministère de l’Information a aussi affirmé que plus de 10 suspects avaient été arrêtés pour « interrogatoires », sans donner plus de détails. Déjà  plusieurs assauts Les forces de sécurité ont lancé plusieurs assauts pour tenter de venir à  bout du groupe armé. Lundi à  la mi-journée, de fortes explosions et des « tirs nourris » avaient déjà  retenti dans le Westgate dévasté, avant que d’épais nuages de fumée noire ne s’en échappent. Dans la journée, un membre des forces spéciales kényanes ayant participé aux combats avait raconté la difficulté de l’intervention, parlant d’une partie de « cache-cache » avec les islamistes dans les magasins du vaste centre commercial. Samedi, au moment de l’attaque, ce centre commercial de luxe, détenu en partie par des Israéliens, était bondé de Kényans – clients et employés – et d’expatriés de toutes nationalités. Selon une source sécuritaire, des agents israéliens sont intervenus sur place aux côtés des Kényans. Dimanche en fin de journée, le président kényan Uhuru Kenyatta avait indiqué avoir reçu des offres d’aide de plusieurs « pays amis », assurant néanmoins que l’opération restait pour l’instant une « opération kényane ». Unité face à  la crise Plusieurs étrangers, dont deux Françaises, six Britanniques, un Sud-Africain, une Sud-Coréenne, une Néerlandaise, un Péruvien, deux Indiens et deux Canadiens ont été tués dans l’attaque, ainsi qu’un célèbre poète et homme d’Etat ghanéen, Kofi Awoonor. Il s’agit de l’attentat le plus meurtrier à  Nairobi depuis une attaque suicide d’Al-Qaà¯da en août 1998 contre l’ambassade des Etats-Unis, qui avait fait plus de 200 morts. Des intérêts israéliens au Kenya ont déjà  été la cible d’attaques revendiquées par Al-Qaà¯da: en 2002, un attentat suicide contre un hôtel fréquenté par des touristes israéliens avait tué 12 Kényans et trois Israéliens près de la ville côtière de Mombasa. Presque simultanément, un avion de la compagnie israélienne El Al avec 261 passagers à  bord avait échappé de peu aux tirs de deux missiles à  son décollage, également à  Mombasa. Selon des témoins, les agresseurs ont « tiré dans le tas » samedi à  Westgate. D’après un employé du centre commercial, Titus Alede, « ils ont dit « vous avez tué notre peuple en Somalie, c’est à  votre tour de payer ». Dans une capitale connue comme le « hub » de l’Afrique de l’Est, o๠vivent de nombreux expatriés rayonnant dans toute la région, le Westgate était régulièrement cité par les sociétés de sécurité comme une cible possible de groupes liés à  Al-Qaà¯da comme les shebab. Ouvert en 2007, le bâtiment compte restaurants, cafés, banques, un grand supermarché et un cinéma multiplexe qui attirent des milliers de personnes chaque jour. Le président américain Barack Obama a déploré lundi « une terrible tragédie » et offert son aide au Kenya. La classe politique kényane a elle appelé à  l’unité face à  la crise. Et le vice-président William Ruto a obtenu de la CPI de pouvoir rentrer dans son pays pour gérer la situation. Il comparaà®t depuis le 10 septembre à  La Haye pour son rôle présumé dans les violences politico-ethniques ayant suivi les élections kényanes de 2007 et fait plus de 1.000 morts.