Macron à Gao : Pour un redimensionnement et une accélération de l’engagement français

Le président Emmanuel Macron se trouve ce vendredi sur la base de Gao au Mali, pour une visite éclair aux forces armées sans passer par Bamako, afin de réaffirmer l’engagement militaire de la France au Mali. Il a exprimé, lors d’une conférence de presse, sa « détermination » à lutter contre la menace djihadiste et sa volonté « d’accélérer » la mise en œuvre de l’Accord d’Alger, en parallèle d’actions de développement pour le pays, antidote au terrorisme.

C’est à 10h00 GMT qu’a attéri sur la base militaire française de Gao, à bord de son falcon présidentiel, le chef de l’État français Emmanuel Macron accompagné du ministre des Affaires Étrangères Jean-Yves Le Drian, de la ministre des Armées, Sylvie Goulard ainsi que du directeur général de l’Agence française de développement (AFD) Rémy Rioux, pour une visite éclair de six heures avec un programme très chargé. Le président IBK a fait le déplacement de Bamako pour accueillir le président français.

Après un entretien de 45 minutes avec le président IBK sur la lutte contre le jihadisme et l’application de l’accord de paix, le président Macron a passé en revue les troupes présentes sur la base de l’opération française Barkhane avec son homologue malien. Puis les deux chefs d’État ont pris part à une conférence de presse conjointe.

Lors de cette conférence, le président Macron à réaffirmer à son homologue malien l’engagement de la France aux côtés du Mali, il a assuré qu’il se montrerait « intraitable » avec les groupes djihadistes et qu’il y aurait une « accélération » dans la mise en oeuvre de l’accord d’Alger. « L’accord d’Alger est un bon cadre, qu’il faut relancer » a-t-il souligné, déplorant la lenteur de sa mise en œuvre. Le président français a aussi exprimé sa volonté d’articuler l’action militaire de la France avec des politiques de développement car c’est « un antidote au terrorisme » a-t-il ajouté.

Interrogé par une journaliste sur le rôle que pourrait jouer l’Allemagne et l’Europe dans le dossier sécuritaire malien, le président français a déclaré qu’il souhaitait « renforcer le partenariat avec l’Allemagne au Mali » et « faire davantage avec l’Europe » car cette menace est aussi un risque claire pour les européens.

Le chef de l’Etat français s’est également dit prêt à se rendre, à l’invitation du président IBK, président en exercice du G5 Sahel (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger, Tchad), à une prochaine réunion de cet ensemble « dans les semaines qui viennent ».

Le programme du président Macron se poursuivra avec une séance d’information avec les commandants de l’opération Barkhane. Il déjeunera aussi avec les troupes françaises, visitera une unité chirurgicale, aura un exposé des opérations militaires en cours et prononcera un discours devant les forces françaises, avant de s’envoler pour la France.

Macron au Mali pour donner une nouvelle dimension à l’engagement français

Pour son premier déplacement hors d’Europe, le président Emmanuel Macron se rend vendredi sur la base de Gao au Mali, pour donner une nouvelle dimension à l’engagement militaire de la France, présente depuis quatre ans pour lutter contre les jihadistes.

Moins d’une semaine après son entrée en fonctions, le chef de l’Etat veut non seulement marquer sa « détermination » à poursuivre l’engagement au Sahel mais aussi l’inscrire dans une coopération renforcée avec l’Allemagne. Il entend encore compléter l’action militaire par une stratégie d’aide au développement, a indiqué son entourage, comme le réclament d’ailleurs des organisations humanitaires.

Il sera accompagné par ses ministres Jean-Yves Le Drian (Europe et Affaires étrangères) et Sylvie Goulard (ministre des Armées), ainsi que par le directeur général de l’Agence française de développement (AFD) Rémy Rioux. 25 journalistes seront également du déplacement, alors qu’une quinzaine de sociétés de journalistes, des directeurs de rédaction et Reporters sans frontières ont protesté jeudi contre l’organisation de sa communication, notamment du choix des journalistes l’accompagnant au Mali.

A son arrivée, il sera accueilli par le président malien Ibrahim Boubacar Keïta, avec qui il aura un entretien sur la lutte contre le terrorisme, le dossier sahélien, le volet politique du dossier et la difficile mise en oeuvre des accords de paix de 2015.

Le nouveau chef des armées compte également s’adresser aux 1.600 soldats déployés sur la base de Gao (nord) dans le cadre de l’opération « Barkhane », et se fera présenter les différentes composantes du dispositif, selon la même source.

L’Elysée a choisi Gao car il s’agit de la plus importante base des forces françaises engagées à l’extérieur.

Davantage que l’ex-président François Hollande (2012-2017), son successeur veut mettre l’accent, selon son entourage, sur la coopération internationale dans la lutte contre le terrorisme, avec les autres pays européens, notamment l’Allemagne, premier contributeur de la Mission des Nations unies au Mali (Minusma).

La France veut « une impulsion franco-allemande pour que l’Europe joue un rôle croissant dans les dossiers de sécurité et de défense, dont ceux de l’Afrique et du Sahel ». Une question déjà évoquée lundi avec Angela Merkel.

Sortir du ‘purement militaire’

Autre nouvel axe affiché: articuler davantage l’approche militaire avec les politiques de développement, comme le montre la présence du directeur général de l’AFD, a souligné l’entourage du président.

C’est ce que demandent plusieurs organisations humanitaires, pour qui la seule approche militaire ne résoudra pas les violences secouant le Mali.

La politique française en Afrique est trop « purement militaire », et doit « investir dans le secteur de la gouvernance », notamment dans « la lutte contre l’impunité » en « réorientant son aide publique vers la justice », plaide la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH), qui dénonce au Mali « un niveau d’insécurité sans précédent ».

Même diagnostic pour l’organisation humanitaire Human Rights Watch, qui appelle le président Macron à « exhorter le président du Mali à s’attaquer frontalement aux problèmes qui ont mené à des décennies d’instabilité, notamment une faible gouvernance, une corruption endémique et les abus commis par les forces de l’ordre ».

Le nord du Mali était tombé en mars-avril 2012 sous la coupe de groupes jihadistes liés à Al-Qaïda, qui ont été en grande partie chassés par une intervention militaire internationale, lancée en janvier 2013 à l’initiative de la France.

Mais des zones entières échappent encore au contrôle des forces maliennes, françaises et de l’ONU, régulièrement visées par des attaques meurtrières, malgré la signature en mai-juin 2015 d’un accord de paix censé isoler définitivement les jihadistes. Depuis 2015, ces assauts se sont étendus au centre et au sud du pays, où la sécurité se détériore de plus en plus.

Dix-sept militaires français ont été tués au Mali depuis l’intervention Serval en janvier 2013, à laquelle a succédé en août 2014 l’opération Barkhane (4.000 hommes), étendue sur cinq pays du Sahel (Mali, Burkina-Faso, Mauritanie, Niger et Tchad), selon un décompte de l’AFP.

Au Mali, aux 1.600 soldats français s’ajoutent les 12.000 soldats de la Minusma.

En janvier, un attentat-suicide visant des combattants de groupes armés signataires de l’accord de paix avait fait près de 60 morts dans la ville de Gao.