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Afrique du sud, un État sous influence

Un rapport de 355 pages fait trembler le chef de l'État sud-africain, Jacob Zuma, il confirme les pires craintes de…

Un rapport de 355 pages fait trembler le chef de l’État sud-africain, Jacob Zuma, il confirme les pires craintes de l’Afrique du Sud concernant la corruption au sein du gouvernement. Dans ces 355 pages, l’ex-médiatrice publique Thuli Madonsela et son équipe d’enquêteurs décrivent en détail combien la famille Gupta, une riche famille d’immigrants indiens, ont usé de leur influence pour appuyer la nomination de certains membres du gouvernement, ou obtenir frauduleusement des marchés publics . Jacob Zuma, ami proche des Guptas, ainsi que deux ministres impliqués dans le rapport, sont allés devant les tribunaux pour empêcher la diffusion du rapport. Mais à l’issu de maintes protestations et d’une âpre bataille judiciaire le rapport a été finalement rendu public mercredi 2 novembre.

Ce rapport contient une interview détaillée du ministre adjoint des Finances, Mcebisi Jonas, qui affirme que les Guptas lui ont offert le poste de ministre des Finances quelques semaines avant que le président Zuma ne se sépare de trois ministres des Finances en une semaine. Mcebisi Jonas affirme avoir été conduit à la maison des Guptas par le fils du président, Duduzane Zuma, où il a rencontré, un membre éminent de la famille Gupta, Ajay Gupta.

Ajay Gupta aurait dit à Mcebisi Jonas qu’il voulait qu’il soit leur homme dans les finances du pays. La famille Gupta faisait 6 milliards de rands (environ 443 millions de dollars) de marchés publics avec le gouvernement, elle voulait à présent faire monter ces transactions à au moins 2 milliards de rand soit environ 147 millions de dollars de plus. Devant le refus de Mcebisi Jonas, la famille Gupta lui aurait proposé 600 millions de rand (44 millions de dollars) et un supplément de 600 000 rand (44 318 $) en espèces. Mcebisi Jonas a refusé l’argent, et des mois plus tard est devenu le lanceur d’alerte qui a permis de faire démarrer l’enquête.

Le rapport décrit la pression que la famille Gupta pouvait exercer sur les ministres du gouvernement comme pour l’ancien ministre des Finances, Nhlanhla Nene, qui en a fait les frais, il a perdu son emploi parce qu’il insistait pour respecter les règles ou comme Barbara Hogan, ancienne ministre des entreprises publiques, qui a refusé d’autoriser une influence extérieure dans les nominations des membres du conseil d’administration de South African Airways, elle a été relevée de ses fonctions quelques mois plus tard. Dans de certains cas exposés, le président Jacob Zuma intervenait pour appuyer les requêtes de la famille Gupta.

Le rapport met aussi en lumière comment les plans de la famille Gupta ont été contrariés à maintes reprises par les fonctionnaires du trésor. Le Trésor national, chargé d’approuver les transactions liées aux entreprises publiques, respectait les règles de passation des marchés publics et de finances publiques. Les responsables du Trésor ont remis en question différents accords passés. Comme il était impossible d’arrêter les contrats initiaux, ils ont réussi à bloquer des extensions des contrats. Ces obstructions semblent avoir frustré la famille Gupta et ont coûté le poste de Nhlanhla Nene, ancien ministre des Finances. Beaucoup avancent que les batailles juridiques actuelles du ministre des Finances, Pravin Gordhan, sont liées à la résistance du trésor face à l’influence des Guptas.

Le président Zuma a fait sa première apparition en public depuis la sortie du rapport, samedi 5 mai. Il a dans un discours, défié l’opposition et la société civile, et affirmé, « Je n’ai pas peur de la prison, j’y ai déjà passé suffisamment de temps ». Les ministres incriminés et la famille Gupta n’ont pour le moment pas encore répondu aux allégations contenues dans le rapport. L’ex-médiatrice publique Thuli Madonsela a depuis quitté son poste, ce rapport explosif étant le coup d’éclat d’une bataille de sept ans livrée contre la corruption. Son successeur, qui a déjà commencé a travaillé, devra prochainement apporter des accusations potentiellement criminelles à l’autorité nationale de poursuite et à la Direction de l’enquête sur les crimes prioritaires de la police.

Pour rappel, au-delà du rapport publié cette semaine, Jacob Zuma est également visé par 783 charges de corruptions qui pèsent toujours contre lui. L’opposition a déjà prévu de déposer, la semaine prochaine, une nouvelle motion de défiance à l’encontre du président Zuma.