Religion : le Sénégal au rythme du Magal de Touba

Ce jeudi 11 décembre 2014 se tient le grand Magal de Touba. Cet événement qui commémore le départ en exil du vénéré Cheikh Ahmadou Bamba (fondateur de ladite ville), est un des évènements les plus importants du calendrier religieux mouride. En effet, Le 18 safar (2e mois du calendrier de l’Hégire) a une portée significative pour les mourides du Sénégal et du monde entier. C’’est à  cette date qu’est célébré le grand Magal de Touba, l’un des plus grands événements religieux du Sénégal. à€ Touba (lieu saint des mourides), le Magal (terme wolof qui signifie « rendre hommage, célébrer » commémore, le départ en exil du fondateur de la confrérie, cheikh Ahmadou Bamba, arrêté et exilé pour ses convictions religieuses. Durant cette journée, les seules activités autorisées sont la lecture du Coran et des Khassaà¯des (œuvres écrites par Cheikh Ahmadou Bamba), et des actions de grâce en offrant des repas, chacun suivant ses moyens. Environ 3 millions de pèlerins ont fait le déplacement de la ville sainte. Ils viennent des quatre coins du pays, de la région (du Mali, de Mauritanie, du Gabon) et même d’encore plus loin (de France, d’Espagne, d’Italie et des Etats-Unis). Touba, centre religieux et économique Touba abrite la plus grande bibliothèque musulmane au Sénégal o๠sont rassemblés des livres du Saint Coran, des livres de nombreux érudits musulmans et des écrits du fondateur du Mouridisme, Cheikh Ahmadou Bamba. Les cimetières de Touba sont situés à  l’est de la mosquée. Tous les mourides sont appelés à  y être enterrés. Chaque année, le Magal impacte considérablement, et à  bien des égards, l’économie locale. Cependant, à  en croire Serigne Bassirou Mbacké Abdou Khadre, président du comité d’organisation du Magal, par ailleurs porte-parole du khalife, Touba, en tant que collectivité, ne profite pas encore de cette manne économique. Mieux, selon le marabout, le Magal de Touba participe chaque année à  hauteur de 250 milliards F CFA dans l’économie du pays. A son avis, la ville sainte de Touba devrait donc avoir droit « à  une restitution d’au moins cinquante milliards F CFA par an ». Et cette manne financière pourrait servir dans la construction d’infrastructures pour une amélioration du cadre de vie de ses populations.

A Touba, les 28km de la discorde

Le village de Touba, dans la commune de Duguwolowila, est réputé pour la ferveur religieuse de ses habitants et leur esprit d’entreprise. Depuis quelques temps il doit également sa renommée à  une affaire d’argent et de goudron. En 1975, les gens de Touba ont ouvert une déviation au niveau de Sirakorola afin d’aller au village sans avoir à  faire un détour par Banamba, et économiser ainsi plusieurs kilomètres. Cette route de 28km – les «Â 28 » comme on l’appelle communément – est un bourbier en saison de pluies. Ni les camions, ni les bus ni les deux-roues ne s’aventurent sur l’axe. Seules quelques charrettes s’y risquent, en s’embourbant parfois pendant plusieurs jours avec leurs marchandises. Après l’homme d’affaires, les amis du député Pour remédier à  cela les ressortissants ont décidé de donner un peu de leur argent chaque année pour «Â panser » les portions les plus impraticables. La première initiative est venue de Djedi Tandja, un richissime homme d’affaires qui a fait fortune en Afrique australe dans les années 70. Il a été suivi par d’autres fils du pays qui se sont regroupés au sein du mouvement de la jeunesse de Touba pour le développement (MJTD). Après plusieurs réparations à  mettre au compte de Djedi Tandja, le MJDT a mobilisé en 1994 la faramineuse somme de 149 millions de FCFA pour une nouvelle réhabilitation de la voie. Mais à  chaque saison des pluies la voie, très sollicitée, se dégradait. Au fur et à  mesure, les divisions politiques de la communauté ont tari les financements. Alors d’autres se sont mis à  mobiliser des fonds pour la voie, en l’occurrence des proches du député de Duguwolowila, Hamadaou Sylla, peu apprécié car accusé de partialité lors des élections municipales de 2009. Une route très politique Les habitants ont donc appris avec méfiance que l’entourage du député a réuni 24 millions de FCFA pour venir au secours des populations riveraines. Approché par nos soins, Hamadaou Sylla assure que la décision de mobiliser cette somme a été prise à  son insu, raison pour laquelle il a soumis le projet aux notabilités pour agir dans la transparence. Aujourd’hui, 2,3 km de routes plus une portion de 200m ont été réparées par le député. Ses opposants ont vu d’un mauvais œil qu’il aille en faire la publicité à  la télévision. Mais pour l’élu cette médiatisation a permis de récolter 13 millions de FCFA. Les populations se disent maintenant ravies de l’initiative, même si la voie reste à  parfaire. Les «Â 28 » se parcourent désormais en trois heures en véhicule tout terrain. Le bitumage total de la voie est à  portée de mains, mais ne pourra se faire qu’au prix de l’union des fils de la localité, toujours divisés.