Agressions sexuelles : Bamako, une ville dangereuse pour les femmes ?

Dans une récente étude publiée par Plan International sur les agressions sexuelles dans le monde, Bamako, a été classée parmi les villes les plus dangereuses en matière d’agression à l’égard des femmes. L’enquête menée  entre mai et août décrit un phénomène qui interpelle. Dans la ville des 3 caïmans, des adolescentes et des jeunes femmes sont victimes d’agressions sexuelles. Des victimes qui peinent encore à se départir de la honte pour dénoncer leurs agresseurs, dont les actes restent pour la plupart impunis.

Selon les conclusions d’une étude menée par l’ONG Plan International, Bamako est parmi les villes les plus dangereuses pour les femmes (agressions sexuelles, enlèvements, meurtres…). Parue la semaine dernière, l’étude, menée en ligne auprès de 392 experts des droits de l’enfant et des femmes, place la capitale malienne au 17ème rang, après Johannesburg et Ouagadougou mais avant Stockholm et New York. 22 villes étaient concernées et dans lesquelles un minimum de 15 experts par ville devaient répondre aux questionnaires de l’ONG. Les critères de choix des différentes villes ne sont pas définis dans l’étude. Cette dernière précise toutefois que dans les 22 villes sondées « le harcèlement sexuel est le principal risque pour la sécurité des filles et des jeunes femmes ». 60% des experts affirment que « les actes de harcèlement sexuel ne sont jamais ou difficilement dénoncé aux autorités ». A la question de savoir à combien ils évaluent les risques d’agressions sexuelles ou de viols à Bamako, les experts l’estiment à 32%, devant des mégalopoles comme New Delhi (Inde) ou encore le Caire (Egypte). Des affirmations qui étonnent le commissaire principal Marie Jeanne Sangaré, commandant de la Brigade des mœurs. « Je ne sais pas d’où ils tirent ces conclusions, mais je ne saurais dire que Bamako fait partie des villes dangereuses pour les femmes » assure-t-elle. Celle qui dirige l’unité qui lutte contre ces cas d’agressions depuis 2015 affirme être très surprise. En 2017, son département n’a enregistré « que » cinq cas de viols, sept de pédophilies, un inceste, mais tout de même 28 attentats à la pudeur dirigé à l’encontre de mineurs. Pour l’année en cours, trois viols ont été répertoriés. Parmi lesquels le sinistre viol collectif qui a circulé sur les réseaux sociaux et dont les images avaient suscité l’émoi de toute la capitale. Pour ce cas, précise la commandante, il a fallu une dizaine de jours à la victime avant de se présenter dans leurs locaux. Ce qu’elle regrette. « Après une agression sexuelle, la victime doit être prise en charge dans les 72 heures, au-delà, elle s’expose ». A moins de trois mois de la fin de 2018, les chiffres sont en baisse. 5 cas d’attentats à la pudeur et un cas de pédophilie complètent le tableau des violences sexuelles à la brigade des mœurs. Toutefois, elle reconnait que tous les cas ne sont pas signalés à leur niveau. Certains le seraient directement dans les commissariats, la non uniformisation des données rend difficile une compilation plus large.  Une fois répertoriée, une expertise médicale est demandée par les forces de l’ordre. « Nous recevons des cas, mais ce n’est pas très fréquent et le plus souvent ce sont des viols commis sur des mineures ou des adolescentes non encore mariées », précise le professeur Issa Diarra, chef du service gynécologique de l’hôpital Mère-Enfant du Luxembourg. Etape délicate pour de nombreuses victimes. « Nous ne devons pas les obliger. Il faut établir une relation de confiance avec les victimes, c’est la base.  Si vous perdez cette confiance, vous prenez le risque que la victime se braque » affirme le commissaire principal Sangaré. Les cas répertoriés ne constituent que la face visible des crimes commis.

Des causes injustifiables Les violences que subissent les femmes sont diverses. Harcèlement, viol, violence physique et morale. Les causes mises en avant ne justifient pas les déchainements. « Parfois, ce sont des comportements liés à l’habillement qui provoquent  mais aussi il y a des hommes qui ne sont satisfaits que quand ils agressent la femme », note le professeur Issa Diarra. La ville de Bamako devient un carrefour où se mêlent divers profils. En plus du climat d’insécurité et de banditisme qui y règne, la cité de 3 caïmans est un réservoir de délinquance juvénile. Madame Diawara Bintou Coulibaly, présidente de l’Association pour le progrès et la défense des droits des femmes (APDF) n’est en rien surprise par la place qu’occupe Bamako. « Les agressions s’accroissent à cause des jeunes qui ne cessent de se droguer », soutient-elle. Avant d’ajouter que les dérives actuelles prennent leur essence jusque dans l’effondrement de la cellule familiale. Nous avons eu des cas où le mari, sous l’effet de la drogue, a poignardé 33 fois sa femme », rappelle celle qui milite pour l’émancipation de la gente féminine. Son association assure-t-elle a reçu de janvier à octobre 2018, 249 dossiers de femmes ayant subi des violences.

