DDR : coup de fouet au processus

L’Entente signée à la veille du premier anniversaire de la signature de l’accord de paix entre le gouvernement et les…

L’Entente signée à la veille du premier anniversaire de la signature de l’accord de paix entre le gouvernement et les groupes armés, doit permettre la mise en place des autorités intérimaires pour accélérer la mise en œuvre de l’accord. Dans ce sens, le processus de Désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR) connait une accélération afin de régler la question des combattants des groupes armés de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) et de la Plateforme. Les sites de cantonnement de Likrakar, Fafa, Inaggar, Tinfadimata, Ilouk, Tabankort, Tessalit, Ber, etc, sont d’ores et déjà prêts à accueillir ceux qui veulent s’engager pour la paix.

Il va sans dire que la bande sahélo-saharienne connait de fortes turbulences. Du Mali au Tchad, en passant par le Niger, des armes continuent de crépiter. Au Mali, après la signature de l’accord de paix, les combattants des groupes armés se sont de nouveau affrontés, fragilisant le processus enclenché. La signature d’un accord entre eux, à Anefis, le 15 octobre 2015, puis d’une « Entente » entre le gouvernement et les groupes armés CMA et Plateforme, relance l’espoir de paix et de développement dans les régions du nord. Mais tout cela n’est guère possible sans le retour de la sécurité dans la zone, raison pour laquelle des efforts sont faits pour accélérer le processus de Démobilisation, désarmement et réinsertion.

DDR accéléré Conformément au mécanisme opérationnel de coordination (MOC), des dispositions sont prises actuellement pour que des patrouilles mixtes puissent opérer dans les meilleurs délais entre les forces de défense et de sécurité malienne et les deux principaux groupes. La commission technique de sécurité (CTS), avait, au cours de sa dernière réunion le 20 juin, examiné le cadre permettant un DDR accéléré pour les éléments des groupes armés signataires, qui feront partie des premiers bataillons des patrouilles mixtes du MOC. Ce DDR accéléré sera coordonné par un groupe composé des représentants du gouvernement, des groupes armés signataires et de la MINUSMA. Selon une source proche du dossier, il ne viserait que 200 ex-combattants de la Plateforme et de la CMA chacun, qui participeront aux patrouilles mixtes. Ces derniers seront enregistrés et subiront un test médical. Les armes et les munitions individuelles seront vérifiées et stockées par le MOC, a-t-on précisé. À la date d’aujourd’hui, le gouvernement et les parties signataires se sont déjà entendus sur les deux commissions qui doivent statuer, la commission nationale de DDR et la commission d’intégration. Le projet de décret a été adopté et signé. Il ne reste qu’à en nommer les membres, qui devront travailler sur les critères du DDR et de l’éligibilité pour les forces de sécurité.

Quasi opérationnels Depuis le 29 décembre 2015, la MINUSMA a commencé à construire et aménager les sites de cantonnement qui ont été validés par la CTS. Au total, 24 sites ont été proposés par les groupes armés, 12 par la plateforme et 12 par la CMA. « Actuellement, nous avons 8 sites prêts à accueillir 6 000 combattants au total. La plateforme et la CMA avaient demandé un total de 24 sites, mais à la date d’aujourd’hui, les deux mouvements n’ont pas donné la liste certifiée de leurs combattants et de leurs équipes à la commission technique de sécurité, tel que prévu par l’accord de paix, pour justifier la construction des sites additionnels », explique M. Samba Tall, le directeur de la réforme du secteur de la sécurité et du DDR de la MINUSMA. Le mode opératoire de cantonnement définit exactement les critères selon lesquels quelqu’un est considéré comme combattant, et qui doit être cantonné. Ce document conjoint a été élaboré et signé par les trois parties, sous l’égide de la commission technique de sécurité depuis octobre 2015. Il appartient maintenant aux mouvements d’amener des combattants remplissant ces critères, pour qu’ils soient cantonnés. Mais tous les combattants ne pourront certainement pas être versés dans l’armée. « Ils ne resteront pas les bras croisés », rassure-t-on, puisque un volet réinsertion socio-économique sur le long terme sera mené par le gouvernement, avec le soutien des bailleurs de fonds.

Réalités du terrain « Par rapport au retard, il faut retenir qu’on est dans un processus de paix avec des facteurs internes et externes. Mais il y a eu une grande accélération ces derniers mois et surtout ces dernières semaines, notamment la signature de l’ « Entente » entre les différentes parties », a ajouté M. Samba Tall. Ce qui n’est pas l’avis de Mahamadou Djéri Maïga, de la CMA. Il estime que depuis la signature de ce document, les choses n’ont pas bougé. « Nous n’avons pas d’interlocuteur depuis la signature de l’Entente. Auparavant, c’était avec le ministre de l’Action humanitaire qu’on traitait les dossiers, mais depuis la nomination du Haut-représentant du chef de l’État pour la mise en œuvre de l’accord, on ne voit plus personne. Le MOC devait être opérationnel depuis le 1er juillet », a-t-il déclaré. Sur le terrain, ce mécanisme qui est un état-major opérationnel composé d’officiers des trois parties signataires, et de la MINUSMA et de Barkhane, est déjà opérationnel à Gao. Il y a également, les éléments mixtes d’observation et de vérification qui comprennent aussi les signataires et la MINUSMA. À cela s’ajoute le sous-comité défense et sécurité du comité de suivi de l’accord, qui regroupe au niveau stratégique les représentants en matière de défense et de sécurité des parties, de la MINUSMA et de la médiation internationale. « Il y a encore un travail politique qui est en train d’être fait, sous la direction du gouvernement qui est le maitre d’œuvre de tout le processus de mise en œuvre de l’accord, les partenaires internationaux, qui sont en appui et jouent aussi leur part. Concomitamment à l’installation de ces deux commissions, la MINUSMA a aussi l’obligation et la tâche de construire les sites de cantonnement », explique Samba Tall.

Scepticisme Oter les germes des crises armées, c’est là le but ultime du processus DDR, qui doit permettre aux anciens combattants de redonner un sens à leur vie post-conflit. Les Maliens suivent le début de ce processus avec scepticisme, se souvenant que ce sont souvent les « reversés dans l’armée » qui ont de nouveau pris les armes contre le pays. La plupart veulent cependant espérer que cette fois-ci, le DDR sera la solution pour que les armes se taisent définitivement au nord, comme partout ailleurs au Mali.