(Défis de 2019- 2/7) Droits de l’Homme : Leur respect s’impose !

2018 aura été pour le Mali une année difficile pour les Droits de l’Homme. Les organisations de défense des droits humains dans le pays sont toutes unanimes dans ce constat. Des restrictions ont été observées concernant la jouissance de certains droits élémentaires : manifestation, protestation ou encore liberté d’expression. Les multiples exactions commises, notamment au centre du pays, où l’insécurité va toujours grandissant, ont fini d’amener les indicateurs au rouge. À l’orée de la nouvelle année, d’importants défis restent à relever.

Rien que pour le dernier trimestre 2018, 90 cas de violations de Droits de l’Homme ont été enregistrés, occasionnant 163 victimes, dont 12 femmes et 18 enfants.  En plus de 30 cas d’exécutions extrajudiciaires recensés dans le pays, on note également 5 cas de torture et 9 cas de détentions illégales. Avec 57% des cas, les régions de Mopti et Ségou sont les plus touchées. Par contre, les régions de Koulikoro et de Kidal enregistrent seulement 1% des cas. Ces chiffres proviennent du dernier rapport de l’ONU sur le Mali, publié le 28 décembre 2018. Si, selon ce rapport, la plupart de ces cas de violations de Droits de l’Homme sont commis par le Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (GSIM), les groupes armés signataires de l’Accord pour la paix et les forces de défense et de sécurité maliennes sont aussi impliqués.

Ce tableau peu enviable de la situation des droits de l’homme dans le pays inquiète les défenseurs des droits humains, qui suivent attentivement l’évolution des évènements. « De façon générale, de notre point de vue, les Droits de l’Homme sont vraiment à la peine au Mali. Qu’il s’agisse des droits civils et politiques ou des droits économiques et socioculturels, il existe encore beaucoup de difficultés et des défis à relever », relève Dr Malick Coulibaly, Président de la Commission nationale des droits de l’Homme (CNDH).

Au sud du pays, plus particulièrement à Bamako, si la situation est globalement acceptable, certaines restrictions se sont néanmoins accentuées autour de libertés fondamentales, notamment les droits de manifestation et la liberté d’expression, entres autres. « Quand il y a des discriminations, quand certaines manifestations sont réprimées parce qu’interdites tandis que d’autres ne souffrent d’aucune interdiction, que le gouvernement obéit les yeux fermés à certains, c’est extrêmement grave », souligne Maitre Moctar Mariko, président de l’Association malienne des Droits de l’Homme (AMDH). Une situation mal vécue aussi au niveau d’Amnesty International Mali, où l’interdiction de la marche de protestation du 5 décembre 2018 contre le projet de loi d’entente nationale est décriée. « Le respect de l’état d’urgence se fait de manière sélective. Lors des rassemblements du Maouloud et du pèlerinage de Kita, personne ne l’a évoqué. Pourquoi, quand il s’agit des fêtes religieuses, on occulte l’état d’urgence, mais quand il s’agit d’attroupements pour manifester des désaccords et des mécontentements, on interdit les marches ? », s’interroge Ramata Guissé, Directrice exécutive d’Amnesty International Mali.

Quels défis pour 2019 ?

Bien des défis sont à relever pour cette nouvelle année en matière de Droits de l’Homme au Mali. Pour la plupart des observateurs, notamment les organisations de défense des droits humains, le défi majeur de cette nouvelle année pour les autorités étatiques du Mali est de résoudre l’épineuse problématique de l’insécurité dans les régions du centre et du nord. Pour y arriver, l’AMDH préconise le dialogue entre les communautés comme solution. « C’est aux communautés elles-mêmes de trouver les voies et moyens, en dehors de l’État, parce que à chaque fois que l’État intervient, il y a certaines communautés qui ne se sentent pas à l’aise, ayant des suspicions de soutien de l’État  à d’autres », estime Maitre Moctar Mariko. La lutte contre l’impunité doit également s’accentuer. Le Président de l’AMDH penche pour des « procès emblématiques », qui feront comprendre à ceux qui s’adonnent aux violations des Droits de l’Homme que certains actes passent nécessairement par la case justice.

Dr Malick Coulibaly évoque pour sa part une lutte incisive contre la corruption, car, dit-il, « un franc détourné, c’est un droit à l’éducation ou à la santé en moins. Qui connait l’interconnexion entre les droits humains comprend aisément que la mauvaise gouvernance impacte négativement la jouissance des Droits de l’Homme ». Selon le Président de la CNDH, les efforts doivent être démultipliés pour que cette année le maximum de Maliens puisse avoir accès aux droits prescrits par la Constitution et les instruments juridiques régionaux et internationaux que leur pays  a librement ratifiés.

 

Cet article a été publié dans le Journal du Mali l’Hebdo N°(196) du 10 janvier 2019

2017: Une année difficile pour les droits humains

Amnesty International a procédé au lancement régional (Afrique de l’Ouest et du Centre) de son rapport annuel sur la situation des droits de l’Homme dans le monde. Cette présentation qui se fait pour la première fois au Mali, dresse un bilan plutôt sombre de la situation des droits de l’Homme avec l’entretien « d’un climat de peur pour justifier les attaques contre les défenseurs des droits de l’Homme dans la région ». L’organisation souligne tout de même que l’espoir est permis.

