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Lancement du rapport conjoint FIDH – AMDH : une justice ballottée

La maison de la presse a servi de cadre le vendredi 8 décembre au lancement du rapport conjoint FIDH- AMDH,…

La maison de la presse a servi de cadre le vendredi 8 décembre au lancement du rapport conjoint FIDH- AMDH, intitulé «  Face à la crise, faire le choix de la justice ». Les responsables des organisations de défense des droits de l’homme lors de cette conférence de presse, ont étayé l’état  de la lutte contre l’impunité, le point sur plusieurs affaires judiciaires  et  formulé des recommandations aux autorités nationales et internationales.

Au présidium, le président de l’association malienne des droits de l’homme (AMDH) Me Moctar Mariko, accompagné du coordinateur du projet conjoint Fédération internationale des droits de l’Homme  (FIDH)- Association malienne des droits de l’Homme (AMDH), Drissa Traoré, de la présidente du WILDAF Mme Bintou  Founé Samaké et d’Issiaga Fofana, membre du bureau national de l’AMDH. Me Mariko a éloquemment résumé ce document de 47 pages, qui apparait dans un contexte où le domaine subi tant d’entraves.

Des dossiers au ralenti

Face à la presse, le président de l’AMDH, Me Moctar Mariko a mis l’accent sur l’importance de ce rapport, qui analyse les moyens et les actions développés par la justice du Mali pour lutter contre les crimes les plus graves. « Le rapport montre que certains dossiers ont connu  des avancées significatives grâce à la volonté  et aux positions tenues par les autorités maliennes », se félicite Me Mariko. Cependant, l’arbre ne doit pas cacher la forêt a-t-on dit. Plusieurs dossiers sont restés dans la stagnation, à cause de l’implication des politiques dans des affaires  judiciaires. « D’autres affaires sont toutefois restées en souffrance, entravées par une situation sécuritaire fragile, le manque des moyens ou parce que politiquement sensibles », a-t-il regretté. Des obstacles majeurs qui font tarder  la vérité non seulement  pour les accusés mais aussi pour les victimes dans certains cas. Le plus souvent des criminels sont libérés sur des décisions politiques alors que les victimes s’attendaient au triomphe de la justice. Ceux de la crise de 2012, constatent avec indignation leurs droits sacrifiés au nom des mesures de confiance et  de la réconciliation.

Retour sur les faits majeurs

Le conflit  déclenché en 2012 au Nord du pays, opposant l’État à certains groupes armés s’est propagé au fil des années dans sa partie centrale. Selon le président de l’AMDH, cette opposition à causer des milliers des victimes. Malgré la signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation, la situation des droits de l’homme s’empire d’année en année. «Les deux dernières années ont vu une recrudescence des violences et attaques et la perpétuation des nouveaux crimes graves» déplore Me Mariko.  Le rapport souligne l’ampleur et la gravité des crimes en cours d’instruction et  des jugements qui, sont selon lui, inédits dans l’histoire contemporaine du Mali. «Nos organisations ont entendu plus de 500 victimes et témoins ces dernières années. Elles ont initié et participé à une dizaine de procédure judiciaire, accompagnant plus de 180 victimes aux parties civiles devant la justice » relate Me Mariko. L’ouverture du procès du général Amadou Haya Sanogo et de ses complices poursuivis pour l’exécution de plus de 20 bérets rouges, la condamnation par la justice malienne de l’ancien commissaire de  police islamique de Gao, la création du pôle spécialisé  dans la lutte contre le terrorisme et la commission vérité justice et réconciliation sont considérés comme « des avancées considérables .»

Dossiers dormants

En outre, le  rapport décrit l’attente de certaines affaires, telle que les crimes sexuels perpétrés par des groupes djihadistes entre 2012 et 2013. « Sur les dizaines de personnes arrêtées et inculpées en 2013, aucune depuis n’a été inquiétée, alors que ces crimes sont constitutifs des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité.» rappelle Me Mariko. « Plusieurs autres procédures sont dans l’attente de relance, notamment  celles concernant le massacre d’Aguelhok, la mutinerie de Kati, les disparus de Tombouctou et les autres crimes commis par toutes les forces en présence pendant la reconquête du Nord en 2013»s’impatiente le président de l’AMDH. Dans sa plaidoirie Me Mariko, soutient aussi l’inclusion au sein des enquêtes terroristes les graves violations des droits humains contre les populations. Il déplore le contexte sécuritaire et politique ‘’ambivalent ‘’qui pèse sur les procédures judiciaires. « Les accords passés ont entrainé la libération et parfois l’abandon des poursuites à l’encontre d’individus soupçonnés des crimes les plus graves », martèle-t-il. L’emblématique dossier d’Amadou Haya Sanogo et coaccusés quant à lui est en suspens depuis un an, alors qu’autant les accusés qui ont soif  de connaître la vérité.

Appel aux autorités

Étant les principales organisations de défense de droits de l’homme au Mali, le FIDH et l’AMDH, « appellent les autorités maliennes et les forces internationales à mettre la justice, le dialogue, le respect des droits Humains au cœur de toutes leurs actions et d’éviter ainsi de renouer avec les erreurs du passé, des stratégies du tout sécuritaire» prévient le président de l’AMDH. En lançant cet appel, les deux organisations mettent en garde les autorités maliennes  contre la concentration des efforts sur la lutte armée au détriment des mesures pouvant ramener la paix et la justice de façon efficace et durable.

Ce rapport conjoint, prend en compte les violations des droits humains commis de 2012 à 2017. Il indexe la nécessaire urgence que constitue le rendement de la justice dans un pays en crise, car « il ne pourrait y avoir de paix sans un minimum de justice », assure le président de l’association malienne des droits de l’homme.