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Il était une fois l’Union Africaine… (1/2)

Le 25 mai 1963. Une date, un symbole pour le continent africain. Elle marque la création à  Addis-Abeba en Ethiopie…

Le 25 mai 1963. Une date, un symbole pour le continent africain. Elle marque la création à  Addis-Abeba en Ethiopie de l’Organisation de l’unité africaine(OUA), ancêtre de l’Union africaine. C’’était sous l’impulsion de l’empereur Haà¯lé Sélassié d’Ethiopie et des pères de l’indépendance comme Houphouà«t Boigny, Léopold Senghor, Modibo Kéita et autres. Ces braves hommes s’inscrivaient dans la continuité d’autres qui ont vite entrepris d’étancher la soif d’unité africaine. Le demi-siècle de parcours de l’Union africaine est l’occasion de rendre hommage aux précurseurs du panafricanisme. Au nombre de ceux-ci figure en bonne place Touissant Louverture. Héros de l’indépendance haà¯tienne en 1791, il reste une source d’inspiration pour tous les Noirs de la diaspora hostiles à  l’esclavage. Paul Cuffee, le médecin Martin Delaney, Alexander Crummell, Georges Wshington, Edward Blyden font aussi tous partie des précurseurs du panafricanisme et avaient en commun le combat contre l’expansionnisme européen et la défense des intérêts du monde noir. La fin du XIX siècle marque un tournant décisif dans la quête de l’idéal panafricain. En effet Edward Wilmot Blyden, originaire de Gold Coast, prêchait déjà  en ce moment la nécessité de créer un Etat unitaire en Afrique de l’Ouest. Sur l’initiative des Noirs de la diaspora à  l’image de Sylvester Williams, originaire de Trinidad, le premier congrès panafricain s’est tenu à  Londres en 1900. Une autre rencontre réunira vingt plus tard la diaspora noire à  Paris sous la direction de William E. Burghart Du Bois. Le mot d’ordre était le même : l’émancipation des Noirs partout dans le monde. On ne saurait parler du panafricanisme et passer sous silence Kwamé Krumah. Très marqué par William E. Du Bois, l’ancien président Ghanéen, avait toujours rêvé d’une Afrique unie au point d’écrire un livre presque éponyme ‘’l’Afrique doit s’unir » dont des exemplaires ont circulé à  Addis-Abeba à  l’occasion du congrès constitutif de l’OUA. Mal compris par certains de ses pairs, il n’aura pas le temps de mette en œuvre ses idéaux, car il sera chassé du pouvoir en 1966 avant de mourir en 1972 en Roumanie avec des convictions fortes comme : « Notre tâche n’est pas finie et notre sécurité n’est pas assurée tant que les derniers vestiges du colonialisme ne sont pas balayés de l’Afrique ». Une naissance sur fond d’antagonisme La trentaine de chefs d’Etat, réunis à  Addis-Abeba ce 25 mai 1963, a paraphé la charte constitutive de l’Organisation de l’unité africaine(OUA). Les présidents africains à  la tête de pays, qui venaient de gouter aux délices de l’indépendance, amorçaient une étape importante de l’histoire contemporaine du continent africain. Mais pour en arriver là , il a fallu gérer les antagonismes qui existaient entre les pays africains indépendants. Des antagonismes qui ont failli entamer le rêve d’unité. En effet depuis 1961, un groupe radical appelé « groupe de Casablanca » plaide pour la constitution d’une Assemblée consultative africaine et dont les leaders comme Kwame Nkrumah sont favorables à  l’idée du fédéralisme. Il va se butter à  l’opposition d’un autre groupe réputé être proche de l’Occident préférant mettre l’accent sur la souveraineté des pays. Il s’agit du « groupe de Brazzaville ». Ce groupe donnera naissance plus tard à  un nouveau groupe nommé « groupe de Monrovia », fort d’une vingtaine de pays. Ce dernier groupe avait des accointances avec les puissances coloniales qui comptaient sur lui pour continuer d’exploiter les richesses du continent. Le groupe opte plus pour une de coopération à  la place d’unité forte prônée par les radicaux de Casablanca. La déclaration finale de la conférence constitutive dudit groupe en dit long sur sa volonté de ne pas aller vers une unité réelle des pays africains : « l’idéal unitaire, qui constitue notre but actuel, n ‘a pas en vue une intégration politique d’Etats souverains, mais une unité d’aspiration et d’action considérée sous l’angle de la solidarité nationale africaine et l’identité de points de vue politiques ». Chantre du panafricanisme et du fédéralisme, Kwame Nkrumah était une des figures de proue du « groupe de Casablanca » et soutenait mordicus qu’ «il n’y a pas de temps à  perdre. Et que nous devons nous unir ou périr ». Au même moment, l’ancien président sénégalais, Léopold Sédar Senghor, proche du « groupe de Monrovia », déclarait au moment de la création de l’OUA : « Nous serons prudents, en avançant pas à  pas et par étapes. Vouloir du premier coup bâtir une fédération, ou seulement une confédération, avec parlement et commandement militaire unique, C’’est, J’en ai peur, nous préparer à  un échec cuisant dans un bref délai. » C’’est dans ce contexte d’opposition entre ces deux groupes que l’OUA a été portée sur les fonts baptismaux. Ce qui a fait dire à  certains analystes que l’organisation panafricaine était la programmation d’un échec ou encore l’institutionnalisation d’une division. l’histoire leur a-t-il donné raison ?