Sikasso consacre 28 chefs de villages et 9 chefs de quartiers

Dans intervention, le Président de CRI 2002 et Ministre des Relations avec les Institutions, le Dr. Abdoulaye Sall, a indiqué que cette consécration des chefs de villages et quartiers s’inscrit dans le cadre de la réalisation sur le terrain du développement régional et local des Cadres de Concertations établis entre la région, les Cercles de Sikasso et de Koutiala et le Cercle de Réflexion et d’Information pour la consolidation de la démocratie au Mali (Cri-2002) en mars 2011. Forum régional Il a rappelé que sur cette voie, la première action forte, significative et porteuse a été l’organisation et la tenue les 30 et 31 mars 2011 du Forum Régional sur la valorisation du rôle et de la place des autorités traditionnelles dans le cadre de la décentralisation qui a regroupé plus de 150 participants venus des 7 cercles de la région, et représentant la tutelle, les services déconcentrés et décentralisés de l’Etat, les élus communaux, locaux, régionaux et nationaux des collectivités territoriales, les chefs de villages et de quartiers, les chefs traditionnels et religieux, les organisations de la société civile et qui a formulé comme recommandations majeures, l’accélération du processus de reconnaissance officielle des chefs de villages, de fractions et de quartiers et leur consécration par les autorités administratives et politiques. Au nom de Cri- 2002, Dr. Abdoulaye Sall a chaleureusement remercié le Gouvernement du Mali, les autorités administratives, politiques, traditionnelles et religieuses, les populations laborieuses de Sikasso, le Bureau de la Coopération Suisse qui ont placé leur totale confiance en lui pour l’accompagnage de ce processus, combien décisif, dans l’ancrage de la démocratie et de la décentralisation dans sa base originelle, citoyenne, durable et pérenne. Convaincu qu’il était, le ministre Sall a largement expliqué que si le mandat du maire, du conseiller communal, de cercle, de région, est de cinq (05) ans, celui du chef de village, de fraction et de quartier est à  vie. Une assurance à  vie conférée par l’Etat pour permettre à  ces auxiliaires de l’administration à  jouer pleinement et entièrement leur courroie de transmission entre les populations, les collectivités territoriales, l’Etat et/ou vice-versa. Dans cette perspective, Dr. Abdoulaye Sall, a pris l’engagement ferme de poursuivre, d’intensifier et de consolider son accompagnage de la Région de Sikasso en général, et des autorités traditionnelles en particulier, face aux nouveaux enjeux et défis découlant de la présente consécration des chefs de villages et de quartiers de la Commune Urbaine de Sikasso. « Les droits, ils sont acquis, ils restent maintenant à  chacune des parties à  assumer démocratiquement ses responsabilités, principalement, dans les domaines de la mobilisation des ressources financières (TDRL), de l’information, de la formation, de la sensibilisation, de la mobilisation citoyennes pour le portage des réformes institutionnelles, du référendum et des élections générales de 2012. Nous avons toutes les cartes en mains pour maà®triser et réussir ce challenge. Que Dieu bénisse notre cher et beau pays, le Mali de nous tous », a conclu le président de CRI-2002. La cérémonie de consécration des chefs de villages et de quartiers de la commune urbaine de Sikasso était présidée par le ministre en charge de la Décentralisation, David Sangara qui avait à  ses côtés son homologue de l’Environnement et de l’Assainissement, Tiémoko Sangaré. Chacun d’eux ont invités les chefs de quartiers à  assumer leurs responsabilités pour la marche la décentralisation, la gestion des ressources naturelles, la mobilisation des ressources financières pour les collectivités, le portage des élections générales de 2012 et les réformes politiques en cours dans notre pays.

Manger local pour combattre la malnutrition

Pour prévenir la malnutrition, le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef) préconise l’allaitement maternel exclusif jusqu’à  six mois révolus. Et au-delà ? Des sociétés produisent des farines enrichies pour compléter et équilibrer l’alimentation des enfants mais aussi des adultes. Parce que leurs ingrédients sont en grande partie made in Mali, ces farines cadrent avec la stratégie nationale de valorisation des produits locaux pour combattre la malnutrition. Une stratégie qui, explique-t-on au ministère de la Santé, se veut moins coûteuse que l’importation de traitements comme le Plumpy Nut, une pâte à  base d’arachide, légumineuse très cultivée au Mali. «Le pays produit beaucoup de céréales telles que le mil, le sorgho, le maà¯s, les légumineuses, le haricot, le soja… Nous voulons vraiment encourager leur consommation, surtout dans les ménages. Il faut que tout le monde puisse manger de façon saine et équilibrée», plaide le docteur Samaké Raki Ba, chef de la division nutrition à  la direction nationale de la Santé de Bamako. «Les œufs rendent muet» La route est longue. «En 2008, sur 400 tonnes de farine produites, nous en avons vendu 132 pour l’Unicef. Et ces 132 tonnes sont toutes parties à  Sikasso, le grenier du Mali», se souvient Abdoulaye Sangho, coordonnateur des unités fabriquant le Misola, une farine enrichie à  base de petit mil, soja et arachide. «C’’est un véritable paradoxe. à‡a veut dire que, quelque part, les gens ne savent pas ce qu’il y a d’essentiel à  donner à  leurs enfants.» Cette situation résulte entre autres des croyances. «Certains pensent que manger des fruits peut provoquer des maladies comme le paludisme. On leur fait comprendre que C’’est seulement la piqûre de moustique qui peut donner le paludisme, que si les mamans utilisent les moustiquaires imprégnées, les enfants seront protégés. Et on explique que les fruits sont très nourrissants pour les enfants», raconte Mariam Diarra, présidente de l’Association de santé communautaire de Tingolé, à  105 kilomètres de Bamako. «D’autres, poursuit-elle, pensent que si une femme enceinte mange des œufs, cela rend l’enfant muet. On explique que C’’est surtout la malnutrition de la maman qui peut entraà®ner des maladies chez l’enfant, et que la femme enceinte doit bien manger pour que l’enfant à  naà®tre soit en bonne santé.» On est loin du compte: d’après l’enquête démographique et de santé de 2006, 68% des Maliennes en âge de procréer souffrent d’une carence en fer causée par le paludisme, les grossesses rapprochées, des problèmes gynécologiques ou la consommation de thé juste après les repas… Des cuissons qui détruisent les vitamines Lors de la Semaine d’intensification des activités de nutrition (Sian), organisée par l’Etat malien deux fois l’an à  l’occasion du déparasitage et de la supplémentation en vitamine A, un grand volet est consacré à  la valorisation des produits locaux. «On rappelle les aliments riches en fer: le foie, le jaune d’œuf… Les aliments vert foncé, telles que les feuilles utilisées pour certaines sauces, regorgent souvent de fer, de vitamine A…», énumère Anne-Marie Dembélé, chargée des programmes de nutrition à  l’Unicef, qui soutient les Sian sur les plans technique et financier. Seulement, ce potentiel nutritionnel n’est pas toujours optimisé. La responsable onusienne souligne en effet que si des ethnies n’utilisent que les feuilles vertes comme aliment quotidien, leur valeur nutritive est annihilée par la cuisson. «La sauce peut passer trois heures dans la marmite avant qu’on ne la considère comme cuite. Cela entraà®ne une destruction des vitamines, qui ne résistent pas à  la chaleur.» Autre écueil: le Mali est en pleine transition nutritionnelle «Par exemple, on préfère les huiles et le cube Maggi au soumbala [épice fabriquée à  partir des graines de néré, ndlr], observe Anne-Marie Dembélé. Il va falloir encore renforcer la promotion des produits locaux, parler des valeurs nutritives, expliquer pourquoi ces produits locaux sont nécessaires pour le développement et la croissance de l’organisme —surtout des enfants et des femmes.» Mais pour cela il faut des fonds et, pour l’heure, la division nutrition ne bénéficie pas d’un budget propre. En outre, celui-ci se révèle insuffisant: il oscillerait entre 400 et 500 millions de francs CFA (entre 615.000 et 769.000 euros), dont environ la moitié est engloutie dans l’achat de farines enrichies.