Des séquelles pour la vie « Quand une fillette est victime d’une agression sexuelle, cela  reste  toujours  dans sa mémoire. Très souvent, même quand elles sont mariées elles ont peur de l’homme », révèle le professeur Issa Diarra. Les conséquences des actes sur les victimes sont indescriptibles. « Il y a aussi très souvent  la frigidité qui s’installe. Et ce n’est pas le gynécologue seulement qui peut les soigner, il faut aussi un psychologue », souligne Diarra. « Ce sont des séquelles qui restent  très longtemps » appuie-t-il.

Malgré ces conséquences dévastatrices, la pratique est un sujet tabou au sein de la société malienne.  Les victimes de viol, par peur des reproches, se résignent au silence. Le regard de la société, parfois répressif, freinent leurs expressions. En plus de leur dignité volée, elles reçoivent les échos négatifs d’un milieu conservateur. Elles se culpabilisent, la mort dans l’âme.

Une complaisance partagée ? Il y a une semaine, dans le quartier de Banconi, une fille de 14 ans a été violée par un groupe de cinq jeunes. D’eux d’entre eux auraient été appréhendés par le sixième arrondissement qui le transfère devant le procureur de la commune VI. « Mais ce dernier refuse de poser tout acte tant que la grève des magistrats a cours », raconte Madame Bouaré Founé Samaké, présidente de Wildaf. Pendant ce temps, la victime peine à marcher à cause de la violence subie. « Elle est pratiquement couchée. Elle marche à peine, alors que ses violeurs se promènent à  Bamako », explique-t-elle, révoltée. Les interventions de personnalités influentes étouffent  l’affaire.  « Les chefs de quartier et les religieux se sont réunis pour que les auteurs n’aillent pas en prison », rapporte encore Madame Bouaré.

Pourtant, de telles atteintes à l’intégrité de la femme doivent secouer les consciences. Mais l’absence de justice pour les abusées apparait comme un autre supplice. Le plus souvent, les coupables sont libérés avant même de comparaitre.  « Si  ces pratiques continuent c’est qu’il n’y a pas de punition. En cas de viol, les parents sont tentés de régler à l’amiable le problème », s’indigne de son côté Madame Diawara Bintou Coulibaly, présidente nationale de l’Association pour le progrès et la défense des droits des femmes (APDF). Des apartés qui, selon la présidente, amplifie le phénomène. La complaisance des acteurs contribue à la violence.

Que faire ? Face à l’ampleur des violences, une mobilisation est nécessaire pour stopper ces viles pratiques. La sensibilisation des jeunes filles, des familles et des pouvoirs publics serait une initiative porteuse. « Il faut réellement que la justice  soit égale et rendue pour tout le monde », formule le gynécologue. Des mesures préventives doivent être envisagées pour endiguer ce phénomène. Chaque femme violée est un rêve qui s’écroule. Et les victimes dans leur silence, parlent.

Recrudescence de viols au nord du Mali

 

Ils avaient été l’ombre au dessus des femmes dans les régions du nord pendant la crise et l’occupation. On les avait pensé révolus jusqu’à ces derniers mois où ils semblent devenir monnaie courante. En quelques semaines, les viols, qui sont  désormais le faits des bandits armés, ont fait de nombreuses victimes.

