Entretien avec Maitre Konaté sur la justice malienne

Assigné en justice pour détournement, l'ex PDG de la Banque de l'Habitat du Mali (BHM) Baba Diawara est à  nouveau…

Assigné en justice pour détournement, l’ex PDG de la Banque de l’Habitat du Mali (BHM) Baba Diawara est à  nouveau au C’œur de la polémique. l’arrêt rendu par la cour d’assise de Ségou, le condamnait en juillet 2008, à  la réclusion à  perpétuité. Au moment o๠les avocats de l’ex-PDG, emprisonné à  Bamako et son co-inculpé, gardé à  la prison de Ségou, accomplissaient les dernières formalités pour leur libération définitive, des instructions ont été données pour ne pas libérer les condamnés. «Le ministre de la justice a ordonné le maintien en détention de Mr Diawara et Mr Haidara par un pourvoi en cour suprême » affirme une source au Ministère de la justice. Aux dires de l’avocat, Maitre Konaté, cette cassation intervient sans renvoi : «De manière générale, ce qu’il faut retenir C’’est que nous sommes dans un imbroglio o๠l’on n’arrive plus à  faire la différence entre ce qui est public et privé. Aujourd’hui, l’état du fait de sa participation dans le capital social de la BHM, revendique le caractère public du patrimoine de la banque. Selon le droit privé, cela est difficilement acceptable et met l’ensemble des responsables de banques, o๠l’état a des parts, dans une situation confuse ». Toutefois, l’auxiliaire de justice dira que l’objectif de base n’est nullement la condamnation, mais la récupération des montants dissipés (autrement dit, la réparation du préjudice causé) : « Cette affaire ne devra souffrir d’aucune confusion. J’ose croire que cet arrêt de la cour suprême connaitra un certain nombre d’évolutions, de développement et d’analyses, qui puisse fixer le cadre du droit. On a tendance à  ajouter la confusion à  la confusion dans ce dossier. Et pour ça, les professionnels du droit doivent de monter au créneau… » La justice malienne est-elle vraiment indépendante ? A la lumière de ces évènements, on ne peut nier les dysfonctionnements qui minent la justice malienne, mais son caractère déficient s’expliquerait-il seulement par la pauvreté qui ronge le pays ? : « Je ne le crois pas. Et quant je parle de justice C’’est vraiment au sens général du terme, je n’ai pas tendance à  mettre en cause, le juge, l’avocat, le notaire, ou encore l’huissier, explique Me Konaté. On doit surtout s’interroger si l’indépendance de la justice est une réalité ou un leurre. Il est évident que nos juges ne sont pas respectés dans leur indépendance. l’affaire du Végal nous l’a démontré et maintenant la BHM ! Il y’a des forces qui font tout pour dominer la justice, mais d’une manière générale, elle même refuse d’être indépendante. Les juges maliens sont bien payés, et pourtant, ils sont nombreux à  accepter les pots de vins », ajoute, Boubacar D, ingénieur. La justice malienne est à  deux vitesses. C’’est comme dans les fables de Lafontaine : selon que vous soyez riche ou pauvre, elle vous rend blanc ou noir. Le système judiciaire malien est organisé de telle manière que les magistrats soient indépendants, selon l’article 89 de la Constitution. Mais les juges veulent-ils vraiment de cette indépendance ?, s’interroge un autre juriste. Pour Me Konaté, ce sont les pouvoirs publics, les premiers à  bafouer l’indépendance de la justice ; « Nous assistons à  l’autorité abusive du pouvoir exécutif au détriment du principe de séparation des pouvoirs. Aucun état, aucun chef d’état, aucun chef du gouvernement, aucun ministre, ne veut aujourd’hui se départir du contrôle de la justice ». Or l’état du mali est entrain d’instrumentaliser la justice pour la mettre au service de ses intérêts. Dans le cadre de l’accomplissement de leur fonction, certains jugent se laissent aller à  trop de légèreté. Quand la demande de justice est faite, la réponse du juge doit uniquement être basée sur le droit et l’application de la loi. Aussi Me Konaté préconise une prise de conscience nationale, et un retour aux préceptes de bases qui puissent nous permettre de croire que la justice est le dernier rempart.