Anniversaire du 26 Mars : Sur un air de désillusion

Si un peintre s'amusait à  dresser un tableau des deux décennies de la démocratie malienne, sans doute serait-il bien sombre.…

Si un peintre s’amusait à  dresser un tableau des deux décennies de la démocratie malienne, sans doute serait-il bien sombre. Les fruits de la démocratie n’ont pas tenu toutes leurs promesses. En tout cas, à  l’heure du bilan, d’aucuns jugent le parcours mi-figue, mi-raisin pendant que d’autres concluent à  un fiasco. l’avis des deuxièmes semblent l’emporter. En effet les Maliens, dans leur écrasante majorité, estiment que la démocratie malienne n’aura été qu’une grande supercherie politique à  l’origine de la crise actuelle. Deux régimes en 20 ans de démocratie La désillusion a été la constante des deux régimes démocratiques à  telle enseigne que certains en arrivaient à  regretter le passé. Deux décennies de parcours démocratique censées a priori améliorer de façon exponentielle le quotidien du peuple auront à  posteriori déçu les espoirs. Les hommes et femmes jugés dignes de la confiance des masses populaires ont trahi leur serment. Un acteur du mouvement démocratique nous confiait il y a quelques années que la révolution du 26 mars 1991 avait été récupérée par des bandits à  col blanc doublés d’apatrides qui l’ont vidée de son sens. Ils ont formé, dénonçait-il, une bourgeoisie compradore qui en train de piller le pays. Aujourd’hui encore Dame pauvreté se porte comme un charme. Rares sont les chefs de famille qui réalisent l’exploit, si C’’en est un, de bouillir la marmite trois fois par jour. Le chômage demeure l’épouvantail qui pousse des jeunes à  tenter les périlleuses traversées de la mer à  la recherche d’un eldorado, tandis que d’autres versent dans la délinquance ou le banditisme. l’éducation va à  vau-l’eau. l’école malienne est devenue le laboratoire des produits inutilisables. La corruption, tel un cancer, s’est métastasée dans le corps social et politique avec son corollaire de pertes inestimables pour le pays. Les bons soins de santé demeurent un luxe pour le Malien moyen. «Â Les magistrats sont indépendants de tout sauf de l’argent sale », cette boutade de l’ancienne ministre de la justice, Fanta Sylla est assez évocatrice d’une justice déliquescente. Démocratie de paille La décennie de règne de Alpha Oumar Konaré a été incapable d’apporter des réponses réelles aux multiples préoccupations des Maliens, étouffés qu’ils étaient, par la longue parenthèse dictatoriale du général président. Les démocrates sincères ont vite oublié l’idéal démocratique pour se servir au détriment du peuple. La démocratie malienne a commencé à  fabriquer ses milliardaires sur le dos des millions de Maliens qui végétaient dans la misère. Les richesses du pays ont été siphonnées avant d’être redistribuées entre les pontes du parti au pouvoir l’Adema-PASJ (Alliance pour la Démocratie au Mali-Parti africain pour la solidarité et la justice) et leurs alliés. Les infrastructures de prestige ont été privilégiées par rapport aux infrastructures de développement. Les secteurs sociaux de base n’ont été que parcimonieusement mis en valeur. Disons le net : l’arrivée d’Amadou Toumani Touré au pouvoir, un candidat indépendant a porté un sacré coup à  la démocratie malienne. l’émergence d’un candidat livre n’honore pas une démocratie. Le Mali a expérimenté une voie politique aléatoire à  savoir la gestion consensuelle, qui est en réalité antinomique à  la démocratie. Ainsi les institutions, la société civile, les partis politiques et la presse dans une large mesure ont fait allégeance à  ATT. Contre des prébendes le plus souvent. Le boulevard lui était ainsi ouvert pour agir à  sa guise. Bonjour le clanisme, le népotisme, favoritisme l’injustice, la corruption… érigés en règle de jeu démocratique. Le paroxysme a été atteint en 2007 lorsque des partis politiques ont tout simplement renoncé à  participer aux élections présidentielles pour soutenir le candidat indépendant ATT. Ils étaient regroupés au sein de la plateforme politique ADP (Alliance pour la démocratie et le progrès). Parmi eux figuraient des grands partis comme l’Adema-PASJ, l’URD (l’Union pour la République) de Soumaà¯la Cissé, le Congrès national d’initiative démocratique (CNID- Faso Yiriwa Ton)de Me Moutaga Tall, du Mouvement patriotique pour le renouveau(MPR)de Choguel K Maà¯ga.  Les ouvrages ‘’ATTcratie : la promotion d’un homme et de son clan » et un ‘’Para à  Koulouba » de notre regretté confrère, Ousmane Sow, avaient, avant la fin du premier mandat de ATT, pourtant tiré la sonnette d’arme sur les errements du régime. Ce qui n’a pas empêché le président sortant d’être réélu dès le premier tour. Mais l’histoire leur a donné raison. Cinq après, la coupe était finalement pleine. Elle a finalement débordé. La démocratie malienne obtenue de haute lutte et longtemps présentée en modèle s’est écroulée comme un château de cartes. l’heure est à  la reconstruction sur de nouvelles bases. Ce 22ème anniversaire nous en donne une occasion.