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L’Afrique défie l’ONU sur le dossier des dirigeants kenyans

NEW YORK, 15 nov 2013 (AFP) - Les pays africains lancent vendredi à  l'ONU un défi à  la Cour pénale…

NEW YORK, 15 nov 2013 (AFP) – Les pays africains lancent vendredi à  l’ONU un défi à  la Cour pénale internationale (CPI) avec l’organisation d’un vote du Conseil de sécurité sur une résolution appelant à  suspendre les procès pour crimes contre l’humanité de dirigeants kényans. Leur projet de résolution demande de reporter d’un an les procès du président Uhuru Kenyatta et du vice-président William Ruto, mais il est quasiment certain de ne pas être adopté en raison d’un manque de soutien du Conseil. En outre, diplomates et juristes s’accordent pour dire que le geste des pays africains risque d’exacerber encore un peu plus les tensions entre l’Afrique et la CPI. MM. Kenyatta et Ruto, élus en mars, sont les premiers dirigeants en exercice jugés par la CPI. Ils sont poursuivis séparément depuis 2011 pour leurs responsabilités respectives dans les violences politico-ethniques sur lesquelles avait débouché la précédente présidentielle de fin 2007. Plus de 1.000 personnes avaient perdu la vie. M. Ruto est poursuivi pour crimes contre l’humanité et plaide non coupable. Son procès a déjà  commencé. M. Kenyatta est lui aussi accusé de crimes contre l’humanité et rejette les charges retenues contre lui. Son procès est censé démarrer le 5 février, après avoir été reporté trois fois. Tous deux ont jusqu’à  présent coopéré avec la CPI, mais le Kenya a déposé deux requêtes écrites au Conseil de sécurité pour demander de suspendre ou mettre fin aux poursuites. La résolution qui sera mise au vote vendredi est notamment défendue par le Rwanda, actuellement membre non permanent du Conseil de sécurité, qui n’est par ailleurs pas signataire de la CPI. L’Ethiopie, un autre opposant au tribunal de La Haye, soutient aussi le texte. Le vice-président de la Commission de l’Union africaine (UA), le Kényan Erastus Mwencha, a assuré à  l’AFP depuis Addis Abeba que le projet de suspendre les procès procédait du « souhait de l’Afrique ». Il a dit espérer ‘ »en tant que priorité », que la demande africaine obtienne « une réponse ». huit enquêtes ouvertes par la CPI Réunie en sommet extraordinaire en octobre, l’UA avait demandé l’ajournement des procédures engagées contre les deux têtes de l’exécutif kényan, estimant que les dirigeants en exercice jouissaient d’une immunité. Les résolutions du Conseil doivent obtenir le soutien de neuf Etats membres pour être adoptées. Mais comme sept des 15 pays aujourd’hui membres sont également signataires de la CPI, et que les Etats-Unis sont opposés au texte, ce dernier n’a quasiment aucune chance de passer, notent des diplomates. Le Conseil a la capacité de demander à  la CPI de reporter d’un an un de ses procès si celui-ci est considéré comme une menace pour la paix internationale. Le projet de résolution avance ainsi que le procès des deux dirigeants kényans « empêche » MM. Kenyatta et Ruto de faire leur devoir. Selon les pays africains, les deux hommes devraient rester aux manettes du Kenya pour pouvoir gérer la lutte contre les combattants islamistes en Somalie, ainsi que les suites de l’attentat dans un centre commercial de Nairobi. Les dirigeants africains se plaignent fréquemment de ce que la CPI s’en prenne en priorité à  leur continent. Mais les diplomates occidentaux y voient davantage une campagne politique pour mettre fin aux poursuites et une tentative par les pays opposés à  la CPI de discréditer la Cour. « Les Africains ont atteint un point o๠ils parlent de ce vote comme d’un test pour savoir si l’on est pour l’Afrique ou contre l’Afrique », commentait jeudi un diplomate onusien sous le couvert de l’anonymat. Les huit enquêtes ouvertes par la CPI concernent uniquement des pays africains mais presque toutes ont été demandées par les pays concernés. « C’est le défi le plus important auquel la Cour ait été confrontée depuis sa mise en place », a estimé un autre diplomate de l’ONU.