Dans l’univers des coépouses (1) : Grande soeur et petite soeur

Les signes extérieurs de richesse sont peut être la chose la plus variable au monde. Dans certaines de nos sociétés traditionnelles, la puissance d’un homme se mesurait à  l’étendue des terres dont il était propriétaire, au nombre de têtes de bétail qu’il possédait, mais aussi à  la richesse et à  la qualité de son harem. l’orgueil de l’empereur ou du chef de tribu transparaissait toujours dans sa capacité à  combler ses innombrables concubines. C’’était le terme qui convenait mieux que celui d’épouse, puisque ses femmes étaient choisies, puis intronisées compagnes par la seule volonté du souverain ou du chef. Ce statut très précaire avait un seul avantage : il excluait toute forme de jalousie (comment pouvait-on combattre quelqu’un dont la chute ne nous profite pas ?) et le désir de se faire remarquer se faisait dans le respect de la cohabitation. l’esprit de compétition entre les concubines s’exprimait exclusivement dans une fécondité plus ou moins triomphante. Le nombre d’enfants et surtout de garçons établissait une hiérarchie naturelle aux yeux de tous, même si l’on se gardait d’établir ouvertement ce classement. Les rapports à  la cour du seigneur étaient régis selon une règle tacitement acceptée : tout le monde relevait la satisfaction du maà®tre des lieux chaque fois qu’il avait un garçon et lui-même traduisait son inclination du moment, en montrant un peu plus d’affection pour la toute nouvelle et heureuse maman. Les règles du jeu étaient donc clairement définies. La religion venue d’Arabie allait encore conforter à  sa manière la toute puissance de l’homme, lui accordant le droit de prendre au maximum quatre épouses, mais selon des règles définies et qui refrénaient ainsi certains abus. Mais même avant que l’islam n’instaure ses limites normatives dans les traditions, l’union comme la séparation se déroulait selon des rites précis et même codifiés à  l’extrême. Au sein de la population le ciment de l’union de deux êtres était si puissant et si fortement ancré dans les esprits qu’il ne pouvait venir à  l’esprit d’aucun conjoint de le banaliser. Par exemple quand des conjoints se séparaient, on amenait les futurs divorcés sous un arbre en pleine brousse afin de prononcer la sentence à  laquelle le dit arbre ne survivait pas. Dans la gestion des ménages polygamiques la tradition, soucieuse de la paix familiale, était parvenue dans beaucoup de cas à  une certaine « magnification » des rapports entre deux épouses pour neutraliser autant que possible le sentiment de rivalité, qui pouvait découler de leur cohabitation. La première femme était considérée comme l’aà®née à  tout point de vue. Les reproches en public – C’’était elle qu’on blâmait au cas o๠sa coépouse, plus jeune et donc moins instruite des choses de la vie, se comportait mal. Elle payait moralement pour l’autre en cas de dérapage. Par contre, si elle parvenait à  exercer une influence bienfaisante sur sa « jeune sœur », elle retirait généralement beaucoup de gratitude dans la conduite d’une vie de famille harmonieuse. Son prestige auprès de tous se nourrissait avant tout d’une totale absence de jalousie de sa part. La première femme était perçue comme une rassembleuse et en aucun cas, les germes de la division ne pouvaient être semés par elle. La société, elle aussi contribuait à  réguler la situation en apportant certains aménagements de nature à  contenir les débordements des écervelées. De celles qui sont incapables de considérer les rapports entre coépouses autrement qu’en termes de compétition. Au nombre des procédés on pourrait citer la géniale idée de confier l’enfant de la seconde épouse à  la première et vice versa. Ce procédé contribua de façon puissante à  atténuer tout sentiment de jalousie dans l’un ou l’autre camp. Les conséquences de cette pratique sont parfois bizarres : il arrive par exemple qu’une mère se trouve prise à  partie par les enfants qu’elle avait mis au monde, mais qu’elle n’avait pas élevés. Tout aurait pu longtemps aller pour le mieux dans le meilleur des mondes polygames. Mais pour beaucoup les choses se gâtèrent quand des chefs de famille, par faiblesse sans doute, acceptèrent que l’une de leurs femmes leur adresse en public des reproches. Cette apostrophe de l’homme signifiait qu’il s’était montré inéquitable dans le traitement de ses épouses. Ce qui constitue la pire des maladresses dans un ménage polygamique. Les femmes s’estimaient en effet toutes « mariées » de la même manière. Pour elles la codification du mariage amenait, avant d’abord l’égalité en droits et en devoirs, la protection de l’époux et son sens de éthique. Si ce postulat est respecté, il était relativement à  aisé de faire admettre à  la femme qu’elle devait avoir nécessairement une coépouse. Celle-ci était sensée l’aider dans les travaux, la soulager quand elle serait dans l’incapacité d’assumer la tenue du foyer (en cas d’accouchement ou de maladie par exemple). Les apôtres de la polygamie se gardaient prudemment (et on les comprend) de dire à  la première femme que sa « petite sœur » comblerait le vide de la couche du mari pendant qu’elle garderait la chambre pour « quarante jours » après la naissance d’un bébé. Mais cela bien sûr était sous-entendu. Les plus acharnés arrivaient par cet argument à  rendre indispensable la coépouse. Une femme de la vieille époque, Sara témoignait ainsi : « De notre temps, soupirait-elle, nous avions le culte de l’homme et même si nous connaissions ses petites faiblesses, il se montrait digne de notre respect en remplissant sa charge d’époux avec une conscience que n’ont pas les hommes d’aujourd’hui. Comment voulez-vous faire plaisir à  une femme