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Jacques Vergès l’Africain

Jacques Vergès est mort le 15 août à  l'âge de 88 ans. Ami de Pol Pot, défenseur de Klaus Barbie,…

Jacques Vergès est mort le 15 août à  l’âge de 88 ans. Ami de Pol Pot, défenseur de Klaus Barbie, ce « salaud lumineux » (surnom qu’il s’était lui-même donné) s’est plu toute sa vie à  plaider pour le meilleur et pour le pire avec la même verve et le même amour de la justice. Habité par un anticolonialisme viscéral, Me Vergès deviendra célèbre en défendant les membres du FLN algérien en 1957. Plus tard, il surprendra son monde en défendant les présidents Omar Bongo Ondimba, Idriss Déby Itno et Denis Sassou Nguesso. L’histoire de Jacques Vergès et l’Afrique commence à  la Réunion quand, à  l’âge de 10 ans, le futur avocat fait la connaissance d’Abdelkrim al-Khattabi, résistant marocain pendant la guerre du Rif. Impressionné par ce dernier, le jeune Vergès lui doit sans doute ses premiers émois révolutionnaires et anticolonialistes. Plus tard, après avoir combattu dans la Résistance aux côtés du Général de Gaulle et des Forces françaises libres (FFL) puis obtenu le barreau, il propose ses services aux avocats qui défendent le Front de libération nationale (FLN) en Algérie, en 1957. C’est à  ce moment-là  qu’il tombera « amoureux des Algériens » – qui lui donneront le surnom de « Mansour » (le victorieux) – et luttera corps et âme pour leur indépendance. Séduit par la jeune militante Djamila Bouhired, il se bat pour obtenir la grâce de celle qu’il épousera après le renversement de Ben Bella, en 1965. Inscrit au barreau d’Alger, il assure plus tard la défense de militants palestiniens à  la demande d’Abdelaziz Bouteflika, alors ministre des Affaires étrangères. Après avoir disparu pendant 8 ans, de 1970 à  1978, l’avocat refait surface et se plaà®t à  défendre des personnalités contestées, voire honnies, parmi lesquelles des « grandes » figures du continent. Vergès réussit à  commuer la peine de Moussa Traoré en détention à  perpétuité En mars 1991, Moussa Traoré donne l’ordre à  l’armée de tirer sur des milliers d’écoliers et de lycéens descendus dans les rues de Bamako. Bilan : plus d’une centaine de morts. Le général-président est alors destitué. Condamné en 1993 à  la peine de mort pour « crime de sang », l’ancien dictateur sera finalement gracié suite à  l’intervention de Vergès qui réussit à  commuer sa peine en détention à  perpétuité. Plus tard, l’avocat prétendra que « Moussa Traoré a été renversé à  la suite d’une émeute organisée par le gouvernement français ». En mai 1999, Amnesty International publie un rapport qui faisait état de violations massives et systématiques des droits de l’homme au Togo, sous la présidence de Gnassingbé Eyadéma. Offusqué par ces allégations, le gouvernement togolais charge un collectif d’avocats emmené par Jacques Vergès de poursuivre la plus célèbre organisation de défense des droits de l’homme pour diffamation. Il sera notamment très présent en Côte d’Ivoire, oà¹, en 1999, il défend le futur président ivoirien, Alassane Ouattara, au moment de la querelle sur sa nationalité ivoirienne. En 2002, il y est au côté des familles des victimes du massacre de Duékoué, et, en 2010, après la crise postélectorale, il soutient, avec Roland Dumas, le président ivoirien Laurent Gbagbo dont il est l’avocat.