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Dans l’œil du photographe Malick Sidibé : à 73 ans, il lit sans lunettes !

A 73 ans, le génie malien de la photo n'a pas encore réalisé ses derniers clichés. Il marche sans canne,…

A 73 ans, le génie malien de la photo n’a pas encore réalisé ses derniers clichés. Il marche sans canne, lit sans lunettes et se déplace seul dans la ville de Bamako qui a vu naà®tre sa gloire. Troisième fils de sa mère, Malick est le seul enfant de sa famille à  avoir fréquenté l’école française du temps des colons. Il a vu le jour dans le petit village de Soloba en 1936. Il confesse : « Un matin, alors que je jouais avec mes camarades, mon père me fit appeler pour m’annoncer que J’étais inscris à  l’école le lendemain. J’étais tout excité à  l’idée de pouvoir apprendre à  lire et à  écrire. » Après l’obtention de son diplôme d’études fondamentales, Malick entre à  l’Institut National des Arts (INA). Sans bourse, il y accède en 1952 grâce au commandant de cercle de Bougouni, monsieur Baker et qui voyait déjà  ses talents de dessinateur. Il lui fallait un métier. Il opte alors pour la bijouterie et gagne un diplôme de dessin en 1955. Malick explique qu’il a choisi la bijouterie pour se maintenir à  l’INA puisque «les peuls n’ont de vocation pour cet art ». Ensuite la chance lui sourit. Son chemin croise celui du photographe français Gérard Guignard qui recherchait un dessinateur pour décorer son studio. Malick était la personne indiquée. C’’est après avoir visionné les photos de Malick que son futur associé lui propose une collaboration. Il devient son apprenti. Du dessin à  la photo, un talent inné… Le talent pour l’image est inné chez Malick Sidibé. Dès le primaire, il dessine avec du charbon de bois. Du dessin, il passe à  la photo. Un jour, alors que la photo était méconnue à  cette époque, sa mère rêve que toute la maison est ornée de photos prises par Malick. Photos qu’elle a jadis qualifié de dessins puisqu’elle ignorait le nom de ces « images », raconte Malick ému. Et lorsque Gérard Guignard lui demande sa collaboration, son premier réflexe est de faire le parallèle entre l’appareil photo et le dessin. « l’appareil photo est plus rapide que le pinceau », avait conclu Malick. En 1956, l’enfant du Fouta Djalon acquière son premier appareil photo. Il s’essaie d’abord à  des prises de nuit, dans les soirées dansantes puis esquisse des portraits en noir et blanc ou de groupes et qui feront sa patte. Chacun veut se faire photographier par le génie Malick. Au studio de Guignard, o๠il travaillait, il représente la sensibilité africaine et Gérard, l’influence occidentale. En 1957, Malick Sidibé se met à  réparer les appareils photos, tout en montrant l’étendue de sa passion. Il était le seul réparateur à  l’époque. « Les gens venaient de Guinée, de Haute volta et même de la Mauritanie pour me confier leurs petits bijoux. C’’est le destin d’un homme qui fait aujourd’hui la fierté du Mali. l’année 1960 marque un tournant dans la vie de Malick Sidibé. l’heure est venue de quitter le maà®tre. l’artiste crée son propre studio photo dans le quartier populaire de Bagadadji à  Bamako et se met à  son compte. La même année, il se marie et peut avec fierté targuer d’être le patriarche d’une quinzaine d’enfants aujourd’hui. Parmi eux, un seul prendra la relève. Un casque difficile à  porter si l’on en croit cette légende de la photographie malienne. Mais Karim répare les appareils comme l’a fait son père en son temps. De 1960 à  nos jours, le studio du maà®tre est resté le même. C’’est là  qu’il se fera connaà®tre grâce à  des clichés qui feront le tour du monde. Une pluie de récompenses Malick Sidibé a reçu il y a quelques jours, le prix photo-Espagna de la meilleure photographie à  Barcelone. C’’était le 22 juin dernier : « Ce n’est pas le prix qui m’a impressionné, mais plutôt l’ambiance autour, l’enthousiasme avec lequel le public m’a accueilli. Cela m’a beaucoup touché. C’’est un honneur pour moi, mais aussi pour le Mali de recevoir ces distinctions », ajoute t-il les yeux brillants. La photo est-elle un art réservé à  quelques privilégiés ? « Je vis biende mon art. Grâce à  mes photos, ma famille est à  l’abri… ». Malick a aussi investi dans plusieurs actions caritatives et contribué à  la construction d’écoles dans son village natal à  Soloba. A 73 ans, il continue d’exercer son métier de photographe et a toujours préféré l’argentique malgré l’avènement du numérique.