en ayant la tête ailleurs ? l’amour au sens physique du terme n’est pas un acte banal, voilà  pourquoi actuellement les hommes n’ont que ce qu’ils méritent, voilà  pourquoi la division règne dans leurs foyers. On ne comblera jamais une épouse avec quelques coups de reins précipités. Une vraie complicité – Ceux qui limitent à  cet acte mécanique leurs obligations conjugales ne peuvent fonder leur ascendant dans la famille que sur la jalousie que nourriront les femmes les unes envers les autres. Mais pas sur le respect et l’affection que celles-ci doivent leur porter. Nos hommes étaient justes dans leurs rapports avec chacune de nous coépouses. Je me rappelle qu’un jour mon mari m’avait dit qu’il avait contrevenu à  la loi de Dieu en me préférant une nuit de plus à  ma coépouse qui était la première femme. Son affliction était si réelle que J’en fus moi-même désolée. Et pourtant un tel acte aujourd’hui remplirait d’orgueil toute épouse qui en bénéficierait. Nous avions été élevées de manière à  ce qu’un sentiment d’injustice dont nous bénéficions nous donnait mauvaise conscience et nous ne nous sentions pas flattées par une préférence déplacée. Les rapports sur tous les plans étaient sains, insistait Sara. Ma grande sœur me donna toujours l’impression de se préoccuper de moi. Une telle attitude bienveillante ne pouvait donc que me culpabiliser pour les excès d’une nuit que notre mari faisait avec moi à  ses dépens. » Un tel comportement et une conscience aussi aiguisée de la justice dans les rapports entre homme et femme et surtout entre femme peuvent sembler incongrus de nos jours, mais dans les temps anciens, ils entraient dans un code de conduite parfaitement accepté. Sara poursuivit : « Le jour o๠je fus mariée on m’indiqua sans ambages que je devais me plier à  la volonté de ma grande sœur (la première femme) puisque celle-ci était déjà  engagée à  être une sorte de « tutrice » pour moi. La différence d’âge (8 ans) justifiait ce statut. Dès les premiers jours de notre cohabitation, l’atmosphère fut telle que je me suis sentie soutenue et encouragée. Je vais vous faire une révélation que mon grand âge (65 ans) va faire passer comme déplacée. Ma grande sœur a enrichi ma culture des rapports physiques avec notre mari. Pouvez-vous imaginer une telle complicité entre les coépouses d’aujourd’hui ? Sûrement non, alors voilà  pourquoi je n’étais pas fière d’avoir volé une nuit d’amour à  une telle personne. « Je ne me sentais aucunement supérieure à  elle, même si je savais qu’au fil du temps J’étais pratiquement, la seule de nous deux à  voir la couche de notre époux comblée. La retraite de ma grande sœur se fit en douceur et ce fut elle-même qui m’apprit que les rapports physiques entre elle et notre mari s’espaçaient de plus en plus. Je compris ensuite qu’elle était à  la base de cette compréhension et même qu’elle donna liberté à  notre mari de se consacrer plus souvent à  moi qu’à  elle. Et pour m’enlever tous mes scrupules de conscience, elle me dit ceci : « Il faudrait que tu aies les reins plus solides désormais pour accomplir ta part et la mienne dans les sollicitations de notre époux ». Je remplissais son invite du mieux que je pouvais. Et J’y mettais d’autant plus de C’œur, que ce devoir là  n’était pas du tout désagréable. Je comprenais que je bénéficiais de la fraà®cheur que me donnaient mes huit années de différence d’avec ma grande sœur. Avant que je n’arrive, elle avait déjà  eu trois enfants, mais je ne pus donner que deux de plus à  mon époux après sa retraite, si bien qu’il resta toujours cette différence d’un enfant entre nous (huit contre sept) ». Par « goût personnel » – « A la limite, se souvient Sara, J’étais heureuse de ne l’avoir pas rattrapé dans ce domaine et les cinq enfants (tous des garçons) d’elle, que J’eus à  élever furent parmi ceux de nos fils qui ont le mieux réussi dans la vie. Là  en toute honnêteté la « Ban’tchini », (petite maman) que je suis pour tous les enfants de notre époux, conçoit beaucoup de fierté dans ce domaine. Je me dis que J’ai été une épouse docile et surtout une coépouse irréprochable à  tout point de vue. Ma plus belle récompense est venue quand les enfants, qui me furent confiés, réussirent pleinement dans la vie. Ce sont eux qui nous ont, tout les trois (ma grande sœur, notre mari et moi), envoyé effectuer le pèlerinage à  la Mecque. Jamais je n’ai accepté leur proposition de m’envoyer la première au prétexte que ma grande soeur « Makoroba » qui avait des rhumatismes articulaires n’aurait pas pu tenir physiquement ». Sara n’avait-elle pas craint que leur époux prenne une troisième femme ? « A priori non, mais au fur et à  mesure que ma complicité avec ma grande sœur allait en se renforçant, J’avoue avoir eu des appréhensions. Chaque fois qu’il rentrait à  la maison la mine soucieuse, je le regardais sournoisement en me disant qu’il allait nous annoncer sa décision de me donner une « petite sœur ». Makoroba, elle, était certaine du contraire. Elle connaissait notre homme mieux que moi. Ce ne fut que le jour o๠notre mari me confia, qu’il avait contrevenu à  la loi morale en me préférant une nuit de plus que ma grande sœur que J’eus la conviction, à  partir de ce jour-là , qu’il ne prendrait jamais une troisième femme. Mon troisième enfant venait de marcher, beaucoup de vieilles femmes de l’époque me trouvaient épanouie physiquement. On appelait ça « noroya fari ». Notre époux faisait envie aux autres femmes mais J’étais sûre de mon emprise sur lui au plan physique, voilà  pourquoi il ne songea jamais à  une troisième femme. Vous les jeunes d’aujourd’hui vous êtes impertinents, ne me poussez pas à  vous révéler le secret qui fait qu’on puisse garder un époux », conclut Sara dont le regard brillait à  l’évocation de cette période d’apogée. C’’est vrai qu’en la regardant bien on ne doutait pas, vu sa prestance et la finesse de ses traits qu’elle ait provoqué des ravages au début des années 50 o๠elle situait sa troisième maternité. Nous eûmes beau solliciter de continuer la conversation avec elle, elle refusa tout net. C’’était comme si elle voulait quitter la scène en pleine gloire après l’évocation de cette « période faste » de sa vie d’épouse et de coépouse comblées. Elle avait auparavant admis qu’elle s’occupa de la grande cuisine exactement huit ans après la retraite de sa « grande sœur » et qu’après cette date, leurs belles-filles prirent la relève. Justement, C’’était autour du cas de son second fils I.T. marié à  deux femmes, qui ne s’étaient jamais entendues, que se poursuivit notre conversation. Le fils de Sara avait deux femmes qui se vouaient une haine qu’il est difficile d’imaginer. Leur mari avait plutôt réussi sur le plan social en devant un entrepreneur fortuné. Il avait préféré rester dans la famille paternelle, malgré le fait qu’il soit un peu à  l’étroit après avoir pris une seconde épouse. Il l’avait fait en disant à  ses amis que la première était le choix de ses parents. Ce qui voulait dire que la deuxième était de son « goût personnel ». « Même s’il ne le disait pas ouvertement, nous confia Sara, il était clair qu’il comblait physiquement celle-ci mieux que la première. Pouvais-je lui en parler ? Non bien sûr, car J’étais trop prude pour lui tenir ce genre de discours à  mon fils. Ce sont les amis qui devaient régler ce genre de question. Avec mon silence, je me sentais coupable. Mais malgré sa préférence pour sa seconde épouse, I.T. présumait que l’harmonie entre ses deux femmes allait s’établir d’elle-même ». Mais indiscutablement, l’homme fut sans doute fautif dans la dégradation de l’atmosphère. Le commentaire malheureux, fait devant ses amis, était revenu à  sa seconde femme qui voulut s’imposer comme la préférée. Il n’en fallait pas plus pour que la zizanie s’installât. Sara, son mari, sa grande sœur et presque toute la famille défendaient discrètement la première épouse. Celle-ci, AD, ne manquait pas d’atouts. C’’était une femme communicative, qui savait mettre ses beaux-parents, ses beaux frères et ses belles-sœurs à  l’aise sur tous les plans. Ils en rirent méchamment – Elle s’investissait à  écouter ceux-ci, compatissait à  leurs problèmes, montrait constamment que l’unité de la grande famille lui était particulièrement chère. Souci qui visiblement n’habitait pas O.K., le chouchou de I.T. Cette dernière, forte de sa position privilégiée auprès de son époux, ne se gênait pas pour dire haut et fort son fait à  tout membre de la famille qui l’importunait. Elle oubliait que vivre dans une concession paternelle exige de toute « étrangère » qu’elle sache se plier devant les premiers occupants. O.K. n’était donc que tolérée dans sa belle-famille et un beau jour elle dépassa la ligne rouge de la bienséance. Après une dispute avec sa coépouse, elle clama qu’elle ferait déménager I.T. de cette famille de m…. Propos violents, propos imprudents et surtout propos, qui furent pris pour une déclaration de guerre. Dans ce genre de situation, la réaction des agressés ne se fait pas attendre. Ouvertement, beaux-frères et belles-sœurs se rangèrent sans état d’âme du côté de la première épouse. O.K. comprit d’ailleurs très vite qu’elle était allée loin et même trop loin. Dans une tentative de réconciliation, elle vint s’agenouiller publiquement devant le père de son époux et présenter ses excuses, les mains derrière le dos. Cette attitude lui avait été conseillée par la seule belle-sœur qui la tenait en estime et qui était une sorte de complice compréhensive de ses états d’âme. Mais le mal était irréparable et O.K. ne regagna pas le terrain perdu, malgré son geste de soumission. Ses adversaires jugeaient qu’elle avait brisé les liens de considération mutuelle en prononçant des propos blessants pour une famille respectable. Quant à  Sara elle n’a pas montré de l’hostilité pour sa belle fille pendant longtemps. Sans doute son amour maternel pour IT a reprit très vite le dessus. Elle aussi contribua à  l’acte de contrition de O.K. Elle l’aida à  faire preuve d’une certaine humilité pendant un bon moment au point d’endormir la vigilance de son époux, avant que IT ne lui présente sa requête comme nous allons le voir plus loin. Cela dit il faut, pour respecter la réalité des faits, dire que O.K. n’était fondamentalement une mauvaise femme, bien au contraire. Mais elle avait un caractère impétueux, qui la poussait à  parler et à  agir sur des coups de tête et en se laissant entièrement dominer par son émotivité. En outre, elle ne donnait pas dans la discrétion, ni dans la demi-mesure. Ses colères se transformaient souvent en véritable prise à  partie pour ceux qu’elle soupçonnait de vouloir nuire à  ses relations avec son mari. Dans la famille, on commença à  recenser patiemment ses faiblesses pour les exploiter. O.K. avait l’habitude de laver de façon démonstrative ses sous-pagnes et de les étaler fièrement à  sécher quand son mari était chez elle. Elle le faisait plus comme une subtilité bien apprise que par malice. Un jour qu’elle s’adonnait à  son exercice favori, une de ses belles-sœurs lui fit perfidement la remarque, qu’il était étonnant que son mari puisse la combler alors qu’il sortait d’une opération d’appendicite, subie seulement une semaine auparavant. O.K. haussa les épaules et montra qu’elle n’avait cure d’un tel jugement. Mais la remarque avait fait mouche et son venin se répandit dans la concession. Dans la famille, tous les membres en rirent