Accord a minima à Ouaga

Les burkinabè et la sous-région attendent toujours le nom de la personnalité qui doit diriger la transition née de la chute de Blaise Compaoré le 31 octobre dernier. Les tractations vont bon train depuis presque deux semaines ais les points de vue semblent avoir du mal à  converger. Une lueur d’espoir cependant ce mercredi, l’armée et la société civile se sont mis d’accord sur un certains nombre de points. Un gouvernement de 25 membres Le Conseil National de la Transition mis en place par les militaires et dirigé par el Lieutenant-Colonel Isaac Zida devient un organe «législatif»,alors que l’armée souhaitait qu’il soit simplement «consultatif». Il sera composé de 25 membres de l’opposition, 25 de la société civile, 15 militaires et 10 membres du camp de Blaise Compaoré. l’accord a minima confirme que le président de la transition sera un civil, qui choisira lui-même son Premier ministre, ce dernier nommant les 25 membres du gouvernement. Aucun de ces cadres du futur régime ne pourra participer aux prochaines élections, selon ce texte établi au sein d’une commission à  laquelle participaient la société civile, les autorités religieuses et traditionnelles, l’opposition et l’armée, à  raison de 2 membres chacun (8 au total). L’accord n’a cependant pas encore été validé en assemblée, comme prévu initialement, «les militaires étant partis recueillir les avis et amendements de leur hiérarchie», a déclaré un membre de cette commission. l’assemblée convoquée ce mercredi siègera à  nouveau ce jeudi soir, a-t-il précisé. Ensuite, si cette assemblée valide le texte en présence de militaires, l’armée devrait lever dans de brefs délais la suspension de la Constitution qu’elle avait déclarée à  son arrivée aux affaires. Le Conseil constitutionnel se saisira alors du document. Pour rappel, une charte de la transition, sorte de constitution intérimaire, a été remise par la société civile à  l’armée, qui y avait rédigé ses propres propositions. Un accord avec les militaires est impératif pour que ceux-ci rendent le pouvoir aux civils comme le réclament l’Union africaine et les partenaires occidentaux du Burkina.

Burkina Faso: toujours pas de fumée blanche

De Ouagadougou à  Accra, tout le monde planche sur le dossier burkinabè. Dans la capitale o๠le calme est revenu après plusieurs jours de manifestations, d’intenses tractations ont lieu pour trouver la personnalité civile qui doit diriger les 12 mois de transition. Le « pays des hommes intègres », qui a chassé par la rue son désormais ex-président le 31 octobre dernier est pour l’instant entre les mains des militaires dirigés par le Lieutenant -Colonel Isaac Zida. Une commission réunissant opposition, société civile et chefs religieux et traditionnels planche depuis jeudi sur l’architecture de cette transition qui devra mener à  des élections générales dans un délai d’un an. Elle doit proposer une « charte de la transition » qui devra être validée par toutes les parties lors d’une plénière, avant d’être présentée aux médiateurs le lundi prochain. En attendant, l’armée entend bien se faire entendre et refuse que la communauté internationale « impose un calendrier » aux burkinabè. « L’UA peut dire +dans trois jours+, ça n’engage que l’Union africaine », a déclaré le Lt-Cl Zida. »Si demain nous avons une personnalité consensuelle » pour diriger la transition, « nous n’allons pas attendre l’UA » pour rendre le pouvoir, a-t-il toutefois expliqué. L’Union Africaine a en effet donné deux semaines aux militaires pour remettre le pouvoir à  un civil, menace de sanction à  l’appui. Une démarche réfutée par la CEDEAO qui était réunie en sommet ces dernières heures à  Accra. Les chefs d’Etat et de gouvernement de la Cédéao, l’organisation régionale ouest-africaine ont plaidé vendredi pour un assouplissement à  l’égard du Burkina et demandé de ne pas lui imposer de sanctions « compte tenu des efforts en cours ». Les acteurs de la crise se sont en effet entendus mercredi sur la durée de la transition – un an – et sur le fait qu’elle sera dirigée par une personnalité civile. En outre, des élections présidentielle et législatives doivent se tenir d’ici novembre 2015. Mais le nom du futur chef de la transition n’est pas encore sorti. Cette question épineuse nécessite davantage de temps, selon tous les protagonistes. Le schéma des militaires Ces derniers ont en effet pleinement réfléchi à  a question et ont leurs propositions pour la transition. Celles-ci se résumeraient en la mise en place d’un « Conseil national de transition », doté de pouvoirs législatifs et composé de 60 membres, à  parts égales entre armée, société civile, opposition et ancienne majorité. Il serait présidé par un militaire. Les portefeuilles d’un « gouvernement de la transition, technocratique et non partisan » seraient répartis également, un tiers chacun, entre l’armée, la société civile et les partis politiques. « L’armée a des propositions mais elles ne sont pas toutes bonnes », a déclaré un responsable associatif burkinabè. « On se retrouve tous ensemble lundi – armée, société civile, partis politiques, religieux – pour sortir un document unique et consensuel », a déclaré de son côté Jonas Hien, un responsable de la société civile, à  l’issue d’une rencontre avec le lieutenant-colonel Zida. L’important, c’est de parvenir à  un consensus pour aller au bout d’une année sans problème et faire des élections dont les résultats seront acceptés par tous », a estimé M. Zida. Les « hommes intègres » attendent donc toujours celui qui empêchera leur pays de se désintégrer.