Pratiqué généralement lors des conflits armés, des viols sur les femmes ont été commis en 2012 lors de l’occupation du territoire par les groupes rebelles et djihadistes. Bien que diminué depuis la reconquête du territoire, des individus armés renouent avec la pratique surtout sur les principaux axes routiers menant aux régions du nord du pays. Il y a un mois, des bandits armés ont attaqué des passagers qui passaient la nuit  au bord du fleuve à Tombouctou, pour attendre la traversée par le bac au lendemain matin. Les agresseurs, après avoir dépouillé les voyageurs, se sont méthodiquement attaqué aux femmes présentes, auxquelles ils ont infligé toutes sortes de sévices. Sous le regard impuissant des autres passagers. Une semaine plus tôt, une femme avait été violée dans la même zone alors qu’elle revenait d’un point d’eau.  Le dimanche  10 septembre dernier, nouveau braquage contre un bus de Maiga Transport entre Hombori et Gossi. Aux environs de 20 heures, les bandits détroussent les passagers et agressent sexuellement  une jeune fille de 15 ans  en présence de ses parents. Un acte d’humiliation et d’atteinte à la dignité humaine qui prend de l’ampleur de plus en plus. Le dernier cas en date s’est déroulé ce week-end. Samedi 12 septembre au soir, les passagers d’une voiture personnelle venant de Tombouctou pour Sévaré tombent sur une jeune femme dans un état critique sur la route entre Bambara Maoude et  Ngouma. Elle a été violée et ses agresseurs lui ont tiré dans les fesses, selon les témoins. Malgré la diligence des bons samaritains, elle succombera lors de son transport vers l’hôpital.

Face à des tels actes barbares, les voix se lèvent pour interpeller les autorités et les organisations de droit de l’homme. L’insécurité sur les axes routiers  ne permet plus de voyager, les passagers craignant d’être dépossédés de leurs biens, voire pire. Les transporteurs n’osent plus emprunter ces routes, à l’instar d’Ansongo-Ménaka, où c’est l’arrêt total des camions de transports depuis cinq jours  à cause des attaques régulières.

 

 

 

 

 

A toutes les Nafissatou d’Afrique !

Elle s’appelle Nafissatou Diallo. C’’est elle qui a osé ! Elle a porté plainte le samedi dernier contre l’un des hommes les plus puissants de la planète parce qu’il a voulu exercer ce que sous certains cieux, on apelle « le droit de cuissage » ! Parce qu’il est qui il est, parce qu’il est puissant, parce que le poids de son portefeuille n’a pas à  être proportionnel à  celui de sa conscience ! Depuis que ce qu’il est convenu d’appeler l’affaire DSK a éclaté, tout le monde plaint le pauvre homme « dont tout le monde connaissait les faiblesses et qu’on a piégé » !Eh bien, si tout le monde connaissait ses penchants pourquoi ne pas avoir protéger ses potentielles victimes ? Enfin… Les questions sont si nombreuses dans cette histoire et le temps certainement nous permettra d’obtenir des réponses à  certaines d’entre elles. Mais depuis samedi et surtout dimanche dernier, quand il a été plus ou moins confirmé que la « plaignante » était une américaine d’origine guinéenne, mère célibataire de surcroit, C’’est-à -dire tout ce qu’il y a de plus précaire comme situation au pays de l’oncle Sam, J’ai dit chapeau ! Que ce soit cette femme-là  qui a eu le courage de crier à  la face du monde ce qu’on lui avait fait, C’’est une victoire pour la gent féminine. A-t-elle eu conscience en ce moment-là  de qui elle envoyait en enfer, je ne le sais pas. Mais une chose est sure, elle a dit NON. Non au silence, non à  l’acceptation, à  la résignation. Non à  l’ordre établi des choses dans une société encore, malheureusement, phallocratique. Non à  ce monde qui veut que l’homme puissant manifeste sa puissance en disposant selon son bon vouloir des « femelles » qui passe devant lui ! En écrivant cette phrase, je ne sais pas pourquoi l’image du roi du Swaziland s’impose à  moi. Ce jeune monarque qui organise chaque année une cérémonie pour se choisir une nouvelle épouse parmi les vierges de son royaume. Et tout le monde fait mine de croire que C’’est un honneur pour les jeunes filles dont la vie s’arrête ainsi !Je ne suis pas féministe, je ne veux pas m’approprier le combat dans lequel se sont lancés les combattantes du monde entier pour défendre « l’honneur de la victime de cet horrible crime ». Moi, avec ma toute petite voix, je voudrais dire merci à  Nafissatou. Merci d’avoir en notre nom à  toutes, au nom de toutes les Awa, Silvia, Christine, Macha, Petra ou que sais-je encore, de par le monde qui se sont tues parce que C’’était un ministre, un député ou pire un frère ou un père. Et je lance un appel à  toutes celles qui ont jusqu’ici gardé le silence, à  toutes les Nafissatou d’Afrique, d’essayer, au moins essayer, de suivre l’exemple de Nafi des Etats Unis.