IdéesIdées, Tribune




Au nom de toutes les autres…

Cela fait deux jours que Bamako bruisse de rumeurs diverses. Comme à  chaque fois qu'un évènement frappe la conscience populaire,…

Cela fait deux jours que Bamako bruisse de rumeurs diverses. Comme à  chaque fois qu’un évènement frappe la conscience populaire, il fait l’objet de tous les débats et les versions les plus folles circulent. Une chose est sure, il s’est passé quelque chose de terrible:un homme a tué sa femme. Fait extraordinaire? Que nenni! Il suffit de lire la rubrique des faits divers ou les comptes rendus d’audience de cours d’assises pour se rendre compte que des victimes de violences conjugales, on en compte…disons, beaucoup, au Mali. Peu ou pas de chiffres. On en entend si peu parler, les médiateurs familiaux et les « c’est la volonté de Dieu » agissent si bien que très peu de cas arrivent au niveau de la justice. Dans le monde, on est à  peu près fixés. Environ toutes les trois heures, une femme meure sous les coups de son mari. Alors, pourquoi cette fois-ci en parle-t-on autant? Certainement à  cause de la violence de l’agression. Plus d’une dizaine de coups de couteau, portés dans l’intention de tuer? On ne saurait vous répondre. Du moins pour l’instant, puisque l’enquête se poursuit pour éclaircir les circonstances de ce drame. Aussi parce le couple, marié depuis à  peine deux ans, avait un jeune enfant. Quel avenir pour ce petit, sanglotent toutes les âmes touchées par son sort. Surtout, à  cause de la personnalité des deux protagonistes de cette malheureuse affaire. Le jeune homme, que ses proches disent aujourd’hui « malade mental », avait tout pour réussir. La jeune femme, issue d' »une bonne famille », que tous décrivent douce et attachante, et qui a vraisemblablement vécu une vie de couple douloureuse. Mais surtout, parce que tous réalisent que « ça pouvait arriver chez moi ». Depuis deux jours, les appels à  la justice se multiplient. Mais aussi les interrogations sur les conséquences de cette violence domestique que tous voient mais qui souvent est tue au nom des convenances sociales. « Mugnu ni sabali », la patience et le pardon, supporter. Supporter pour ses enfants, pour sa famille, pour le qu’en dira-t-on, pour protéger son mari, pour ne pas avoir honte, supporter et se taire. Combien de milliers de femmes se sont reconnues dans les récits des amis de la jeune femme qui racontent ce qu’elle vivait au quotidien? Tous soupirent et se disent, « pourquoi en arriver là , ne valait-il pas mieux divorcer? » Les questions sont nombreuses et n’auront certainement pas toutes des réponses. Cette mort, révoltante, inacceptable, insupportable a un triste mérite. Porter sur la place publique un mal qui mine notre société. Ces couples qui se déchirent, o๠le ou les conjoints meure(nt) à  petit feu ou de manière brutale comme dans le cas présent. On pense que cela n’arrive qu’aux autres. On cherche des solutions familiales dans les conciliabules et des conseils difficiles à  mettre en pratique tant les situations sont individuelles et variées. Et finalement, on se détourne, on ne veut plus voir, plus entendre, car « on ne peut rien y faire ». Faux! Tous nous sommes responsables. Responsables de nous et des autres. Il faut que finissent les violences entre personnes qui se sont juré amour et protection. Il faut que cesse notre silence. Il faut que les coupables soient punis, pour que les autres soient avertis. Il faut que cessent les violences conjugales, les violences faites aux femmes. Au nom de Mariam et de toutes les autres… RIP