Burkina Faso : Transition sous pression

Depuis la chute du régime Compaoré, le vendredi dernier, les voix se font entendre, de partout, pour réclamer le retour à  l’ordre constitutionnel. Ce qui équivaudrait, dans le contexte actuel o๠l’Assemblée Nationale n’existe plus, (dissoute et les députés en fuite pour la plupart), à  la prise du pouvoir par un civil. l’armée a effectivement fait main basse sur les rênes du pays, après que la rue ait chassé le désormais ex-Président. Ce dernier souhaitait, grâce à  un vote à  l’Assemblée Nationale, modifier la Constitution du pays afin de pouvoir se représenter à  la présidentielle, au terme de 27 ans de pouvoir. Samedi dernier, après quelques sueurs froides pour les observateurs de la situation qui craignaient un conflit interne à  l’armée, les militaires se sont mis d’accord pour que le Lieutenant Colonel Isaac Zida conduise la transition. Mais C’’était sans compter avec la société civile burkinabè, qui n’entendait pas se laisser spolier sa victoire obtenue dans la rue, avec la perte de 30 manifestants tués par balle par l’armée. La rue n’a donc pas désempli depuis le week-end dernier et la place de la Nation, rebaptisée place de la Révolution continue de manifester, même si la vie a repris dans les écoles, au marché et dans la plupart des administrations. La communauté internationale s’est mêlée du dossier burkinabè, après s’être tue pendant les jours chauds de la révolte, quand on ne savait pas encore si « Blaise » partirait ou pas. C’’est désormais une pression tous azimuts que pèse sur les militaires. Ainsi, le chef de l’Etat ghanéen et président en exercice de la CEDEAO, John Dramani Mahama, ainsi que les présidents nigérian Goodluck Jonathan et sénégalais Macky Sall, étaient ce mercredi 5 novembre à  Ouagadougou pour y rencontrer le patron de la transition burkinabè, alors qu’un sommet de la Cédéao doit se tenir à  Accra ce jeudi et sera en partie consacré à  la crise au Burkina Faso. Ils ont présenté leur plan de sortie de crise et de remise du pouvoir des mains de l’armée aux civils. Les trois présidents ont tour à  tour rencontré l’opposition, de la société civile, les chefs traditionnels et religieux, l’armée, l’ex-majorité et le Conseil constitutionnel. Ils ont demandé à  chaque groupe de proposer chacun, trois noms de civils susceptibles de prendre la tête de la transition. Au terme de plusieurs heures de discussions, aucune personnalité n’a été retenue par les parties. Un accord sur la levée de la suspension de la constitution a été cependant conclu. Rendez-vous à  Accra ce jeudi à  Accra, o๠la situation au Burkina Faso sera de nouveau au menu du sommet de la CEDEAO. Pression populaire et pression économique Mardi déjà , le lieutenant-colonel Isaac Zida, s’est engagé à  «remettre le pouvoir aux civils » auprès du plus influent chef traditionnel du pays, le Mogho Naba. « Ils sont venus nous dire qu’ils vont remettre le pouvoir aux civils. Nous les avons encouragés à  aller dans ce sens. Le pays doit retrouver la quiétude et la paix afin d’envisager son développement », a déclaré Roi des Mossi sur le perron de son palais après l’entretien. L’opposition aussi a souhaité que la direction de la transition revienne à  un civil. l’Union africaine (UA) a donné ultimatum de deux semaines à  la transition pour qu’elle remette le pouvoir aux civils et a brandi la menace de sanctions si le délai n’est pas respecté. Le Canada n’aura pas attendu la décision de l’UA, le pays vient d’annoncer la suspension de son aide au développement au Burkina Faso, en attendant qu’un « gouvernement civil stable et élu démocratiquement » soit en place.Il faut « faire en sorte que des élections puissent avoir lieu », et « pour qu’elles puissent se tenir, il faut que ce soit un pouvoir civil qui puisse le faire, ce qui normalement doit être mené à  bien dans les prochaines heures », a déclaré le président français François Hollande lors d’une visite au Canada. Les principaux alliés du Burkina comme la France et les à‰tats-Unis pourront emboiter le pas si rien n’est fait. l’arrêt de l’aide risque de rendre très rapidement exsangue l’économie burkinabè, rendant le pays ingouvernable. Un scénario que les Hommes Intègres, qu’ils soient militaires ou civils, ne veulent pas voir survenir.