SociétéÉducation, Société




Infrastructures universitaires : Le trop-plein

La réforme de l'enseignement supérieur au Mali, initiée en 2011, est un lourd chantier qui procède de la volonté des…

La réforme de l’enseignement supérieur au Mali, initiée en 2011, est un lourd chantier qui procède de la volonté des autorités de mettre les étudiants maliens dans les conditions optimales pour se former et entrer de plain-pied dans la vie professionnelle. La division de l’Université de Bamako en 4 entités, l’Université des sciences, techniques et technologies (USTTB) avec 15 000 étudiants, l’Université des lettres et sciences humaines (ULSHB) regroupant tous les départements de la FLASH et ses 25 000 étudiants, l’Université des sciences économiques et de gestion (USGB) avec 20 000 étudiants et l’Université des sciences juridiques et politiques (USJPB), la plus importante, qui compte 40 000 étudiants, n’aura pas suffi à  régler le problème des infrastructures. Le constat est connu, avec un effectif de 100 000 étudiants, les facultés sont surchargées et les enseignants débordés. Pire, certains démembrements n’ont toujours pas leurs locaux, notamment l’Institut des sciences appliquées (ISA) et l’Institut universitaire de technologie (IUT) encore en attente. Sur la colline du savoir, dans le quartier de Badalabougou, sur la rive droite du fleuve Niger, à  part le campus, il n’existe pas non plus de résidences universitaires à  proprement parler. Des pôles comme la faculté de médecine, de pharmacie d’ondoto-stomatologie (FMPOS), détachée dans le quartier du Point G, vivent les mêmes sempiternels problèmes de logements : « Le plus dur, ce sont les dortoirs avec six étudiants par chambre, ou le village du Point G, et ses chambres de 16 m2, insalubres et manquant d’eau, louées entre 10 000 et 25 000 francs CFA. l’idéal, bien sûr, serait d’habiter dans une résidence universitaire avec des tarifs codifiés », témoigne Grégory Ngueyem, étudiant camerounais en dernière année de médecine. Kabala à  la rescousse Pour Souleymane Bâ, ce qui pose problème, ce sont les équipements : « Il n’y a pas de bibliothèques universitaires dignes de ce nom dans les facultés, ni de plannings de cours, encore moins d’enseignants à  l’heure », se plaint cet ancien étudiant en droit. Aussi, tous les espoirs sont portés sur le futur pôle universitaire de Kabala, situé à  une quinzaine de kilomètres de Bamako et qui devrait accueillir 30 000 étudiants. Ce campus ultra moderne, fruit d’un partenariat entre le Mali et la République populaire de Chine, doit résoudre une partie du problème. Sa superficie de plus de 100 hectares doit, à  terme, abriter un rectorat central, plusieurs bureaux pour les enseignants, un centre multimédia, deux amphithéâtres de 500 places, un de 300 places, une nouvelle faculté des Sciences humaines, de droit et une école d’enseignement technique et professionnelle. Le tout pour un coût d’environ 95 milliards… Pourtant, le chantier de Kabala, débuté en 2010, tarde à  finir. à€ ce jour, explique Drissa Diakité, conseiller technique au ministère de l’Enseignement supérieur, la zone administrative, entièrement financée sur budget national et qui comprend le Centre national des œuvres universitaires (CENOU), est terminée. Quant à  la zone résidentielle, ses 4 blocs devant accueillir 4 080 étudiants, sont en cours de finition. Enfin, la zone pédagogique, la plus importante et qui donne lieu à  toutes les spéculations, devrait s’achever en novembre 2016. Ce qui fait dire à  notre interlocuteur que les 7 blocs sont déjà  très avancés, et seront d’une modernité exemplaire. Ils devraient répondre à  l’urgence de désengorger le campus de Badalabougou, aujourd’hui envahi par toutes sortes d’entrepreneurs loin du domaine universitaire. En outre, ce trop-plein s’accommode mal avec une offre d’études qui correspond peu aux besoins du marché. C’’est pourquoi des projets novateurs sont en route, tels que l’école de journalisme en cours de finition, ou le projet de pôle scientifique et technologique à  Kati, sur une superficie de 50 hectares. Décentralisation et déconcentration à€ 200 kilomètres de Bamako, l’Université de Ségou, issue des recommandations du Forum national sur l’éducation de 2008, financée à  hauteur de 900 millions de francs CFA, a démarré ses activités en 2012. Elle répond surtout à  une dynamique de développement industriel et compte aujourd’hui près de 1 500 étudiants, contre 1 200 en 2014, répartis entre 4 facultés (sciences sociales, agroéconomie et médecine animale, santé, et un institut universitaire de formation professionnelle – IUFP). Les cours pour l’année 2015-2016 ont déjà  débuté et l’inscription en ligne a plutôt bien fonctionné. « Les étudiants qui ne sont pas originaires de Bamako, particulièrement les Kayésiens, sont de plus en plus attirés par le pôle universitaire de Ségou », précise Aliou Badra Bâ, secrétaire aux relations extérieure et à  la coopération de l’université. Avec un amphithéâtre de 500 places, une nouvelle infirmerie et plusieurs dortoirs, le pôle dispose en tout d’un espace de 509 hectares, dont 9 seulement sont exploités et concentrent les infrastructures existantes. Trop peu pour le potentiel de Ségou, qui offre pourtant des filières innovantes comme l’agroéconomie, l’eau, l’environnement et les énergies renouvelables, dans une zone o๠l’Office du Niger fait référence. Le seul problème selon M. Bâ, de retour d’une tournée de sensibilisation à  l’intérieur du Mali, est que « les différentes facultés sont dispersées dans la ville alors que nous devrions être regroupés ». Si l’objectif était d’inscrire près de 5 000 étudiants en cinq ans, l’Université de Ségou demeure un mini laboratoire de la décentralisation voulue par les autorités maliennes. Avec des professeurs recrutés sur la base de contrats et sortis des meilleurs instituts, Ségou n’aurait rien à  envier à  Bamako, et ne subit pas de grèves du corps enseignant. « Certains professeurs sont même payés 10 000 francs CFA de l’heure ici. Il faut donner l’autonomie aux universités, C’’est la seule solution pour réussir la décentralisation de l’enseignement supérieur », se défend le secrétaire aux relations extérieures, également professeur de technologie alimentaire. Les futurs pôles Si Ségou est un début de solution, d’autres pôles universitaires, annoncés dans la déclaration de politique générale du Premier ministre Modibo Keà¯ta, devraient voir le jour dans un futur proche. C’’est le cas de Tombouctou, qui dispose aujourd’hui du seul Institut de formation des Maà®tres (IFM), de Gao, et Mopti, dont la position géographique centrale lui permettrait d’absorber des étudiants de plusieurs régions pour désengorger Bamako. Seul problème, l’insécurité chronique dans ces zones pourraient ralentir les projets et augmenter la pression sur la capitale.