Le rapport annuel d’Amesty International pointe du doigt une dégradation de la situation des droits de l’Homme dans la région Afrique de l’Ouest et du Centre. Cette aggravation de la crise des droits de l’Homme se manifeste à travers la répression des manifestations. Amnesty relève que dans 20 pays africains des atteintes ont été portées au droit de manifester. Au point que « les cas dans lesquels le droit à la liberté de réunion était respecté représentaient l’exception et non la règle », ajoute le rapport. Dans le même temps, les attaques à l’égard des défenseurs des droits de l’Homme, des journalistes et des militants de l’opposition se sont multipliées. Les cas du Cameroun, du Tchad, de la Guinée équatoriale et d’Érythrée ont été cités.

Les violences engendrées par les conflits ont également occasionné des exactions notamment de la part de groupes armés. C’est le cas au Cameroun, au Niger, au Nigeria, en République centrafricaine, en RDC, en Somalie et au Mali.

Installé dans une zone de turbulences depuis 2012, la Mali enregistre également ces cas de violation. Le rapport souligne que « l’expert indépendant des Nations Unies sur la situation des droits de l’Homme au Mali et la MINUSMA » ont exprimé « leurs inquiétudes quant à de graves menaces pour la sécurité dans les régions du nord et du centre ».  Ce qui constitue un danger pour les civils et les empêche d’accéder « aux services sociaux de base.»

L’insécurité, une des causes de violation des droits.                                   

La MINUSMA a recensé 252 atteintes aux droits humains imputables aux forces de sécurité ou à des groupes armés et ayant fait plus de 650 victimes. Elle a également recensé 21 exécutions extrajudiciaires et homicides délibérés et arbitraires, 12 disparitions forcées et 31 cas de torture et autres formes de mauvais traitements. Le rapport met l’accent sur des exactions menées par les groupes armés dans les régions de Mopti et Ségou. Il ajoute que « la présence accrue des groupes armés et le recrutement local  ont aggravé les tensions entre différentes ethnies.» Les forces de maintien de la paix, les forces de sécurité maliennes et les forces françaises de Barkhane ont été la cible de 155 attaques, selon la MINUSMA. Et ce sont 30 personnes travaillant pour la force onusienne qui ont trouvé la mort dans des attaques revendiquées, pour la plupart par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans. Une insécurité qui a remis en cause le droit à l’éducation pour plus de 150 000 enfants. Ainsi  plus de 500 écoles de Gao, Kidal, Ségou, Mopti et Tombouctou sont restées fermées toute l’année. La situation des personnes détenues dont plus de 1 366 de la prison centrale de Bamako étaient en attente de leurs procès, et l’impunité dont les « efforts ont perdu de leur vigueur » selon le rapport, ont aussi retenu l’attention sur la situation du Mali.

L’espoir est permis

Même s’il s’alarme du fait que « la haine est passée du discours à la réalité », M. Alioune Tine directeur d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest et Centrale estime que l’espoir est permis. Car « le fait que des milliers d’habitants de la région continuent à défendre leurs droits montre que les revendications de liberté, de justice et d’égalité persisteront toujours ». Et plutôt que de répondre par la répression, il invite les « Etats d’Afrique de l’Ouest et du Centre » à traiter les causes pour lesquelles les populations protestent, comme les questions de santé, de logement et d’emploi.

L’armée malienne accuse la rébellion touareg de « violer » l’accord de Ouaga

« Depuis samedi, le MNLA a mobilisé femmes et enfants à  Kidal, pour jeter des pierres sur les populations noires, sur les militaires africains et maliens. C’est une grave violation de l’accord de paix » de Ouagadougou signé le 18 juin entre rebelles touareg et le gouvernement de transition du Mali, a déclaré dimanche soir à  l’AFP, le lieutenant-colonel Diarran Koné, de l’armée malienne. Trois militaires de la Minusma blessés Il a affirmé que depuis l’arrivée vendredi 5juillet des soldats maliens à  Kidal, en parallèle au cantonnement des combattants du MNLA et conformément à  cet accord, « les manifestants, manipulés par le MNLA, ont blessé trois militaires africains de la Minusma (mission de stabilisation de l’ONU) et caillassé trois véhicules de l’armée malienne dont une ambulance ». « C’est une grave violation de l’accord de Ouagadougou, et nous demandons aux forces impartiales (armées française et de l’ONU présentes à  Kidal) de le dire publiquement », a ajouté le lieutenant-colonel Koné. Une source militaire africaine, contactée par téléphone à  Kidal par l’AFP, a de son côté affirmé que plusieurs dizaines de civils maliens s’étaient « réfugiés » dans un camp militaire de la ville o๠se trouvent les soldats maliens, français et africains. Ces habitants « subissent des représailles de la part de groupes touareg armés » pour avoir manifesté leur joie à  l’arrivée de quelque 150 soldats maliens dans la ville qui étaient occupée par la rébellion touareg depuis février. Il s’est inquiété du « climat de tension » à  Kidal au moment o๠débute dans tout le reste du pays la campagne pour le premier tour de la présidentielle du 28 juillet qui, grâce à  l’accord de Ouagadougou, doit théoriquement se dérouler aussi à  Kidal. Depuis vendredi, manifestations pour et contre la présence de l’armée malienne se succèdent à  Kidal, selon des témoins.