2012, un cauchemar à la malienne

Le millésime 2012 n'aura pas été le meilleur pour les Maliens et les Maliennes. Jamais dans son histoire contemporaine, le…

Le millésime 2012 n’aura pas été le meilleur pour les Maliens et les Maliennes. Jamais dans son histoire contemporaine, le pays n’avait connu d’épisodes aussi douloureux, fragilisant sa stabilité, et mettant à  mal le rôle de pays-modèle qu’il jouait dans la sous-région et en Afrique. Le mauvais rêve a commencé avec l’attaque de la garnison de Ménaka le 17 janvier. Elle portait la signature des indépendantistes touarègues du Mouvement national de libération de l’Azawad(MNLA). Quelques jours plus tard les images atroces de militaires ligotés et abattus d’une balle dans la tête, font froid dans le dos des Maliens. Ces images qui ont fait le tour du monde via internet provoquent l’indignation dans le monde. Au camp militaire de Kati, les femmes se soulèvent et battent le pavé pour fustiger un pouvoir qui envoie leurs maris sans armes adéquates à  la boucherie. Reçues à  la présidence ce 29 janvier, les femmes, très remontées, ont rencontré le président Amadou Toumani Touré, pour lui demander des comptes. Cette marche des femmes était l’expression du moral en berne et l’exaspération de la troupe face à  la gestion de ce que l’on appelait déjà  la « crise au nord ». Le siège de Tessalit vient exacerber ce sentiment. Et les conséquences ne se font guère attendre. Le 22 mars, soit moins d’un mois après la marche des femmes, les militaires passent à  la vitesse supérieure en balayant le régime ATT. l’incurie du régime dans la gestion du nord est pointée du doigt. Le Mali connaà®t son troisième coup d’Etat, œuvre d’une junte basée au camp de Kati et emmenée par le jeune capitaine Amadou Haya Sanogo. Dissoutes, les institutions laissent la place au Comité National pour le Redressement de la Démocratie et la Restauration de l’Etat(CNRDRE). Des dizaines de leaders politiques et de cadres de l’administration se retrouvent dans les geôles de Kati, pour «garantir leur sécurité », selon la junte. Conséquence immédiate du putsch, la faillite de la chaà®ne du commandement de l’armée qui favorise la chute, une à  une, des trois régions septentrionales du pays. Après Kidal le 30 mars Gao et Tombouctou tombent les jours suivants aux mains des rebelles touarègues du MNLA aidés par les islamistes. Désormais les 2/3 du territoire national échappent au contrôle du gouvernement malien. Sous la pression de la communauté internationale surtout de la CEDEAO par l’entremise de ses médiateurs (le ministre burkinabé des Affaires étrangères, Michel Bassolé et Adama Bictogo, ancien ministre ivoirien de l’intégration africaine), le capitaine Sanogo lâche du lest début avril en rétablissant les institutions. Le même jour les Maliens apprenaient la déclaration l’indépendance de l’Azawad par le MNLA. La partition de fait du pays est désormais consommée. Accord Cadre l’accord cadre du 6 avril signé entre la junte militaire et la CEDEAO décante provisoirement la situation. ATT transmet sa démission à  la Cour Constitutionnelle qui peut désormais investir le Président par intérim. Chose faite le 12 avril avec la prise de fonction officielle du Président de l’Assemblée Nationale, Dioncounda Traoré. Ce dernier nomme le 18 avril Cheick Modibo Diarra, Premier ministre de pleins pouvoirs. Avec la formation du gouvernement un jour plus tard, le Mali entame son retour dans la communauté des Nations dont il était au ban depuis le coup d’Etat. Les maigres avancées du mois d’avril sont malheureusement remises en question par la tentative du contre coup d’Etat des Bérets rouges du 30 avril. La guerre des Bérets est sanglante, divise et affaiblit une armée déjà  mal en point. 