Franc CFA-Euro : faut-il couper le cordon ?

Le Franc de la Communauté Financière d'Afrique, ou Franc CFA, est officiellement né en 1945, quand la France a ratifié…

Le Franc de la Communauté Financière d’Afrique, ou Franc CFA, est officiellement né en 1945, quand la France a ratifié les accords de Bretton Woods. Cette monnaie, qui signifiait alors « Franc des colonies françaises d’Afrique », est aujourd’hui commune à  14 pays d’Afrique centrale (CEMAC) et de l’Ouest (UEMOA). Selon les économistes, sa stabilité et sa crédibilité a permis de maà®triser l’inflation, qui s’est établie en moyenne à  2% par an sur la période 2004-2014. Pourtant, la question d’abolir la parité entre le franc CFA et l’euro est de plus en plus posée. Les avis divergent sur le sujet et les considérations politiques le disputent à  celles économiques. « Pour avoir sa propre monnaie, un à‰tat doit être stable », explique Amadou Sangaré, économiste et expert comptable. « l’insécurité physique génère l’insécurité économique. l’arrimage du franc CFA nous permet de garder une certaine sécurité, quelque soit ce qui se passe dans nos pays. Les pays africains sont confrontés à  des difficultés aussi bien politiques qu’économiques et une monnaie non-arrimée risque de chuter brusquement », explique M. Sangaré. « l’autre élément, C’’est la prise en compte du fonctionnement des économies. Les pays qui ont une économie tournée vers les exploitations comme la Côte d’Ivoire pour le cacao et dans une moindre mesure le Mali pour le coton, ont intérêt à  une dévaluation qui leur permet d’exporter à  meilleur coût. Sortir de l’euro, cela devrait aussi aider l’industrie », poursuit-il. Et de poser la question de l’absence de fluctuation entre les pays, puisque les économies ne sont pas au même niveau. Pas du tout du même avis, l’économiste togolais Kako Nubukpo, s’exprimait début octobre sur le sujet. Rappelant que la Banque des à‰tats de l’Afrique centrale (BEAC) et celle des à‰tats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), disposaient en 2005 de plus de 3 600 milliards de francs CFA de réserves auprès du Trésor français, il estime que la monnaie doit être au service de la croissance et du développement africains, au lieu de dormir dans des coffres. « Il est quasiment impossible pour nos pays de rattraper les économies émergentes si le franc CFA reste arrimé à  l’euro », déclarait-il. Pour lui, il est tout à  fait possible de quitter cette parité. « Nous pouvons au moins procéder par étapes, en redéfinissant les objectifs des deux banques centrales et leur capacité à  financer la croissance économique, puis en évaluant la qualité de leur gestion monétaire ». Qu’est-ce qui empêche d’ouvrir ce débat ?, s’interroge l’ancien ministre togolais de la prospective, qui conclu qu’« on ne peut pas revendiquer notre indépendance et attendre que l’ancien colonisateur nous donne l’autorisation d’agir ». Ibrahima Sory Makanera, juriste, assure quant à  lui que « l’appartenance à  une zone monétaire ne remet pas en cause la souveraineté d’un à‰tat, et que le choix de l’ancrage nominal du franc CFA à  l’euro peut être remis en cause à  tout moment ». Iront-ils jusque là , et en ont-ils les moyens ? La question reste pour l’instant posée.