Comment fêter le 8 Mars au Mali ?

«Â Si vous demandez à  de nombreuses féministes ici au Mali, d'o๠vient la journée internationale de la femme, elles ne…

«Â Si vous demandez à  de nombreuses féministes ici au Mali, d’o๠vient la journée internationale de la femme, elles ne sauront pas vous le dire ! ». Cette affirmation d’un journaliste pourrait s’inscrire en faux contre 100 ans de lutte féminine contre l’émancipation. Est-elle vraie à  100% ? Ou faut-il la démentir ? Ou encore la relativiser ? Souvent jugée folklorique, la fête du 8 Mars au Mali rassemble de nombreuses citoyennes maliennes, le long du boulevard de l’indépendance, autour d’un défilé d’associations devant le chef de l’état, suivi d’un déjeuner au Palais présidentiel avec la première dame. Mais le 8 Mars ne saurait se limiter à  cela, répond Aicha, membre de la coordination des associations et ONG féminines du Mali (CAFO), la principale organisation féminine du pays. l’instauration du 8 mars remonte aux luttes ouvrières qui ont secoué l’Europe au début du siècle. Les femmes du siècle dernier réclamaient de meilleures conditions de travail et l’égalité entre hommes et femmes. Déjà  le combat s’inscrivait autour de la notion du travail et de l’autonomisation des femmes. Clin d’œil historique, puisque le thème de 2012 s’articule autour de «Â  l’autonomisations des femmes rurales et l’élimination de la pauvreté et de la faim«Â . Plus que les femmes des villes, en Afrique, les femmes rurales sont de véritables ouvrières, trop souvent oubliées lors de grandes célébrations comme le 8 Mars. «Â  Pour moi, les femmes qu’il faut célébrer sont celles qui Font de durs labeurs, dans les champs ou dans les mines d’or pour assurer leurs subsistances et celle de leurs familles », poursuit notre confrère. Sans aller dans les extrêmes, le 8 Mars touche chaque femme, qu’elle soit citadine ou rurale, bourgeoise ou prolétaire. Une femme aurait-elle plus le monopole du 8 Mars qu’une autre ? C’’est donc l‘une d‘elles, Clara Zetkin, allemande et représentante de l’Internationale socialiste en Allemagne, qui propose pour la première fois l’idée d’une journée internationale lors de la conférence internationale des femmes à  Copenhague en 1910. l’idée fait son bonhomme de chemin, avec la grève des ouvrières russes de St-Petersburg. Le 8 Mars 1914, les femmes allemandes réclament le droit de vote. Qui sera lui acquis à  l’issue de la deuxième guerre mondiale pour les femmes européennes. Ce n’est qu’en 1977, que les Nations Unies officialiseront le 8 Mars comme la journée Internationale de la femme. En Afrique, il faudra attendre les indépendances pour qu’émerge la lutte pour l’émancipation de la gente féminine. Le paradoxe du 8 Mars En Afrique, les choses se mettent en place à  partir de l’indépendance avec l’émergence de figures de proue comme Aoua Keita, première femme député sous l’ère Modibo Keita et les nombreuses marches de femmes au foyer pour obenir l’indépendance. « Folklorique, le 8 Mars, elles ont toutes la même tenue ! », martèle un enseignant. Sira DIOP, première femme bachelière au Mali, n’en dirait pas autant, elle qui considère l’instruction comme le moteur de l’émancipation personnelle des femmes au Mali avec la construction du foyer conjugal. A qui se référer alors lorsqu’on parle du 8 Mars, C’’est un peu le fond du débat. Les grandes figures elles restent sollicitées, mobilisées pour la cause. On peut citer de grandes figures comme l’ex première dame Adame Ba Konaré, historienne et véritable mine d’informations qui a réalisé un dictionnaire de femmes maliennes toutes origines sociales confondues ou les grandes doyennes de la cause. A bien chercher, on en trouverait des femmes qui ont des choses à  dire sur le 8 Mars. Mais le 8 Mars, C’’est aussi une affaire personnelle : « Ce qui est plus embêtant, considère Ibrahim, étudiant, C’’est de voir que les hommes politiques vont instrumentaliser le 8 Mars, alors qu’ils ont voté le code de famille, qui fait régresser une bonne partie des avancées réalisées en matière de promotion féminine au Mali ». « Pour moi, affirme Aude, une éditrice installée à  Bamako, les femmes ne méritent pas qu’une journée mais 365 jours de fête ». Une belle réponse pour tous ceux qui pensent que la journée crée la discrimination positive d’emblée, Cette année, au Mali, le 8 Mars s’articule autour du thème « Femmes et Elections » contexte politique oblige. On va même jusqu’à  faire le lien entre le 8 Mars et la situation des femmes au Nord du Mali. En estimant que face à  la situation sécuritaire des veuves et orphelins de la crise du nord, il serait indécent de battre le tam-tam pour célébrer notre fête annuelle. Mais le 8 Mars reste une journée symbolique, encore plus si son essence est comprise par les hommes. Faire le ménage, le marché, préparer à  manger pour Madame, n’est-ce pas une jolie façon de célébrer un 8 Mars ?