4 mai 2012 à  Dakar. Le sommet de la CEDEAO fixe la durée de la transition malienne à  12 mois. Tollé à  Bamako o๠les partisans de la junte, le front pro-putsch manifestent leur mécontentement. Des marchent sont organisées dont celles du 21 mai qui finira par l’agression au sein même du Palais Présidentiel du président Dioncounda Traoré. Les manifestants entendaient le démettre par la force de ses fonctions qui selon, eux, devaient prendre fin avec la fin de la période d’intérim de 40 jours. M. Traoré sera finalement évacué à  Paris (France) le 24 mai pour des soins. Il ne rentrera au Mali que le 27 juillet. Le mois de juin verra la dissolution du CNRDRE et la fin de l’alliance entre le MNLA et les islamistes. Ces derniers prennent définitivement le contrôle des régions conquises aux côtés des rebelles touareg. s’en suivra l’application stricte de la charia avec la destruction des mausolées de Tombouctou, mais surtout les amputations, les flagellations, la destruction de mausolées, viol et autres actes inhumains et dégradants. Ces actes sont posés par les islamistes de Ançar Dine d’Iyad Ag Ghaly et du Mouvement pour l’unicité du jihad en Afrique de l’Ouest(MUJAO). Critiquer les nouveaux maà®tres du Mali n’est pas sans risque. Plusieurs journalistes l’apprendront à  leurs dépens. Une énième agression commise sur la personne du directeur de publication du journal l’Indépendant Saouti Haà¯dara, fait exploser la colère de la presse qui descend dans les rues et observe une journée sans presse le 17 juillet. Mobilisation de masse Face à  la crispation de la situation politique, le Haut conseil islamique organise un méga meeting, le 12 août au stade du 26 mars, pour arrondir les angles mais surtout apporter son soutien au Premier ministre Cheick Modibo Diarra, déjà  fortement contesté. Pour arrondir les angles et tendre la main à  ses opposants du front anti-putsch, M. Diarra ouvre son équipe et forme un gouvernement « d’union nationale» fin aout. La chute de Douentza, dans la région de Mopti le 2 septembre, rapproche un peu plus les islamistes armés de la « zone non occupée » dont la frontière est la ville de Mopti. Les Maliens appellent de plus en plus à  une intervention rapide au nord pour libérer les populations dont la situation humanitaire se dégradent cheque jour un peu plus. Bamako accueille en novembre une réunion du groupe de soutien de l’Union africaine qui soutient l’option de l’intervention mais appelle également à  l’organisation d’élections dans les plus brefs délais afin d’avoir un pouvoir légitime à  Bamako. Pierre Buyoya est nommé haut représentant de l’UA pour le Mali. Il rejoint la pléiade de personnalités qui se bousculent au chevet du Mali pour l’aider à  trouver des solutions à  la crise qu’il traverse. Une note d’espoir ? 2012 s’achève pour beaucoup sur une note d’espoir. l’arrivée de l’équipement militaire bloqué en Guinée depuis des mois, la démission forcée de Cheick Modibo Diarra et son remplacement par Diango Cissoko, personnalité beaucoup plus consensuelle, autant de signaux positifs pour les observateurs. Le début de négociations avec les groupes armés qui sévissent au nord du pays est également positif pour ceux qui préfèrent que l’option militaire soit le dernier recours, afin d’épargner les populations. Enfin, après des mois de tergiversations, la communauté internationale s’est mise d’accord pour voter une résolution qui donne quitus aux forces africaines pour intervenir au nord Mali. La résolution 2085 est pourtant accueillie avec peu d’enthousiasme à  Bamako. Les barbus d’Ançar Dine ont d’ailleurs prouvé le peu de poids qu’ils lui accordaient en procédant le dimanche 23 décembre à  la destruction de mausolées à  Tombouctou. Les yeux à  présent tournés vers 2013, les Maliens espèrent qu’elle apportera avec elle les solutions pour définitivement tourner la page. Une intervention dans les six mois au nord du pays, un redémarrage de l’économie en berne, et un retour « à  la normale », tout en retenant les leçons de ces mois passés. Les bénédictions et souhaits seront certainement unanimes en ce 31 décembre, au Mali.