méchamment et ne pouvant plus supporter les quolibets lâchés à  tout bout de champ, O.K. finit par se faire loger dans une villa de son mari avec la bénédiction du chef de famille. l’épisode des sous-pagnes qui ailleurs fait des ravages comme nous allons le voir dans nos prochaines publications, devint véritablement proverbiale. Pour ironiser méchamment sur un cas incroyable, les belles-sœurs ne se privaient pas de lancer : « C’’est devenu l’affaire des sous-pagnes de Oumou », avant d’en rire longuement. Tout était déjà  préparé – Comme nous le disions, la cohabitation était donc devenue si intenable entre les deux coépouses. I.T, qui n’en pouvait plus devant cette guérilla contre sa « chérie » obtint de son père la permission de transférer O.K. dans une maison située hors de la concession familiale. A.D., qui restait dans la grande famille, ne vit aucun inconvénient dans ce transfert pour lequel on sollicita au préalable son approbation. Cependant la rivalité entre les femmes de I.T. apparaissait comme un coup de gueule sans intérêt dans un univers calme quand on la compare à  celle qui opposait les coépouses de Karim, un des contremaà®tres de I.T. marié, à  trois ans d’intervalle, à  deux femmes qui auraient pu s’entendre. Mais ce fut lorsque la seconde s’installa que la première révéla au monde des facettes de sa personnalité qu’on ne lui connaissait pas : celles d’une femme coléreuse, aigre, envieuse et surtout animée d’une jalousie morbide. Auparavant personne n’avait vu Ata élever la voix en trois années de mariage. Tous les membres de la famille l’estimaient d’ailleurs parce qu’au terme de cette période elle donna un beau garçon à  son mari. Un bébé que toutes les filles et même jeunes femmes du quartier se disputaient. Sa mère pouvait passer presque une journée entière sans voir son enfant. On lui préparait même le biberon ailleurs pour pouvoir le garder plus longtemps. Ata semblait nager dans le bonheur lorsqu’on l’appela chez l’oncle de son mari pour lui dire qu’elle allait avoir une « petite sœur ». Tout avait été déjà  préparé et C’’était le lendemain que la nouvelle épouse de Karim, N.K, allait arriver. Muette après son retour à  la maison, Ata s’efforça de faire bonne figure quand sa coépouse fit son entrée. Elle se retint exactement pendant quarante jours, puis commença ce qu’il faut bien appeler sa guerre. Faut-il jeter la pierre à  la première épouse ? Non compte tenu de la très bonne atmosphère qui régnait entre Ata et son mari. Non quand on sait que la venue au monde, de leur très beau garçonnet constituait pour le couple un réel motif de fierté. Alors pourquoi une telle duplicité de la part de son mari ? Ata n’avait, sans doute, pas de réponse aux questions qu’elle se posait et même qu’une bonne partie de leur entourage aussi se posait. Pendant quarante jours Ata avait ruminé sa douleur, se demandant ce qu’elle avait elle fait au ciel pour mériter un tel châtiment. Elle avait eu confiance en son mari et voilà  comment ce dernier la payait en retour. Mais avant de passer à  l’offensive, elle prit le temps de mieux connaà®tre sa coépouse. Ce fut ce qui expliqua l’accalmie de longue durée, qui précéda l’ouverture des hostilités. Ata commença par une campagne sournoise de dénigrement. Elle répandait des commentaires fielleux sur sa « petite sœur ». Certes, disait-elle, la nouvelle venue avait l’avantage d’avoir une croupe avantageuse. Mais elle ne se privait pas de la remuer à  tout va. Ce genre de pratique ne se retrouvait que chez les dames de petite vertu et de bas étage, confiait elle à  ses proches. Certes, disait-elle encore, N.K était de teint clair tandis qu’elle était d’un noir de jais, mais « le teint ne se mangeait ». Ata se répétait cela pour ne pas se sentir inférieure physiquement par rapport à  sa coépouse, qui il faut le reconnaà®tre, était plus séduisante qu’elle. Mais la réalité était que la jalousie la rongeait au point qu’elle perdit l’éclat qu’on lui connaissait après sa maternité. Ceux qui la connaissaient sentaient que le mal la rongeait au point qu’elle se fanait à  vue d’œil. Guettant sa coépouse et son mari, elle avait fini par tomber dans le voyeurisme. Une de ses copines dira pour lui trouver des excuses, qu’elle voulait seulement se rendre compte si son homme sursurrait à  N.K les mêmes amabilités qu’il lui chantait lors des deux premières années de leur mariage. Mais en fait Ata qui venait la nuit poser son oreille sur la porte de la chambre de sa coépouse, se retrouvait encore plus malheureuse en attendant Karim et N.K roucouler dans leur chambre. Et le lendemain, elle sautait sur la moindre peccadille pour déclencher un scandale terrible. Comme N.K en outre avait l’avantage d’avoir un emploi, les choses ne s’arrangeraient pas. La « petite sœur » mettait la main au portefeuille pour financer des petits plats à  son mari. Les sorties verbales de Ata enflaient comme des orages et quand elles atteignaient leur paroxysme, tout n’y était qu’insulte. N.K répliquait peu, mais quand elle le faisait, elle savait trouver les formules qui faisaient mal. Elle affirmait par exemple que la différence entre elle et sa grande sœur se faisait dans l’intimité de la chambre à  coucher. Et que dans ce territoire, elle apportait à  son époux des choses qu’un « bambou » comme Ata ne pourrait jamais lui donner. La « première » faillit étouffer de rage la première fois qu’elle entendit ce commentaire venimeux et qui n’était pas entièrement faux. Ata dépérissait à  vue d’œil et l’élégance, qui était la sienne quand elle se mariait avec Karim, avait disparu de même que l’enveloppe charnelle, qui la rendait désirable après sa maternité, avait fondu comme beurre au soleil. (à  suivre) TIà‰MOGOBA

