Fespaco 2013: « Toiles d’araignées » décroche le prix de l’UA

Le prestigieux prix du plus grand festival panafricain cinématographique, l’Etalon d’or de Yennenga, a été décerné au réalisateur sénégalais Alain Gomis pour son long métrage Tey (Aujourd’hui). Son film raconte la dernière journée d’un homme qui sachant sa mort imminente, se promène dans Dakar. Le personnage principal est interprété par l’Américain Saul Williams, acteur et musicien. « Moi qui suis fait de morceaux de Guinée-Bissau, de France, de Sénégal, je suis très heureux et très fier de pouvoir apporter le premier Etalon d’or au Sénégal », a lancé très ému, le réalisateur. Il a ajouté par ailleurs que « La richesse du cinéma africain d’aujourd’hui, c’est sa diversité ». l’Etalon de bronze est revenu à  son compatriote Moussa Touré pour son film «Â La Pirogue » qui parle du drame de l’émigration de jeunes Africains en quête d’Europe. L’Etalon d’argent a été décerné à  « Yema » de l’Algérienne Djamila Sahraoui présenté par la présidente du grand jury, la réalisatrice française Euzhan Palcy, comme une « tragédie antique et contemporaine » sur une famille brisée par un attentat islamiste. l’Etalon d’or de la meilleure actrice a été attribué à  Mariam Ouédraogo, l’héroà¯ne de Moi Zaphira qui parle de l’histoire d’une femme qui lutte pour réaliser ses rêves et traverse tous les heurts et malheurs de la société burkinabè. Le cinéma numérique désormais en compétition Le Mali représenté au FESPACO avec quatre films majeurs remporte le prix de l’Union Africaine. Ce prix est attribué à  Ibrahim Touré pour son film «Â Toiles d’araignées ». D’importantes réformes sont annoncées pour les éditions futures. On peut citer, la prise en compte des films de la diaspora dans les compétitions officielles, l’introduction du format numérique ainsi que la revalorisation des prix, parmi lesquels l’Etalon d’or passe de 10 à  20 millions de FCFA. Créé en 1969, le Fespaco, qui a accueilli cette année plus d’un millier de cinéastes, comédiens et producteurs, avait innové en confiant pour cette biennale la présidence de tous les jurys à  des femmes. Euzhan Palcy, la réalisatrice de « Rue Case-nègres », s’est félicitée que le festival ait mis les femmes « au centre » et « à  l’honneur ». Rendez-vous en 2015 pour la prochaine édition !

Ibrahima Touré, réalisateur : « ce qu’on montre dans le film est toujours une réalité au Mali »

Ibrahima Touré à  travers son premier long métrage dénonce «Â la dictature faite par les Hommes sur les Hommes ». Son œuvre, raconte les mésaventures de Mariama, une adolescente de 17 ans qui refuse d’épouser le mari choisi par ses parents. Malgré la pression de son entourage, Mariama est restée égale à  elle-même. Dans ce film, le réalisateur part en guerre contre l’oppression, l’humiliation des femmes, la corruption, etc. Filmer le réel Pour Ibrahima Touré, «Â Ce qu’on montre dans le film est toujours une réalité au Mali et en Afrique. Les droits des individus sont toujours réprimés et les tenants du pouvoir restent au pouvoir. Ils refusent la gouvernance, ils refusent l’alternance. C’’est un problème qui mine l’Afrique. » Malgré le fait qu’il ait dénoncé certains maux de la société notamment la corruption, I. Touré affirme qu’il n’a pas été inquiété mais plutôt qu’il a été soutenu. Par ailleurs, ce professionnel du 7ème art affirme que «Â ce film est destiné à  tout le monde. On a commencé à  le montrer à  des étudiants, à  des jeunes, à  des femmes qui sont venues et qui ont pleuré. Elles m’ont dit que C’’est trop dur, mais C’’est comme ça, C’’est la réalité, C’’est la vie. La vie est dure dans le Sahel. » . Tourné en six semaines avec un seul acteur professionnel et un budget de 180 millions francs CFA, «Toiles d’Araignées» est l’un des deux longs métrages produits entre 2010 et 2011 par le Centre national de la cinématographie du Mali. Ce film est une adaptation du roman «Â Toiles d’araignées » écrit en détention, par Ibrahima Ly au moment o๠le Mali était dirigé par la junte militaire dans les années 1970. Ce long métrage de 92 minutes a remporté le prix de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF)  dans la catégorie «meilleur long métrage» de la 28ème édition du festival international de cinéma Vues d’Afrique qui s’est déroulée du 27 avril au 6 mai 2012 à  Montréal au Canada.

