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Contrôle physique : le blues des enseignants

Le contrôle physique entrepris présentement par le département de la Fonction publique est perçu par les initiateurs comme un moyen…

Le contrôle physique entrepris présentement par le département de la Fonction publique est perçu par les initiateurs comme un moyen efficace de lutter contre la fraude. Ainsi les fonctionnaires se présenteront physiquement pour percevoir leur salaire au lieu du traditionnel virement bancaire. Seulement voilà  : l’initiative fait grincer des dents en raison de ses conditions d’organisation. Ceux qui en souffrent le plus, ce sont les enseignants. Dans la cour du lycée Askia Mohamed ce vendredi matin, ils sont des dizaines d’enseignants fonctionnaires de l’Etat pour l’enseignement fondamental et du secondaire dans l’attente de leur salaire de l’Académie d’enseignement de la rive gauche. Ici seulement deux salles de classe sont aménagées pour des centaines et des centaines d’enseignants. Une salle pour le contrôle physique et l’autre pour le paiement des salaires. « A l’intérieur, on n’a pas plus de 5 enseignants alors qu’on entre par trentaine », témoigne un enseignant. Assis sur des bancs disposés dans le désordre, certains sur le siège de leurs motos, d’autres préférant faire le pied de grue, ces enseignants affichent une mine qui traduit le calvaire qu’ils vivent depuis deux semaines. Pendant tout ce temps, ils en sont réduits à  une corvée quotidienne qui commence de 8 heures du matin pour s’achever à  18 heures. Et sans succès disons sans toucher leur salaire. Boubacar Sissoko fait partie de ces infortunés. Ce professeur de Lettres au lycée Mamadou Sarr de Lafiabougou dénonce de but en blanc les conditions d’organisation de cette opération et regrette la souffrance physique et morale subie. « Nous abandonnons nos classes pour passer toute la journée ici avec tout ce qu’il comporte comme difficulté physique et autres. Et pourtant au début on nous disait que le contrôle et le paiement allaient se passer entre le 25 et le 25 », se plaint l’homme de Lettres pour qui cette situation prouve que l’enseignement est le dernier des soucis des autorités. Le même sentiment d’indignation et de révolte anime cet autre professeur de Lettres qui dénonce l’incurie des organisateurs. Laquelle a engendré une marche hier vers 11 heures sur la Fonction publique lorsque les agents préposés au payement avaient affirmé un problème de trésorerie pour payer les gens. La situation a été très vite décantée par la suite devant la détermination des enseignants. Joseph Drabo déplore la difficile situation de certains de ses collègues qui laissent des plumes dans ce parcours du combattant. Après avoir touché son salaire, nous explique l’enseignant en guise d’exemple, une enseignante s’est effondrée dans la cour et n’a du son salut qu’intervention rapide de ses collègues. De quoi rebeller cette femme visiblement agacée par ce spectacle. « Comment peut-on travailler dans la fatigue et toucher l’argent dans les même conditions », s’interroge-t-elle, dépitée. La solution ? « Les contrôleurs se rendent sur les lieux de paiement entre 10 h et 11 h, observent plus d’une heure de pause avant d’arrêter à  17 h sous prétexte qu’il n’y a plus d’argent. Des enseignants ont été contrôlés comme moi depuis lundi mais n’ont pas encore touché leur salaire. Pourtant ils sont présents à  l’ouverture et à  la fermeture des points de paiement », enfonce El Hadj Traoré, professeur d’Histoire et de Géographie au lycée Mamadou Bodj de Sébénicoro qui estime que le renvoi des enseignants des collectivités vers d’autres lieux n’a pas contribué à  améliorer la situation au lycée Askia. Les enseignants sont d’autant indignés par leur situation qu’ils trouvent paradoxal de créer de telles conditions de promiscuité à  l’heure o๠la lutte contre la maladie à  virus Ebola bat son plein. Quelle solution préconisée ? Beaucoup d’enseignants répondent en chœur qu’il fallait procéder cette opération dans les établissements respectifs pour éviter tous les désagréments qui apparaissent. Quid de l’incidence sur les cours au lycée Askia Mohamed ? La réponse du surveillant général, l’établissement, Cheick Oumar Coulibaly, est on ne peut plus claire : « Cette opération n’a aucune incidence sur le bon déroulement des cours » , lâche-t-il avec fierté.