Les « donzos » font danser Hamdallaye

Pendant deux jours, le terrain de football d’Hamdallaye communément appelé « Commune terrain » a été transformé en véritable salle de spectacle. Parrainé par le président du Rassemblement pour le Mali, (RPM), Ibrahim Boubacar Kéita, cette manifestation culturelle a regroupé de nombreuses personnes. Les jeunes ont activement pris part à  cet événement riche en couleurs. D’un côté, la mélodie irrésistible du tambour « bara », du balafon, et du « Konin » faisait vibrer les C’œurs. Et de l’autre, un sketch sur le mariage joué par le groupe Gnokolo et la danse des masques n’ont pas laissé le public d’indifférent. Un week-end de miracles Les femmes dans leurs uniformes cousus pour la circonstance, se donnaient à  la danse du « bara » et les chasseurs venus d’ un peu partout à  Bamako, ont tenu le public en haleine jusqu’à  l’aube par les signes de leurs pouvoirs mystiques et démonstrations de force, tels que faire passer une lame sur la langue ou cracher du feu par la bouche. Pour Fodé Moussa Sidibé, représentant du chef du quartier, Fodé Moussa Sidibé, une telle initiative permet de s’unir pour le développement du quartier. En retour, les chasseurs d’Hamdallaye lui ont remis un diplôme de reconnaissance fait d’un tissu en coton et portant un dessin d’oiseau, symbole de progrès et de bravoure. Le président de la sous-section IV de la Fédération Nationale des chasseurs du Mali, Bréhima Coulibaly a demandé à  ses confères de rester solidaires. Ramener l’éducation familiale à  la source ! Au cours de ce week-end culturel, une conférence débat a été animée par le président de l’association « N’go », Mamadou Kéita. Les échanges ont porté sur l’éducation familiale des enfants, la consolidation des valeurs humaines au sein de nos familles. Avec la présence des chefs des familles, de quartiers et des enseignants. Un retour aux sources de tous les africains s’impose pour mettre en avant les valeurs traditionnelles qui s’effritent petit à  petit. Avec la mise en place d’un comité de suivi composé de la Fédération nationale des chasseurs, du conseil du quartier et des acteurs de l’école à  Hamdallaye.

Gargaci Mairiga : « Etre griot et gagner sa vie, c’est possible ! « 

Etre griot et gagner sa vie, C’’est possible, déclare Gargaci Mairiga, la trentaine bien révolue qui n’est nullement un apprenti, encore moins un parvenu dans le monde du griotisme. Ce travail là , je l’ai appris de mes parents. Je suis le griot du Lamido. Mon grand-père et mon père ont fait ça jusqu’à  moi-même. Cette longue et riche expérience qu’il a su tisser dans ce domaine au fil des ans lui a d’ailleurs valu un nom de star que seuls ses fans connaissent mieux que quiconque: On m’appelle Régional. Partout o๠il y a des cérémonies ou des réunions, je suis là -bas. Le griotisme : une tradition africaine Gargaci Mairiga est donc un artiste d’un autre genre que tout le monde aimerait voir prester, de toutes les façons, que vous le vouliez ou pas, ce ne sont pas les lieux et les cérémonies qui manquent pour ses prestations. Quand il y a des cérémonies, des mariages, des baptêmes, je suis là -bas. D’ailleurs comme dans la musique moderne, les rythmes ici sont diversifiés: Il y a le Gargaci, le Algueta, le Paré, le Djaodjé, le Banga et le Conciré. Plus ces rythmes sont diversifiés, plus les adeptes s’y plaisent et plus aussi, les revenus du griot sont énormes. Il y a des mariages o๠on donne 10 000, parfois 20 000 jusqu’à  100 000 ou 200 000 Fcfa. Etre griot et gagner dignement sa vie est donc vraiment possible. Les griots, gardiens de l’héritage de la communauté qu’ils se transmettent de père en fils oralement (faute d’écriture) sont présents dans les principales circonstances, de la vie: circoncision, excision, mariage, funérailles, etc. La caste des griots est née puis s’est développée dans un contexte o๠n’existaient historiquement ni l’écriture (sauf pour les religieux), encore moins la radio ou la télévision. Le griot est ainsi considéré comme étant notamment le dépositaire de la tradition orale. Les familles griotiques sont spécialisées soit en histoire du pays et en généalogie, soit en art oratoire ou soit en pratique musicale. Les principaux groupes de griots ou communicateurs traditionnels sont appelés djéli en pays mandingue, guéwà«l en pays wolof et gawlo chez les Toucouleurs. On ne devient pas griot, on naà®t griot Par des liens particuliers. Le cas des djélis. Tout enfant est initié dès son plus jeune âge aux techniques et aux savoirs de sa caste. Ce sont les anciens qui forment les jeunes. àŠtre griot, c’est donc appartenir à  la caste des djélis (sang), caste qui peut être identifiée par le nom de famille: Kouyaté, Diabaté, Dramé, Niakaté, Soumano… Il n’est pas possible de passer d’une caste à  une autre. De plus, les mariages exogames sont interdits. Les djélis, porteurs des savoirs et des mystères, ne peuvent épouser que des membres de leur caste afin de sauvegarder la djéliya et de préserver l’identité des djélis. Un enfant (fille ou garçon), né(e) dans une famille de djéli, reçoit l’instruction propre à  sa caste, une instruction qui s’établit selon neuf paliers de sept années chacun, chaque pilier correspondant à  une étape de la vie. De nos jours, du fait de l’exode rural, de l’émigration et de la mondialisation, nombreux sont les enfants de griots qui ignorent tout des pratiques artistiques et des connaissances de leurs ancêtres. Par ailleurs, il est possible que des membres appartenant à  d’autres castes accomplissent des fonctions de griots mais ceux-là  ne peuvent être assimilés aux griots. Il en est ainsi de Salif Keà¯ta (descendant de Sundjata Keita, caste des rois). Les maà®tres de la parole: Les griots Le griot a de tout temps été considéré comme le détenteur de la parole, par conséquent la mémoire sociale du groupe. Il retient les faits et les événements importants de son temps mais aussi des temps passés, que ses pères lui ont confiés pour qu’il les restitue aux générations futures. C’est ainsi que, véritable professionnel de la parole, le griot veille à  leur bonne transmission. On fait appel à  lui lors des événements importants pendant lesquels il ne se fait pas prier pour reconstituer la généalogie d’une famille donnée au son de la kora ou d’un autre instrument de musique selon le type de société. Périodiquement, de grandes réunions à  caractère ésotérique rassemblent les griots initiés pour des récapitulations de l’histoire des peuples. Lors de ces cérémonies, les plus jeunes d’entre eux acquièrent de nouvelles connaissances. Les aà®nés leur présentent des sites sacrés, tombes ou anciens autels, leur apprennent les systèmes de décompte du temps pour chaque ethnie et les formes anciennes des langues qui permettent aux chefs des sous-groupes de se comprendre. D’autres agents qui interviennent dans la transmission de la tradition orale sont les conteurs qui ont toujours des messages à  véhiculer lors des veillées nocturnes, mais aussi les chanteurs qui puisent à  volonté dans le répertoire national. Un peu plus tard, on retrouvera ce rôle chez les écrivains africains, en effet la peinture de la société traditionnelle est très présente dans l’oeuvre d’un Senghor, d’un Birago Diop ou encore d’un Mamby Sidibé. Même si cette transmission n’est pas faite par le canal oral, elle mérite d’être citée car la finalité demeure, inculquer aux enfants les valeurs traditionnelles. Cependant, avant tout, les griots sont restés des maà®tres de la parole; ce sont eux qui font et défont les réputations, apaisent ou excitent l’ardeur des chefs, relatent et magnifient la naissance, l’apogée ou la chute d’un état, et font entrer dans la légende tel un brave ou en sortir tel un méchant guerrier. C’est pour cela que tant qu’existeront les traditions chez les Soninke, Mandingues et autres Peul, ces mots du célèbre griot Mamadou Kouyaté resteront d’actualité: Nous sommes des sacs à  paroles, nous sommes les sacs qui renferment des secrets plusieurs fois séculaires. L’Art de parler n’a pas de secret pour nous; sans nous les noms des rois tomberaient dans l’oubli, nous sommes la mémoire des hommes; par la parole nous donnons vie aux faits et gestes des rois devant les jeunes générations. Je tiens ma science de mon père Djeli Kedian qui la tient aussi de son père; l’Histoire n’a pas de mystère pour nous; nous enseignons au vulgaire ce que nous voulons bien lui enseigner, c’est nous qui détenons les clefs des douze portes du Manding…

