Élections locales : le 25 octobre envers et contre tout ?

La course contre la montre est engagée. Dans un mois et demi, les Maliens seront appelés aux urnes pour choisir…

La course contre la montre est engagée. Dans un mois et demi, les Maliens seront appelés aux urnes pour choisir leurs élus locaux, maires, conseillers communaux et régionaux. C’’est la mission clairement définie au ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, afin de parachever le processus électoral entamé en 2013 avec la présidentielle. Mais depuis que la date du vote a été annoncée, les réserves ont fusé de toutes parts, tant au niveau des politiques que de la société civile. « Trop court pour se préparer », pour les uns, « trop de conditions préalables non satisfaites » selon les autres. Le gouvernement n’en démord pourtant pas, les élections couplées auront bel et bien lieu le 25 octobre 2015. 10 752 élus locaux pour diriger les 703 communes, les 49 cercles, les 8 conseils régionaux et le District de Bamako. C’’est donc une élection d’envergure qui doit se dérouler dans quelques semaines. à€ l’occasion de la rencontre des acteurs de la décentralisation tenue les 4 et 5 septembre au Centre international de conférence de Bamako (CICB), les élus locaux ont de nouveau exprimé leur inquiétude quand au respect du calendrier électoral. « Nous ne sommes pas prêts. Il y a encore trop de choses à  régler, ne serait-ce que sur le plan logistique », s’inquiète un élu de la région de Ségou, présent à  ces assises. Dans les recommandations issues de leurs travaux, ils ont d’ailleurs à  nouveau demandé au gouvernement de reconsidérer sa position et de repousser une nouvelle fois le scrutin, en prorogeant leur mandat jusqu’à  son organisation effective. Pour rappel, les élections communales et régionales ont déjà  été reportées à  trois reprises, en avril et octobre 2014, puis en avril 2015. Le 25 octobre est donc le quatrième rendez-vous pris avec le corps électoral. Un argument brandi par le ministère de tutelle, qui estime qu’un énième report ne changera rien à  la situation. s’adressant aux présidents des organes des collectivités territoriales lors de la rencontre de la semaine dernière, le ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, Abdoulaye Idrissa Maà¯ga, les a pourtant invités à  « s’impliquer pleinement dans la préparation et la tenue des élections communales, régionales et du District devant avoir lieu le 25 octobre prochain à  travers une bonne information et la sensibilisation des populations». Les arguments du report Sécurité, retour des réfugiés, application des dispositions de l’accord. Ce sont les raisons invoquées pour justifier un nouveau report. Dans les régions au nord du Mali, et en particulier celles de Gao et Kidal, la violence est de retour et met en danger la réalisation du scrutin. Qu’ils soient de la majorité présidentielle ou de l’opposition, les élus sont quasi unanimes. « Comment va se faire l’acheminement du matériel électoral, avec tous les coupeurs de route qui sévissent, les mines, etc. ? l’à‰tat peine à  se réinstaller dans certaines communes, que dire de Kidal qui échappe encore aujourd’hui à  l’administration malienne ? On ne peut pas aller dans ces conditions si l’on veut que cette élection soit validée et ses résultats acceptés par tous », plaide un élu du nord. Pour d’autres, à  travers son entêtement, le gouvernement est en train de créer les conditions d’une résurgence des conflits. « Dans nos communes, des communautés entières sont encore hors du pays, réfugiées dans les camps du Niger ou du Burkina Faso. Faire une élection sans assurer leur retour, C’’est à  nouveau créer des frustrés qui finiront par prendre les armes car ils ne se reconnaitront pas dans les autorités en place », insiste, inquiet, Harouna Keà¯fou élu à  Ouattagouna dans la région de Gao. Un argument largement repris par le maire de Ségou, qui rappelle d’ailleurs le fait que le retour des réfugiés est un préalable fixé par l’accord de paix signé en mai et juin derniers. l’annexe 1 du texte, qui porte sur la période intérimaire, stipule bien que « les élections sont tenues aux niveaux régional et local pour les organes concernés par les dispositions du présent Accord durant la période intérimaire, conformément aux dispositions et dans le délai maximum de 18 mois ». Joueurs et arbitres… N’en déplaise aux élus, pas question pour le ministre Maà¯ga de céder aux pressions. Répondant à  leurs questions lors de la rencontre de Bamako, il a été on ne peut plus formel. Rappelant qu’il existe des cadres de concertation avec les différents acteurs, il a signalé qu’aucune de ces instances n’avait officiellement saisi le département pour demander le report des élections. « Il ne vous sied donc point de demander votre maintien en violation des lois de la République », leur a-t-il déclaré. Un report entraà®nerait en effet une nouvelle prolongation du mandat des élus, en poste depuis 2009. « Qu’il dise plutôt que le Rassemblement pour le Mali (RPM) a hâte de placer ces cadres à  nos places », marmonne un élu d’un parti de l’opposition, croisé dans les couloirs du CICB. Le parti au pouvoir craindrait, selon lui, de voir sa côte encore baisser au niveau de l’électorat et ainsi ne pas pouvoir faire passer ses listes, si le scrutin était à  nouveau repoussé. « Les élections permettront de donner la légitimité aux élus municipaux qui ont outrepassé leurs mandats. à‡a ne sert à  rien d’aller de report en report », estime quant à  lui Adama Mamary Traoré, militant du RPM. Pourtant, certains dirigeants du parti des Tisserands laissent entendre un autre son de cloche, et en appellent au président de la République. Ce jeudi 10 septembre est la date limite de dépôt des dossiers de candidatures, qu’elles soient issues d’un parti politique ou d’indépendants. Il semble bien que malgré leur réticence, les candidats se soient bel et bien préparés à  compétir. Les dernières semaines ont été utiles pour sceller les alliances nécessaires à  la victoire et déterminer les porte-étendards. Les listes qui pourront prendre part au double scrutin seront proclamées le 5 octobre 2015. Et, si rien ne vient changer la ligne que s’est fixée le gouvernement, les Maliens iront voter le 25 octobre. Du moins ceux qui le pourront, car dans la région de Kidal, une menace supplémentaire pourrait s’abattre sur le processus : la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) vient de publier un communiqué dans lequel elle interdit « toute mobilisation, sensibilisation ou campagne concernant les élections municipales sur l’ensemble du territoire de l’Azawad »Â