Foire exposition  » le Mali à Paris » : était-ce vraiment la fête ?

A en juger par les allées désertes de la rotonde de la Bourse de Commerce de Paris et la mine renfrognée des exposants, cette 9ème édition qui s’est tenue du 29 au 5 octobre ne semble ne pas avoir été à  la hauteur des attentes. Elle met en évidence les faiblesses de la promotion touristique du pays. Des artisans non pris en charge Alors que la quarantaine d’artisans maliens présents ont pris en charge leur billet d’avion, et sont hébergés à  leurs frais en France, l’une d’elle s’indigne du fait que le ministère du tourisme, co-organisateur de l’événement avec la Maison de l’Afrique, ne leur ai même pas facilité les formalités de visa. « Tout est à  notre charge, et lorsque l’on arrive sur place, on se rend compte qu’ils n’ont pas fait le nécessaire pour faire venir du monde ! ». Alors que les années précédentes la promotion battait son plein à  grand renfort de publicité dans des journaux français tels que le Parisien ou Libération, la fête de cette année semble moins arrosée. « Pourtant, ils disposaient d’un budget de promotion. Alors qu’en ont-ils fait, s’interroge avec ironie le touareg Ibrahim, vendeurs d’objets en cuir. » Ce budget a t-il été utilisé pour le traiteur et le cocktail servi le jour de l’ouverture ? Non, il s’agissait de mets préparés par une malienne venue pour la circonstance, et les serveuses n’étaient autres que ses sœurs et cousines… Toutefois, vu l’affluence et le bourdonnement autour des plats, ils devaient être de qualité. Au point de croire que la fête de l’artisanat n’attire que des pique-assiettes et gourmands de passage ? Non, car visiblement quatre ministres de la République on fait le déplacement, pas moins que cela ! Ndiaye Bah, la mine tendue, ministre du tourisme et de l’artisanat et grand maà®tre de cérémonie, ainsi que ses collègues de la culture, Mohamed El Moctar, du ministère des maliens de l’extérieur, Badra Aliou Macalou, et le grand argentier Sanoussi Touré, ministre de l’économie et des finances, ont honoré de leur visite les stands de chaque exposant, accompagnés par son Excellence Monsieur l’Ambassadeur. Cette affluence ministérielle était-elle destinée à  masquer la lassitude du public autour d’une foire-exposition, qui au bout de la 9ème édition n’évolue toujours pas ? Si C’’est le cas, nos Ministres ont-ils au moins fait des emplettes ? Pas si sûr, tant on sait que ce ne sont pas les Maliens qui achètent à  Paris ce type d’artisanat, tableaux, statuettes, pagnes, bogolans et autres objets de maroquinerie, qu’ils trouvent beaucoup moins chers au pays. Les acheteurs frileux cette année Pendant cette semaine passée à  la Bourse du commerce, les artisans ont eu tout le loisir d’admirer les fresques qui ornent les plafonds de ce monument historique datant du 13ème siècle. Les moins chanceux cherchaient avec désespoir ce qui était devenu l’oiseau rare : une tête blanche et son portefeuille bien garni, un acheteur qui ne perd pas son temps en conjectures et négociations. « Cette année cela n’a pas marché, l’affluence n’est pas au rendez-vous, et nous risquons de perdre de l’argent », se lamente Niuma, vendeuse d’objets de décoration, les bras croisés devant son stand. Pour ceux d’entre eux qui ont pu s’y inscrire, les affaires reprendront peut-être à  Evry, Montreuil et la Courneuve, o๠la foire se poursuit successivement pendant encore 15 jours. On peut malheureusement en douter, tant ces villes de banlieue parisienne concentrent avant tout une population immigrée… Et pas sûr que les « bobos » parisiens fassent le déplacement sans une véritable campagne de communication visant à  les y attirer. Quelle est efficacité pour la politique touristique Malienne ? Cette 9ème foire-exposition nous amène à  nous interroger sur la politique de promotion de l’artisanat et du tourisme au Mali. Son efficacité reste à  prouver pour plusieurs raisons. Tout d’abord, les chiffres du tourisme affichés par le gouvernement sont contestés par les professionnels du secteur, qui ne voient pas o๠se cachent les xx touristes annoncés. Par ailleurs, au delà  de la clientèle française et européenne traditionnelle, le pays est peu connu en Amérique et en Asie, pourtant des zones à  fort potentiel. De plus, en dehors des hôtels de luxe construits et rénovés par la Lybie dans la capitale Bamako, peu d’infrastructures touristiques ont vu le jour ces dernières années, ce qui limite les possibilités, surtout à  l’intérieur du pays o๠se trouvent les véritables attraits du Mali. Enfin, la finalité d’une politique touristique réussie est la création d’emploi et la baisse de la pauvreté. Or, on ne peut pas dire que les artisans maliens s’en sortent vraiment, au point de devoir cumuler plusieurs jobs. A qui la faute ? Le ministre actuel, en poste depuis sept ans a eu la durée pour lui. Il aurait du mettre en place une politique visant à  distinguer le « produit Mali » pour le rendre identifiable face aux concurrents africains. Malgré le soutien depuis quatre ans de l’agence Mapa Mundi et de sa directrice Virginie Tremsalt, Ndiaye Bah peine à  vendre les trésors du pays. Qui n’a pas rencontré un interlocuteur français qui ne savait pas que Tombouctou se trouvait au Mali ? On se souvient d’ailleurs de l’échec cuisant de la campagne sur les 7 nouvelles merveilles du monde en 2007… Quel touriste étranger n’a pas failli s’étrangler face à  un personnel hôtelier mal formé et maà®trisant à  peine les langues étrangères ? O๠sont les écoles de formation ? Pourquoi les maliens préfèrent-ils passer leurs vacances à  l’étranger qu’à  l’intérieur du pays ? Comment limiter l’impact négatif des troubles dans le Nord ? Toutes ces questions, il faudra bien y répondre, et pourquoi pas à  l’occasion du Salon international du tourisme (Sitour) qui se tiendra du 16 au 18 octobre à  Bamako. En attendant les grandes réformes, « commencez par rendre les locaux du ministère du tourisme et de l’artisanat moins vétustes et plus accueillants », juge une visiteuse étrangère, pourtant amie du Mali.