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Forum de l’Eau de Marseille: La soif du monde

Il est 6 heures du matin. Maà¯mouna fait comme tous les jours la queue à  la borne fontaine de Nyamakoro,…

Il est 6 heures du matin. Maà¯mouna fait comme tous les jours la queue à  la borne fontaine de Nyamakoro, un quartier populaire de Bamako. Elle devra attendre que la dizaine de femmes qui l’ont précédé ce matin et le revendeur d’eau qui remplira ses 10 bidons de 20 litres chacun aient fini, avant de pouvoir remplir son seau et de regagner la maison. Cela fait plus de quatre ans que C’’est ainsi. Depuis qu’elle est arrivée de son village pour rejoindre son mari, maçon, à  Bamako. « La vie n’est pas difficile pour moi, je rend grâce à  Dieu. Avec mon petit commerce et le travail de mon mari, on s’en sort. Mon seul et unique problème, C’’est l’eau. Vraiment, C’’est très dur de vivre correctement quand on n’a pas l’eau courante chez soi ». Dans la cour o๠elle a habité à  son arrivée, il y avait un robinet, les choses étaient donc moins compliquées. Mais, les Diarra ont construit leur propre logement, si modeste soit-il. Pour avoir l’eau à  la maison, il fallait débourser près de 200 000 francs CFA en frais divers, un montant que le chef de famille peine à  rassembler. Alors en attendant, « on a acheté de l’eau avec le revendeur qui nous livrait deux bidons par jour », nous raconte-t-elle. « J’utilisais cette eau pour la cuisine et pour boire. Mais je me suis rendue compte que les enfants tombaient malades, souffraient tout le temps de diarrhée et J’ai très vite pensé que les bidons du revendeur ne devaient pas être très propres. Alors, maintenant, je vais chercher l’eau moi-même. C’’est pénible et ça me fait perdre un temps précieux le matin ». Pour Maà¯mouna, la responsabilité de sa situation, partagée par la majorité des familles qui vivent dans son quartier, incombe aux autorités. Selon elle, on n’investit pas assez pour faire de l’eau une priorité sociale. « l’eau, C’’est la vie, C’’est vous les gens instruits qui le dites ! Alors qu’on nous en donne à  un prix auquel tout le monde pourra être branché ! ». Un enjeu de taille pour l’Afrique Cinq cent millions d’Africains n’ont pas accès aux services de l’Eau et de l’Assainissement et plus de trois cent millions d’entre eux n’ont pas accès à  l’Eau Potable. Cette situation va s’aggraver si des mesures urgentes ne sont pas prises. Investir dans le secteur de l’Eau et de l’Assainissement doit être une priorité pour les gouvernants africains. « On se demande donc pourquoi aujourd’hui on continue de construire des hôpitaux alors qu’investir dans le secteur WASH peut permettre de réduire les cas de maladies » déclare Mr Idrissa Doucouré Secrétaire Exécutif de l’Agence Intergouvernementale Panafricaine Eau/Assainissement pour l’Afrique à  Dakar. l’EAA est la nouvelle version de l’institution auparavant connue sous le nom de Centre Africain pour l’Eau Potable et l’Assainissement(CREPA). Pour Mr Doucouré, le faible engouement pour le secteur tant au niveau de l’Etat que des investisseurs privés, met en péril l’atteinte des Objectifs Du Millénaire pour le Développement(OMD) pour l’Eau et l’Assainissement. Si on continue ainsi, ces objectifs ne seront atteints qu’en 2076. « l’objectif 2015, C’’est la moitié de ceux qui n’ont pas accès à  l’Eau et à  l’Assainissement, et l’autre moitié on n’en parle pas encore. Il y a donc matière à  réfléchir » conclut-il. Ces difficultés ne sont pas propres qu’au continent africain. On estime que le tiers de la population mondiale n’a pas un accès correct à  l’eau et à  l’assainissement. « Le temps des solutions » C’’est au nom de Maà¯mouna et des deux milliards d’individus qui n’ont pas accès à  l’eau potable et à  un assainissement de qualité que les acteurs de ce secteur se réunissent à  partir d’aujourd’hui pour le 6ème Forum Mondial de l’Eau. Cette grande messe internationale se déroule à  Marseille, dans le sud de la France et réuni pendant six jours, chercheurs, société civile, décideurs. Il s’agit pour eux de formuler des propositions concrètes notamment sur la mise en œuvre effective du droit d’accès à  l’eau et à  l’assainissement pour tous, mais aussi sur des thématiques transversales comme l’eau et la santé, l’eau et l’énergie, le changement climatique. Fruit de deux années de préparation, ce 6ème Forum s’inscrit dans la continuité des précédents et appelle à  l’entrée dans une nouvelle ère : le Temps des solutions. A moins de trois mois du sommet de Rio+20, il s’agit d’inscrire le thème de l’eau en tête de l’agenda des politiques. «Nous devons trouver des solutions concrètes, politiquement et financièrement réalistes, socialement acceptables et adaptées aux contextes locaux » affirme Benedito Braga, Président du 6ème Forum Mondial de l’Eau, sur le site internet du Forum. Lieu d’échange et de réflexion, le 6ème Forum Mondial de l’Eau se fixe cette année douze priorités et trois conditions de succès. De ces priorités se détache en particulier la garantie de l’accès à  l’eau et à  l’assainissement. Non seulement, l’enjeu est d’améliorer la santé publique, mais aussi de créer de l’emploi pour les travailleurs non qualifiés, contribuer à  éradiquer la pauvreté et jouer un rôle clé pour un développement socio-économique durable.