Yémen, les hôpitaux cibles stratégiques

Le conflit qui oppose la coalition menée par l’Arabie Saoudite, qui soutient le président en place faceaux rebelles chiites Houthis, fait rage. Les civils continuent d’y payer un lourd tribut, comme ce 15 août, où une attaque de la coalition arabe a de nouveau ciblé un hôpital, faisant six morts et vingt blessés.

Lundi 15 août en début d’après-midi, l’hôpital public de la ville d’Abs, situé en zone rebelle non loin de la frontière avec l’Arabie saoudite, a été la cible d’une frappe aérienne qui a en partie détruit l’établissement tenu par Médecins sans frontières (MSF) depuis juillet 2015, et qui soigne plus de 4 000 patients par an. « C’est la quatrième attaque contre un centre médical de MSF en moins de 12 mois », a déclaré Teresa Sancristoval, responsable MSF pour le Yémen. « Une fois encore, un établissement médical fonctionnel, où se trouvait nombre de malades ainsi que des équipes médicales, a été ciblé dans une guerre qui n’a plus aucun respect pour les hôpitaux et leurs patients », a-t-elle déploré. Depuis les raids aériens de la coalition qui ont débuté en mars 2015, l’accès aux soins est très limité et l’espace aérien yéménite ayant été fermé par les forces de la coalition saoudienne, l’acheminement du matériel médical pour ravitailler les centres et établissements médicaux, est devenu très compliqué.

Stratégie récurrente Les bombardements d’hôpitaux qui constituent un crime de guerre, selon la convention internationale des Nations unies, sont pourtant de plus en plus fréquents et visent à réduire ces endroits en ruine pour empêcher l’ennemi et les populations d’avoir accès aux soins. Les établissements de MSF ont été la cible répétée des frappes aériennes et bombardements ces 2 dernières années, en Syrie, Somalie, et Afghanistan, occasionnant de nombreuses victimes. L’attaque la plus meurtrière qu’a connu MSF, fut à Kunduz en Afghanistan, quand 42 personnes trouvèrent la mort suite à une frappe aérienne américaine.

Ces frappes de la coalition surviennent dans un contexte très tendu, alors que les pourparlers de paix sont au point mort depuis une semaine, après que les rebelles Houthis et le parti de l’ancien président Saleh aient créé un conseil gouvernemental chargé de diriger le pays. Cet acte, vivement condamné par l’ONU et le gouvernement yéménite, a été qualifié de « violation constitutionnelle ». Depuis, bombardements et combats acharnés entre belligérants ont repris de plus belle dans cette guerre qui a déjà fait plus de 6 400 morts et 30 000 blessés, dont de nombreux civils, et poussé sur les routes deux millions de déplacés.

Montée de tension au Moyen-Orient: risques « très sérieux » d’attentats

L’alerte attentat a été renforcée dans la plupart des ambassades occidentales dans les pays du Moyen-Orient.Selon le site d’informations Euronews.com, on en sait désormais plus sur le faisceau d’indices qui a poussé la semaine dernière les à‰tats-Unis à  fermer une vingtaine d’ambassades et de consulats dans les pays arabes et à  appeler, mardi, leurs ressortissants à  quitter le Yémen «immédiatement». Les renseignements américains ont, selon plusieurs médias, intercepté des «communications» entre le chef d’al-Qaida et le responsable de la branche yéménite de l’organisation. Appels « à  l’action » des chefs d’Al Qaida C’est l’interception de messages contenant des menaces d’attentats entre le numéro un d’Al-Qaà¯da, Ayman al-Zawahiri, et Nasser Al-Whaychi, le chef de la filiale Al-Qaà¯da dans la Péninsule arabique (AQPA) qui a été le déclencheur de la décision de Washington de fermer une vingtaine d’ambassades et de consulats, selon les médias américains. Le premier aurait ordonné au second de perpétrer un attentat dès dimanche dernier. Zawahiri avait demandé à  al-Whaychi de « faire quelque chose », ce qui a poussé les responsables de Washington et du Yémen à  redouter une attaque imminente, selon les mêmes sources. Non seulement ces échanges émanent de «cerveaux» d’al-Qaida mais ils sont très précis, ce qui explique pourquoi Washington les a pris autant au sérieux. En outre, relèvent les analystes, il est rare que le leader d’al-Qaida, qui a trouvé refuge au Pakistan, discute des opérations à  venir avec les organisations sœurs. Il semble qu’Ayman al-Zawahiri se soit rapproché de Nasser al-Wuhayshi. Il y a quelques semaines, il aurait nommé l’ancien secrétaire de Ben Laden en Afghanistan, «manager», soit numéro 2 du réseau al-Qaida. «Frankenbombers» Leurs messages surviennent alors que le «bavardage» entre sympathisants d’al-Qaida s’est intensifié. Des communications auraient été observées entre des membres d’al-Qaida et quelqu’un résidant aux à‰tats-Unis. Les contacts auraient eu lieu par voie électronique comme postale. Dans le même temps, plusieurs figures d’al-Qaida ont retrouvé la liberté à  la faveur d’évasions massives de prison en Irak, en Libye et au Pakistan. L’AQPA serait en train de finaliser un attentat qui coà¯nciderait avec la fin du ramadan cette semaine, craignent les services secrets américains. Les intérêts occidentaux au Yémen seraient une cible de choix. Les autorités yémenites chercheraient activement les voitures piégées, dont al-Qaida compterait se servir contre les ambassades étrangères. Inquiétudes accrues Londres a déjà  évacué tout le personnel de son ambassade au Yémen, fermée depuis dimanche. Les Etats-Unis ont eux appelé ce mardi leurs ressortissants à  quitter le pays «immédiatement». Du côté du Quai d’Orsay (Ministère français des affaires étrangères, NDLR), on explique que les 600 ressortissants français enregistrés auprès de l’ambassade ont depuis dimanche des «consignes de restriction de déplacement maximale». Une autre peur des services de renseignement est l’usage par les terroristes de nouveaux explosifs indétectables dans le transport aérien. Des kamikazes pourraient être déployés avec des bombes implantées chirurgicalement dans leur corps, à  la manière des «mules humaines» utilisées dans le trafic de drogue, afin de déjouer les contrôles de sécurité. La presse américaine les a déjà  baptisés «Frankenbombers», une contraction de Frankenstein et de poseur de bombe. AQPA aurait aussi développé un explosif liquide. Il suffirait de tremper un vêtement dans ce bain et de le faire sécher. L’habit deviendrait alors «un objet piégé».