« Toiles d’araignées » : Sur les traces de l’histoire politique du Mali.

Après le premier long métrage historique intitulé «Â Da Monzon : la conquête de Samanyana », le Centre national de la cinématographie du Mali revient sous les feux des rampes avec une nouvelle création d’un autre genre : l’adaptation du roman à  l’écran. l’exercice est osé pour Ibrahim Touré, et l’intention est à  saluer, car la tâche était délicate. La projection en avant-première du film «Â Toiles d’Araignées » sous la président Dioncounda Traoré, a été toute une émotion. Au C’œur de la répression sous Moussa Traoré « Toiles d’Araignées » est le titre du roman autobiographique d’Ibrahim Ly. Jeune professeur de mathématiques, militant contre l’arbitraire, pour la justice sociale, les droits et les libertés, il devient membre d’un regroupement clandestin de l’époque appelé le PMRD (Parti malien pour la révolution démocratique) o๠se trouvaient des patriotes engagés dans la lutte contre la junte militaire au pouvoir à  Bamako. Nous sommes dans les années 1970. Arrêté par la police du CMLN (Comité malien de libération nationale) pour ses activités politiques, en l’occurrence la distribution d’un tract de dénonciation du régime et de la mascarade de consultation référendaire sur le projet de Constitution en 1974, cet objecteur de conscience à  la silhouette frêle, mais à  l’âme trempée, au caractère ferme et résolu, va être déporté à  Taoudénit. Dans ce bagne de triste réputation (o๠a passé l’ancien président du Mali Modibo Keà¯ta), il va vivre les affres de la prison, dans les pires conditions carcérales que réservaient les putschistes à  l’époque à  leurs adversaires et opposants. Bien après, il sera, par mesure de « clémence », transféré à  Niono à  une centaine de kilomètres de Ségou, avant sa libération en 1978. Cela, après quatre années de martyrs dans les geôles de la soldatesque. Un récit époustouflant de 92 minutes à  vous couper le souffle, ce film est un chef d’œuvre. « Un travail de professionnel » Pour un coup d’essai, le producteur a réussi un coup de maà®tre. Le produit obtenu est d’une remarquable facture. Et les critiques du cinéma sont formels : « C’’est une œuvre de qualité, travaillée avec rigueur ». Du jeu des acteurs dans l’interprétation des rôles, à  la composition musicale de génie signée par le maà®tre du solfège, Cheick Tidiane Seck, en passant par les décors, les costumes, les maquillages, la lumière, etc. le produit est tout simplement excellent. Le film d’Ibrahima Touré est à  la fois un témoignage à  charge, mais également revêt une vision humaniste. l’adaptation cinématographique de « Toiles d’Araignées » d’Ibrahima Ly nous fait revivre des pages sombres des dictatures africaines qui ont scellé le destin de nos peuples, avec le musellement des voix de conscience et l’écrasement brutal de toute velléité de contestation. On comprend ainsi l’émotion suscité chez le président de l’Assemblée nationale, qui a présidé la projection en avant-première de ce film sur invitation du ministre de la culture. l’ancien bagnard qu’il est, sait ce que cinéaste met sur écran. Il se souvient des terribles époques décrites par le film. Pour Dioncounda Traoré, au-delà  de l’émotion, « Toiles ‘d’Araignées » est un témoignage fidèle d’une autre époque de notre histoire. « Il rappelle les pages douloureuses de notre indépendance », rappelle-t-il. Avant de rendre un vibrant hommage aux martyrs de l’époque Moussa Traoré. « Ils ont sacrifié leurs vies pour que le Mali d’aujourd’hui soit » a conclut le président de l’Assemblée nationale. Qui a salué le travail artistique de l’œuvre. Un film à  voir absolument !