« Diatiguiya » : Le sens de la cordialité et de l’hospitalité malienne.

Offrir l’hospitalité est un devoir La « Diatiguiya » est le sens de la cordialité et de l’hospitalité malienne, rendant les échanges très conviviaux. Elle est une tradition séculaire, car le visiteur étant sacré, lui offrir l’hospitalité est un devoir. Tout visiteur est séduit et marqué par cette coutume. L’héritage des empires Le Mali tire son nom du prestigieux empire du Mali que les historiens qualifient de plus puissant Etat de l’Afrique au sud du Sahara au moyen âge. D’une superficie de 1.241.192km², sans accès à  la mer, le Mali est entouré de sept (7) pays : l’Algérie au Nord, la Cote d’Ivoire et la Guinée au Sud, le Burkina Faso au Sud Est, la Mauritanie et le Sénégal à  l’Ouest et le Niger à  l’Est. Sa population est de 12 millions d’habitants avec une densité de 9,4 habitants au kilomètre carré. Plusieurs ethnies cohabitent formant une richesse de langues et de cultures : Bambara, Malinké, Soninké, Khassonké, Sénoufo, Bwa, Bozo, Minianka, Dogon, Sonrha௠(sédentaires, cultivateurs), Peul, Touareg, Maures(nomades, éleveurs)… «Depuis les temps immémoriaux, nos ancêtres ont toujours accueilli les étrangers, et cela sans arrières pensées. La diatiguiya permettra de donner un séjour agréable aux étrangers. C’’est pourquoi, l’étranger bénéficiera d’un bon traitement de la part de ses hôtes. Tout est fait à  l’honneur de celui-ci. Voila ce dont témoigne Adama Traoré qui était venu ressourcer chez lui à  Massala à  9 km de Koulikoro . « C’’est ma deuxième fois de venir passer mes vacances dans mon village. Je me sens à  l’aise ici, tout le monde prend soin de moi, même ceux qui ne me connaissent pas, les voisins et les amis de mon oncle » témoigne t-il. « Nous n’avons ni or, ni diamant, mais nous offrons le diatiguiya pour mériter la confiance de nos visiteurs », lance un vieux bamabara à  Nafadji(Kita) Alpha Oumar Konaré Konaré le vulgarisateur du concept « Diatiguiya » Pour que les étrangers se sentent à  l’aise lors de la CAN au Mali, Alpha Omar Konaré, véritable boà®te à  idées, a vulgarisé le concept diatiguiya. Objectifs visés: donner une touche malienne à  la fête sportive, et afin que les étrangers venus d’horizons divers se sentent chez eux Mali. Ousmane Coulibaly est professeur d’Histoire Géographie au Lycée à  Bamako, il donne ici des détails. « D’abord, un étranger originaire de ces deux pays arrive dans notre commune. Tout de suite on l’intègre dans un « grin », regroupement quotidien d’amis o๠on se retrouve pour papoter autour d’un verre de thé à  la menthe. Il se fait des potes. Il devient tout de suite citoyen de la commune. Il a un problème nous serons là , malgré la modicité de nos moyens. L’étranger pour nous est déjà  roi. Il sera pour nous empéreur».

L’enseignement des traditions par le conte : « Moriba Yassa, le paresseux », une illustration

