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GATIA – CMA, un retour au choc ?

Samedi 21 janvier, trois jours après l'attentat à la voiture piégée qui faisait 77 morts à Gao, dont la majorité…

Samedi 21 janvier, trois jours après l’attentat à la voiture piégée qui faisait 77 morts à Gao, dont la majorité parmi les groupes armés, une attaque contre un poste du GATIA près de Tinessako faisait 13 victimes. Cette attaque, imputée à la CMA, vient s’ajouter aux nombreuses violations des accords de cessez-le-feu et pourrait être le point de départ, si on n’y prend pas garde, d’un nouveau conflit entre les deux mouvements rivaux, qui pourrait faire basculer la région dans une nouvelle guerre fratricide.

Malgré les signes d’unité qui ont fait suite à l’attentat qui a fait 77 victimes à Gao, le conflit est la discorde, entre le GATIA et la CMA,  en pause relative depuis septembre dernier, semble ravivé. Samedi 21 janvier, vers 4h du matin, une colonne d’une dizaine de pick-up faisait route vers un poste tenu par le GATIA, situé à une quarantaine de kilomètre de Kidal à l’est d’Edjarer, sur l’axe Tinzawaten-Ménaka, dans le cercle de Tinessako. L’attaque a surpris les 14 combattants du Gatia qui ne se sentaient pas menacés. « Ils sont venus les canarder en pleine nuit alors qu’ils avaient relâché leur vigilance. Il y a eu 13 morts, un combattant du GATIA a pu en réchapper, il a fait une trentaine de kilomètre à pied pour alerter ses compagnons. Le GATIA a suivi les traces des assaillants, elles menaient à Kidal… », explique cette source proche des mouvements.

Le secrétaire général du GATIA, Fahad Ag Almahmoud a accusé la CMA d’être l’auteur de l’attaque et plus particulièrement un certain Bohaba Ag Hamzata qui serait membre de la coordination. Les responsables de la CMA ont rejeté ces accusations dans un communiqué publié le jour même et ont appelé la Minusma à diligenter une enquête afin de faire la lumière sur ce tragique événement. 24 h plus tard, sur les réseaux sociaux, le groupe djihadiste Ansar Dine revendiquait l’attaque.

Dans le dernier rapport du secrétaire général des Nations Unies sur le situation au Mali, il est fait état, depuis septembre 2016, dans la vallée d’Edjarer, d’exactions, perpétrées par des combattants de la Plateforme et visant les populations, les forçant à se déplacer sous peine de torture ou de mort. Le GATIA, par ces actes, s’est attiré les foudres d’Ansar Dine qui a déclaré la guerre au groupe d’Auto-défense à majorité Imghad.

Bonnet blanc, blanc bonnet Les accusations envers la CMA du secrétaire général du GATIA, ne s’avère pas totalement infondées, mais établir sa responsabilité semble plus complexe. « La mort de ces 13 combattants est dû à une frange du HCUA, des gens qui sont en connivence avec les islamistes. Ils appartiennent aussi à la CMA, ils sont sous l’autorité de son chef actuel, Alghabass Ag Intalla. C’est eux qui avaient perpétré l’attaque de Sehene, début octobre 2016, le jour de la mort de Cheickh Ag Aoussa. En réalité, Bohaba Ag Hamzata, qui est un parent d’Alghabass Ag Intalla est un narcotrafiquant notoire et un des hommes fort du HCUA, ce n’est pas totalement un électron libre, c’est un Ifoghas, un clan soudé, et Ansar Dine est à dominante Ifoghas », révèle cette même source qui côtoie les mouvements.

La katiba de Bohaba Ag Hamzata est une des rares qui ose s’aventurer or de Kidal depuis les affrontements entre Gatia et CMA, qui ont enflammé la région entre juin et septembre 2016. Selon nos informations, ce cadre militaire du HCUA aurait commis l’attaque avec l’aide de son ex-beau père, Malik Wanasnate, un ancien du Mouvement Islamique de l’Azawad (MIA) passé par le HCUA avant de le quitter en 2015 pour revenir à Ansar Dine. En 2012, il était un des commandants de Iyad Ag Ghaly, l’éminence grise du célèbre groupe djihadiste. « Il y a des éléments du HCUA qui sont liés aux djihadistes et qui navigue entre ces deux mouvements », explique cet ancien cadre du MNLA, « Il y a une facette de la CMA pour les médias, mais les gens qui vivent à Kidal savent bien qu’il y a des personnes non-officielles au sein du HCUA, qui sont des bras armés d’Ansar Dine, en même temps ils sont dans l’Accord mais ils font aussi ce qu’ils veulent. Ça maintient la terreur et leur pouvoir sur les autres », ajoute-t-il.

Depuis l’attaque, la tension est en hausse à Kidal. Les rumeurs parlent de représailles et les deux camps s’organisent. « Les armes lourdes sont montées sur les véhicules et la CMA renforcent ses positions. Tout le monde va être comptable de l’action de quelques-uns. Les gens ont peur que cette attaque remette tout à zéro. On craint un nouvel embargo et des affrontements. Après l’attaque, tous les chefs du GATIA qui étaient à la frontière algérienne ou en Libye, lieux de tous les trafics, sont revenus dans la région de Kidal, ils ne reculeront devant rien », explique cet habitant joint au téléphone. Pour cet ancien partisan du MNLA, « ces combats successifs pour la drogue, la rivalité entre Imghad et Ifoghass ou entre le GATIA et le HCUA, ne sont pas prêt de se terminer », affirme-t-il, « Le MNLA n’a pas apprécié cette attaque mais ils ne peuvent rien faire car ils sont dominés militairement et politiquement par le HCUA » et qu’on ne vienne pas lui parler de la Minusma ou de Barkhane « ils ne feront rien pour trouver les coupables, car ils ont toujours besoin de preuve alors qu’ils ne font même pas le déplacement » conclut-il.