Autorités transitoires : le niet des élus locaux

Dans trois correspondances datées du 25 janvier 2016 et adressées au Président de la République, Ibrahim Boubacar Keà¯ta (IBK), les élus locaux de tous les échelons sans distinction d’appartenance politique se disent très inquiets de l’élaboration d’un projet de loi portant installation d’autorités transitoires dans les collectivités des régions de Tombouctou, Gao et Kidal. Le gouvernement fait pourtant suite aux demandes répétées des mouvements signataires de l’Accord, s’appuyant sur le texte qui prévoit « la mise en place, le cas échéant et au plus tard trois mois après la signature de l’Accord, des autorités chargées de l’administration des communes, cercles et régions du Nord durant la période intérimaire, leur désignation, compétences et modalités de leur fonctionnement seront fixées de manière consensuelle par les parties. » Les élus affirment ne pas comprendre une telle démarche, dans la mesure o๠une loi vient de proroger les mandats des organes des collectivités jusqu’à  la tenue des élections communales et régionales. Dans les mêmes correspondances, ils appellent à  l’accélération du processus de cantonnement des combattants des groupes armés, mais aussi à  la tenue des élections. « Nous, les élus de la région de Gao soussignés, rejetons avec la dernière rigueur toutes mesures tendant à  mettre fin au mandat des conseils des collectivités fonctionnelles en les remplaçant par un collège transitoire ou toutes formes d’administration non prévues par la loi », peut-on lire dans la correspondance. En interpellant ainsi le Chef de l’à‰tat, les élus du Nord se démarquent des responsables des groupes armés qui se battent depuis quelques mois au sein du comité de suivi de l’Accord pour la paix et la réconciliation, afin d’obtenir l’installation d’autorités transitoires. Selon un élu qui s’exprimait sous le couvert de l’anonymat, la mise en place des autorités transitoires prévue dans l’accord n’est qu’une éventualité. Un autre élu assure que l’installation de ces autorités nécessite la mobilisation de moyens financiers colossaux qui pourraient être investis dans l’organisation rapide des élections communales et régionales. « Après consultations de nos membres, souhaitons qu’il soit mis fin au processus de mise en place des collèges transitoires (…) tant que le cantonnement et le désarmement ne sont pas effectifs », déclare le collectif des pouvoirs locaux. Il semblent suivis par les populations, « car il faut être du nord pour comprendre le fonctionnement d’ici. l’à‰tat malien veut nous livrer aux rebelles. Nous ne laisserons pas faire. Aucune administration transitoire ne sera mise en place tant que nous vivons. C’’est une indépendance programmée », s’alarmait Agaichatou Maà¯ga, une habitante de Gao. Au niveau du comité de suivi de l’accord de paix, les discussions sur ce point continuent, mais cette levée de boucliers des élus hypothèque un peu plus une option déjà  très impopulaire.