Dans le souci de préserver ce qui reste d’une tradition basée sur l’oralité et répondre à  l’alerte lancée par le sage Amadou Hampâté Ba sur le danger que court nos traditions, la matérialisation de cette tradition par l’écriture s’avère salutaire. C’’est dans cette logique de sauvegarde de nos valeurs ancestrales que se situe effectivement le recueil de contes « Moriba Yassa, le paresseux », sous titré Contes du Mali, publié en 2008, de l’écrivain N’Tji Idriss Mariko. Contes du terroir Ainsi, à  travers dix contes multi ethniques, puisés du terroir national, l’œuvre nous livre des enseignements, des leçons pleines de sagesses sur la vie en société et les comportements à  adopter ou à  fuir. Ces contes restent fideles aux fonctions classiques du conte que sont le divertissement et l’éducation. Aussi bien les adultes que les plus petits y trouvent leur compte. Le recueil est truffé de sages proverbes et teinté d’un humour qui nous guide tout droit dans les traditions ancestrales du Mali. l’œuvre enseigne le respect des traditions à  travers la fin tragique ou le remords de tous ceux qui ne les respecte pas. Dans « Sébouroussé », le premier conte, la princesse éponyme du conte est victime de l’éducation que lui a réservée son roi de père. Pour avoir été élevée en marge de la société par son père, elle ne sut même pas s’occuper de son enfant qu’elle tuera par ignorance. Le conte « Les anciens » fournit des enseignements sur l’utilité des vieux dans une société car « la jeunesse est un arbre qui pousse sur le terreau que constituent les vieux » Le conte « La petite fille désobéissante » montre l’utilité d’écouter ses parents et autres personnes âgées. En effet, la désobéissante Karitio refuse le conseil de son père. Pourtant « la mère poule ne donne rien à  son poussin qui lui soit nuisible ». Son refus d’écouter les conseils de son père lui vaudra la prison et bien de mésaventures. D’un conte à  un autre, C’’est la voix de la sagesse qui résonne en écho. Le rôle du griot dans la société, ce que pensent les différentes ethnies les unes des autres, le vol sont autant de sujet abordés au fil du recueil. Le conte comme miroir de la société Une version de la légende de Moriba Yassa, le paresseux est livré. Le texte éponyme de l’œuvre nous donne la conception du travail de la société traditionnelle. Cette société n’admet pas l’oisiveté, la paresse. En effet, Moriba est atteint d’une paresse maladive que la société ne peut accepter de peur de voir d’autres jeunes lui emboiter le pas. Le conseil des sages décide de le chasser du village. Seul, vivant dans la brousse, Moriba n’eut plus de vêtements. C’’est alors qu’il se confectionne des vêtements à  base de feuilles d’arbre. Dans cette brousse qui ne le refuse pas, il devint un devin. Car au passage des femmes qui lui expliquaient leurs problèmes, il donnait toujours des solutions futures qui se réalisaient. Il eut une grande réputation et, du coup, fut très sollicité. Les femmes promettaient que si leurs vœux se réalisaient, elles viendraient danser « le Moriba yassa, yosso yassa », onomatopée de la démarche et du bruit des feuilles que portait Moriba. Ce conte s’inscrit quelque part dans la philosophie du bon sauvage de Rousseau. La civilisation est corrompue, Moriba se sent libre de toute contrainte dans la brousse o๠il n’établit aucun programme, laissant la vie tout faire. Loin de l’hypocrisie et de la bêtise humaine. Le conte livre également une philosophie parfois ambiguà« de la liberté : la vraie liberté ne s’accommode pas avec la vie en société. Cette pensée n’est pas sans rappeler la conception de la liberté de Jean Paul Sartre. Ce recueil de conte confirme davantage que la sagesse réside dans le bon usage de la tradition. N’Tji Idriss Mariko est à  la fois professeur de Lettres et l’un des derniers gardiens de notre tradition. Ces deux aspects se sentent aisément dans l’œuvre : elle est écrite dans une langue simple, limpide, accessible, et transmet des éléments essentiels de notre culture. Même si, comme le dit l’auteur, la puissance de la voix et les gestes ne peuvent être matérialisés sur du papier.

L’excision, un sujet d’une extrême sensibilité

L’excision ou les mutilations génitales féminines (MGF) dans toutes leurs formes, sont pratiquées à  grande échelle sur le continent africain et touchent environ 130 millions de femmes et d’enfants avec des conséquences physiques et psychologiques parfois irrémédiables. Particulièrement au Mali o๠plus de 92 % des femmes sont excisées. Bien vrai que cette pratique constitue une violation de l’intégrité physique et des droits fondamentaux de la personne et en dépit du péril de mort qu’encourent celles qui la subissent, elle reste un sujet sensible dans une société o๠le poids de la tradition pèse. Le cas du Mali en est une parfaite illustration. l’excision, un sujet encore tabou Le Mali a créé un Programme National de Lutte contre l’Excision (PNLE). Objectif : adopter une stratégie de sensibilisation de la population en vue d’un changement de comportement pour l’abandon définitif de la pratique. Mme Kéà¯ta Joséphine Traoré, Directrice du PNLE, affirme que « le sujet reste tabou dans notre pays. Quand on parle de la sexualité ou que l’on touche à  l’intimité de la femme, cela est perçu comme quelque chose de sacré ». Comme en témoigneMme Sidibé Aminata Diakité (femme enceinte) et que nous avons rencontré lors d’une consultation prénatale au centre de santé de Badialan II (un quartier de la commune III de Bamako). Pour elle, « C’’est une pratique ancestrale, donc une valeur sociétale à  conserver et qui purifie la femme et lui évite de ne pas être indexée dans son foyer ». Dans le même ordre d’idée, un homme d’une quarantaine d’années, électricien de son état, fulmine que l’excision constitue une pratique nécessaire à  la santé de la femme. Il désapprouve les acteurs de la lutte contre l’excision : « les occidentaux veulent spolier nos valeurs traditionnelles pour implanter les leurs ». Poursuivant son « coup de gueule », cet homme ajoute que « la pratique est recommandée dans les dogmes religieux précisément dans l’Islam ». Ce qui est faux. A l’inverse, Awa Guindo, enseignante de profession, regrette d’avoir subi cette pratique et pour cause, elle évoque les conséquences néfastes sur son intégrité physique : « J’ai fait deux maternités difficiles, finalement, on m’a conseillé de ne plus tomber enceinte pour ne pas mourir ». A chaque accouchement, les sages femmes étaient obligées de procéder à  une intervention chirurgicale au niveau du vagin. Une étudiante de la Faculté de médecine nous confie qu’elle subit des perturbations de son cycle menstruel dues à  l’excision. Lamine Traoré, professeur d’Anthropologie à  l’Université de Bamako et responsable du programme de Lutte contre l’excision, a souligné que les enquêteurs envoyés à  l’intérieur du Mali ont été ‘’arrosés » d’injures par les locaux pour avoir abordé l’idée de l’abandon de la pratique. Mais, la situation s’améliore sur le terrain… Notons que dans sa politique de lutte contre l’excision, le gouvernement malien a rendu gratuit le traitement des complications causées par l’excision.